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Corinne Atlan (Traducteur)
EAN : 9782877303842
521 pages
Editions Philippe Picquier (23/04/1999)
3.82/5   819 notes
Résumé :
Au Japon, les nouveau-nés abandonnés dans les consignes des gares sont voués à une mort certaine. Deux d'entre eux pourtant, Hashi et Kiku, vont vivre. La vie de ces deux enfants est une plaie béante qui ne se cicatrise pas, un cri qui ne se tait pas. Le cauchemar les hante, leur univers s'est réduit aux parois d'une consigne, un monde sans espoir où l'on cherche une échappatoire tout en sachant qu'elle n'existe pas. Autour d'eux, un brouillard épais et pesant s'est... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (66) Voir plus Ajouter une critique
3,82

sur 819 notes
Il y a généralement beaucoup de poésie et de délicatesse dans la littérature japonaise, c'est probablement la raison pour laquelle j'aime m'y réfugier si souvent.

Mais, cette fois-ci, je suis chez Ryu Murakami, et la douceur, le romantisme, la poésie ne sont pas les qualificatifs les plus appropriés pour son oeuvre.
Ici, tout est sombre, glauque, violent, morbide. Il n'y a ni amour, ni tendresse dans ces lignes et pourtant malgré ça, j'ose à peine le dire, mais j'ai adoré ce livre.

Il s'agit d'une deuxième lecture que j'ai abordée avec une certaine crainte, tant le souvenir que j'en avais était celui d'un livre inoubliable.

Le thème du roman est l'abandon et la construction d'un être humain soumis dès sa plus tendre enfance, à la cruauté la plus atroce.

Kiku et Hashi ont été abandonnés par leurs mères respectives dans des casiers de consigne automatique d'une gare de Tokyo. Tous deux ont connu l'angoisse et la terreur de l'enfermement dans un espace sombre, étroit et étouffant.

Contre toute attente, les deux enfants sont sortis indemnes de leurs prisons et sont adoptés par un couple qui vit sur une île isolée.
Mais la vie de famille ne leur apporte pas la sérénité. Ils continuent à s'attacher à ce qui leur ressemble : maisons en ruine, village abandonné, chiens errants, marginaux de toute sorte.

Kiku découvre qu'il peut canaliser la violence qui l'habite en devenant champion de saut à la perche.
Hashi entame une quête identitaire qui le conduira dans les bas-fonds de Tokyo et fera de lui un célèbre chanteur de rock.

En conclusion, ces bébés, devenus des hommes dans le sang et les larmes ont su me convaincre, s'il en était besoin, que tout être humain se construit dès ses premiers instants sur terre.

Un livre inclassable, violent et beau, sombre et drôle.

Pour la deuxième fois, j'ai adoré !

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Kiku et Hashi ont tous deux, chacun de leur côté, été abandonnés à leur naissance dans des consignes automatiques. Ils se rencontrent à l'orphelinat et deviennent inséparables au fur et à mesure que tous les autres enfants se font adopter. Quand finalement leur tour vient et qu'ils deviennent frères, on pourrait croire que leur nouvelle vie sur une île loin des grandes villes leur apportera la stabilité d'une famille dont tout enfant a besoin. Mais une série d'évènements va les détourner d'une vie paisible quand Hashi découvre à la télévision un moyen de retrouver sa mère biologique et part à Tokyo. de là, c'est la descente aux enfers progressive pour les deux frères...

