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EAN : 978B08NTRT5BM
414 pages
Noir sur blanc (14/01/2021)
3.62/5   4 notes
Résumé :
Après avoir bourlingué dans les festivals de théâtre d’Europe avec sa femme junkie et leurs deux enfants, Mour décide de rentrer en Bohême. Nous sommes en 2015 et le rejet des étrangers grandit partout. Après de nombreuses péripéties, dont un détour par la guerre du Donbass où Mour récupère Gérard Depardieu, la famille s’installe sur les rives de la Sázava, au sud-est de Prague.

Mour est alors accusé d’avoir assassiné son beau-père. Il échappe à la ju... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
"Il n'y a pas de ciel, ni d'enfer, jamais, nulle part, je te le promets. Et elle reprend sa rengaine. La vie est belle ! triste et belle ! C'est tout ce que je sais."

Dans la famille "Vive les embrouilles" je demande le père : Mour. Comédien amateur (raté ?) aspirant écrivain formé en HP grâce à l'art-thérapie, c'est un bon gars malgré un lourd penchant pour la bouteille, un certain laxisme dans l'éducation de ses deux rejetons et quelques manquements à l'égard de madame que nous lui pardonnerons car la vie n'a pas été tendre avec lui.

Dans la famille "Vive les embrouilles et la débrouille" je demande la mère : Sonia. Son avenir est à l'image de son passé : pas vraiment radieux, si jeune et déjà marquée par les excès, elle devance largement monsieur en mélangeant alcool et drogues dures. Suite à un accident de scène elle se retrouve salement amochée : un oeil crevé et une patte à la traîne qui la laisseront hagarde et en vrac à mi-chemin de ce récit.

Dans la famille "Vive les embrouilles et la débrouille, est-ce que tu crois que Dieu existe ? Car si Dieu existe il doit protéger tous les enfants sans exception" je demande les deux fistons (dont nous ne saurons pas les petits noms). L'aîné : ado mutique, semble porter toute la misère du monde sur ses frêles épaules. Il faut reconnaître que sa venue au monde n'a pas été des plus simples puisqu'il est né à la sauvette sous un pont d'une route d'Europe, de son jumeau nous ne saurons rien même si certains sous-entendus laissent supposer qu'il a été placé dans une maison spécialisée. Quant au petit dernier qui est encore dans les langes, on va espérer mieux pour lui, même si abruti de somnifères il ne perçoit pour l'instant pas grand chose du monde qui l'entoure.

Dans la famille "Vive les embrouilles et la débrouille, est-ce que tu crois que Dieu existe ? Il a quand même permis que tous les hommes aillent au bordel" je demande la tante : Monika. Ah cette Monika elle est baignée de lumière et ne laisse pas les hommes indifférents, pour se sortir de la misère la belle a fait ses classes à Amsterdam derrière une vitrine et depuis elle gère un bordel (U Paručky) à Městečko.

Voilà pour les présentations de la petite famille originaire de Tchéquie avec laquelle nous allons vivre quelques péripéties pour le moins rocambolesques. Nous sommes en 2015 et nous sillonnons dans un premier temps les routes d'Europe à bord du van de Mour avec madame et les enfants au gré des festivals de théâtre dans l'espoir de quelques représentations dignes de leur talent. Destination Bristol en Angleterre durant le festival consacré à l'oeuvre de Shakespeare puis nous rallions la France et l'Espagne quand soudainement Mour et Sonia décident que le temps est venu de rentrer en Bohême pour se refaire une santé (madame en a grandement besoin et les représentations se font rares) mais hors de question pour la petite famille de rentrer sans avoir fait un arrêt au préalable dans le Donbass en guerre pour y récupérer un Gérard Depardieu sorti de nulle part mais plus inspiré que jamais et surtout chargé comme il se doit en caisses de Beaujolais car finalement rien de mieux qu'un barbecue improvisé dans la campagne pour détendre l'atmosphère. Mais les choses ne vont pas se passer comme prévues : aussitôt arrivé dans le village de Poříčí nad Sázavou dans la maison du paternel de Sonia, le pauvre Mour -pour des raisons que je ne dévoilerai pas, la quatrième de couverture s'en charge très bien- doit prendre la fuite avec les deux enfants et laisser Sonia sur le carreau à l'hosto, avec un seul but : celui de rejoindre coûte que coûte le bordel de la tante Monika à Městečko

