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EAN : 9782358721745
208 pages
La Fabrique éditions (15/02/2019)
4.36/5   148 notes
Résumé :
Pourquoi le terme « féministe » est-il librement approprié à la fois par l’extrême droite, la gauche, et le capitalisme ? Dans un contexte, où les notions de féminisme et d’égalité sont vidées de leur sens hier radical, que peut signifier être féministe aujourd’hui ? Quels sont les combats à mener ? Comment mettre au cœur des luttes des femmes l’antiracisme, l’anticapitalisme et l’anti-impérialisme ?

Françoise Vergès s’attache d’abord à interroger les... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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C'est incroyable à quel point les structures dans lesquelles nous sommes pris, nous, moi, des individus, hommes, et même femmes, nous influencent et nous façonnent. Nous déculpabilise. Nous font répéter sans nous en rendre compte les mêmes erreurs.
Non, écoutons réellement les plus maltraités, écoutons-les, c'est la seul façon de vraiment évoluer, changer. Parce qu'un féminisme seul n'a pas de sens, parce que l'antiracisme seul n'a pas de sens ou de poids... L'atomisation des différents combats les déforce et renforce la structure capitalistique dominante qui arrange toujours les mêmes. Ou, qui s'il ouvre la porte à certains groupes ce n'est que pour mieux en profiter et c'est systématiquement au détriment d'un autre groupe... Les femmes banches ont effectivement vu leur situation un peu s'améliorer au fil du temps, mais pas les racisées, qui sont à nouveau exploitées pour permettre à quelques-unes, devenues petit à petit privilégiées, d'être "bien". D'être au propre. Mais la saleté est structurelle, le capitalisme est une organisation de production de déchets et de saletés. Et qui parvient à se rendre illusoirement propre en surexploitant toujours les mêmes, et en tentant de se donner bonne conscience.
Le même discours peut-être tenu envers les affreuses tentatives de greenwashing concernant l'environnement, etc.
Le problème est multimodal, multidimensionnel et il faut, il faut, il faut écouter ceux qui en souffrent le plus. C'est d'eux qui peut venir une autre vision et forme possible d'existence au monde.
Ce livre fait partie de ces livres qui sont bien trop confidentiels, dont on ne parle quasi pas. Même si on croit donner la parole aux "minorités", c'est toujours dans nos cadres, avec nos codes de privilégiés destructeurs pourrissant, et maintenant il nous faut juste nous taire et écouter.
Merci, Madame Vergès, pardon pour toutes les offenses et les souffrances passées et présentes, et aidez-nous, oui c'est encore à vous que nous demandons de l'aide (c'est fou), aidez-nous à devenir meilleurs.
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Le minority politics, qui connaît une certain succès électoral depuis quelques années, consiste à rechercher le suffrage des minorités (femmes, « racisés », minorités sexuelles…) en leur faisant valoir (à tort ou à raison) qu'ils sont opprimés ou exploités. Évidemment, puisqu'à ce jeu le gagnant est celui qui se dit le plus opprimé, ça se transforme assez rapidement en concours de pleurniche entre minorités. L'exemple le plus flagrant en est dans les pays anglo-saxons la lutte idéologique extrêmement violente entre les féministes « TERF » et les transsexuels, illustrée récemment par les mésaventures de J.K. Rowling ou Martina Navratilova sur les réseaux sociaux. Décidée à ne pas être en reste, Françoise Vergès s'attaque ici au « féminisme blanc » ou "féminisme civilisationnel", qu'elle oppose à un « féminisme décolonial » qui serait représenté et porté exclusivement par les femmes noires. Au combat raciste et dévoyé des féministes civilisationnelles contre le voile islamique ou l'excision, s'opposerait le combat vertueux des féministes décoloniales contre le racisme et le Capitalisme. le féminisme blanc, allié objectif ou idiot utile du mondialisme libéral, est en définitive un véritable "fémo-fascisme" (page 80), qui exploite les femmes noires comme femmes de ménage ou nounous pour que les femmes blanches puissent occuper des emplois bien payés.

