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Rachid Akel (Traducteur)Rosie Pinhas-Delpuech (Traducteur)
EAN : 9791034909230
176 pages
Liana Lévi (11/01/2024)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Deux peuples, deux récits. En temps de guerre, chacun raconte l'histoire d'un seul point de vue – le sien –, le seul considéré comme "juste". C'est pourquoi six professeurs d'histoire palestiniens et six professeurs d'histoire israéliens ont décidé de réunir dans un livre l'histoire racontée côté Palestiniens et côté Israéliens autour de trois dates clés – la déclaration Balfour de 1917, la guerre de 1948 et la première Intifada de 1987. Utilisé depuis 2002 dans de ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Ce petit livre nous arrive par ricochet mais ce serait un tort de considérer que nous ne sommes qu'indirectement concernés. Comme ce serait une erreur de croire qu'il s'agira de prendre position pour ou contre Israël et la Palestine.

Entre août 2002 et janvier 2003, en pleine seconde Intifada, six professeurs de lycées israéliens et six professeurs de lycées palestiniens se sont réunis quatre fois plusieurs jours afin de travailler ensemble à la rédaction de deux textes historiques autour de trois dates : 1) 1917, la déclaration Balfour, 2) la guerre de 1948, 3) 1987, la première Intifada. Il en a résulté deux récits et deux glossaires traduits en hébreu, en arabe et anglais. Lors de la troisième et dernière séance, les enseignants ont lu les deux narratifs dans leur propre langue. Par la suite, le travail sera poursuivi en encore deux tomes qui ne sont pas traduits en français mais auront été mis à la disposition des professeurs qui l'auront souhaité tant en Palestine qu'en Israël. Avec, dernier détail qui m'a séduite, deux colonnes pour établir les deux versions des mêmes chronologies et, au centre, une colonne vide destinée à recevoir les commentaires des lycéens.

Histoire de l'autre publié en France une première fois et réédité à la suite du 7 octobre 2023 présente ces deux récits et ces deux glossaires augmentés d'une préface de David Chemla, l'auteur de Bâtisseurs de paix, d'une postface d'Elie Barnavi, historien essayiste israélien, qui accueille le texte d'Elias Sanbar, historien et poète palestinien. Afin qu'aucun biais de mise en page ne vienne influencer la lecture, toutes les pages de gauche sont réservées au récit israélien et toutes les pages de droite au récit palestinien. de même pour les glossaires. La recension des événements selon ces deux regards est donc faite dans un permanent tête à tête, comme deux rivières qui suivraient leurs cours parallèlement.

D'un point de vue théorique, j'ai trouvé passionnante la réflexion sur L Histoire à laquelle amenait ce projet. « L'histoire est écrite par les vainqueurs », le propos de Robert Brasillach (homme de lettres et collaborationniste fusillé en 1945) est connu et s'il ne fait pas l'éthique d'un historien, il reflète une réalité est assez prégnante pour qu'un travail scientifique exact et précis soit mobilisé autour de l'établissement des faits historiques avérés et non de l'interprétation qu'un pouvoir veut lui donner. Reste que le choix des sujets d'études est révélateur de l'état d'esprit d'une société et des questions du passé qu'elle juge nécessaire d'éclairer ou non. Reste que ce que les enfants d'un pays apprendront dans leurs manuels d'histoire contribuera à forger la légitimation d'actes passés. A ce compte, la démarche n'est pas que scientifique, elle contribue à l'élaboration d'un récit national. Avec ses ombres et ses impasses. La manière dont, en France, on commence à peine à relire la période de la guerre d'Algérie en est un exemple manifeste.

Mais que dire alors de l'Histoire qui n'en finit pas de se faire pour deux pouvoirs, deux institutions prétendant à être un Etat qui n'en finissent pas de ne pas être en sécurité dans leurs frontières fixes ? Deux peuples cherchant chacun à faire nation sur un territoire unique, empêchés l'un et l'autre dans leur objectif par l'existence de l'autre ?