C'est donc en auto, en moto, en pétrolette, en bateau, en radeau, à pied à travers la campagne et dans les marais de la Sázava que nous faisons la connaissance d'une ribambelle de personnages, des marginaux, des éclopés de la vie avec lesquels nous taillons la route et c'est ainsi que de cabanes en campements de fortune nous rencontrons un candidat au suicide : Broněk ; un pêcheur : Šupina dit "tonton Šupina" ; une sirène : la belle Světlana qui elle aussi se rend au bordel de Monika pour y célébrer ses noces avec Kája ; un maître d'école (qui un temps fut celui de Mour) : Lojda dit "le Capitaine" et autant de personnages atypiques et attachants qui nous offrent un récit palpitant et sans temps mort agrémenté de descriptions poétiques de toute beauté qui viennent contrebalancer avec le langage cru et décomplexé de Mour et de Sonia qui faute de pouvoir monter sur les planches nous jouent une véritable comédie pleine d'humour noir qui n'est autre que celle de leur vie. On sourit, beaucoup, la balade bucolique de Depardieu dans la campagne est hilarante ; on pleure aussi, le portrait de la mère de Mour, vieille bique alcoolique pleine d'amertume est édifiant mais pour autant ce roman n'est absolument pas triste bien au contraire et même s'il est vrai que la misère touche l'ensemble des personnages c'est l'entraide et la générosité qui priment car sur les berges de la Sázava on aide son prochain sans poser de questions et si jugement il y a, on s'en remet à Dieu ou alors on prie la Sainte-Madone de Poříčí, la vierge des espérances et puis surtout on n'oublie pas de trinquer à l'amitié, aux retrouvailles car c'est l'alcool qui réchauffe les coeurs et apaise les rancoeurs. Et si de personne sensible il est question, pour ma part je n'en vois qu'une seule et c'est le personnage qui m'a d'emblée touchée : c'est le fils aîné qui fait presque office d'extra-terrestre dans ce récit où tout le monde braille, a toujours quelque chose à dire et à revendiquer. Silencieux de la première à la dernière page, il jette un regard ébahi sur le monde qui l'entoure, un regard grave, bien trop grave pour un enfant de son âge.

Un roman fort qui ne peut laisser indifférent et qui soulève des thèmes tels que : la survie, l'exclusion et la misère sociale, l'insécurité économique et culturelle, les dérives du populisme. Un roman dans lequel chacun est conscient de sa propre misère, les pleurs et les lamentations laissent toutefois place aux rires et à la joie car rire c'est vivre malgré tout sans pour autant oublier les drames qui se cachent derrière les masques comme les évènements de 1968, la répression du Printemps de Prague, l'invasion soviétique, qui sont ancrés dans les mémoires à l'image de ce tank qui orne fièrement la couverture et nous promet un final explosif !

Je remercie mon ami Guy (Glaneurdelivres) grâce à qui j'ai découvert la très belle plume de Jáchym Topol et je vous invite à lire sa critique.


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« Une personne sensible », c'est l'histoire d'une petite famille tchèque qui voyage à bord d'une fourgonnette. Ils sont comédiens de théâtre, et ont décidé de participer à différents festivals en parcourant l'Europe de l'Ouest, puis les campagnes de l'Est.
Mais soit les festivals sont annulés, soit ils se font refouler… On est en 2015 et le rejet des étrangers grandit partout. le père, c'est Mour et la mère, Sonia. Elle est enceinte et mettra au monde un petit garçon, dans la nature sous un pont avec l'aide de gens du voyage… Autant vous dire tout de suite que c'est rock ‘n'roll et que leur voyage est rempli d'aventures, de folies, et de conflits.

Alors êtes-vous prêts à embarquer dans un road trip effréné avec cette famille ravagée, sans foi ni loi, éprise de liberté ?
Je l'espère, car alors vous ferez en leur compagnie des rencontres improbables, avec entre autres : un gorille violeur, Iggy Pop, Gérard Depardieu… Ne cherchez pas le comment du pourquoi ! C'est sauvage !
Ce roman est très contemporain, à la fois moderne et hors du temps. Picaresque !
ON PEUT DIRE QUE C'EST DU EMIR KUSTURICA EN VERSION TCHEQUE !

