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Critiques de Anatole France (265)
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Les dieux ont soif

Anatole France démonte le mécanisme terrible qui conduira un honnête garçon à justifier les pires crimes de la Terreur de1793. Évariste Gamelin est certes un artiste, un peu exalté, mais il n'est jamais calculateur ou cynique. Ce roman historique lui fait croiser quelques personnages de la grande histoire, mais aussi une galerie de savoureux portraits. J'avoue un attachement particulier pour le vieux Brotteaux et son Lucrèce qui ne le quitte jamais. Anatole France égratigne tous ses personnages, athées ou bondieusards, philosophes de salon, révolutionnaires convaincus comme de façade, et tant d'autres. On constate souvent une sorte de tendresse pour l'individu, et une grande sévérité pour le genre humain dans son ensemble. Un excellent roman historique à l'écriture marquée par son époque mais agréable et ne présentant aucune difficulté particulière.
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Les dieux ont soif

Quelle claque que cette dénonciation du totalitarisme, que ce lent glissement de la Révolution dans la Terreur, que le chemin parcourut par le personnage principale, jeune peintre du nom d' Evariste Gamelin et que le lecteur verra d'abord se priver de pain pour augmenter la ration de sa mère, avant d'assister à sa transformation en impitoyable juré, qui finit sous le couperet en même temps que Robespierre.

C'est la première fois que je lis quelque chose d'Anatole France, et je dois dire que j'ai été soufflée, et par la construction, et par le style. Le thème en plus, fort intéressant, magistralement traité, cette exploration de l'âme humaine, de ses justifications, de ses cruautés... Les purs sont bien cruels, faute de comprendre la pitié et l'amour, faute de comprendre le pardon.

Un texte magistral, que j'ai littéralement dévoré.
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Les dieux ont soif

C’est sous la jeune IIIe République qu’Anatole France publie ce roman risqué. En effet, la Révolution étant l’acte fondateur de ladite République, la remettre en cause, en montrant qu’elle aussi recèle ses injustices et fanatismes, lui valut de nombreuses critiques du côté de la gauche, et bien entendu l’approbation de la droite de l’époque, qui se défiait de l’esprit révolutionnaire.

Et si je suis tenté de défendre en partie Robespierre – j’invite chacun à lire une biographie sérieuse du personnage et se rendre compte du contexte dans lequel se trouve alors la France avant de le juger sans nuance –, je ne peux qu’adhérer à l’analyse d’Anatole France. Analyse qui se verra confirmée par toutes les révolutions du XXe siècle, depuis 1917 en Russie jusqu’à 1979 en Iran. Robespierre demeure – et c’est ce qui le rend si complexe – un Janus : il a deux faces, l’une séduisante, l’autre effrayante.

Si la vision d’Anatole France est sombre elle n’en est pas moins réaliste : « Le pouvoir absolu corrompt absolument », écrivait Machiavel.

Pour incarner cette corruption idéologique, l’auteur choisit donc un personnage de prime abord inoffensif et plutôt sympathique : un jeune peintre et élève de David, Evariste Gamelin, un révolutionnaire convaincu dont le jusqu’auboutisme ira croissant. Il deviendra juré au tribunal révolutionnaire, suiveur fanatique de ses maîtres à penser : Robespierre et Marat.

Le destin de Gamelin ressemble, rétrospectivement, à ceux des cadres du parti nazi qui, au nom d’une idéologie nettement plus délétère que la Terreur, ont adhéré sans retenue et en connaissance de cause à l’hydre hitlérienne.

Les dieux ont soif met en garde le lecteur : privé du libre-arbitre, l’homme se meut en une machine, prête à tout accepter au nom de sa religion, qu’elle se réclame de l’ici-bas ou l’au-delà.

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Théâtre - Anatole France et le cinéma par René Je..

Ce recueil, extrait de la réédition complète des œuvres d'Anatole France par le cercle du Bibliophile, s'intéresse plus particulièrement à son Théâtre.

Il contient cinq pièces et un essai intitulé "Anatole France et le cinéma".

Le premier morceau "Le lys rouge" est l'histoire d'une passion vouée à l'échec et dévorée dès sa naissance par la jalousie. C'est une sorte de marivaudage bourgeois, pas vraiment ennuyeux mais un peu long.

Mais, à peine le rideau levé sur la première scène de la deuxième pièce "Crainquebille", le recueil s'éclaire et prend soudain un intérêt formidable.