La présentation des deux récits palestinien et israélien est fascinante. Au début, je n'ai pas pu m'empêcher de traquer la formulation que j'aurais trouvée abusive, le biais interprétatif patent. Ce n'est pas qu'il n'y en ait pas, c'est que c'est un contre sens de le chercher. Dans les deux cas, il s'agit d'établir les faits dont les conséquences se font sentir aujourd'hui par dizaines de milliers de morts, de blessés, d'exilés. Et de constituer les acteurs des deux camps comme deux peuples. Ce qui, pour des raisons différentes, n'a rien d'une évidence ni pour les Juifs, ni pour les Palestiniens. Dans ces circonstances, il est impossible que le récit ne soit pas teinté. Non qu'il soit inexact, il est teinté des noms qui ne sont pas les mêmes selon qu'on est juif ou palestinien, des faits que l'on retient ou pas comme saillant selon le côté depuis lequel on écrit.

On comprend aussi très vite que s'il s'agit de laver du linge sale en famille, la famille est très nombreuse : l'Angleterre et son protectorat, l'Allemagne à la veille de la deuxième guerre mondiale, les Nations Unis, les pays arabes, les Etats Unis et la France, chacun y est allé de son intérêt personnel, variable selon les époques, avec la seule constance de trahir systématiquement son engagement précédent. Dire que le problème israélo-palestinien ne concerne que ces deux peuples est historiquement faux : le conflit n'a cessé d'être envenimé par des puissances étrangères illégitimes. Et c'est loin d'être fini, en exergue, Liana Levi le rappelle : aujourd'hui, « ceux qui croient devoir s'identifier aux uns et aux autres se montrent plus intransigeants que les acteurs même du drame. ».

Ce qui m'a frappé aussi, c'est la division qui régnait, au gré des époques et là encore pour des raisons différentes, d'un côté comme de l'autre de ces frontières fluctuantes. L'Etat d'Israël est fait de courants différents dont les partisans du Grand Israël pour qui seul un territoire totalement unifié peut être défendable. Je pense aussi aux ultraorthodoxes qui ne sont pas spécifiquement nommés pour la période ici traitée mais influent énormément le devenir d'Israël ces dernières décennies. du côté palestinien, le rôle des pays arabes limitrophes, les dissidences et l'absence de représentativité des populations est également marquant. Des deux côtés cette impression d'un train fou emporté à toute vitesse par des conducteurs qui ne font pas l'unanimité au sein de leur propre camp.

En filigrane, j'ai été sensible à la manière dont les faits étaient rapportés. Souvent, le récit israélien parle de « cours de l'histoire changé » et s'inscrit dans un déroulé implicitement téléologique. le récit palestinien semble, dans la première partie s'appuyer sur un registre appartenant davantage au géopolitique, analysant les faits en termes de forces en présence, rappelant des dates et citant des extraits de documents historiques. Des deux côtés, des poèmes, des chansons, des cartes, des photos comme autant de témoignages à vif de la manière dont les événements sont éprouvés. Et des deux côtés également, cette revendication d'une terre pour un Etat-nation, comme héritage des revendications que l'Europe a porté tout au long du 19e siècle, comme facteur portant inexorablement à une lutte acharnée. Alors même que, depuis des siècles le peuple juif n'était pas le peuple d'un territoire unique. Alors même que les Palestiniens n'étaient pas un peuple unifié sur une terre limitée lorsque cette portion du monde était sous la coupe de l'Empire ottoman.

On aimerait que ces réflexions restent théoriques et qu'elles ne touchent pas un territoire à feu et à sang, réfléchir posément à ce qui constitue un récit, à ce qu'est une démarche scientifique d'historien, au rôle qu'ont ces textes dans la confirmation de l'identité des uns et des autres.

Cette paix dans la réflexion est interdite à tous, plus que jamais. Mais c'est un signe d'intelligence et d'espoir que de voir persister malgré la peur, la haine, la rage, cette volonté de réfléchir côte à côte, de faire de l'autre un interlocuteur à égalité avec soi. Les auteurs finissent leur introduction par ces mots : « Il faut considérer l'enseignement de l'histoire comme une tentative de construire un avenir meilleur en « retournant chaque pierre » et non en la lançant à la tête de l'autre. Nous espérons que vous, enseignants et élèves, partagerez cette vision avec nous et nous aiderez à relever ce défi. » Pourvu que ces voix magnifiques relaient et diffusent cette manière de voir et qu'advienne vite un temps où chacun peuple puisse être reconnu et habiter en paix une terre qui soit la sienne.

