Bien que pouvant tout à fait être lu indépendamment des autres livres de
Moussa Nabati, je conseille tout de même la lecture de
Guérir son enfant intérieur et
le bonheur d'être soi. Je trouve que ces derniers permettent en effet d'appréhender avec plus de facilité les concepts développés dans ce dernier ouvrage : « enfance blanche », « enfant intérieur », « enfant thérapeute », « DIP : Dépression Infantile Précoce », « énergie vitale », «maison-soi » par exemple.
Se Reconstruire n'est pas un guide de bonnes pratiques ni un livre de recettes magiques pour surmonter une souffrance, dépasser un traumatisme ou se relever d'une épreuve douloureuse.
Il s'agit davantage d'une invitation à la réflexion personnelle et à l'introspection. L'auteur nous invite à poser un regard bienveillant sur les différents évènements qui ont jalonnés notre vie et qui nous ont construits, qui nous ont nourris, animés, parfois blessés, souvent fait grandir.
L'auteur adopte toutefois certaines postures qui m'ont fortement déplu. La perception de la femme, principalement, que je trouve extrêmement dépréciative, caricaturale et réduite à un simple rôle maternel et conjugal. Cette représentation, éculée me semble t-il, ne rentre pas en résonance avec les différentes évolutions sociales majeures que l'on a connu ces dernières décennies.
1. Les hommes et les femmes étant selon lui interdépendants et s'inscrivant dans la « dialectique féconde des contraires » (page 114), la femme non seulement se réaliserait et s'accomplirait dans sa féminité à travers l'amour qu'elle porte à son partenaire. Mais elle se développerait et s'épanouirait également à travers la maternité : «Elle souhaite aussi, dans la plupart des cas, s'accomplir en tant que mère, engendrer et materner, le fameux instinct maternel, certes contesté par certaines féministes modernes mais demeurant néanmoins une incontestable réalité biologique » (p. 119) (ah bon ?!). Il me semble au contraire que nous soyons en train de dépasser ce consensus normatif maintes fois rabâché par le passé.
2. Même en ayant beaucoup d'autodérision et un certain sens du second degré, certaines phrases de l'auteur m'ont très fortement exaspérée : « L'homme permet à son alter ego de devenir femme et mère, en la désirant, et en la fécondant » (p. 115). Passons sur la réduction archaïque et pas hyper valorisante de la femme en tant qu'objet de désir et en tant que matrice évoquée dans cette phrase (nous pourrions en débattre pendant des heures !!) et concentrons nous sur ce mot détestable « fécondant ». Pitié, Messieurs, en 2023, il serait grand temps que vous reconsidériez l'hypothèse selon laquelle les femmes ne seraient que de pauvres petits réceptacles passifs attendant patiemment et désespérément la semence procréatrice de l'homme alpha pour se révéler à elles-mêmes 🤣!!!
3.
Moussa Nabati évoque régulièrement les souffrances individuelles (insécurité, addictions, angoisses, désamour de soi, manque, vide, peur de l'abandon, faille narcissique, …) comme résultantes d'un amour maternel défaillant, inexistant ou incomplet : un « paradis maternel perdu » p. 74, « une indisponibilité maternelle » p. 123. Résumons les choses ainsi : « La carence matricielle consécutive à l'indisponibilité psychologique de la mère crée dans le psychisme enfantin une dépression infantile précoce » (p. 113). Oups, la messe est dite !
Au-delà de ça, notons que
Moussa Nabati n'évoque la sexualité, les relations sentimentales et la parentalité qu'à travers le prisme de l'hétérosexualité. Mouais… Voilà qui réduit considérablement le nombre de lecteurs pouvant potentiellement se sentir concernés par ses propos. Dommage !
Vous l'aurez compris : un ouvrage qui ne m'a hélas pas convaincue. J'ai été gênée par son côté clivant, culpabilisant, manichéen, binaire, suranné. Il n'entre, je pense, pas en cohérence avec la réalité sociale que l'on connait et que l'on vit aujourd'hui. Et je le regrette sincèrement parce que cela m'a très probablement fait passer à côté de messages plus positifs véhiculés dans le livre.