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Critiques de Anatole France (265)
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Histoire contemporaine, tome 2 : Le mannequ..

Dans cette deuxième partie, M Bergeret est pleinement à l'honneur. Secoué dans son amour propre, il ne semble pas pour autant déséquilibré. Il fait preuve d'un contrôle de soi qui, au fil du temps, parait comme un acte cruel, inhumain. Pour ne pas sombrer dans un profond abattement, M. Bergeret se cloitre dans ses lectures, dans ses recherches, dans ses réflexions philosophiques, une manière à lui de réprimer la trahison de sa femme...mais le mannequin d'osier lui permet quand même de décharger, sur cet objet innocent, toutes les aigreurs de sa vie. Cette ambiance un peu sauvageonne dans la maison des Bergeret permet de souffler un peu de ces discours sentencieux sur l'armée, le clergé, la politique, la corruption, le sémitisme. L'auteur entretient toujours le mystère sur le poste d'évêque à pourvoir à Tourcoing. L'écriture est toujours très pointilleuse, et je me suis mieux sentie dans ce deuxième tome que dans le premier. Et qu'adviendra-t-il du troisième tome?

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Histoire contemporaine, tome 3 : L'anneau d..

Enfin Me Bergeret quitte la ville de *** non sans avoir déclenché un scandale qui fera dire quelle y est "restée un jour de trop". Resté seul M.Bergeret déménage, prend ses aises, change de servante et se découvre un nouvel ami à quatre pattes dénommé Riquet ...Dreyfusard parce que la cause lui semble juste et que l'erreur judiciaire est possible il est mis au banc de la société bien-pensante. Ils ne sont pas bien nombreux à penser comme lui à l'exception du recteur de l'université dont il se rapproche. Il se voit enfin titularisé et il est question qu'il soit nommé à Paris.

Et l'Abbé Guitrel me direz-vous. Va t-'-il avoir l'évêché de Tourcoing? Tout se décide à Paris , c'est le ministre des cultes M.Loyer qui doit prendre la décision ,Concordat oblige. Comment M.Loyer va t-'-il pouvoir résister à toutes ces charmantes dames qui sont montées à Paris pour soutenir sa candidature. Mme de Gromance, la Baronne de Bonmont et Mme Worms-Clavelin sont décidées et bien décidées.

Anatole France publie l'Anneau d'améthyste en 1895. L'affaire Dreyfus est omniprésente dans les conversations et les esprits. L’Église souffre financièrement des lois fiscales et rechigne devant les exigences ruineuses de l' État. M.Bergeret reste fidèle à ses convictions, nous les fait partager. Malgré tout cela, j'ai trouvé ce troisième volet plus léger, un peu de gaité arrive même à transpercer , l'arrivée de Riquet dans la vie de M.Bergeret apporte un souffle de tendresse, ces dames se révèlent amoureuses, impertinentes et décidées . Il ne me reste plus qu'à suivre M.Bergeret à Paris et à surveiller le sort de Mr l'évêque ....
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Les dieux ont soif

Voici un roman historique passionnant et immersif dans une période de l’histoire française que je ne connaissais pas très bien. Effectivement, la Révolution et plus précisément la Terreur allant de la mort de Marat à celle de Robespierre n’est pas une période qui a été très détaillée dans mon parcours scolaire et il s’agit du premier livre que je lis en traitant. Il a d’ailleurs fallu que je me fasse violence pour le commencer, en repoussant sans cesse la lecture. Mais je me suis finalement plongée dedans et je l’ai lu très rapidement me retrouvant happée par le récit. Son style narratif, bien que très détaillé et parfois proche du documentaire, s’avère néanmoins très addictif. On est plongé dans une période sombre servie par des personnages forts.

On sent dès le début tout le tragique de l’histoire et la fin inexorable vers laquelle tend Evariste. Ce dernier est un jeune peintre empreint des idées de la Révolution et de l’idéalisme de la République. Il devient juré au Tribunal révolutionnaire et se retrouve prit dans la folie de la justice et des condamnations. Son côté absolutiste et son intransigeance face aux accusés qu’il condamne en fait un personnage sanguinaire à l’image de certaines grandes figures de l’époque. Les personnages secondaires qui gravitent autour de lui offrent un panel intéressant des idées du peuple pendant cette période et de leurs réactions face aux événements qui bouleversent Paris.

Il s’agit incontestablement d’un grand livre historique à lire. Je trouve dommage qu’il ne soit pas plus connu et conseillé. Anatole France, malgré son prix Nobel, reste un romancier peu lu et peu étudié. J’ai bien l’intention de retrouver sa plume dans d’autres de ses romans.
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Histoire contemporaine, tome 2 : Le mannequ..

