AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Georges-Olivier Châteaureynaud (100)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Le jardin dans l'île

Entrer dans l’univers de Georges-Olivier Châteaureynaud, c’est pousser une porte qui n’est visible qu’aux yeux des attentifs, et pénétrer un domaine dont on s’éprend très vite, onirique et mystérieux, où les démons intérieurs et les fantômes viennent vous tarauder, un monde imprégné de l’étrangeté réelle ou rêvée de l’existence, où sont si bien rendus la nostalgie des temps disparus, l’amour des objets anciens et des lieux qu’on a habité.



Dans ce recueil de dix nouvelles (toutes de belles découvertes) paru en 1989, et réédité en 2005 par Zulma, mes coups de cœur furent pour la nouvelle éponyme, «Le Jardin dans l’île», car Georges-Olivier Châteaureynaud a un don pour évoquer le charme envoûtant des femmes que l’on croise parfois, ici une artiste peintre qui vit isolée sur une ile ; et puis «L’inhabitable» dont le héros «maudit», poursuivi par des expériences malheureuses de logements impossibles, pense avoir enfin trouvé la maison de ses rêves et, euphorique, signe la location et emménage sans même la visiter ; et enfin et surtout «Le courtier Delaunay», témoignage du talent de l’auteur pour raconter une histoire construite essentiellement sur tout ce qui n’y est pas dit. Dans cette nouvelle, un antiquaire, intrigué par l’habileté de son courtier à dénicher les objets les plus improbables désirés par ses clients, n’a de cesse que de découvrir son secret.



«Sans me vanter, j’ai connu des moments difficiles. Si j’en faisais le compte, les bas, dans ma vie de locataire, l’emporteraient de beaucoup sur les hauts. Ainsi, j’ai habité quelque temps dans les flammes. Allons, j’exagère ! Il ne s’agissait que de flammèches, mais c’était tout de même agaçant. À toute heure du jour ou de la nuit, des débuts d’incendie éclataient chez moi, spontanément, ici ou là, derrière un tableau, au fond d’une penderie, sous une chaise, dans la panière à linge… Mes affaires n’étaient nulle part à l’abri. Combien de fois me suis-je retrouvé sans un sou, combien de fois ai-je du faire refaire mes papiers d’identité, parce que mon portefeuille s’était consumé avec mon pardessus, pendant mon sommeil ? A l’instant de m’habiller, je trouvais mon pantalon brûlé jusqu’aux genoux, mes chemises à demi calcinées, mes souliers racornis et cloqués, mes gants en cendres au fond du tiroir où je les serrais. Ma vie était un enfer en miniature ; je sentais perpétuellement le roussi, j’étais roussi moi-même !» (L’inhabitable)



Sous la plume de Georges-Olivier Châteaureynaud, chaque nouvelle est un nouveau rêve alors pourquoi s’arrêter de rêver ?

Commenter  J’apprécie          110
La dernière génération de mortels

C'est encore le miracle Masse critique, qui vous sort de vos zones de confort, de votre sphère habituelle de lectures.

Et c'est un beau message d'espoir pour tous les passionnés de lecture, qui parfois sont effleurés par cette pensée affreuse : et si un jour j'avais fait le tour ? Des auteurs, des sujets, des scénarii ? Et si un jour je ne trouvais plus la nouveauté, la surprise, le personnage différent ?

Vous imaginez l'horreur ?

Eh bien ce petit recueil de nouvelles vient vous apporter la réponse et l'espoir : les bibliothèques et librairies regorgent encore de moult auteurs dont vous n'avez pas encore eu la chance de croiser la route.



Pour ma part, je confirme que je suis tombée sous le charme de l'écriture de cet auteur. Soignée, onirique, avec cette petite touche de surnaturel ou juste d'inexpliqué qui donne une certaine saveur au quotidien banal. On n'accompagne pas les personnages. On devient ces personnages. On endosse leur vêtement et on vit leurs angoisses, leurs curiosités.

C'est presque de la sorcellerie. Je suis vraiment enchantée par cette découverte.