Crainquebille est marchand de quatre saisons, il roule sa voiture depuis cinquante ans en criant "des choux ! des navets ! des carottes !..."

Mme Bayard, marchande de chaussures à l'enseigne de "l'Ange gardien" choisit une botte de poireaux et, n'ayant pas les quatorze sous en main, retourne dans son échoppe pour les chercher.

Malheureusement pour Crainquebille, l'agent 64 fait irruption et lui intime l'ordre de circuler...

Anatole France, dans cette courte pièce, est tranquillement subversif. Il raconte une histoire assez triste, peut-être même tragique : la chute d'un brave homme ayant travaillé dur toute son existence et qui est pourtant à la merci du l'agent 64 qui représente ici l'injustice gratuite et irraisonnée.

L'auteur excelle dans la peinture des personnages et de leur psychologie.

Au final, le tableau qui nous est brossé est celui de la société du XIX° siècle.

Cette pièce, que Georges Brassens aurait pu mettre en chanson est un véritable grand moment de Théâtre qui se cache derrière son petit format.

Et le rideau tombé, le père Crainquebille ne nous quitte pourtant pas de sitôt.

Les trois autres pièces, "Le mannequin d'osier", "Au petit bonheur" et "La comédie de celui qui épousa une femme muette" n'ont pas réussi à me happer dans leur univers et le recueil refermé, un seul titre s'impose.

L'essai, par contre, très intéressant, éclaire les relations ambiguës d'un écrivain et dramaturge avec le jeune cinéma naissant qui n'est pas encore devenu une industrie.

A la manière de Sacha guitry, il l'a détesté, disant "le cinéma matérialise le pire idéal populaire", puis aimé, rajoutant à la même époque "J'aime le cinéma. C'est un art charmant, neuf, un art où l'on fait des trouvailles".
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Les dieux ont soif

Elevé dans la bibliothèque paternelle, qui conserve maints ouvrages, pamphlets, brochures, journaux, caricatures et chansons sur la Révolution française, le jeune Anatole France a amassé un savoir encyclopédique sur la Révolution. Cette érudition nourrit tous les domaines de cette chronique de la Terreur : arrière-plan politique et militaire, mais aussi chansons, urbanisme, architecture, façons de se vêtir, considérations sur la peinture... C'est une sorte de roman total.

Au moment où Mathiez et Jaurès écrivent une histoire de la Révolution qui réhabilite Robespierre et la Terreur, Anatole France, pourtant proche des socialistes, dénonce les excès de cette période et de ses protagonistes.

Son héros s'appelle Evariste Gamelin. Il est artiste peintre, émule de David. Ce n'est pas un assoiffé de pouvoir, ni un enragé. C'est un bon fils qui partage son pain avec les miséreux et aime timidement sa dulcinée. Seulement il est persuadé de détenir la vérité. Ses héros s'appellent David, Marat, Robespierre. Mais en mauvais peintre, il ne questionne pas ses maîtres. Il se contente de les reproduire servilement.

J'ai aimé dans ce roman le souci de la nuance et du questionnement. Anatole France oppose à la figure de Gamelin celle de Brottaux, personnage réfléchi et réfléchissant. La prose de France est riche, subtile mais un peu ampoulée et précieuse. On est loin de la sobriété de la peinture néoclassique de David dont Gamelin tente de s'inspirer dans le roman et dont il se fait l'apôtre.
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Les dieux ont soif

La période postrévolutionnaire qu'a été La Terreur ne m'était pas bien connue. Je connaissais le rôle qu'y avait joué Maximilien Robespierre, mais je ne savais rien de la dérive qui avait mené là. Bien sûr, c'est un roman, bien sûr, plusieurs des personnes qui interviennent dans ce roman demeurent des personnages fictifs, mais je crois bien qu'Anatole France a su décrire de façon particulièrement juste l'atmosphère qui a pu régner dans les ans II et III de la jeune République française. En retraçant l'évolution du jeune peintre et citoyen patriote Évariste Gamelin, autant dans son quotidien et ses amours naissantes que dans ses convictions et ses positions politiques en regard de la république, c'est toute une société qui se cherche dont Anatole France a voulu brosser le tableau. On verra la foule parisienne s'émouvoir à la mort de Marat, la place de plus en plus grande qu'occupera le tribunal révolutionnaire, l'engagement comme juré du jusqu'au-boutiste Évariste Gamelin, sa dérive, transporté par la force des événements, de convaincu qu'il était à bourreau de ses proches. On constate le déraillement des meilleurs sentiments vers des actes d'atrocité portés par la guillotine. Voici donc un magnifique roman historique dont la lecture, à toute époque, amène son lot de résonance avec l'actualité et ne manque pas de provoquer des réflexions sur le monde.
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Les dieux ont soif