La vie continue à ****, cette petite ville de Province. En arrière-plan la guerre entre les Turcs et les Grecs, l'exécution de l'assassin de la veuve Houssieu, les déboires juridico-politiques du sénateur Laprat-Teulet, ,les tractations en coulisse pour le poste d'évêque à Tourcoing, la main mise de la Finance sur l’État et les déboires conjugaux de M.Bergeret ... Voilà pour Anatole France un terreau idéal pour exprimer ses idées sur l'armée, la morale, la politique et le mariage ... Dire que M.Bergeret dans son rôle de mari cocufié ne lui inspire que du respect et de la compassion serait sans doute beaucoup dire ... Malgré quelques passages un peu "pompeux" les échanges de points de vue de tous ces personnages donnent une idée précise de ce qu'était la vie "bourgeoise" en province, montrent qu'il en aurait fallu beaucoup pour que tout ce petit monde bouge et que le confort d'une vie "plan-plan" primait avant tout.

M.Bergeret verra t'il enfin Mme Bergeret quitter le domicile conjugal en emportant son fichu mannequin d'osier et qui sera le futur évêque de Tourcoing l'Abbé Guitrel ou l'Abbé Lantaigne ? affaire à suivre ....
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Les fous dans la littérature

Nous connaissons tous Anatole France, du moins de nom. Pourtant s'il est une chose que nous ne savions pas forcément, c'est qu'il était l'un des écrivains français préféré de Sigmund Freud. Les fous dans la littérature nous dit le préfacier Georges Londeix, est un ouvrage placé "sous le thème de la plongée dans l'inconscient". Il s'agit de dix récits publiés entre 1886 et 1905 dans lesquels l'auteur "croque des savants férus d'ésotérisme, des simples d'esprit fous de livres ou fous de Dieu". Mâtinés de fantastique et peuplés de personnages étranges, les quelques contes rassemblés dans ce petit recueil donnent au célèbre prix Nobel de 1921 l'occasion de prouver qu'il est un digne "explorateur des sombres forêts de la psyché, dans une écriture toujours célébrée pour sa clarté et son intelligibilité." Il y a en effet dans ces textes quelque chose de curieux. La folie racontée par Anatole France prend des airs étranges et ses textes laissent une drôle d'impression : ni particulèrement marquants, ni particulièrement habités, les fous d'Anatole France incarnent une fiction naturaliste mise à mal à l'époque par les surréalistes et ses contes qu'on qualifierait aujourd'hui de nouvelles ont fait leur temps. L'auteur a pourtant trouvé son public parmi les psychanalystes dont Ferenczi dira "il est consolant pour nous, psychanalystes de compter parmi les nôtres Anatole France."



C'est vrai, les histoires proposées par Anatole France réunissent les éléments affectionnés par le psychanalystes. Je n'y ai pourtant pas trouvé ce grain de folie que je recherchais. De la folie dont il est question, je n'en ai pas gardé trace. De la clarté de l'écriture vantée par le préfacier, je n'en ai pas retenu grand chose. Il y a bien un ou deux récits qui ont retenu mon attention (Manuscrit d'un médecin de campagne, L'oeuf rouge ou Les fous dans la littérature) mais je n'ai pas accroché au style tant honni par les Surréalistes. Peut-être aurais-je plus de chance avec L'île aux pingouins du même auteur ?
Lien : http://embuscades-alcapone.b..
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Les dieux ont soif

Ecrire une critique est parfois difficile. Il m'arrive d'avoir aimé ou détesté un roman, sans pouvoir y apporter d'arguments concrets. Parfois, je suis consciente de ses qualités, mais d'autres choses m'empêchent de l'apprécier ( le style, les personnages, des incohérences dans l'histoire).

Et parfois, comme pour "Les Dieux ont soif", la critique est difficile, parce qu'il y a tant de choses à en dire, de réflexions induites, de qualités, que je crains de ne pas être capable d'en restituer toute la force et d'oublier ou mal restituer des aspects importants.

L'action du roman se passe durant la révolution et plus précisément de la Terreur, les personnalités de l'époque y sont évoquées ( Marat, Robespierre..), mais le récit se focalise sur un jeune peintre, idéaliste et tout entier acquis à la Révolution. Son entrée au tribunal révolutionnaire aiguisera cette volonté de faire triompher la Révolution à tout prix. Et ce prix est lourd, sanglant et souvent injuste : une bataille perdue, une dénonciation, une pièce de théâtre jugée pas assez révolutionnaire, une certaine tiédeur dans les opinions...et c'est la Guillotine. L'Homme, le Peuple n'est rien, seule compte la Révolution, la vie des accusés n'a aucune valeur car seule la Révolution compte et la peur et la terreur sont des moyens d'assurer sa survie. Anatole France, dans ce roman démontre de façon efficace, les risques du fanatisme et de l'extrémisme, lorsque les idéaux et les convictions prennent le pas sur l'Humanité, lorsque la finalité de ses dernières disparaissent derrière une idéologie, une religion, un concept. Anatole France ne critique pas la Révolution, mais ceux qui pensant détenir la Vérité s'arrogent le droit de devenir des bourreaux en se présentant comme des saints, ceux qui

déguisent leur goût du sang et du pouvoir derrière des idéaux, ceux dont les réflexions et les idées ne passent plus qu'au travers d'un seul prisme et sont donc perverties. Il y aurait encore beaucoup à dire sur cet ouvrage et c'est pour cela, que je me contenterai de vous conseiller de le lire, surtout si vous aimez les récits historiques.
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Le procurateur de Judée

Le procurateur de Judée est un récit ironique, qui interroge le lecteur sur la mémoire de l'histoire et la tolérance.