Ce livre commence par la phrase la plus horrible que j'aie jamais lue. Une phrase qui plante le décor, suivie par un paragraphe tout aussi déconcertant qui fait ouvrir grand les yeux. le ton est donné : les deux bébés sont traités dans la plus pure déshumanité et surtout leur destin est presque scellé, à peine quelques heures après leur naissance.
Je dis presque, car la vie a tenté de leur offrir une issue de sortie, mais comment ne pas rester traumatisé par de tels traitements ? Ce livre est la représentation parfaite de l'influence de la sociologie sur le devenir d'un homme. Ce qui est intéressant, c'est de voir que les deux garçons refusent les opportunités, comme hantés par le début catastrophique de leur existence.
Ce livre est violent, crade, ne passe pas par quatre chemins, ne fait pas de Tokyo la ville rêvée et idéalisée des étrangers passionnés. Comme partout on y trouve la drogue, le proxénétisme, la brutalité et tutti quanti dans le quartier bien-nommé de Toxitown.
Les évènements qui mènent les garçons à la pure violence apparaissent pourtant comme des déclencheurs minimes. Que se passe-t-il vraiment dans la tête de Kiku et Hashi ? On pense Hashi parti chercher sa mère mais apparemment il s'est barré de chez lui parce qu'il était gay et se retrouve à se prostituer tout en se travestissant. Kiku, lui, développe une sérieuse inclination pour le meurtre de masse quand sa mère adoptive décède subitement alors qu'elle cherchait son autre fils. Pourquoi ces deux évènements sont-ils si catalyseurs de dérive personnelle, comme si chacun n'avait que faire de leur propre devenir ? Y a-t-il une part de complaisance à satisfaire une sorte de fatalité ? Répondent-ils à l'appel du mal car engendrés par le mal, comme prédestinés à ne pas vivre une vie normale, attirés par la bassesse du monde ?
Honnêtement, je n'ai pas pu finir ce livre, car il semblait s'enfoncer dans la noirceur la plus profonde et enterrer les personnages dans une succession de mauvais choix sans échappatoire possible. La sociologie explique beaucoup ce type de comportement, mais Murakami a choisi de présenter le côté ténébreux de l'être humain aussi bien que de la ville, qui a elle-même un rôle prépondérant dans l'histoire.
L'auteur a toutefois un style percutant, incroyablement imagé qui fouette l'esprit et marque indéfiniment. On est loin des jolies descriptions de la campagne naturelle et pure des classiques japonais. C'est une écriture qui tranche sans équivoque avec la littérature traditionnelle et ouvre une porte sur la littérature contemporaine trash qui ne veut plus jouer à cache-cache avec la vraie vie. L'onirique et le surnaturel, thèmes courants dans la littérature japonaise contemporaine, ont presque disparu (Hashi chante quand même au point d'hypnotiser tout le monde), ce qui donne une statut vraiment hors-catégorie à l'auteur qui sort de sentiers assez battus.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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Je m'attendais, après avoir lu des critiques, à un récit hyper violent et d'une cruauté exacerbée, à peine tolérable. Je n'y ai pas vu plus de violence que celle qu'on propose aujourd'hui à nos enfants dans leurs jeux sur console, moins de violence que dans nos journaux télévisés et les films 3D dont nos ados (et nos jeunes adultes) se délectent , à peine plus de violence que dans les faits divers quotidiens de notre presse écrite, juste un peu plus de violence que celle de nos routes et de nos villes… Murakami Riû a vu juste, en 1980 c'est quasi notre société d'aujourd'hui qu'il décrit. En forçant le trait il nous montre jusqu'où elle peut nous mener. Il nous fait prendre la distance en y ajoutant de l'humour, de la poésie (noire) et parfois un peu d'irréel. J'ai lu ce livre sans aucune lassitude, attendant impatiemment le moment de le reprendre pour en continuer la lecture. La prose est rapide, dense, elle foisonne de détails et d'imagination. Les survivants de la consigne automatique resteront dans ma mémoire longtemps.
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Hashi et Kiku ont été chacun abandonné par leur mère dans une consigne de gare, comme plusieurs autres enfants la même année. Ils ont cependant été les seuls à survivre, et grandissent ensemble dans un orphelinat. Cette difficile entrée dans la vie ne manque pas de laisser des traces : crise de violence, ou renfermement sur soi. Pour les calmer, on leur fait écouter par hypnose le battement de coeur qu'il devait entendre avant de naître.

Mais les crises ne se calment que pour un temps : Hashi devient obnubilé par le son qu'on lui a fait écouter, et est prêt à tout pour l'attendre à nouveau. Il cherche à retrouver sa mère, part à Tokyo, se prostitue et devient une star du rock, mais son obsession pour le son ne fait que croître. Kiku trouve un instant le repos dans la pratique du saut à la perche, puis part à la recherche de la « datura », drogue puissante qui transforme celui qui le respire en assassin fou furieux, dans le but de le répandre dans tout Tokyo.