Formellement ce livre est un crédo, ou une incantation : il livre, sans vraiment la justifier ou l'argumenter, une doctrine dont les principaux dogmes sont, en vrac, que l'État est structurellement raciste (page 28), que la banane est "négrophobe" (page 36) et que les féministes blanches sont narcissistes (page 63). Pour preuve, elles pleurent quand on les traite de Blanches. Néanmoins ce livre a trois intérêts à mon avis : il énonce les principes d'un féminisme « décolonial » (comprendre, « noir ») sans démonstration mais avec une certaine cohérence, et affirme que les féministes blanches doivent en être exclues ; il étudie, pour le discréditer, le féminisme européen historique et montre que, trop occupé à réclamer le bikini ou la minijupe, il ne se souciait pas des Noirs ou de l'esclavage et s'accommodait très bien de la colonisation ; et enfin il illustre avec une violence ahurissante les rivalités suscitées entre les minorités par le minority politics.

Le style est un peu alambiqué. J'ai dû par exemple m'y reprendre à trois fois pour comprendre page 24 la phrase "Le système contre lequel nous luttons a renvoyé à l'inexistence des savoirs scientifiques, des esthétiques et des catégories entières d'êtres humains." Gné?
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J'ai lu avec beaucoup d'intérêt cet essai passionnant, manifeste à agir pour un féminisme plus inclusif et intersectionnel. Il invite à la réflexion, et met à nu certains mécanismes qui sous couvert de « féminisme », sont de nouvelles formes d'exploitation et de dénigrement de certaines populations sur d'autres.
Françoise Vergès, politologue et enseignante-chercheuse à l'Université de Sussex, a grandi à La Réunion, entourée de parents militants qui ont marqué et façonné sa vie et ses combats. Femme engagée, elle se bat pour la reconnaissance des droits des femmes, et se présente comme militante féministe décoloniale. Ses travaux portent sur les questions d'esclavage colonial, de créolisation, et de capitalisme racial.
Nous voici invité.e.s à réfléchir sur l'universalité supposée du féminisme. Dans cet essai percutant, Françoise Vergès invite à décoloniser le féminisme, à l'observer sous un angle plus large que l'inégalité de genre. Car si de nombreuses luttes féministes ont existé et coexisté depuis de nombreuses décennies, certaines semblent éclipsées, invisibilisées, notamment les luttes des femmes du « Sud », des Noires américaines, et des femmes résistantes et marronnes.
Le féminisme décolonial est un féminisme qui questionne aussi bien les inégalités de genre, mais aussi de milieu social, d'appartenance ethnique et religieuse, et dénonce une structuration sociale et politique, en Europe notamment, néocolonialiste. Pour elle le féminisme devrait « renouer avec une analyse du capitalisme néolibéral qui dévaste le monde », et qui « ne peut pas rester indifférent à l'impérialisme, à la situation des femmes précaires ».
Françoise Vergès fait la « critique d'un féminisme [qu'elle] appelle civilisationnel parce qu'il a entrepris la mission d'imposer au nom d'une idéologie des droits des femmes une pensée unique qui contribue à la perpétuation d'une domination de classe, de genre et de race » . Elle s'inquiète enfin d'une récupération du féminisme par des mouvances xénophobes et réactionnaires.
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Le féminisme décolonial est un livre nécessaire qui m'a ouvert les yeux à plus d'un titre. Sur la question du racisme structurel en premier lieu : grand lecteur de livres dénonçant le patriarcat ou les dérives du capitalisme, j'ai réalisé en lisant Françoise Verges combien ma paresse intellectuelle sur ce sujets avait été grande. L'autrice commence d'ailleurs par faire voler en éclat le terme de décolonisation, qui sous-tend une période qui aurait conclu la colonisation, alors même que les structures ayant permis cette colonisation ont perduré.