Sur une route de Sicile, à la faveur d'une rencontre avec Lamia, un ancien ami revenu de son exil en Palestine, Ponce Pilate se souvient du temps où il était procurateur de Judée.

Dans ce court texte, Ponce Pilate évoque le dégoût que lui inspira le peuple juif. Il en parle avec violence, ne soulignant que les aspects négatifs. Lamia, au contraire, évoque avec passion les rencontres qu'il a faites. Ainsi s'installera un court débat entre l'étroitesse d'esprit, la haine et la tolérance, la curiosité intellectuelle. Ces deux opposés trouveront leur apogée lorsque Ponce Pilate s'arrêtera sur le sort des Chrétiens et la méfiance qu'ils lui inspirèrent.



L'ironie prendra alors tout son sens lorsque la mémoire de Ponce Pilate lui permettra de relater toutes les rivalités qu'il a rencontrées, les soulèvements qu'il a du réprimer, mais lorsque Lamia le questionnera sur la condamnation d'un certain Jésus le Nazaréen, Ponce Pilate avouera n'avoir aucun souvenir de cet homme. C'est pourtant le fait de sa célébrité, encore 2000 ans après.

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Histoire contemporaine, tome 3 : L'anneau d..

Pour ce troisième tome, avec l'anneau d'Amethyste, Anatole France ne nous laisse plus planer dans le suspens. Enfin le rideau tombe. Le masque tombe. Un cycle évolutif s'ouvre enfin devant nous. Des sujets, ayant connu beaucoup de tergiversations dans les deux premiers tomes vont enfin trouver d'issue. Notamment avec le clergé de Tourcoing, resté longtemps vacant, pendant ce temps les avis s'enfiévraient, se partageaient entre l'intransigeant abbé Lantaigne et le diplomate abbé Guitrel. L'auteur nous sort ici les dernières artilleries des dessous de l'administration. L'ami d'un tel connait la maïtresse d'un tel, qui connait le frère d'un tel et le fils d'un tel, la mère d'un tel connait le mari d'un tel et le feu ami d'un tel, c'est sous toute la ramification de tel copinage que le clergé de Tourcoing aura à sa tête l'abbé Guitrel. De l'autre coté, monsieur Bergeret voit atterrir chez lui un chat, qui, dans un premier temps va le déconcerter dans ses méditations philosophiques, mais, par la suite, il deviendra le meilleur compagnon de sa solitude philosophique. Enfin monsieur Bergeret reçoit une promotion, il se verra obliger d'aller à Paris...

J'ai plus aimé ce troisième tome que j'ai trouvé plus dynamique, surtout les débats ont été beaucoup plus définis que dans les deux premiers tomes... Enfin, je suis impatiente de retrouver monsieur Bregeret à Paris!!!
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Le Livre de mon ami

Ah le phrasé d'Anatole France ! Fluide ; il coule de source. Beaucoup d'humour. Tellement attachant ce "petit mari" qui nous promène dans son enfance. Le "réveil " est cependant brutal. Sans que rien ne le laisse présager, le lecteur se retrouve tout à coup dans un dialogue qui n'a pas sa place, et qui plus est, est pour le moins abscons. Dialogue que j'ai quand-même compris, (enfin, un peu), mais je ne vois pas l'utilité de couper de la sorte un cheveux en quatre, sauf pour peut-être "intellectualiser" l'oeuvre. Dommage ! La première partie était si fraîche.
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Histoire contemporaine, tome 3 : L'anneau d..

AVOIR UN BON COPAIN !



A force de petite goujaterie au quotidien, d'absence du moindre effort et, pire que tout, de ne plus même sembler voir son épouse, M. Bergeret est parvenu à ses fins : Mme Bergeret est décidée à quitter cet homme indélicat, sans avenir, impossible ! Il faut dire que la mise à la porte de l'ancienne servante - pas mauvaise en soi, mais tellement terrifiée par sa maîtresse qu'elle se rangeait systématiquement à son opinion et à ses ordres - pour la remplacer par une bon à rien, alcoolique invétérée à la cuisse un peu légère, et qui s'endort régulièrement, complètement saoule, sur son ouvrage. Mais cela, c'était le lot de notre Xanthippe tout au long du précédent volume des aventures, certes très statiques mais Ô! combien philosophiques et savoureuses de notre petite ville de province, Le Mannequin d'osier.