Alors faut-il le lire ? Oui un énorme oui. De mon côté, immédiatement après cette lecture j'ai réservé L'Autre rive du même auteur dans la médiathèque ou je sévis. Je vous promets une critique sous peu...
Commenter  J’apprécie          90
Le corps de l'autre

Louis Vertumne est un vieux con. Depuis des années, il traîne son existence de critique littéraire aigri, méprisant tout le monde (surtout les romanciers), haïssant tout le monde (surtout les romanciers). Les seules personnes qui le supportent encore sont trois femmes : son ex-épouse qui le soutient par habitude, sa femme de ménage qui lui permet quelques caresses furtives et sa secrétaire. Non content d’être un vieux con, Vertumne est un vieux con sur le point de crever. Un soir de Noël où il rentrait tranquillement chez lui, il se fait poignarder par un jeune skinhead, Donovan Dubois. Touché à mort, Vertumne s’effondre, plonge une dernière fois son regard dans celui de son agresseur… Et là – miracle des miracles ! – se retrouve projeté dans l’enveloppe corporelle de son meurtrier. Vertumne occupe donc le corps de Donovan Dubois et si ce corps a l’avantage d’être jeune et vigoureux, il a également de sacrés ennuis, notamment la menace d’être coffré par la police pour le meurtre d’un vieux critique grincheux comme un dogue. Affolé, paniqué, Vertumne fuit dans la nuit, mais rapidement son dégoût et sa terreur font place à une certaine fascination et à un à espoir flageolant : et si ce nouveau corps était l’occasion de recommencer sa vie ? De tout reprendre à zéro ? Peut-être même d’écrire le roman dont il a tant rêvé sans jamais réussir à en taper une ligne ?



« Le corps de l’autre » commençait très bien. La première moitié m’a captivée et l’originalité de l’idée de départ m’a enthousiasmée d’emblée ! Mais voilà… Cet enthousiasme n’a pas survécu aux longues et pesantes déambulations de Vertumne. Le principal problème de ce récit, pourtant singulier et fort bien écrit, vient du personnage principal : comme dit plus haut, Vertumne est un vieux con. Indécis, méprisant, mesquin, replié sur lui-même, il n’attire pas du tout la sympathie et son extraordinaire aventure ne semble pas avoir une influence très positive sur son caractère. Même coincé dans la peau d’un jeunot fauché, il reste un écrivain raté reprochant sans cesse aux autres son manque de talent. Il donne rapidement l’impression de tourner en rond – deux pas en avant, trois pas en arrière, deux pas en avant, trois pas en arrière… – et les zigotos qui tournent en rond, ça m’ennuie un peu. Rendant à César ce qui est à César : il y a du bon, voire du très bon, dans « Le corps de l’autre », quelques très jolies scènes en dehors du temps, mais aussi trop de longueurs et une histoire qui semble un peu menée à la va-comme-j’te-pousse. Pas mal, mais pas extraordinaire non plus.

Commenter  J’apprécie          90
L'autre rive

L'Autre Rive est un roman magnifique sur la quête de soi, d'une identité et d'un but. Sur la difficulté à être au monde, à aimer et à vivre. Sur l'espoir de s'accomplir, la terreur de vieillir et de se perdre en route - mais perdre quoi, au juste, quand on peine déjà tant à savoir ce qu'on est ? Brisures si familières au milieu de l'étrange - l'étrangeté du monde et des autres, que la distorsion fantastique du réel met si bien en relief, ici comme ailleurs.



Ce roman est d'ailleurs merveilleux plutôt que fantastique, suspendu comme dans une bulle entre les genres, entre réel et imaginaire, participant un peu de tous sans s'y laisser définir. C'est un roman magique, en tout cas, par sa faculté à entraîner son lecteur, tout entier, dans un monde à part tellement plus réel que le nôtre, et tout aussi mystérieux. (Ou est-ce l'inverse ?)



De cette magie, participe pleinement une plume élégante et limpide, en laquelle s'accomplit un parfait mélange de poésie et de vigueur. Mais aussi chaque personnage auquel l'auteur a donné vie avec une générosité inépuisable : notables douteux, parents indignes, fils à papa, gamins paumés, voyous maléfiques, créatures de l'autre monde, secondaires ou essentiels, attachants, sympathiques ou presque odieux, chacun a son relief propre, son ambiguïté, chacun est investi d'au moins une parcelle de grandeur, de folie ou de fragilité qui nous accroche à lui. Et les premiers rôles, de ceux qui gravitent autour de Benoît Brisé, sont tout particulièrement réussis.