Sur l'influence de ce racisme structurel sur le féminisme, en second lieu. Propos fascinant, critique radicale de ce "féminisme blanc bourgeois" qui, bien heureux de pourvoir compter sur des femmes racisées pour assurer les tâches les plus basses de la sociétés, prétend éduquer les femmes du sud, voire les libérer comme d'autres évangélisaient quelques décennies plus tôt. En gommant par la même opération l'existences de mouvements de libération de la femme dans les pays du sud, pour ne laisser émerger que quelques figures qui semblent seules et déconnectées alors qu'elles ne l'étaient justement pas Rosa Parks n'était pas une veille femme douce et têtue qui a décidé un jour de ne pas se lever du bus : c'était une militante pour le droit des femmes depuis des années, soutenue par des milliers de femmes engagées, organisées pour leur libération (y compris au sein des mouvements de lutte contre l'apartheid)

L'exemple du traitement du voile par les médias comme par ces défenseurs d'un féminisme civilisationnel (défenseurs que FV se défend peut être un peu trop d'identifier dans son essai) est détonnant : comment expliquer une telle focalisation sur un épi-phénomène quand des femmes racisées exercent aujourd'hui la plupart des métiers les moins valorisées de notre société, autrement que par le fait que cette situation arrange ceux qui ne sont pas tout au bas de l'échelle sociale ? A ce titre les exemples citées par Françoise Verges sont parlants, du secteur de la santé à celui du nettoyage.

Seule petite critique à apporter à ce livre, un vocabulaire parfois un poil trop érudit qui ne me semblait pas toujours nécessaire (genre fémonationalisme)