Cette fois, donc, Mme Bergeret s'en va, non sans être à deux doigts d'avoir les bonnes âmes de son côté (c'est qu'elle a passé beaucoup de temps à se plaindre, ici et là, du caractère épouvantable de son conjoint. Lequel n'étant déjà guère en grâce, ce ne fut une tâche guère difficile à accomplir). Mais c'était sans compter sur l'époux d'une de ses meilleures amies, M. Lacarelle, un des glorieux représentants de cette coterie, affublée d'une magnifique paire de moustache lui donnant un air de chef gaulois d'où il tire le surnom dont on l'affuble : Eporédorix. Bien que parfaitement fidèle à son épouse, il ne peut s'empêcher de surjouer ce personnage égrillard et imposant qu'on l'imagine être - nos "ancêtres" gaulois étaient à la mode en ces temps-là. n'oublions pas que c'est sous Napoléon III que Vercingétorix sorti de son oubli poli, que le site d'Alésia fut activement recherché, et selon toutes hypothèses, retrouvé, etc -. C'est ainsi que ce bon bougre un peu idiot de M Lacarelle se retrouva dans une position fort inconvenante, bouche contre bouche, avec cette pimbêche de Mme Bergeret. Hélas, il avait fallu que Mme Lacarelle arriva sur ces entrefaites... Toute honte bue, L'épouse éplorée du professeur libertaire dû quitter cette petite ville de province suivie de la pire réputation, tandis qu'il s'en était fallu d'un poil (de bacchante) qu'elle s'en aille auréolée de toutes les vertus. Pauvre, pauvre Mme Bergeret (dont nous n'entendrons plus jamais parler de toute la suite de cette fameuse tétralogie).



M. Bergeret est, bien évidemment, totalement étranger à ces histoires-là, dont on se demande s'il en soupçonne seulement l'existence. En revanche, la drôlesse une fois décanillée, M. Bergeret s'empresse de changer et de bonne et de logis. Le voici donc nanti de la gracile Angélique qui, ennuyée de son chagrin et surtout de sa solitude, lui fera cadeau d'un chiot, dont il ne veut d'abord pas, mais auquel il fini par s'attacher, lui attribuant le nom de Riquet. Et le solitaire d'échanger plus souvent qu'à son tour des réflexions avec ce partenaire jamais contrariant et tout attachement et tendresse à ce maître pas toujours des plus amènes. Nous le voyons ainsi évoquer, défendre même, pour des raisons souvent des plus justes ( même si l'on imagine fort bien qu'en cette année 1899, année de publication de ce troisième opus)



Mais alors, quelle est donc cette histoire d'anneau d'améthyste ? On va le découvrir assez rapidement, à l'occasion d'une discussion entre Mme de Bonmont, une richissime héritière d'origine israélite convertie au catholicisme et qui se pique d'aider le toujours vaillant et roué abbé Guitrel (mais plus que jamais faussement humble) à devenir ce futur évêque de Tourcoing :



«Monsieur l'abbé, est-ce que l'anneau des évêques doit avoir une forme particulière ?

- Pas précisément, madame, répondit Guitrel. L'évêque porte l’anneau comme symbole de son mariage spirituel avec l'Eglise : il convient donc que cet anneau exprime, en quelque sorte par son aspect même, des idées de pureté et d'austérité.

- Ah !... dit Mme de Bonmont. Et la pierre ?...

- Au Moyen Age, madame la baronne, le chaton était parfois d'or comme l'anneau ou bien de pierre précieuse. L'améthyste est une pierre très convenable, ce me semble, à orner l'anneau pastoral. Aussi la nomme-t-on pierre d'évêque. Elle brille d'un éclat modéré. C'était une des douze pierres qui composait le pectoral du grand prêtre des juifs. Elle exprime, dans la symbolique chrétienne, la modestie et l'humilité. Narbode, évêque de Rennes au XIème siècle, en fait l'emblème des cœurs qui se crucifient sur la croix de Jésus-Christ.

- Vraiment ?» dit Mme de Bonmont.

Et elle résolu d'offrir à M. Guitrel, quand il serait nommé évêque, un anneau pastoral, avec une grande améthyste.



Dès lors, ce sont bien des bons parrains et marraines qui vont se pencher sur la candidature de cet abbé aussi impossible à saisir qu'il est coulant comme l'anguille et matois comme un vieux minou affamé. Sans trop en révéler, il y faudra beaucoup de machiavélisme, pas mal d'entregent, des rappels à bons souvenirs, un peu de flagornerie, et même un soupçon de marivaudage (dans un moment d'une drôlerie inépuisable, référence directe à la scène du fiacre que l'on peut lire dans Mme Bovary). Mais que ne ferait-on pas pour mettre ce bon abbé, tellement à l'écoute, tellement moins emporté ou sectaire que son principal concurrent local, tellement plus aisément convertible aux intérêts de la République que l'abbé Lantaigne... Que l'on se méfie cependant de l'eau qui dort !