Le style incomparable d’Anatole France au service d'une étude psychologique très fine qui permet de comprendre la manière dont, dans des circonstances exceptionnelles, certains, avec les meilleures intentions du monde, et une idéologie chevillée au corps qui les emporte dans un enthousiasme porteur autant de haine que d'amour, peuvent se laisser aller aux pires extrémités, à faire le contraire de ce que leur dicterait normalement leurs convictions, au nom même de ces dernières.

Et quelle finesse psychologique que cette mise en scène si humaine et si émouvante d'Evariste Gamelin, cet artiste médiocre qui trouve enfin un destin digne de ce à quoi il estimait avoir droit, à travers le rôle que la Révolution devenue Terreur lui octroye.
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Les dieux ont soif

Un bel essai littéraire qui analyse la dérive sanguinaire des républicains pendant la Révolution. Ou comment l'idéal révolutionnaire déshumanise peu a peu le citoyen Evariste jusqu'à sa perte totale de raison.

Écriture excellente et thème qui ne se démodera probablement jamais. J'ai trouve le traitement du sujet excellemment moderne.



Axel Roques






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Le Livre de mon ami

"Ne perdons rien du passé.Ce n'est qu'avec le passé qu'on fait l'avenir."

Anatole France, écrivain du XIX° et XX° siècle (prix Nobel de littérature) a largement pioché dans ses souvenirs d'enfance (Le livre de Pierre:première partie) et ceux de sa fille (Le livre de Suzanne:deuxième partie plus décousue) pour écrire cette autofiction drôle et tendre à la fois.

Pas de gloire de mon père à la Marcel Pagnol, car le père médecin, bien qu'aimant est plus distant et moins grandiloquent que celui de Pagnol, mais beaucoup de tendresse d'un "bêta" pour sa maman, d'un "petit mari" pour une belle "dame en blanc" et d'un "trésor" pour sa marraine.

L'intérêt de cette partie 1(pour moi) est de montrer (outre l'humour manié concernant le côté gaffeur du petit garçon et l'écriture agréable à lire) comment le pur bonheur dans cette famille protectrice d'enfant unique (bien élevé,curieux,intelligent,timide, gaffeur mais solitaire) et le milieu ambiant ont influencé les pulsions créatrices et "la folie d'écrire" de cet écrivain reconnu. Rien à voir avec les traumatismes d' Enfance de Nathalie Sarraute. Faudrait-il en déduire que tous les écrivains ne sont pas des névrosés? A moins qu'ils ne cachent le moins bon pour ne mettre en avant que des doublés de bartavelles ou de brillantes notes!

La partie 2,moins homogène dépeint la tendresse d'un père ébloui devant sa fille aux yeux couleur "bleu d'ardoise" qui a déjà "l'amour du beau" à 3 mois et qui sait parler aux étoiles à 12, relate diverses historiettes sur des enfants et dialogue sur les contes de fées.

Une lecture enrichissante,divertissante et rafraichissante.
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Le lys rouge

Déception! Pourtant Anatole France me semblait être une valeur sûre, un auteur rencontré dans mes livres de classes de l'école primaire et aussi dans des dictées à la même époque. Bien sûr l'écriture est belle dans son classicisme, mais je me suis ennuyée avec ce verbiage qui ne m'a pas semblé digne d'intérêt, avec ces questions existentielles, ce mysticisme, cette société oisive paradant entre châteaux, salons, spectacles, promenades, intrigues politiques, saisons de chasse ou champs de course, et pour certains aventures extra-conjugales. J'ai peiné à lire ce roman de près de 400 pages traitant de la jalousie... Ton trop larmoyant à mon goût, un livre qui aura mal vieilli, je suis restée insensible à ces tourments de coeurs, Je ne ressens aucune empathie pour les protagonistes. Rencontre manquée avec ce livre.
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Les dieux ont soif

Roman paru la veille de la Grande Guerre,

Souvenir de la folie révolutionnaire,

Les dieux ont soif est le récit d’un glissement,

Celui d’un pur idéal qui devient dément.

