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EAN : 9782911289224
283 pages
Berg International (05/11/1999)
4.09/5   11 notes
Résumé :
Les anciens "collabos" n'ont eu l'occasion de s'exprimer publiquement qu'à une date assez récente, au moment de la guerre d'Algérie. L'antigaullisme a donné à ces hérauts du fascisme français une nouvelle légitimité et une raison de renaître. Leurs discours ont alors pris la forme d'un procès en réhabilitation, leurs livres, celle d'un mémoire en défense politique. Que pensaient-ils véritablement, une fois la défaite du nazisme consommée, des raisons de la déroute d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Rebatet et Cousteau, condamnés à mort en 1945 pour collaboration avec l'ennemi en raison de leurs articles parus dans « Je suis partout » ont vu leur peine commuée, par grâce du président Vincent Auriol, en détention à perpétuité. D'abord détenus à Fresnes, fers aux pieds et dans des conditions dignes des bagnes de l'autre siècle, ils se retrouvent ensuite transférés à Clairvaux où leur statut s'améliore nettement en 1950, car les voilà responsables de la comptabilité et chargés de la gestion de la lingerie et de la bibliothèque de la prison, ce qui leur permet d'entamer ces dialogues remarquables par leur liberté de ton, mais aussi par leur cynisme et leur désespérance. Face à face, se retrouvent un Rebatet, pur homme de droite, formé par les Jésuites et détestant au plus haut point l'Église catholique et un Cousteau, frère du célèbre commandant écologiste de « la Calypso », homme de gauche, athée, fasciste assumé et ne se considérant vaincu que par la force des armes. À la fin de la guerre, le premier suivit Pétain, son gouvernement et Céline à Sigmaringen. le second s'enfuit avec Doriot et ses sbires à Neustadt. Deux lieux où ils furent capturés et ramenés en France.
« Dialogue de vaincus » est un ouvrage assez original traitant de toutes sortes de sujets autant philosophiques, politiques, historiques, théologiques ou autres… Les dialogues sont au nombre de vingt, chacun sur un thème particulier. Au premier abord, le lecteur trouvera une fort longue introduction de 43 pages signée d'un certain Robert Belot, dans laquelle tout est fouillé, analysé, disséqué, décortiqué, explicité à un point tel qu'il risque de ne plus avoir envie de lire la suite. Et il aurait tort, car il raterait un véritable festival d'ironie grinçante et de mauvaise foi mêlée de lucidité désabusée. Ainsi la presse n'est que conformisme et prosternation devant la pensée dominante, même « l'Observateur », dépendant des cocos et des prolos, même « Rivarol », inféodé aux cathos. Seul « Le Crapouillot » trouve un peu grâce à leurs yeux. L'esprit de résistance avant 44 ? Une vaste blague. « Les décombres » de Rebatet s'est vendu à 65 000 exemplaires, « Je suis partout » tirait chaque semaine à 300 000 exemplaires, « la poignée de traitres était quand même assez dense », notent-ils. Cousteau intégra ce journal grâce à l'historien Pierre Gaxotte. le premier article qu'il proposa fut pour défendre des Noirs injustement accusés du viol de femmes blanches aux USA. Quant à Rebatet, il y entra peu après grâce au coup de piston d'un Juif nommé Levinson. En réalité, on a affaire à deux anars, un de droite et un de gauche, tous deux farouchement anti-cléricaux, anti-nationalistes et européistes convaincus, pensant arriver à l'internationalisme en se plaçant sous la bannière du pire fascisme, du pire nazisme. « La démocratie est un fléau répugnant », dit Cousteau. Au fil des dialogues, un nombre impressionnant de personnages célèbres sont rhabillés pour l'hiver à commencer par « Dudule » (Hitler) qui a perdu, car il n'a même pas été fidèle à ses propres principes, en passant par Churchill, qui avoua lui-même avoir « tué le mauvais cochon » en faisant allusion à l'alliance avec Staline, sans oublier Roosevelt traité comme un boutiquier sans envergure qui abandonna la moitié de l'Europe en laissant un rideau de fer s'abattre sur elle. Seul Staline trouve grâce à leurs yeux car lui ne commit aucune erreur, ne prit jamais de demi-mesures et alla jusqu'au bout dans la liquidation de ses ennemis politiques. Un livre qui garde un certain intérêt surtout à titre de document historique et également pour quelques comparaisons affligeantes avec notre situation actuelle.
Lien : http://www.bernardviallet.fr
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Document historique de premier ordre, ces dialogues heurtent par l'intacte violence des propos de ces deux anciens collaborationnistes. Virulents, vitupérant sans cesse, ne goûtant ni les regrets ni les remords, ces deux anciennes plumes de "Je suis partout" étalent leur fiel autant que leur analyse et leur savoir.
Ainsi faut-il passer au-delà de l'idéologie qui y est contenue pour comprendre ce que ces prisonniers ont à nous dire. Et, au milieu de la fange, jaillissent des fulgurances, où leur pensée, néanmoins précise et claire, met d'accord, même le temps d'une virgule, le plus forcené de leurs opposants.
Un document historique, donc, puisque la parole est laissée à ceux qu'on avait muselés après qu'ils ont vociféré pendant quatre ans.
On ressort de cette lecture en demi-teinte : les échanges sont parfois de savants verbiages pas toujours si éclairants ni limpides, cependant que les captifs développent des points de vue et conceptions originaux.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
« Cousteau - (...) La pire engeance en prison ce sont les innocents. Car de deux choses l’une : ou bien ils sont vraiment innocents, et alors je me désintéresse de leur sort puisque ce ne sont pas des copains à nous, ou bien ils sont faussement innocents et c’est bien pire. Car ils sont entrés ainsi dans le jeu de l’ennemi, ils ont accepté l’échelle des valeurs de l’ennemi, et en en se proclamant innocents, ils admettent implicitement que les autres condamnations sont légitimes. La seule réaction honorable est de répudier ce mythe dégradant de l’innocence et de la culpabilité, et de n’accepter que des vainqueurs et des vaincus. Tout le reste n’est que fariboles et fumisteries.
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« Ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste. »
(Pascal)
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« On mènera toujours les peuples avec ces deux mots : ordre et liberté ; mais l’ordre vise au despotisme et la liberté à l’anarchie. Fatigués du despotisme, les hommes crient à la liberté ; froissés par l’anarchie, ils crient à l’ordre. »
(Rivarol)
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Vidéo de Lucien Rebatet
France Culture : Faut-il republier les textes antisémites du XXème siècle ? (2015). A l'occasion de la publication chez Robert Laffont, des œuvres de Lucien Rebatet, et de l'annonce d'une traduction de "Mein Kampf" chez Fayard, Caroline Broué reçoit Pascal Ory, professeur d’histoire contemporaine à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Florent Bayard, historien, chercheur au CNRS (Centre Marc Bloch, Berlin), spécialiste du négationnisme et de la Shoah.
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