Au volant de leur fourgonnette, les discussions vont bon train entre Mour et Sonia, qui se chamaillent souvent ! Sur un ton direct et avec un langage populaire, ils évoquent dans un sacré mélange, le Bataclan à Paris, Charles Baudelaire, Victor Hugo, William Shakespeare, l'époque des communistes et la police politique tchèques, la Révolution de Velours, la séparation de la Tchécoslovaquie en Tchéquie et Slovaquie…

Ils vont faire un détour par le Donbass en guerre (région séparatiste à l'est de l'Ukraine), où ils vont récupérer Gérard Depardieu et son stock de beaujolais, et ils décident de rentrer chez eux, en Bohème…
Mais Mour va être accusé d'avoir assassiné son beau-père et il va alors s'embarquer dans une course effrénée par monts et par vaux… A pied, en voiture, en moto, en bateau… Il lui faut à tout prix sauver sa peau !
Les lieux sont glauques, à l'abandon, l'atmosphère est lourde, la menace est omniprésente.
Le rythme est haletant, les phrases sont courtes.

Mour va devoir affronter de multiples dangers. Dans sa fuite, il va rencontrer des gens peu recommandables et menaçants… des mafieux, de petits délinquants et de grands voyous, des policiers corrompus, des prêteurs sur gages et un tas de personnages qui vivent en marge de la société, toute une population encanaillée… des loosers noyés dans l'alcool, des jeunes avides de la vie et du bonheur, des prostituées, des vieillards attirés par la mort…
Mais ce n'est pas le pessimisme qui se dégage de la condition des personnages de ce roman !
Leurs sorts sont bien souvent tragiques, mais ils échappent en général au désespoir et à la solitude.
Cette impression est due à la verve satirique et à l'humour corrosif de Jáchym Topol.
Il a l'art et la manière de mélanger le rire aux larmes, et le tragique au comique !

Ayant lu précédemment son roman « Missions nocturnes », je me rends compte des éléments récurrents dans les récits de Topol, comme la fuite en avant, les dangers, les épreuves cruelles, les lieux sombres et mystérieux, les souvenirs, la nostalgie. de nombreux personnages interviennent à maintes reprises dans des situations inattendues, sans issue, dont ils parviennent pourtant malgré tout à s'échapper.

L'imagination de Topol est sans limite, et il s'inspire aussi beaucoup de la réalité et de la vie politique. Il évoque par exemple les tendances racistes et les conséquences de la crise migratoire. Parmi les personnages du livre, outre le comédien Depardieu, on trouve le président actuel de la Tchéquie, Miloš Zeman, et son ami Vladimir Poutine.
Jáchym Topol avoue craindre profondément une orientation plus à l'Est de son pays.
Il redoute que les Tchèques redeviennent des vassaux de l'empire russe et ne veut pas que des situations semblables à celles qui se sont produites en Tchécoslovaquie en 1948 et 1968, se répètent dans sa vie. Pour lui, c'est un choc que les Etats d'Europe centrale soient aujourd'hui un motif d'accablement à cause de leur populisme et de leur tentative de trouver des dirigeants forts.

Dans « Une personne sensible », j'ai remarqué davantage de solidarité et d'entraide dans les relations entre les personnages et un sentiment d'héroïsme. Et s'ils ne sont pas croyants, les personnages se raccrochent à des croyances, ou à la Sainte Vierge ou à Dieu… « Il est resté sous forme d'amour avec la puissance d'une supernova de milliards d'orgasmes multiples ! Mais c'est un amour que tu ne peux approcher que quand tu es obligé. »

Pour illustrer son rapport aux personnages de son livre, Jáchym Topol affirme : « L'homme est sensible. Quand tu fais une entaille dans sa peau, quelque chose commence à gicler de lui. J'ai cherché à saisir ses sensations quand on lui fait ça et quand cet homme arrive pourtant encore à rire, à se bidonner. »
Raconter les aventures tragi-comiques de cette famille de saltimbanques est pour Topol un moyen d'exprimer une vision violente du monde dans lequel nous vivons.

Le voyage culminera dans un grand finale qui va réunir une noce, un bordel, la police tchèque et un tank russe. Bienvenue dans le Far East !

Le style riche et coloré est probablement l'atout principal de cette tragi-comédie violente qu'est ce roman de Jáchym Topol. C'est un mélange très expressif d'un langage poétique, avec toute une palette de mots et de locutions argotiques, qui donne au récit un caractère très spécial et qui le rapproche des célèbres effusions verbales de Bohumil Hrabal et de Vlastimil Třešňák.
Et j'ai une pensée pour la traductrice, Marianne Canavaggio, qui a dû avoir du fil à retordre, et qui a bien du mérite !

