Comment faire part de la déception pour un livre sur
Vivian Maier quand elle côtoie chez moi l'admiration pour son oeuvre ? La déception peut être amplifiée par l'attente, évidemment. J'aime l'oeuvre de
Vivian Maier et son univers de Street Photography à l'ancienne, le Rolleiflex en bandoulière et l'oeil penché sur l'envers du décor, penché aussi sur la visée ventrale inversée qu'impose l'appareil, comme un symbole d'inclinaison respectueuse envers ses sujets photographiés. J'aime ses portraits, ses jeux d'ombre et ses reflets, l'ambiance figée et trouble qui s'en dégage. Et pourtant je suis souvent déçu par les histoires qui résultent de la vie de
Vivian Maier. Et je me pose des questions, plus de dix ans après l'avoir découverte grâce au documentaire qui lui a été consacré, et qui racontait le plus intéressant la concernant à mes yeux, sa révélation posthume et la magie de ses photos.
On a cherché à mieux connaître sa vie et ses origines suite à la découverte fascinante de son oeuvre, sauf que voilà, je suis dubitatif : Est-elle vraiment intéressante pour le lecteur, sa vie de nounou célibataire obsédée de photo ? Elle pourrait peut-être le devenir si on y découvrait des raisons de son obsession vitale à photographier, par exemple. Ou pourquoi pas en prenant résolument le parti de l'exofiction comme dans les romans de
Dominique Fortier sur
Emily Dickinson, qui réussit à faire vivre l'oeuvre de la poétesse tout en la racontant.
Toujours est-il que j'ai eu du mal à m'intéresser à sa vie – comme dans le roman de
Gaëlle Josse, retracée ici de manière fragmentaire et plutôt gentillette avec la sensation d'effleurer les sujets, les parts d'ombre de sa personnalité révélées par le documentaire étant aussi occultées. À vrai dire il ne s'y passe pas grand chose. Une plongée doucereuse dans l'Amérique ségrégationniste, des souvenirs d'enfance avec le retour en France de sa maman notamment, une vie de nounou adoptée par ses familles pour l'essentiel. Et un personnage qui s'apparente plus à une
Mary Poppins de la photo qu'à une artiste habitée, secrète et énigmatique. J'ai eu du mal à faire coïncider le portrait de cette
Vivian Maier aux traits minimalistes dans le dessin, plutôt sociable et sans réelle part d'ombre, avec la photographe à l'oeuvre empreinte de mystère, ne cherchant pas vraiment à se faire connaître de son vivant ni à développer ses bobines, ne serait-ce que pour elle-même (même si c'est relaté dans la bd).
Voilà, un rendez-vous manqué pour ma part et j'en suis désolé, je pense m'arrêter là avec les histoires sur
Vivian Maier que le monde de l'édition ne manque pas de vouloir relater, tant l'histoire de sa révélation posthume a fasciné.
Merci à Babélio et aux Éditions Dargaud pour l'envoi de cette bd dans le cadre de masse critique.