On y suit, sous la Terreur, au milieu des brutes,

D’Évariste Gamelin l’ascension puis la chute.



Le contexte historique est finement tissé,

Plongeant le lecteur dans les grands noms du passé :

Le Paris de l’été, de l’amour et d’hier,

Le Paris de l’automne, harcelé aux frontières,

Le Paris de l’hiver, du froid et de la faim,

Le Paris du printemps, de l’espoir, du dédain.



L’histoire est d’un jeune peintre, fébrile, enthousiaste,

Généreux et modeste, inspiré, pauvre et chaste,

Que la fortune mène au plus haut tribunal :

Il se fait, de doux et d’aimant, dur et cruel.

Pour protéger la paix il condamne sans frein,

Trouvant justice à guillotiner son voisin.



Les dieux ont soif est aussi un vaste assemblage,

Galerie de nombreux et variés personnages.

Philosophes et mondains, croyants et athées,

Hommes et femmes, divers, plus ou moins mesurés,

Composent ainsi la triste et fidèle fresque,

De cette trouble époque aux airs cauchemardesques.



Il est étrange en effet de se souvenir,

Que la République a sombré dans le délire,

Piégée par l’ambition du pouvoir politique,

Noyée dans des hordes de partis fanatiques,

Balayée par d’horribles complots fratricides,

Créant dans son sillage une meute homicide.



Avertissement, méditation, prophétie,

Sur ce que fut la première démocratie ?

Les dieux ont soif, mais au fond que réclament-ils ?

Ces dieux ne sont-ils que l’autre nom du hasard ?

Qui alors a soif de sang et de vaine gloire,

Qui, sinon de grands fous qui se pensent habiles ?



Émilie – Apprentie Bibliothécaire
Lien : http://www.paulinedeysson.co..
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Les dieux ont soif

Ce roman pose la question de l'avenir de la démocratie et du respect de ses idéaux quand on accède au pouvoir - judiciaire en l'espèce - . Cette oeuvre est une démonstration que l'excès mène à l'absurde, qui peut être sanguinaire. Elle laisse songeur, autant qu'admiratif de la puissance du style et de ce qui est montré.



Un grand roman.
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Les sept femmes de La Barbe-Bleue et autres..

Challenge Nobel 2013/2014

Où l'on apprend que Barbe-Bleue fut un époux modèle, attentionné et délicat, mais qu'il n'eut jamais de chance en amour, où l'on voit les trois petits enfants ressuscités par le Grand Saint-Nicolas devenir des brigands et des escrocs, et le boucher qui les avait mis au saloir comme pourceaux, se repentir et vivre saintement... Et ce qu'il advint de la Cour de la Princesse au Bois-dormant pendant son sommeil enchanté, et comment trouver la chemise d'un homme heureux pour guérir un roi mélancolique.

Un délice de petit livre, une vraie gourmandise et l'envie de découvrir d'autres textes d'Anatole France.
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Les dieux ont soif

Nous sommes en 1793. Evariste Gamelin est un jeune peintre sans talent et sans le sous. Idéaliste, farouchement jacobin, il est sensible à l'injustice et généreux. Peu à peu, doucement, il se radicalise. La jeune république est menacée de toutes parts. Marat est assassiné. Robespierre enflamme les idéaux de Gamelin. Nommé juré du Tribunal révolutionnaire, il fera danser la guillotine sans remords mais la conscience déchirée. Gamelin est un monstre que l'histoire a créée mais un monstre humain. La réaction thermidorienne en 1794 mettra un terme à la Terreur.



Anatole France nous livre ici un roman magistral. Laissant en toile de fond les personnages historiques importants pour mieux s'attacher au quotidien implacable, l'auteur fait une analyse lucide de cette époque sombre de notre histoire.











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Sur les pas des écrivains : Balade en région Ce..

Que voilà une bonne lecture de vacances, entre projets d'excursions, balades en imagination et douces rêveries tandis que se déroule sous nos yeux paysages et vies de ceux qui surent les chanter... Blésoise d'origine, castelroussine d'adoption, et ligérienne de coeur j'ai découvert ou redécouvert dans ce livre des écrivains qui ont vécu ou sont nés dans la région Centre, vaste région qui comprend des paysages aussi divers que la Beauce et la Sologne et dont le lien essentiel est la Loire.