Un bijou dont je recommande très vivement la lecture.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
Commenter  J’apprécie          90
L'autre rive

L'Autre rive fait partie des livres que j'emporterais sur une île déserte, d'ordinaire je suis un fan de Chateauraynaud, mais là avec ce titre, on touche vraiment au roman merveilleux (je l'ai offert à plusieurs reprises) et il fait partie des livres dont on souhaite que passe un peu de temps pour avoir le plaisir de le relire et de le redécouvrir.

En fantastique, je le rapproche volontiers de Gormenghast, bien que l'univers en soit différent.

Roman de quête, d'initiation, intemporel, qui pourrait se passer n'importe quand, roman du bout du monde, d'une micro-société au microcosme reproduisant toutes les grandeurs et les tares des grandes sociétés.

Roman de la différence, ici les créatures du Styx représentent les réprouvés, roman hanté par la mort, une mort acceptée, fatalitée de la vie.

Les personnages du roman ont une vie dense, et portent en eux toutes les contradictions et toutes les grandeurs qui en font des personnages de roman que l'on n'oublie pas. Cependant , la ville est un personnage à elle-seule, et lorsque le livre est terminé, elle reste présente et il est difficile de s'en détacher.

En résumé, un grand roman, même pour ceux qui n'aiment pas le fantastique, tant celui-ci n'est qu'un support aux propos de l'auteur et non pas le moteur du livre.
Commenter  J’apprécie          80
Le sel de la Bretagne

36 auteurs. 36 textes. 36 souvenirs. 36 expériences. 36 émotions. 36 Bretagne.



Je trouve vraiment que l'éditeur Presses de la Cité a eu une merveilleuse idée pour les 60 ans du Prix Bretagne.



Bretonne de naissance et encore plus de cœur, je suis heureuse d'avoir pu livre cet ouvrage.

Bien sûr, certains textes m'ont plus parlé que d'autres, mais j'ai apprécié d'entrer dans le cœur breton de chacun des auteurs.



Ouvrez ce recueil, et vous découvrirez la Bretagne.

Celle d'avant. Celle d'aujourd'hui. La magie des légendes et des lumières. Les souvenirs d'enfance gravés au fond de son cœur. Les émotions ressenties quand on se sent enfin au bon endroit...



Ouvrez ce recueil, et vous ne pourrez qu'avoir envie de découvrir chacune de ces Bretagne.
Commenter  J’apprécie          70
L'autre rive

Merveilleux roman que celui-ci.



Avec "L'autre rive", Georges-Olivier Châteaureynaud réussit un véritable tour de force littéraire, qui conjugue en 700 pages, chronique sociale, poésie, fantastique et roman d'apprentissage.



"L'autre rive" est un livre ambitieux et généreux, dont le style, à la fois précis et sensible, ne souffre d'aucun temps mort, d'aucune baisse d'inspiration.



Avec une aisance impressionnante, l'auteur nous plonge dans un livre "univers", qui se nourrit de sa propre logique, irradie sa poésie singulière et impose ses propres lois.



La prouesse et l'originalité du livre est, selon moi, d'avoir su développer une riche thématique, celle de la construction adolescente, lovée dans un superbe écrin, celui du roman fantastique. Le tout servi par un humour, un sens de la formule et du verbe tout à fait remarquables.



De toute beauté.





Commenter  J’apprécie          70
Le château de verre

Il est comme cela des romans courtois, sans jeu de mot aucun… Simplement, « Le château de verre » est une œuvre brillante et élégante qui vous maintient en haleine jusqu’à la dernière page. Incroyable destinée que celle de Job de Logonna, sombre bâtard, élevé dans la plus grande des pauvretés, et qui réussira sur sa seule opiniâtreté à la vie, son courage mais aussi quelques belles rencontres à devenir un homme de son temps. Car Georges-Olivier Châteaureynaud, joue habilement ici sur deux tableaux, en premier plan, son barde et ses picaresques aventures (les pages sur la croisade sont extraordinaires entre autres…) et en toile de fond, l’esquisse de la civilisation médiévale ascendante du XIIème siècle, qui trouvera son apogée, grâce à des personnalités comme Job, au siècle suivant. C’est une véritable incursion dans le quotidien de cette époque, offrant, avec une belle véracité historique, nombres de scènes imagées et passionnantes. Il n’est donc pas étonnant que ce livre d’heures suscite notre intérêt en permanence, pas plus le faite de dévorer chaque page avec une certaine avidité grâce à un style est alerte et enjoué et sans aucun temps morts. « Le château de verre » est vraisemblablement l’œuvre la plus pertinente sur cette période méconnue, elle converse aussi bien aux néophytes qu’aux érudits… A (re)découvrir de toute urgence.
Commenter  J’apprécie          70
Le sel de la Bretagne