Pour résumer en deux tirets :
- Avant je n'aimais pas Elisabeth Badinter et ses pseudo-discours anti-voile. Maintenant je comprends pourquoi.
- "Si vous êtes venus pour m'aider, alors vous perdez votre temps. Si vous êtes venus parce votre libération est liée à la mienne, alors travaillons ensemble" Lilla Watson
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Je trouve que parler d'un essai est toujours une chose ardue car, même en étant court (une centaine de pages, ici), j'apprends des choses, je me forge une réflexion, et en faire un retour n'est pas évident, déjà parce que je ne sais pas par quoi commencer, ensuite parce que je reste à assimiler les informations pendant un certain temps.
Bon, c'est quoi, le féminisme décolonial ? Vous l'avez peut-être compris, je ne vais pas pouvoir vous faire une définition précise. En revanche, je peux vous dire qu'il va à l'encontre d'un féminisme blanc bourgeois, d'un féminisme dit civilisationnel. Je vois que j'en ai déjà perdu ! En gros, le féminisme blanc bourgeois ou civilisationnel, c'est un féminisme dans lequel on trouve des femmes qui prétendent mieux savoir ce qui est bon pour les autres, par exemple avec le port du voile, et leur imposent donc leur vision occidentale de leur féminisme. Par ailleurs, elles n'hésitent pas à faire le parallèle entre la situation des esclaves et celle des femmes (cf. L'hymne des femmes – j'y pense car on en a récemment parlé dans l'actu avec la Coupe du Monde de foot) alors que c'est différent (et quid des femmes esclaves? Elles ne sont pas esclaves parce que femmes, tout comme elles ne sont pas femmes parce qu'esclaves ; ce sont deux choses différentes bien qu'elles puissent être associées l'une à l'autre).
Je suis toujours en train de m'imprégner de cet essai de Françoise Vergès mais, quoiqu'il en soit, je l'ai trouvé super intéressant et il m'a vraiment permis de me questionner, de me remettre en question, de remettre en question la société, certains féminismes (ah, oui, pour celles et ceux qui suivent pas, il n'y a pas qu'un seul féminisme, il y en a plein!), etc. le propos est cohérent, bien écrit, il y a des notes très intéressantes (et fournies) et c'est donc facile à comprendre. Eh oui, si j'ai du mal à vous en parler, ce n'ai pas parce que je n'ai rien compris au texte, c'est parce que ça remet des choses en questions et aussi parce que, si j'ai l'habitude de parler de romans, je n'ai pas pour autant l'habitude de formuler des idées, de les synthétiser.
Je vous conseille vivement Un féminisme décolonial : il se lit bien, il est intéressant, rapide à lire (long à digérer mais ça fait du bien) et il permet d'évoluer dans nos réflexions. En bref, il est top.
Lien : https://malecturotheque.word..
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
On le sait, les femmes blanches n’aiment pas qu’on leur dise qu’elles sont blanches. Être blanc a été construit comme étant si ordinaire, si dénué de caractéristiques, si normal, si dépourvu de sens que, comme le signale Gloria Wekker dans White Innocence. Paradoxes of Colonialism and Race, il est pratiquement impossible de faire reconnaître à une Blanche qu’elle est blanche. Vous le lui dites, et elle est bouleversée, agressive, horrifiée, pratiquement en larmes. Elle trouve votre remarque « raciste ». Pour Fatima El Tayeb, dire que la pensée européenne moderne a donné naissance à la race représente une violation insupportable de ce qui est cher aux Européen•ne•s, l’idée d’un continent « color-blind », dépourvu de l’idéologie dévastatrice qu’il a exporté à travers le monde entier.
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Une féministe [..] se pose la question de ce qu'elle ne voit pas, elle cherche à déconstruire l'étau de l'éducation scolaire qui lui a appris à ne plus voir, ne plus sentir, à étouffer ses sens, à ne plus lire, à être divisée à l'intérieur d'elle-même et à être séparée du monde. Elle doit réapprendre à entendre, voir, sentir pour pouvoir penser. Elle sait que la lutte est collective, elle sait que la détermination des ennemi.e.s à abattre les luttes de libération ne doit pas être sous-estimée, qu'ils utiliseront toutes les armes à leur disposition, la censure, la diffamation, la menace, l'emprisonnement, le meurtre. Elle sait aussi que la lutte est porteuse de difficultés, de tensions, de frustrations mais également de joie et de gaîté, de découvertes et d'élargissement du monde.
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J’ai aussi appris très tôt que si l’État veut écraser un mouvement, il a recours à tous les moyens, à toutes les ressources qui sont à sa disposition d’une part pour réprimer, d’autre part pour diviser les opprimé•e•s. D’une main il frappe, de l’autre il cherche à assimiler. La peur est une de ses armes favorites pour produire confor- misme et consentement. J’ai rapidement compris le prix à payer pour se permettre d’échapper à l’in- jonction : « Ne te fais pas remarquer, ne proteste pas trop, et tu n’auras pas d’ennui. »
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L'écriture du passé et de l'histoire des femmes racisées n'a pas eu la même trajectoire que l'écriture féministe européenne parce qu'il ne s'agissait pas de la même démarche. Pour les racisées, il ne fallait pas combler une absence mais trouver les mots qui redonneraient vie à ce qui avait été condamné à l'inexistence, des mondes qui avaient été jetés hors humanité.
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Pourquoi se dire féministe, pourquoi défendre le féminisme, quand ces termes sont tellement galvaudés que même l’extrême droite peut se les approprier ? Que faire quand, alors qu’il y a dix ans les mots « féministe » et « féminisme » portaient encore un potentiel radical et étaient jetés comme des insultes, ils font désormais partie de l’arsenal de la droite néolibérale modernisatrice ?
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Videos de Françoise Vergès (12) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Françoise Vergès
Dans cet épisode d'Effractions : le podcast, la politologue militante feministe « décoloniale », Françoise Vergès évoque les thématiques abordées dans Portrait huaco, de Gabriela Wiener. Dans ce récit, la narratrice se découvre un ancêtre huaquero, c'est-à-dire pilleur d'objets péruviens. Elle enquête sur ses origines. Lecture : Caroline Girard Réalisation : Michel Bourzeix et Fabienne Charraire Musique : Thomas Boulard Extrait lu : Portrait huaco, Gabriela Wiener, Métailié (2023) Ce podcast a été enregistré dans les studios du Centre Pompidou.
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