D'Amboise à Valençay, d'Aubigné à Xenakis, ce livre se décline d'abord selon les départements qui composent cette région et leurs lieux célèbres, et chaque chapitre se clôt sur un "regard contemporain" c'est-à-dire le court texte d'un auteur contemporain qui exprime ce que représente pour lui l'endroit dans lequel il a vécu.

Les écrivains sont évoqués en quelques pages par un spécialiste, historien, enseignant ou bibliothécaire pour la plupart, et la diversité contribue au charme de l'ensemble. On pénètre avec discrétion dans l'intimité des écrivains aimés, et c'est comme une conversation, des confidences que l'on écouterait toutes oreilles ouvertes.

Je ne connaissais pas cette collection ("Sur les pas des écrivains") et ce fut une belle découverte, qui m'a rappelé les émissions de PPDA ( "une maison, un écrivain") que j'avais particulièrement appréciées pour les mêmes raisons. Belle façon de découvrir une région que par les témoignages de ceux qui y ont vécu.
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Le Livre de mon ami

Quand je pense que c'est le premier livre d'Anatole France que je lis, c'est drôle car j'ai l'impression de le connaître. Il faut dire que son nom est célèbre et pas seulement parce qu'il est lauréat du prix Nobel de littérature 1921.

La publication de ce livre de souvenirs est bien antérieure à cela car "Le Livre de mon ami" est paru en 1885. Je l'ai choisi par hasard, pour son titre qui associe littérature et amitié.



Ce livre est un recueil car on peut le diviser en plusieurs parties, certes pas toutes équilibrées mais qui se complètent bien. La première moitié s'intitule Le livre de Pierre car le narrateur se nomme Pierre Nozière bien qu'il soit le double de l'auteur. A travers cet ami fictif, Anatole France évoque plus facilement ses souvenirs heureux par différentes scènes de vie et premiers émois amoureux. Le jeune Pierre a un ami Fontanet, il aime la vie dans ce qu'elle a de simple et de fort et surtout il a le goût de la poésie.

Dans une seconde partie intitulée Le livre de Suzanne, il raconte les souvenirs d’un père sur l’enfance de sa fille. Ses premiers pleurs de bébé, le guignol, le goût de la lecture qu'il donne à Suzanne montrent qu'il est un père attentif et pédagogue, ce qui m'a impressionnée car à l'époque cela devait être rare.

D'ailleurs, il termine par une partie sous forme de dialogue entre trois personnages sur l’origine et le sens des contes de fées. On voit bien que pour lui l'essentiel est de développer l'imaginaire dès l'enfance. Déjà, dans la première partie le petit Pierre évoquait sa fée marraine.



C'est donc la poésie et les joies simples qui dominent dans ce livre, sans oublier l'humour omniprésent. J'ai découvert que l'académicien nobélisé était très drôle avec cette sorte d'humour fin qui donne envie de le lire encore.





Challenge XIXème siècle 2023

Challenge Gourmand 2023-2024

Challenge Nobel illimité

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Les dieux ont soif

Anatole FRANCE sonde les tréfonds de l'âme humaine où les intérêts personnels se fondent avec un faux idéal de défense d'une société affranchie d'une soit-disant tyrannie politique. Des hommes et des femmes se croisent, vivent, meurent au sein d'une république naissante. Page noire et peu glorieuse de l'histoire de France: celle de la Terreur.



Une belle étude de mœurs au sein de laquelle des valeurs fondamentales se dissolvent, où des comptent se règlent en affranchissant leurs auteurs de la conscience des horreurs et injustices commises. Dans un monde ancien qui meurt et cède la place à un monde nouveau empreint d'hypocrisie et de soif de sang.



Mais derrière ce récit, quel style ! Que la langue française est belle, riche de toutes ses subtilités. De toute ses nuances. Quel plaisir de l'âme de retrouver une expression française aussi riche de sens !
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Le lys rouge

Le regard ironique et hardi d'Anatole France s'élance dans ce livre consacré à l'amour avec une énergie rare. Alors que l'auteur voile généralement la dureté de son ton sous un drap de velours, il aborde ici les relations amoureuses avec une acuité qui est poussée jusqu'à la cruauté, sans jamais perdre en justesse, bien au contraire.