#LeSeldelaBretagne #NetGalleyFrance

Je remercie NetGAlley et les Presses de la Cité pour m'avoir permis de lire ce livre. Joli témoignage d'amoureux de cette région. Que ce soit avec la foi, une pâtisserie, un souvenir d'enfance, un bol à oreilles, ou tout simplement avoir mis en mots la sensation ressentie la première fois qu'ils y sont allés, les auteurs regroupés dans ce recueil ont ce point commun si fort, ils aiment cette terre, si particulière et si belle. Certains de ces textes m'ont parlé, je ne suis pas bretonne, mais moi aussi j'ai ressenti cette impression de me sentir en paix, comme à la maison lorsque je m'y suis rendue.
Commenter  J’apprécie          60
Le congrès de fantomologie

Excellent, et trop court! Voilà ce que j'ai pensé en refermant Le congrès de fantomologie, court petit roman de Georges-Olivier Châteaureynaud, qui commence un peu comme un ancien album de Spirou (le petit pays totalitaire imaginaire d'Europe Centrale) et prend un tournant totalement étonnant et très brillant.

Odilon Frêle, personnage principal, se trouve invité à un congrès de fantomologie dans un petit pays totalitaire, seulement une fois sur place, à peine le temps de flirter avec une charmante journaliste, que le voilà embringué dans des problèmes pas possibles avec la terrible police politique locale, une bande d'horribles personnages pour lesquels la déportation est un sport. Cela commence comme un étrange roman d'espionnage, vire au fantastique au plus charmant sens du terme, et se dévore, d'autant plus que c'est merveilleusement écrit!

A vous procurer de toute urgence.
Commenter  J’apprécie          60
Singe savant tabassé par deux clowns

Il a fallu une excellente chronique d'Arakasi pour que je me décide à ressortir de son étagère ce recueil de nouvelles qui y dormait depuis bien trop longtemps. J'étais à peu près certaine de l'aimer, pourtant - l'Autre Rive, acheté en même temps, m'avait enchantée et j'étais bien décidée à explorer tous les autres écrits de l'auteur.

Mais voilà, les recueils de nouvelles, ce n'est pas ma tasse de thé : si certaines histoires m'ont marquée autant que certains romans, j'en ressors souvent avec le sentiment de quelque chose de trop court, d'un peu accessoire, vite oublié. Et puis j'ai besoin de laisser maturer une histoire après lecture - dans un recueil, tout s'enchaîne trop vite et finit par s'embrouiller, ou alors il faudrait que je m'arrête de lire, mais s'arrêter de lire au milieu d'un trajet en RER peut vite tourner au drame. Et je lis beaucoup dans le RER.

Bref.



Point de drame en l'occurrence, ni même de déception. Tout en donnant à chaque texte une puissance particulière, l'auteur conserve de l'un à l'autre une certaine unité qui permet de se laisser captiver sans réelles ruptures : unité thématique, la plupart des nouvelles tournant autour d'une rencontre, d'un basculement. Unité, surtout, d'univers : un monde qui ressemble au nôtre, qui est le nôtre, mais comme posé au bord d'un abîme, au bord d'un miroir derrière lequel il peut passer à chaque instant. Un monde où tout devient possible, surtout le plus étrange.

Il y a un soupçon d'absurde, là-dedans. Plus qu'un soupçon de cruauté aussi, parfois. Mais aussi, et surtout, beaucoup de poésie.



Pas de canard boiteux, dans ce recueil; même si certaines nouvelles m'ont plus séduite que d'autres, même si la fin de quelques unes m'a paru sur le coup un peu frustrante. Celles-là mêmes, au fond, ouvrent sur trop d'interrogations, de possibles, de rêve, pour laisser réellement à désirer.