Deux personnalités torturées dans un univers sombre et violent, ça forme un livre qui ne laisse pas indifférent. Beaucoup d'autres thématiques sont abordées : la surmédiatisation des malheurs, l'univers carcéral, la mise à l'écart de tous les « originaux », confinés dans un quartier abandonné (et attaqués au lance-flamme par la police !)
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Kiku et Hashi sont deux bébés abandonnés par leur mère respective dans un casier de consigne automatique. Elevé dans un orphelinat catholique puis par des parents adoptifs, ils grandissent et semblent se destiner à la musique (Hashi) et au saut à la perche (Kiku). Ils vécurent heureux entourés de l'amour qu'ils ne reçurent pas au départ... sauf que nous sommes chez Murakami Ryû et que ce dernier ne se pose guère comme chantre du bonheur et de la joie de vivre.
Suivent 500 pages s'attachant tour à tour à chacun des frères adoptifs, leur chemin se croisant parfois. C'est sombre, violent et désespérant. Les deux adolescents semblent être condamnés à porter leur casier de consigne automatique en eux, prisonniers de cette boîte étouffante et claustrophobante.

Murakami Ryû dénonce les dérives de la société contemporaine. Travaillant sur le mode de l'anticipation, il place son histoire dans les années 90 alors que lui-même a écrit ce roman en 1980. Il aborde des thèmes qu'on retrouve dans ses autres récits: la violence, la folie, le paraître et l'absence d'idéaux, ...