C'est finalement une sorte de poésie de la douleur qui se tisse au fil des pages et qui prend toujours le lecteur à rebours, sans pour autant l'abandonner : un charme mystérieux se dégage de cette œuvre, comme un parfum entêtant, une musique acharnée, un tour de force que l'on refuse et qui nous fascine malgré tout.
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Le Crime de Sylvestre Bonnard

Pour le centenaire de la mort d'Anatole France, je viens de terminer la lecture du Crime de Sylvestre Bonnard. Il s'agit du premier roman d'Anatole France, publié en 1881.



C'est l'histoire d'un adorable vieillard bibliophile et membre de l'Institut, qui vit dans un bel immeuble au bord de la Seine avec sa servante Thérèse et son chat. C'est dans sa bibliothèque évidemment qu'il passe le plus clair de son temps et qu'il a baptisé « La cité des Livres », dont son chat Hamilcar est le gardien nocturne.



Rien que pour ça, ce roman me plaît. On suit d'ailleurs Sylvestre Bonnard à la quête d'un manuscrit du XIVème siècle, intitulé 'La légende dorée de Jacques de Voragine' rédigé par le clerc Jehan Tout-Mouillé, un panégyrique sur les différents saints attachés à l'église abbatiale de Saint-Germain-des-Prés.



Comme tout bon bibliophile incurable, Bonnard ne cesse de penser à ce précieux ouvrage et mettra tout en œuvre pour se le procurer. Son obsession le pousse jusqu'à aller en Sicile sous un soleil brûlant où le manuscrit se trouve chez un antiquaire italien.



Mais le crime de Sylvestre Bonnard, comme évoqué dans le titre du roman, n'a rien de bibliophile, mais relève plutôt de son passé amoureux. C'est ce crime qui nous fera découvrir un pensionnat pour filles dirigé par une femme revêche et frustrée au nom de Mlle Préfère et une jeune fille au nom de Jeanne qui subit le caractère acariâtre de la directrice avec une patience angélique.



La plume raffinée et cultivée d'Anatole France me plaît beaucoup, et je suis fort étonné que quasiment plus personne ne lit cet écrivain qui remportait pourtant tous les suffrages à son époque, tant pour son humanisme, son immense culture et sa belle plume.
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Les dieux ont soif

Les dieux ont soif

Anatole France (1844-1924)

Académie française

Prix Nobel 1921

Le citoyen Évariste Gamelin est peintre, élève de David et membre très actif de la section du Pont Neuf à Paris du comité militaire révolutionnaire. Il est prêt à signer de son sang la proscription des traîtres fédéralistes qui veulent la mort de Marat.

Les fédéralistes regroupent les Français qui se sont soulevés en province en réaction à l’élimination des Girondins en juin 1793. Le pouvoir central et la Terreur ont l’intention de mettre bon ordre face à cette révolte. La situation est en effet critique, Valenciennes assiégée, Fontenay pris par les Vendéens, Lyon en révolte, les Cévennes insurgées. Les deux tiers des départements sont envahis par l’ennemi ou soulevés, et Paris affamé et ruiné à la merci des canons autrichiens.

Nous sommes à l’époque de la Convention, régime politique qui gouverne la France de septembre 1792 à octobre 1795 et qui fonde la Première République. Élue au suffrage universel masculin après la déchéance de Louis XVI en août 1792, elle donne une constitution au pays en août 1793 et elle abolit la royauté. Dans les faits, la Constitution ne fut jamais appliquée et c’est le régime de la Terreur qui régna face à l’état de guerre intérieur et extérieur. La Convention avec Marat et Robespierre a établi un tribunal extraordinaire pour juger les conspirateurs.

Ce sont des hommes de rien comme le citoyen Gamelin, peintre médiocre ou le citoyen Trubert, opticien d’occasion, le chef du Comité, qui ont détruit la royauté et renversé le vieux monde. Ils n’attendent aucune merci de leur ennemis : ce sera la victoire ou la mort, d’où leur ardeur, l’âme tendue vers de « grandes choses » et leur zèle à faire régner la terreur. Ils sont convaincus que la Révolution fera pour les siècles le bonheur du genre humain.