Ce troisième épisode - appelons-le ainsi - est sans aucun doute beaucoup plus actif que le précédent. On y croise une sorte de jeune Rastignac, près à tout pour être introduit dans le sein des seins de la vieille noblesse locale, lui, le fils de cette Baronne de Bonmont, née juive mais convertie. Il sait que cette noblesse-là méprise ces nouveaux baptisés, qu'il s'y professe même un antisémitisme virulent, mais qu'importe, le jeune homme y tient, et son intelligence désenchantée d'enfant né trop riche et certainement trop intelligent en cette fin de siècle qui l'ennuie - on y reconnaîtrait parfois un genre de Des Esseintes actif -. Il sera d'ailleurs pour beaucoup, lui aussi, dans l'accession à la tiare de l'abbé Guitrel. On rencontre un pesonnage haut en couleur - qui n'est pas sans évoquer, par une série de rapprochements, l'équivoque Commandant Esterhazy, celui qui aurait dû être condamné en lieu et place du Capitaine Dreyfus, et, dans notre histoire, amant insaisissable de notre riche héritière (riche, mais pas folle : elle ne cède ses avoirs qu'au compte-goutte et seulement si elle sent que cela peut servir ses intérêts). On y découvre une espèce de caricature de Bernadette Soubirous répondant au prénom d'Honorine, douée de visions, et passant son temps en contritions dans une petite chapelle du secteur, mais dont les parties de jambe en l'air finiront par se savoir et détourner l'église d'une sanctification bien délicate.



Quant à notre cher M. Bergeret, sa position de dreyfusard inflexible changera indubitablement sa destinée car s'ils sont bien peu, dans cette France repliée sur elle-même, sur ses certitudes et ses idéologies passéistes, l'un des quatre plus ardents défenseurs du malheureux Capitaine n'est autre que le recteur de l'université dans laquelle professe notre avatar d'un certain Monsieur France. Bien que jusque-là les deux hommes ne se sentaient rien de commun et qu'ils avaient même tendance à s'éviter le plus qu'il leur était possible, cette lutte à un contre mille va les rapprocher bien plus qu'imaginé. Le recteur obtenant même la place qu'il n'attendait plus de professeur titulaire. On se prend même à entendre que notre intraitable mais juste professeur pourrait se voir élevé à un poste en Sorbonne...



En 1898; l'Affaire Dreyfus est à son plein. Les luttes entre les deux partis (les pro- et les anti-) divisent à un point qu’il nous est aujourd'hui difficile d'imaginer la France en deux. Et si Anatole France se camoufle ici derrière ce personnage qui est une sorte dee symbole de la force et de la vérité du raisonnement dans un monde entraîné par la passion, ce n'est nullement par soucis de retrait, bien au contraire. Seulement, il est parfois plus convaincant, plus fort et de portée plus grande de prendre ainsi tel paravent car cela permet d'éviter les sentences et autre jugement à l'emporte-pièce et qui ne ferait que répondre par la virulence d'un parti à la virulence, pour ne pas écrire la violence, du parti opposé sans jamais véritablement atteindre son but avoué : convaincre du bien fondé de sa propre réflexion.



Aujourd'hui que nous connaissons les ressorts de cette célèbre et tristement honteuse affaire, ces tribulations peuvent paraître un rien vaines ou alambiquées, mais nul doute qu'elles devaient porter en son temps. Qu'il en reste aujourd'hui une réflexion des plus significatives sur ce que peut-être une pensée humaniste, se méfiant des excès et des outrances, préférant contrarier jusqu'à ses amis du moment parce que c'est la vérité et la justice qui sont, à la fin gagnantes. Et lorsque c'est Anatole France qui nous écrit cela du haut de son siècle passé, c'est tout autant un ravissement pour l'amateur de belles-lettres qu'un régal pour l'intellect. Un compagnon de cette trempe et de ce niveau de pensée, on en redemande !
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Les Sept femmes de la Barbe-Bleue

UNE DRAMATIQUE ERREUR JUDICIAIRE



Il était temps...

Il était temps que la vérité éclata enfin ! Et c'est par la grâce de l'écriture d'une classique élégance, due au génial auteur de La rôtisserie de la Reine Pédauque, de Les dieux ont soif ou du désopilant (et féroce) L'île des pingouins - génial mais Ô! combien oublié - que vous allez l'apprendre, vous qui le demandiez tous à corps et à cris (si, si, je vous ai compris !) : Qu'y a-t-il donc dans cette fameuse pièce interdite à la septième femme de la Barbe-Bleue ?



- Six corps froids et assassinés des précédentes épouses de ce terrible monstre, me rétorquerez-vous !



- QUE NENNI ! Cet homme se trouva honteusement assassiné par l'amant de son ultime épouse - une abominable gourgandine, sous ses airs de Sainte Nitouche - ses deux matamores de frères, poussés au crime par une mère dépensière et une sœur, Anne, peu intéressée par le mâle mais qui se serait damnée pour faire le mal autour d'elle !



Voici donc ce qu'il en fut, réellement, de la vie très simple, quoi que confortable, mais au destin absolument tragique de M. Bertrand de Montragoux, ci-devant gentilhomme campagnard, bel homme et fort timide, et surnommé par les paysans de sa contrée, La Barbe-Bleue, en raison du fait qu'elle était bleue, étant très noire, et que si noire qu'on l'aurait crue bleue !



C'est donc ce cher Anatole France, ayant patiemment lu et relu les dires (totalement erronés) de son prédécesseur, le célèbre Charles Perrault, s'est muni d'une documentation ne souffrant aucune espèce de contestation avant que de nous délivrer, enfin, et pour qu'éclate la seule vérité concernant Les Sept Femmes de la Barbe-Bleue, d'après, nous affirme-t-il, des "documents authentiques".