Jáchym Topol est le représentant de l'underground tchèque de l'après-68.
« Une personne sensible » a reçu le Prix national tchèque de la littérature en 2017.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Le vieillard remplit les gobelets à ras bord et fouille dans le divan. Il attrape une pipe, y enfourne quelques miettes terreuses et observe les yeux écarquillés du père, visiblement réjoui de ce qui se prépare.
Écoute un peu, Mour, tu as compris que c'est le diable qui deale l'alcool et la drogue ?
Ça m'a déjà traversé l'esprit.
J'en ai vu, des jeunes types, brillants, guillerets, les bras faits pour enlacer les femmes, se métamorphoser en loques larmoyantes. C'est la drogue.
Mais enfin...
Mais je suis en train d'arrêter, avec l'aide de Dieu, dit le vieux dans une quinte de toux, il referme les lèvres sur la pipe allumée et aspire la fumée tout en haletant, jusqu'à ce que sa toux se transforme en rire un peu graillonnant. Et il se lève, la couverture rouge de chef lui tombe des épaules, il tend les bras et les balance, ses mains interminables sont tachées de petites croûtes noires sèches, il râle.
Mour, ça t'est déjà arrivé qu'après avoir fait l'amour tu te retrouves dans la lumière ? Une lumière qui t'entourait, même dans les rues grises ou dans la solitude des bois et de ses souches pourries et vermoulues ? Que le monde ait embelli et que les couleurs soient plus vives et claires ?
Oh là, c'est des bobards de pédé, tout ça !
Moi, ça m'a toujours fait ça avec cette fille.
Ah oui ? Sérieux ?
Ouais, j'ai vraiment vécu la plénitude du contact humain qu'est l'amour.
Mais enfin, maître, tu arrêtes pas de parler de baise et de cul.
Mais j'ai compris qu'il y avait un amour encore plus grand ! s'écrie le vieillard.
Tout ça, c'est une réaction physiologique, la sérotonine, les ocytocines et tout ça. Et il y a aussi le cycle menstruel qui joue. On a vu ça en sciences au bahut !
Et l'homme dit à Dieu, tu m'as donné une femme pour qu'elle soit à mes côtés. Mais elle a pris la pomme de l'arbre. Et c'est comme ça que toute cette gigue a démarré, la foire, le gros pépin ! dit Lojda en se penchant très lentement jusqu'à se retrouver assis et se caler dans les coussins.
N'empêche que tu vois encore la lumière avec cette femme, sourit le père.
C'est sympa, cette petite discussion, pas vrai, Mour ! Tu sais quoi ? Je vais te resservir. Eh ouais, toi aussi, tu seras un petit vieux. Y a rien à faire !
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Eh, regarde, Gérard !
Le moinillon, la soutane retroussée, se soulage dans la clairière, il enfouit le tout et s'élance. L'acteur maintient facilement son avance. Il bondit tout nu dans les hautes herbes, s'ébroue comme un jeune taureau détaché ou même un étalon rendu fou par le parfum de son musc, il jouit du mouvement.
Gérard s'est détaché... On est lâ, lâââ ! crie la mère en agitant un bâton piqué de barbaque. Le père lance un morceau de viande cuit à point au gamin qui vient de dégringoler l'échelle, il ramasse le pain dans l'herbe.
Ils mangent. Gloutonnement. Et ils regardent autour d'eux. Le moinillon cherche Gérard qui lui échappe sans cesse. Oui, Gérard Depardieu évolue de façon juvénile et majestueuse dans la clairière, un peu à la façon des faunes mythiques. Il saute et gambade dans les hautes herbes, tantôt il se baisse et scrute la forêt, une jambe en l'air... tantôt il cueille une fleur en pleine course. Et le moinillon s'évertue en vain à le suivre. Le Maître déjoue sans mal les tentatives d'interception, la couleur sable de ses cheveux se fond harmonieusement dans les rayons du soleil déclinant lequel, tel une immense boule, roule sur la prairie. Et Gérard, déjà dans l'ombre des arbres géants, danse, danse...
Hé, regarde-moi un peu ce fessier ! Un vrai toréador !
Tu as les papiers de la bagnole ?
Ils sont dedans. Dis, les trucs dans la boîte à gants. Je les ai pris pour pas qu'ils se perdent.
Elle extrait de la poche de sa jupe des rouleaux de billets rouges, et quand le père voit les trois zéros dessus, il siffle.