Le citoyen Gamelin aîné de deux enfants héberge sa mère qui est veuve. Sa sœur Julie a quant à elle émigré avec un aristocrate. Évariste se rend souvent chez le citoyen Blaise, veuf, qui est marchand d’estampes et qui a une fille unique, Élodie, dont il tombe amoureux. La citoyenne Elodie Blaise se sait aimée et en joue. Elle n’est plus très jeune, ni très jolie, mais elle est voluptueuse et a du charme. Elle aime Évariste et lui prête un fier génie d’artiste qui lui fait penser qu’il sera célèbre un jour. Elle le juge toutefois un peu trop réservé. Elle n’est pas une ingénue, elle a un tempérament fougueux et est toute disposée à épouser Évariste tout en sachant que le citoyen Blaise, son père, n’approuvera pas cette union avec un artiste obscur et pauvre. Séductrice, généreuse, intelligente, sage dans ses folies, le goût d’aimer ne lui a jamais fait oublier les convenances sociales. À vingt sept ans, elle est une fille prudente : elle sait qu’il y a peu de sympathie entre son père aux propos inciviques et Évariste et sa foi révolutionnaire et son enthousiasme ardent pour Marat. Elle va devoir composer avec tendresse et sagesse, et désespérant d’un mariage que tout rend impossible et se refusant à braver les convenances sociales, elle envisage une liaison que le secret rendrait décente jusqu’à ce que la durée l’ait rendu respectable.

Paris vit dans la misère et la pénurie de vivres. Survient l’assassinat de Marat par Charlotte Corday. Évariste Gamelin est reçu comme juré au tribunal révolutionnaire. Les prisons regorgent et l’accusateur public travaille dix huit heures par jour face aux défaites des armées et des généraux traduit en justice, les révoltes des provinces, les complots et les trahisons : les Dieux ont soif !

La Convention va opposer à tous la Terreur. Avec Robespierre en chef. Et Gamelin va faire montre d’un zèle inouï pour expédier les accusés au gibet, lui qui hait les belles amies des financiers, des philosophes et des hommes de lettres, tous coupables selon lui d’avoir joui des plaisirs des sens et de l’esprit et vécu dans un temps où il était doux de vivre. Il condamne par ressentiment, croyant condamner avec justice pour le salut public et son honnêteté, sa pudeur virile, sa froide sagesse, son dévouement à l’État, ses vertus enfin, poussent sous la hache des têtes innocentes. Scrupuleux il agit sans état d’âme voyant partout des conspirateurs et des traitres et songe : « Sainte guillotine, sauve la patrie ! » Et bien qu’il lui apparaisse comme un monstre terrible, atroce et cruel couvert du sang de ses victimes et qu’il lui fasse peur, Élodie aime Évariste de toute sa chair. L’amant sanguinaire et la voluptueuse fille se donnent en silence nuitamment du plaisir. Mais pour combien de temps encore ?

Et pendant ce temps on vide les prisons qui regorgent, on juge sans repos ni trêve, avec force dénonciations affluant au Comité de vigilance des sections. Et beaucoup d’enfants dénoncent leurs parents dont ils convoitent l’héritage. Pour aller encore plus loin, la Convention promulgue la loi de prairial qui supprime l’instruction, les interrogatoires et les témoins. Plus de défenseurs. L’accusé est un mort en sursis et la justice mise en abrégé. Les instincts sanguinaires de Gamelin peuvent se livrer au pire. Mais pour combien de temps encore?

Puis c’est la chute de Maximilien de Robespierre, de Couthon et de Saint Just. À la guillotine ! C’est Fouquier-Tinville qui devient maître d’œuvre dans la Terreur. Nul n’est à l’abri d’une sentence irrévocable. Dans ce tourbillon de sang, qui survivra d’Évariste, Élodie, Julie et le ci-devant Chassagne son mari… et tous les autres personnages de cette histoire ?

Ce roman très classique d’Anatole France, son chef d’œuvre paru en 1912, est une évocation remarquable du fanatisme, de la barbarie, de l’obscurantisme et des atrocités de la Terreur, d’où son intérêt historique en plus de littéraire, évocation dans laquelle il se montre partagé entre son idéal de pureté républicaine et son horreur du fanatisme. Dans un style fluide et limpide, aisé et élégant, il s’exprime avec subtilité et nuances. Oui, un véritable chef d’œuvre du grand écrivain socialiste, féministe et dreyfusard, grande figure intellectuelle de la IIIe République que fut Anatole France, académicien et Prix Nobel de littérature 1921.



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