Mais de quoi ça cause, tout ça, me demanderez-vous peut-être à ce stade. Le titre ne vous suffit pas, vraiment ?

Cela parle d'une femme qui put se croire un jour immortelle. De pêche fabuleuse dans une vieille maison libérée un instant de la mer. De promiscuité étouffante entre morts et vivants. D'un jeune homme découvrant les douceurs fallacieuses et les cruautés de la vie au coeur très secret d'un sanatorium. Pour mes préférées. Mais on y croise aussi trois soeurs aux allures de destin, un perroquet trop savant, des acrobates libidineux poursuivant une belle écuyère, d'ingénieuses machines à fusiller, un chauffeur de taxi bibliovore, et bien d'autres choses, bien d'autres êtres encore. Tous plus improbables et fascinants les uns que les autres, à l'image de ce titre si délicieusement tourné.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
Commenter  J’apprécie          60
Jeune vieillard assis sur une pierre en boi..

Huit nouvelles sont réunies dans ce recueil paru en cet automne 2013, huit ans après «Singe savant tabassé par deux clowns» (2005, et 2013 chez Zulma).



Autour de vies ordinaires, parfois précaires, souvent à proximité d’une brocante ou d’un marché aux Puces, tant les objets semblent ici vivants ou chargés d’émotions, Georges-Olivier Châteaureynaud nous conte des moments mystérieux de la vie où l’étrange apparaît, comme les mémoires de cet homme qui a eu par trois fois la chance de s’envoler (Les intermittences d’Icare).



«C’est là que c’est arrivé, un jour d’été semblable aux autres. L’était-il vraiment ? Plus tard, j’y ai réfléchi, j’ai retourné le tiroir de mes souvenirs, j’ai tenté d’en trier le fatras. Je n’ai rien trouvé qui mérite d’être associé au prodige. Pas un signe annonciateur, aucun rêve prémonitoire, nulle concomitance. C’est venu comme ça. Mais faut-il une cause aux miracles ? Un instant j’étais soumis au joug de la pesanteur, et l’instant d’après j’en étais libéré. Une seconde mes pieds nus s’enfonçaient dans le sable grossier, et la suivante ils en étaient dégagés et flottaient une dizaine de centimètres au-dessus de leurs empreintes.»



Georges-Olivier Châteaureynaud écrit ses nouvelles au fil des années. Empreintes de nostalgie, elles racontent les détours et retours insolites de la vie ou bien leurs ultimes feux d’artifice, comme dans «Diorama», où M. Benjoin, artisan fabricant de figurines, revient vivre sur le tard dans un appartement hérité de sa mère, au sommet d’une tour aux portes de Paris, sur une place où trône bizarrement un manège abandonné. Lors de ses insomnies, il croit reconnaître dans les silhouettes traversant la place, des personnes qui ont compté autrefois.



Pas de frisson de peur dans ce fantastique-là mais des créatures animales inquiétantes traversent ses nouvelles, comme dans «Escargot, pie, furet», les nuits perturbées et étranges d’un petit professeur, habitant dans une chambre de bonne, après l’installation dans une chambre voisine d’un prestidigitateur de seconde zone et de son assistante, ou encore dans la très belle «Une route poudreuse», le séjour d’un conférencier qui se rend dans une petite ville, talonné dans les rues par deux lionnes superbes et menaçantes.



«Qu’on n’aille pas s’imaginer que j’écris pour être cru. Je m’en moque, rendu où je suis de ma vie.» (Les intermittences d’Icare). Et pourtant ces moments de magie nostalgique nous relient à la vie et au passage du temps.
Commenter  J’apprécie          60
Mathieu Chain

Un peu déçu par ce Chateaureynaud dont j'attendais plus eu égard à la collection, Motifs, connue pour ses publications de qualité.



Mathieu Chain est un écrivain célèbre dont la vie bascule lorsqu'il découvre dans sa bibliographie un livre, "Voyageurs sans repos", qu'il est certain de ne pas avoir écrit. Troublé, il va mené sa propre l'enquête...