Nous ne rentrerons pas, icelieu, dans les détails d'une affaire dont vous pourrez vous procurer facilement les rebondissement chez votre libraire habituel. Sachez simplement que la vérité sur cet homme-là fut grandement malmenée, tronquée, et faussée par la famille toute entière de sa dernière jeune mégère, Jeanne de Lespoisse, arguant du seul fait, malheureux et hasardeux, que les six précédentes avaient toutes plus ou moins mystérieusement disparues. Ce qui n'était pas bien vrai, à défaut de s'avérer parfaitement faux.



Quid de la fameuse petite clé ouvrant sur la soi-disante pièce interdite, me direz-vous ? Après minutieuse enquête, M. France nous l'affirme : Il n'y eut jamais aucune interdiction de ce genre par notre infortunée Barbe-Bleue, seulement s'y trouvait un "petit cabinet" dans lequel était reproduit une bien tragique fresque à l'antique, laquelle était peinte de telle manière qu'on y aurait cru, et que l'une des portes de ce cabinet donnait directement, hélas, sur les douves sans eau du château... Comprenez-donc bien les risques presque assurés d'accident funeste, surtout auprès d'une faible et sensible représentante du "beau sexe" qui se serait trouvée dûment et fatalement impressionnée par l'horrifique peinture.



En quelques dizaines de pages bien tournées, pleine d'humour et d'ironie, truffées de jeux de mots et de calembours forcément douteux, Anatole France revisite intégralement un des contes les plus connus - l'un des plus sanguinolent aussi - de Charles Perrault. Tout en faisant preuve d'une irrévérence totale, cette nouvelle est, tout autant, une gracieuse révérence au beau français de cette époque, dont il imite parfois les tournures, sans jamais se rendre illisible, et de l'imaginaire parfois terrible de cette lointaine époque.



Cependant, l'inversion imaginée dans ce récit en fait une bouffonnerie digne des meilleures pièces de Georges Feydeau ou d'Eugène Labiche. D'une leçon épouvantable sur les malheurs que peuvent engendrer une curiosité mal placée et, sous-jacente, l'enfer vécu par les femmes sous la coupe de maris violents, France en fait une histoire de cocuages multiples et désopilants où l'appas du gain le cède au seul plaisir de tromper et de rendre malheureux les amoureux transis et trop candides.



Bien que l'ouvrage s'achève par une Cendrillon, elle-aussi totalement revisitée, sincèrement moins concluante que cette époustouflante Barbe-Bleue, ce petit mignon ouvrage proposé par les éditions La Part Commune donne sérieusement envie (le rire est une affaire sérieuse, c'est bien connu) de poursuivre avec le reste des contes usurpés pour la plus grande joie du lecteur par ce cher vieil (et par trop méconnu) Anatole France !



A bon entendeur...

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La révolte des anges

L'ange gardien d'un jeune homme de bonne famille occupe ses temps libres à l'étude, au grand dam du bibliothécaire des lieux, ce qui a pour résultat de sérieusement dévaluer son Dieu à ses yeux. Quittant ses fonctions (au grand dam, cette fois, du jeune homme), il s'acoquine avec d'autres anges rebelles séjournant sur Terre pour fomenter la révolte. En même temps, il tombe dans les mêmes vices que le premier mortel venu.



C'est un joyeux délire, très cocasse et émaillé d'une ribambelle de blasphèmes inspirés. Au milieu du livre, le rythme change le temps qu'un démon nous raconte l'histoire du monde où Dieu est représenté comme un imposteur cruel et incapable et où Lucifer et sa cohorte d'anges rebelles sont l'inspiration et les bienfaiteurs de l'humanité. On revient ensuite à nos personnages et leurs amusantes et pathétiques actions.



Plus je lis M. France, plus je l'apprécie. Ses textes sont teintés d'une ironie euphorisante. Dieu et l'Église ne sont pas les seuls à en prendre pour leur rhume ici ; la guerre (le roman est publié à l'aube de la 1ère guerre mondiale), les autorités, les révolutionnaires de tout acabit, les hommes, les femmes, tout le monde reçoit sa juste part de pétillant sarcasme.
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Thaïs

L'un des rares romans d'Anatole France où l'auteur se frotte à l'exercice du sublime, prouvant à ses contemporains qu'il est lui aussi capable d'aborder des sujets graves avec un style pur et grandiose. Anatole France, en traitant de la foi et de l'amour, ne se contente bien évidemment pas d'un point de vue académique mais humanise son récit en le ponctuant de saillies où poignent toujours son ironie sincère, sa mansuétude amusée, sa critique bienveillante. C'est donc un roman plus "rangé" que les autres perles de Monsieur France, mais ne manque ni de profondeur ni de beauté vraie.

A lire absolument !
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Les dieux ont soif

Première rencontre avec le prix Nobel de littérature 1921, dreyfusard, anticlérical et ami de Jaurès, que des bonnes références en ce qui me concerne.