Mon avis reste contrasté sur ce roman. J'ai eu envie de continuer pour connaître le devenir des deux protagonistes. Mais j'ai trouvé la fin longue et aux rebondissements excessifs.
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Citations et extraits (64) Voir plus Ajouter une citation
- Moi j'attends, je ne sais pas trop quoi mais j'attends.
- Mais tu attends quoi ? Tu auras beau attendre, rien ne viendra jamais, ton attente n'est qu'un prétexte à ne rien faire, une illusion. Perdue dans un désert aride, tu avales du sable en croyant boire de l'eau.
Une illusion, et alors ? Je vois des mirages, je sais, et alors ? J'en ai marre de l'eau, plutôt qu'une vieille eau croupie je préfère mille fois des grains de sable qui grincent entre les dents et déchirent la gorge jusqu'au sang, je suis malade à vomir de respirer ce vieil air stagnant, mon ennui finira par recouvrir la terre et j'allumerai un feu avec, tandis que toi, pour retenir ton envie de vomir, tu écoutes toujours les mêmes vieilles chansons sans te rendre compte à quel point elles t'ennuient, comme un vieux qui va à la pêche pour passer le temps, mais moi mon ennui j'irai le brûler au soleil, il deviendra un énorme ballon d'air chaud qui se transformera en énorme nuage et quand ce nuage crèvera une pluie lourde se mettra à tomber sans s'arrêter jusqu'à ce que tes poumons en pourrissent d'humidité, les trottoirs mouillés finiront par se fendre, les flaques s'élargiront en petites rivières coulant entre les buildings, le niveau de l'eau montera tous les jours jusqu'à ce que l'humidité empêche tout le monde de respirer et que les palétuviers poussent entre les fentes du béton, et la ville les rues les arbres s'écrouleront, pourriront dans l'eau et deviendront des nids d'insectes venimeux comme tu n'en as jamais vu, les insectes pondront des œufs d'où des larves sortiront en rampant et c'est alors que tes cauchemars d'alcoolique et d'overdose de sperme commenceront à se réaliser, les insectes viendront de nourrir de tes chairs pourries, ta chambre de malade deviendra un repaire de vers et d'araignées mais ce que j'attends le plus viendra seulement après tout ça, quand la pluie sera calmée : un soleil dix fois plus gros qu'avant se lève, et moi je vis avec Gulliver en haut d'une de ces tours restées debout et je regarde en bas et je vois des forêts tropicales et des fleurs de jungle et des gens brûlés par les fièvres, voilà ce que j'attends, voilà ce que je désire.
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La peur avait pris possession de lui, une peur dont toutes ses cellules portaient le souvenir intime, la peur, non de la faim ou de la mort, mais la peur du temps. D'un temps infiniment long durant lequel il avait eu faim et cru qu'il allait mourir. Les bébés ne comprennent pas ce qui leur arrive, ils ignorent quand cela va s'arrêter, mais le temps passé à avoir peur imprègne leurs cellules. Hashi avait passé treize heures dans ce casier de consigne, treize heures de plein été, treize heures d'aboiements de chiens, de cannes d'aveugle tapotant sur le sol, de bouteilles dégringolant dans les machines automatiques, de kaxons, de vieux papiers tourbillonnant dans le vent, de toux de vieillards, d'eau coulant au fond d'un seau, de crissements de freins au carrefour, d'une radio au loin, d'enfants plongeant dans une piscine, de frôlements de jupe, de rires de femmes, de ses propres sanglots, de bruits de bois, de plastique, de fer, de frôlements de peau douce de femmes, de langue râpeuse de chien, dans des odeurs de sang, , de vomissures, de sueur, de médicament, de graillon, de parfums. Toutes ces sensations étaient reliées entre elles par le souvenir : Tu es inutile, personne ne veut de toi, personne n'a besoin de toi.
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Rien n'a changé, ce sont toujours des gens qui n'ont rien à voir avec nous qui viennent nous tarabuster et nous dire ce qu'il faut faire. Rien n'a changé depuis l'époque où on hurlait enfermés dans nos casiers de consigne, maintenant c'est une consigne de luxe, avec piscine, plantes vertes, animaux de compagnie, beautés nues, musique et même musées, cinémas et hôpitaux psychiatrique, mais c'est toujours une boîte même si elle est énorme, et on finit toujours par se heurter à un mur, même en écartant les obstacles et en suivant ses propres désirs, et si on essaie de grimper sur ce mur pour sauter de l'autre côté, il y a des types en train de ricaner tout en haut qui nous renvoient à coups de pied en bas. On tombe par terre, évanoui, et on se réveille en prison ou à l'asile, ah il est habilement dissimulé leur mur, il y a des plantes, des petits chiots à longs poils, des bassins, des poissons tropicaux, des séances de cinéma, des expositions de tableaux, des femmes nues à la peau douce, mais de l'autre côté il y a des murs, avec des gardes partout et une tour de guet d'une hauteur hallucinante. Quand le brouillard de plomb se dissipe un instant, ils sont là : le mur, la tour de garde, et qu'on en ait peur ou qu'on se mette en colère, ça ne change rien, quand on se révolte parce qu'on n'en peut plus de rage ou de parano, c'est la prison, l'hôpital psychiatrique ou un cercueil plombé qui vous attendent, il n'y a qu'une solution : foncer dans le tas, pulvériser tout ce qui se présente, retourner à zéro, réduire tout ça en cendres !
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Puis la ville recouverte de cendres magnifiques, des enfants ensanglantés déambulant dans les rues, au milieu des chiens sauvages, des vautours et de la vermine. Ces images le libérèrent, le délivrèrent de la vision de lui-même enfermé au cœur de l'été dans une horrible boîte sombre et étroite. Comme un serpent qui mue, sa vieille peau partait en lambeaux, la carapace se brisant, des souvenirs profondément enfouis resurgissaient. Les souvenirs d'un été, dix-sept plus tôt. La force qui avait soutenu ce bébé hurlant de toutes ses forces, luttant contre l'atroce chaleur étouffante du casier de consigne, cette force commençait à resurgir du tréfonds de lui-même. Il se rappelait la voix qui l'avait encouragé à survivre, et cette voix disait : Tue, tue, détruis, détruis-les tous ! Cette voix résonnait à nouveau, en arrière-plan du brouhaha de la ville en contrebas avec ses minuscules silhouettes, ses voitures comme des jouets miniatures. Tue, tue, détruis, détruis-les tous ! Tu ne veux pas devenir une momie sous un drap rougi de sang ? Alors détruis, encore et encore, réduis cette ville en cendre.
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- Attends, Kiku, t' es un gosse abandonné, tu m'as dit, non?
- Mmm.
- Tu dois détester ta mère, non?
- Tu veux dire celle qui m'a abandonné?
- Ouais, tu la détestes?
- Mmm, oui, je crois.
- Tu voudrais la tuer, ta mère, non? Celle qui t'a mis au monde?
- Je la connais pas.
- Mais si tu te mettais à tuer tout le monde, tu finirais bien par la tuer elle aussi un jour.
- C'est un peu dur pour les gens qui ne m'ont rien fait, non?
- Mais tu as le droit pourtant, après ce que ta mère t'a fait. Tu as le droit de tuer tout le monde. Si tu veux je t'apprendrai une formule magique.
- Une formule magique? Pour quoi faire?
- Tu n'auras qu' à réciter ça le jour où tu auras envie de tuer tout le monde, ça marche, je t'assure. Rappelle-toi cette formule : Datura, datura.
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