Les prémisses sont alléchantes mais la réalisation peine parfois à maintenir l'intérêt du lecteur. Dommage car le dénouement et l'explication de la retraite de Mathieu Chain relève l'ensemble. Reste alors les qualités stylistiques propre à Georges-Olivier Chateaureynaud. Pas sûr néanmoins que cela suffise en dehors des lecteurs attachés à cet écrivain.



Pour découvrir cet auteur, je conseillerais plutôt l'excellent "L'Autre rive".

Commenter  J’apprécie          60
Les meilleures nouvelles 2018

Tout est dans le titre: un recueil savoureux qui mène le lecteur dans l'univers de chaque auteur. Le lien entre les récits est ténu mais tous les textes sont habités par une qualité d'écriture constante. Chose rare dans les recueils collectifs.
Commenter  J’apprécie          50
Contre la perte et l'oubli de tout

Belles réflexions sur un art personnel de lire et d’écrire le fantastique, ou même la littérature d’imaginaire dans son ensemble.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2018/11/20/note-de-lecture-contre-la-perte-et-loubli-de-tout-georges-olivier-chateaureynaud/
Lien : https://charybde2.wordpress...
Commenter  J’apprécie          51
Le congrès de fantomologie

Très insignifiant professeur de Lettres sortant tout juste d'une dépression, Odilon Frêle n'est pas peu fier lorsqu'il reçoit une invitation à participer au premier congrès international de Fantomologie. Pas peu fier, mais tout de même intrigué. A part une nouvelle de jeunesse, il n'a jamais rien écrit sur le sujet, jamais rien étudié... Qu'importe. Le voilà parti dans sa jolie voiture ancienne à destination de la Pénombrie, petit pays totalitaire dont les frontières, fermées depuis la dernière guerre mondiale, s'ouvrent enfin aux étrangers pour ce grand événement organisé par le dictateur local à des fins... qu'il reste encore à découvrir.

D'abord accueilli avec tous les égards, Odilon voit bientôt les choses assez mal tourner pour lui. C'est qu'en effet, il n'a guère sa place, à ce congrès. Il y a eu une erreur quelque part, qui d'invité le fait intrus et d'intrus évidemment suspect - et donc coupable ! - pour ces messieurs de la police politique pénombrienne dont le chef a fait ses classes, autrefois, du côté de la Schutzstaffel. Accusé d'appartenir aux services de renseignement français, confronté à un projet qui dépasse de très, très loin le simple débat scientifique, le pauvre petit professeur se retrouve embarqué dans une aventure qu'il n'aurait pas imaginé dans ses pires cauchemars mais qui aura au moins le mérite de le forcer à se sortir de sa petite personne...



Auteur que j'aime beaucoup pour ses univers poétiques, teintés de merveilleux et d'étrange, peuplés de personnages hors normes et toujours un peu paumés, Georges Olivier Chateaureynaud s'en vient flirter ici avec les genres souvent plus carrés de l'espionnage et de la science-fiction, auxquels il insuffle son style très particulier. Les questions abordées sont souvent profondes, l'horreur de plus en plus présente - celle d'un système politique qui condense le pire et vise à l'au-delà - mais sa surenchère, loin de tout effet sensationnaliste, joue plutôt d'effets symbolistes, pile à la frontière du tragiquement réel et de l'absurde. Tout ceci forme un petit roman original, sans doute pas le meilleur de l'auteur, un peu court pour tout ce qu'il évoque, mais intrigant de bout en bout et plein d'idées intéressantes.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
Commenter  J’apprécie          50
Le démon à la crécelle

Tout commence lorsqu'un démon de second ordre - Isacaron, version beaucoup plus crade, un peu moins sympathique mais tout aussi réjouissante que le Crowley de Gaiman/Pratchett - offre une crécelle magique à un gamin particulièrement peu gâté par le sort. Orphelin, laid, puceau, mal aimé, maladroit, pas très futé, mal élevé, pétrifié de mal être, éternel souffre-douleur et amoureux malheureux d'une cruche impitoyable, le pauvre Kevin pourrait désormais, d'un simple tour de poignet, soumettre le monde entier à son bon vouloir. N'est-ce pas là chose diablement tentante ?

Le formidable potentiel de nuisance que semble représenter un tel pouvoir aux mains d'un tel garçon n'est pas, toutefois, le seul but que poursuit Isacaron. Car Kevin a pour protecteur Charles-Honoré Milo, vieil érudit pasionné de sciences occultes, qui au cours de ses recherches a découvert l'existence d'un objet depuis longtemps dissimulé aux mortels et que les Enfers recherchent activement.