Un style dans le plus pur genre du début du XXe, assez emphatique mais parfaitement clair... pour qui sait lire correctement, ça va sans dire.

Incontestablement, Anatole a bossé son sujet avant de pondre ce roman historique. On découvre avec gourmandise les moeurs oubliées de la Révolution : ce qu'ils mangeaient, comment ils s'habillaient, les métiers disparus (comme le vendeur de tisane...), et même les jeux auxquels les citoyens jouaient pour tromper l'ennui ou occuper leurs soirées. Il a même tellement bien étudié son sujet qu'il évite avec adresse le piège du Robespierre bashing (lire à ce propos "La probité révoltante" de Cécile Obligi).

On suit alternativement deux personnages qu'à peu près tout oppose, et on sait d'instinct auquel des deux la sympathie de l'auteur (et la nôtre) revient :

- À ma gauche, Brotteaux, ex-aristocrate athée, ruiné, philosophe, reconverti en fabricant de pantins en carton et qui n'hésite pas à partager le peu qu'il a avec un curé ou une prostituée. Il ne se fait aucune illusion sur le destin qui l'attend mais reste jusqu'au bout fidèle à sa générosité et à son amour de la vie.

- À ma droite, Évariste Gamelin, peintre médiocre, républicain et jacobin convaincu, devenu par piston juré au tribunal révolutionnaire, admirateur de Robespierre et grand pourvoyeur de guillotine.

À travers les yeux de Gamelin (et dans son cerveau sombrant petit à petit dans la même paranoïa que la Convention), on suit avec intérêt le processus de la Terreur, de la chute des fédéralistes jusqu'à celle de Robespierre, les charrettes de condamnés à mort qui se multiplient et se remplissent de plus en plus à mesure que le régime devient de plus en plus fou. J'ai ainsi vu défiler les noms dont on connaît le destin en lisant les mémoires du bourreau Charles-Henri Sanson : Brissot, Manon Roland, Charlotte Corday, Marie-Antoinette, Cloots, Hébert, Danton, Desmoulins, Chaumette, les chemises rouges, les soi-disant "conspirateurs des prisons" qui ne se connaissaient en fait ni d'Eve ni d'Adam...

Le problème de ce bouquin, c'est la partie centrale, que j'ai trouvée trop délayée, pas essentielle, trop lente... Bref, je me suis ennuyé. Mais le début, et surtout la dernière partie, sont très bons.

La fin est vraiment vertigineuse, où l'on voit Gamelin perdre pied avec la réalité parallèlement à "sa" Révolution, comme s'il en était l'allégorie, envoyant à la "hache patriotique" sans le moindre état d'âme son beau-frère, sa protectrice, son ami et même son rival amoureux imaginaire, tout en étant sincèrement persuadé de "se sacrifier pour la Nation".

C'est le roman d'un fanatisme, et dès lors le titre s'explique pleinement. Pas étonnant qu'Anatole France ait songé à mettre en scène un inquisiteur avant de traiter finalement le sujet sous l'angle d'un révolutionnaire.
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Le Livre de mon ami

À travers cette oeuvre, Anatole France nous emmène avec lui dans ses souvenirs d'enfance dans une première partie. Dans une seconde, il nous décrit l'admiration d'un père pour sa fille avec toujours son style très fluide. Une lecture toujours aussi agréable.
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La rôtisserie de la reine Pédauque

Une oeuvre truculente et un style classique mais d'une richesse de vocabulaire et des tournures de phrases rendent ce livre éminemment vivant.

Un jeune garçon, destiné à reprendre la rôtisserie de son père a appris à lire avec un capucin, moine mendiant et pouilleux.

Un soir, un abbé vient dîner à la rôtisserie familiale et découvre que Jacques surnommé tournebroche a de vraies capacités. L'abbé Coignard, propose à ses parents de l'enseigner en grec et en latin, moyennant le couvert, ce qui n'est pas une petite choses au vu de l'appétit colossal de l'abbé et de sa capacité à absorber de gandes quantités d'alcool.

J'avais l'impression de me trouver face à Gargantua, mais ce qui différait était le fait que l'abbé était d'une grande piété, même si ses mains s'égaraient dans la gorge des soubrettes car il faut savoir jouir de l'existence.



Outre l'abbé Coignard, que Jacques appellera mon bon maître, nous rencontrons un vieil alchimiste fou qui les engagera tous deux â venir dans son étrange château pour faire des traductions

Là, il veut lui enseigner le merveilleux commerce que l'on peut avoir, en amour avec les salamandres.

Les aventures se succèdent au fil des pages et tiennent les lecteurs en haleine.

Dommage, que cet auteur soit tombé dans l'oubli car il y a matière à réjouir le coeur des lecteurs

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Les dieux ont soif

Commis par Anatole France en 1912, ce roman historique prend place en pleine Terreur, an II et an III (1793-1794). La préface, les notes et les annexes de Pierre Citti méritent d'y porter attention.