Mais ensuite je les rendrai à Gérard, hein ?
Évidemment.
Dès qu'il se sera rhabillé !
C'est clair.
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Maman ? Tu aurais pas quelque chose à boire pour moi ?
Je bois plus, je viens de te le dire. Et quand je bois, je suis très raisonnable.
Tu as bien raison, marmonne le père, il sort les assiettes, les verres, fouine dans les rayons du bas, il enfile le bras jusqu'au fond du buffet parmi les toiles d'araignée, où le papier jauni se décolle des parois.
Il en sort une bouteille, le liquide sombre scintille comme de l'ambre, comme un joyau, comme un secret. Il attaque le bouchon avec les dents. Et il vide la moitié de la bouteille en trois ou quatre gorgées. Il s'adosse au buffet, les regarde, brusquement calme et redressé.
Non, mais c'est pas vrai ! Tu m'as piqué ma bouteille ! C'est pas possible, t'es pas de moi. Va savoir d'où tu sors. Ton père, elle lui servait qu'à pisser. Moi, j'avais besoin d'un homme, d'un vrai. Un jules. C'est quand même leur droit, aux nanas.
Allez, maman, je t'en prie !
Et quand tu restais là, à glander dans la cour, comme un bon à rien, combien de fois je me suis demandé, mais de qui il tient, celui-là ? Du laitier, avec sa grande gueule ? Du petit jeune des bois qui pique des bagnoles, qui pue la bagnole mais qui a un piston bien huilé ? Ou ce serait le postier qui me l'aurait fait ? De qui il tient, ce saligaud ?
Maman, arrête, au moins devant les enfants !
Et sans parler d'Ivan, ton frangin, on aurait mieux fait de l'étouffer avec une aiguille à tricoter, celui-là, tu parles d'une vermine. Il passait son temps à courir au cul de son père, les paluches pleines d'huile de moteur et d'essence, il a failli prendre feu plus d'une fois ! Finalement je les ai dégagés tous les deux dans la grange, qu'ils aillent pioncer avec leurs motos.
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Quand elles arrivent au bordel de Monika, c'est comme si c’était un club plutôt qu'une galère.
L'argent empoché sur leur animalité les comble. Évidemment c'est facile de le gâcher en picole ou en fringues, bref, de le jeter par les fenêtres, mais il y a aussi moyen d'en mettre un peu de côté. Et quand leur carrière provisoire au bordel sera terminée, elles pourront entamer une relation sérieuse sans être raides comme des passe-lacets.
En cas de pépin, Monika les laisse tranquillement passer la nuit à l'oeil. Sans avoir à fournir de services. Ici il y a toujours un petit coin pour les filles à plein temps. Avec une douche. En plus, la renommée de Monika, et aussi ses potes, décourage les connards, les débiles et les brutes les plus endurcies. Ça facilite grandement la vie. Les petites putes partagent les opinions de Monika. En cas de besoin, elle peut aussi les conseiller, entre deux portes, pépère, elle sait essuyer les mirettes éplorées.
Parce que tout de même, baiser pour du fric et de surcroît avec des personnes différentes à chaque fois, ce n'est pas tout à fait normal.
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Cette Monika. Elle est baignée de lumière. Ses anneaux, ses clous, ses boucles d’oreilles, tous ses ornements barbares étincèlent et jettent leurs feux. Quand elle pivote en s’habillant, ils la reluquent. Pendant un instant
on n’entend plus que le grincement du ventilateur et le bourdonnement
des insectes, comme dans la salle des machines de l’éternité.
Monika a la peau écorchée de quelques petits boutons, le nez un peu retroussé, elle n’a plus vingt ans, loin de là même, mais qui voudrait des gamines ? Une déesse, c’est mieux.
Heureusement qu’elle est habillée. Les regards des deux frangins sont littéralement aimantés à elle, comme les tournesols suivent le soleil.
Elle ne s’en rend même pas compte. Normal. Elle a fait ses classes
derrière une vitrine à Amsterdam, et là-bas les filles sont nues toute la sainte journée.
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