Car en réalité, tout a commencé quelques siècles plus tôt, lorsqu'un certain Agrippa de Coscas, soudard parpaillot de la pire engeance, a extirpé du sein d'une lumineuse créature ailée l'embryon de ce qu'il faut bien reconnaitre comme un ange. Au milieu de tout le Mal dont l'existence sur terre, des guerres de Religion aux facéties nazies, des massacres de la Terreur aux dessous malsains des comités d'entreprise, n'est plus à prouver, une preuve de l'existence de l'autre camp subsiste encore peut-être, quelque part.

Pour Milo, sa découverte est un but existentiel en soi. Pour les Enfers, ce serait plutôt question de stratégie. Et en tenailles là au milieu, bien inconscients de ce qui se joue, ce sont toujours les mêmes qui trinquent.



Avec des éléments que ne renieraient ni un Dan Brown (pour le pire), ni un Perez-Reverte (pour le meilleur), Georges-Olivier Châteaureynaud concocte une recette toute personnelle, mélange de réalisme et de magie, d'aventure et d'interrogations existentielles, d'amertume et d'humour, où se pose comme en reflet de la lutte terriblement inégale du Bien contre le Mal, la double tentation du sourire et du désespoir.

Le récit est un peu inégal, avec des parties historiques que j'aurais aimé plus développées, plus abouties, et surtout rattachées au noeud principal de l'intrigue de manière un peu plus travaillée. Ce n'est sans doute pas le meilleur roman de l'auteur, mais cela reste captivant, juste et souvent touchant, avec des thèmes et un style qui me sont chers.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
Commenter  J’apprécie          50
La faculté des songes

Ils sont trois. Trois hommes à qui les hasards du destin n'ont pas accordé le don de la vie - le minimum d'ardeur, l'énergie nécessaire pour être pleinement au monde et y faire un tant soit peu son chemin. Quentin, éternel renvoyé, ne connaît que les contraintes de la misère pour repousser la paresse inexorable qui le dévore et menace sans cesse de le faire tomber un peu plus bas. Manoir, fonctionnaire sans relief, aurait dû mourir enfant sous une bombe, avec sa mère et la demeure familiale. Survivant de corps plus que d'esprit, il erre de lubie en fragile obsession pour tenter de repousser les mauvais rêves qui chaque nuit cherchent à l'ensevelir. Hugo, bibliothécaire bardé de diplômes et écrivain raté, n'a jamais su trouver le souffle de dépasser l'échec de son premier livre et se noie peu à peu dans l'alcool, avec pour seuls compagnons deux chow-chow qu'il ne quitterait pour rien au monde.

Ces trois ratés qui ne vivent plus guère que de songes, une maison va les réunir - une grande maison abandonnée au coeur d'un terrain vague, un refuge à leur image contre la vie étrangère. Une dernière étape avant le dernier voyage.



S'il n'a ni l'ampleur ni la puissance imaginaire de l'Autre Rive, la Faculté des Songes est un très beau roman, qui dit avec une justesse terrible certain sentiment de vide et d'inertie irrémédiable. Qui le dit sans y opposer de faux espoirs, d'artificiel regain - désespérant, mais avec plus de mélancolie tranquille que de noirceur. Sans réel drame - car le drame, après tout, ne naît-il pas au contraire d'un débordement de vie ?

De caractères normalement très fades, l'auteur a fait des personnages très attachants malgré leur manque de substance, un peu comme des fantômes dont l'apparition serre le coeur, qu'on aimerait pouvoir retenir mais qu'on sait voués à disparaître.

C'est beau, et poignant - particulièrement pour moi, sans doute, car par certains aspects un peu trop familier. Plus je le lis, plus cet auteur me devient cher...



(Lu dans le cadre du challenge ABC)
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
Commenter  J’apprécie          50
Jeune vieillard assis sur une pierre en boi..