Cette chronique présente la Terreur un peu froidement, sans jugement ni sentiment ; le récit historique est factuel, détaillé et illustré. France présente ces deux années comme "un temps d'aberration mystique et sadique" ; le roman n'est ni anti-révolutionnaire, ni contre-révolutionnaire. J'y ai vu, en filigrane, le fonctionnement des totalitarismes qui, eux, sont de toutes les époques.



La fiction s'inscrit dans ces pages historiques ; je retiens le couple Évariste Gamelin et Maurice Brotteaux, deux trajectoires sociales singulières, deux caractères contraires, deux histoires contrastées qui se croisent, l'artiste et le ci-devant seront mangés par la même mécanique.



La description du peuple des petits, des humbles, des artisans, des tricoteuses est réaliste et touchante ; la logique des délateurs, des suspects et de la justice est infernale et cruelle ; Évariste est tout à la fois boucher consciencieux guidé par sa foi révolutionnaire et artiste romantique ; le personnage est attachant mais on comprend assez vite que ses contradictions seront sans issue.



J'ai aimé la prose de France, la richesse du vocabulaire, la précision des descriptions, la description des passions, malgré quelques phrases longues et datées.
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La rôtisserie de la reine Pédauque

Tout d'abord, il vaut mieux avoir lu « Le comte de Gabalis » ouvrage d'Henri de Montfaucon, abbé de Villars pour apprécier tout le sel de celui-ci. Car il en est une sorte de décalque amplifié.

Tout comme Gabalis, le cabaliste monsieur d'Astarac va entretenir, celui qu'il prend pour disciple, de doctrines secrètes traitant essentiellement des habitants de mondes éthérés : sylphes, nymphes, gnomes, elfes et autres salamandres et de leurs rapports avec les humains.

Ne doutant pas un seul instant de la réalité de ces mondes parallèles, il va inciter le jeune Jacques Ménétrier dit Tournebroche à s'unir avec une salamandre !

Les deux livres serviront surtout à critiquer pour l'un la société du XVIIème siècle et pour l'autre celle de la France du XIXème dissimulée sous celle du XVIIIème.

Et aucune caste sociale n'échappe à la verve de pamphlétaire d'Anatole France. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que l'ensemble de l'oeuvre de France fut condamnée par le Vatican. Les prêtres de quelques rangs qu'ils soient y sont en général décrits comme fainéants, trousseurs et parfois même détrousseurs. Les femmes ne sont pas mieux loties, frivoles, manipulatrices et surtout intéressées, elles conduisent aux pires catastrophes des hommes tout aussi stupides que libertins. Ce roman tragi-comique est surtout merveilleusement bien écrit, plein de drôlerie et de nostalgie aussi.
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Les dieux ont soif

Comment un livre publié en 1912 sur la Révolution Française qui se transforme en Terreur peut-il se lire aussi facilement et laisser un sentiment de modernité ? Peut-être parce qu'Anatole France, dans une langue classique mais fluide, va au-delà des noms historiques et raconte le destin d'un jeune homme épris d'absolu qui au nom de valeurs érigées en Vérité abdique toute humanité : le culte justifiant des actes aussi peu justifiables que la guillotine à tout va.

Peut-être parce qu'Anatole France a saisi ce qui ne change pas dans le monde : on retrouve dans Les Dieux ont soifs les agioteurs-profiteurs, les égos, le pouvoir, les questions de religion et de laïcité, les débats politiques entre les modérés et ceux qui trouvent qu'ils sont trop mous, et même la liberté des femmes.
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Les dieux ont soif

Plongée en 1793. Un homme se laisse emporter par le culte de la Raison, par les nécessités de la Terreur. Il est jeune et bon, il se voudrait artiste, mais surtout il veut le triomphe de la Révolution. Alors, devenu juré du tribunal révolutionnaire, il juge. De son mieux. Face à lui et ses confrères, des hommes, des femmes, des enfants et des vieillards, accusés d'avoir conspiré, d'avoir spéculé, d'avoir soutenu la royauté ou affaibli la Révolution.

Il sent bien que même l'amour de sa douce ne le retient plus dans l'abîme où son poste l'a plongé, mais il continue en espérant qu'il en viendra un monde meilleur, jusqu'au dénouement fatal de Thermidor.

Avec Évariste, nous vivons cette année terrible. Avec ses voisins et ses amis, nous découvrons tous les aspects de 93 à Paris : la faim, la suspicion, les magouilles pour survivre, les relations avec les émigrés.

Le roman est instructif mais ne décolle vraiment qu'avec la participation du héros au tribunal. Avec son beau-frère et son voisin arrêtés, on se prend à espérer que son humanité triomphera, mais non.

Le titre est sardonique : on ne parle jamais de dieux au pluriel dans le livre, essentiellement du Dieu des catholiques et de la déesse Raison, mais on comprend que le sang coule pour apaiser des forces supérieures qui dépassent les hommes, faibles créatures qui se trucident les uns les autres.

Ce n'est pas le meilleur livre de mon été, mais cela reste une plongée éclairante dans l'âme d'un bourreau et dans une page sombre de notre histoire.
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