Avec la réputation de l'auteur en garantie, j'ai cédé au goût du jour, à un de ces titres fleuves avant-coureurs de récits mièvres et fantaisistes dans mon esprit méfiant. Rien de cela: ce recueil de nouvelles n'a rien du roman de gare ou de supermarché (comprenez bien : je ne méprise pas ceux-ci mais ils ne répondent pas à mes attentes d'explorateur qui en a vu d'autres) et le bandeau ne ment pas : voici de bonnes nouvelles !



S'il ne fallait lire celles-ci que pour l'écriture, je le ferais, tant il est trop rare aujourd'hui de rencontrer des auteurs francophones qui écrivent très bien, de manière soignée avec quelques allures désuètes qui témoignent d'une excellente maîtrise de la langue française. Ces écrivains qui n'hésitent pas à semer ici ou là un mot rare dont on n'hésite pas à chercher la signification, car l'auteur a établi d'emblée une autorité intellectuelle dont on n'a pas envie de se soustraire. Châteaureynaud a en outre la bonne idée de se documenter précisément sur les sujets qu'il exploite, comme la peinture sous verre (Yves Siffer, Marie Amalia fille de Suzy Bartolini), dans "Les Amants sous verre" ou les duels au sabre des étudiants du Burschenschaft dans la belle histoire "La Face perdue" qui rappellle les meilleurs contes de Poe.



La littérature fantastique est plus apte, selon Châteaureynaud, a saisir la réalité de l'être que les courants réalistes. Dans un entretien, il précise que «son» fantastique (il hésite à utiliser ce terme, porteur aujourd'hui d'autres genres de récits axés sur la peur) est plutôt de l'insolite, un décalage par rapport au réel, où "il s'agit toujours de recoller à la réalité et de parler d'elle" sans susciter la frayeur.



Les huit nouvelles, comme c'est l'usage chez lui, sont proposées de façon chronologique, écrites à Palaiseau de 2002 à 2011. Il n'y aurait a priori pas d'axe thématique, mais l'âge de l'écrivain né en 1947 le rattrape, comme en témoignent certaines pages placées sous le signe du vieillisement et des frustrations qui l'accompagnent, principalement dans le premier récit, le plus brillant selon moi, Les Amants sous verre. Si vous ne deviez en lire qu'un, lisez celui-là qui m'a transporté et ravi. Il avait été édité séparément en 2002 (Le Verger éditeur) et 2004 (Facilire - Encre bleue).



Consultant mes notes succinctes de lectures, je découvre deux titres de l'auteur : "Le Héros blessé au bras", apprécié, et "La faculté des songes", qui, avec un titre aussi prometteur, n'avait apparemment pas trouvé mon estime. Il faudrait que je le relise avec le même œil qui, satisfait, s'est complu dans ce dernier éventail du spécialiste français du genre.





Vous ferez davantage connaissance avec Georges-Olivier Châteaureynaud sur https://sites.google.com/site/eparvay/


Lien : http://www.christianwery.be/..
Commenter  J’apprécie          50
Le verger et autres nouvelles

Une vraie et bonne découverte.

J'aime beaucoup cette collection de Magnard pour collégiens, simple, facile à lire, avec des livres méconnus. Et là c'est un auteur inconnu (je ne sais toujours pas ce qu'il a écrit d'autre), avec quatre nouvelles originales qui ont constitué une véritable surprise.

La première est la meilleure: un enfant prisonnier d'un camp de concentration mais dans un verger où il vit, au milieu des détenus. Le fantastique s'invite dans l'horreur, la poésie est au milieu de l'innomable. Et il vit au milieu de ce camp, cet enfant, avec les pommes du verger et les soldats qui ne le voient pas. Les autres sont dans la boue, lui sur l'herbe et il regarde passer des groupes d'humains nus. La fin est métaphorique et prévisible, comme un symbole de la victoire du réalisme sur le fantastique.

Les deux nouvelles suivantes, Le Gouffre des années et La Belle charbonnière, m'ont moins marqué mais la dernière, Paradiso, raconte le voyage d'un homme sur une île mystérieuse, où le surréalisme a toute sa place. On nage en plein délire et l'ensemble donne du cachet à ces petites pépites très bien écritres.

Commenter  J’apprécie          50




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Georges-Olivier Châteaureynaud (412)Voir plus

Quiz Voir plus

Quiz - Claude Gueux

En quelle année a été publié " Claude Gueux " ?

1859
1903
1834

14 questions
1048 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}