Je remercie vivement Babelio et la délicieuse collection des "piccolo" des éditions Liana Levi, de m'avoir offert ce livre dans le cadre d'une masse critique.
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Il est arrivé, il est même dépassé de quelques heures, ce jour que je redoutais….
Le jour où je dois remplir ma part du contrat et rendre ma critique,
Je vais vous l'avouer, je ne l'ai pas encore fini, pourtant, il n'est pas très long. Mais ce n'est pas vraiment ce qu'on peut appeler un livre de chevet. On n'est pas trompé sur la marchandise, c'était clairement annoncé, mais j'ai été plus attirée par la démarche, somme toutes à saluer dans ce conflit sans fin et désespérant que par le sujet précis lui même.
C'est vraiment un manuel d'histoire et, si j'y ai retrouvé des « sons » de mon enfance (parce qu'à l'époque, c'était plus des noms qu'une réalité pour moi) et y ai trouvé des explications et un contexte (OLP, Sabra, Chatila ….), je ne peux pas dire que la lecture a été facile.
D'ailleurs, plus d'une fois, je me suis surprise à lire la page de droite à la suite de la page de gauche (ah oui, parce que, effectivement, c'est comme ça qu'on fait habituellement - mais pas ici : le concept est interessant : le texte se lit en parallèle : pages de gauche le point de vue israélien - page de droite celui des palestiniens)
Alors, j'aurais voulu faire ma philosophe geopolitico analyste et j'ai un peu honte de l'avouer, mais le soir, dans mon lit, je préfère lire un bon roman historique qu'un manuel d'histoire. Voilà, c'est dit. Bientôt je sortirai du placard et j'avouerai que je lis Lévy et Musso, voire du Puertolas….. non, quand même pas …
Merci à babelio et aux éditions piccolo pour leur envoi. Ce n'est pas le livre qui n'est pas bon, c'est moi qui ai fait une erreur de casting …)
Et MERCI aux femmes et aux hommes de bonne volonté qui tentent de renouer les liens entre les peuples, que des calculs politiques ont divisés et déchirés
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La structure du livre fait penser a une histoire de droites parallèles qui ne se rencontrent jamais. Or ce qui est raconté dit tout le contraire : ces parallèles là n'arrêtent pas de se rencontrer ; elles ont toutes les propriétés des droites parallèles dites "confondues" en géométrie. Et elles s'acharnent à se croire distinctes.
La première de couverture montre trois parallèles ; la déclinaison du titre de l'ouvrage en trois langues ; du haut vers le bas, arabe/français/hébreu. Il n'est pas certain qu'il ait été intentionnel de placer la langue qui est étrangère (mais pas si étrangère que ça à l'histoire) au conflit de façon à ce qu'elle sépare les deux langues sémitiques des peuples antagonistes. Dans une édition anglaise de cet ouvrage, cette métaphore de l'influence étrangère eut été plus encore plus puissante (mais la France y a toute sa place).
En dessous, un petit dessin montre deux personnages qui se tournent le dos : l'un porte turban, l'autre est blond (curieusement, on n'a pas songé à lui faire porter kippa). Chacun est occupé à arroser les racines de son arbre.

Mais dans la structure de l'ouvrage, dans ce qu'on appelle le paratexte, ce qui frappe c'est la mise en parallèle de ces deux histoires nationales. La maquette du livre impose un parallélisme géométrique.Ces deux récits historiques ne sont pas placés l'un à la suite de l'autre. Il est peu vraisemblable que ce soit pour éviter une querelle de priorité (on peut considérer qu'être lu en premier est une préséance mais cette satisfaction peut être compensée par le fait qu'être lu en dernier vous donne le dernier mot).
C'est donc le choix de présenter les deux textes sur deux colonnes dans chaque page qui à prévalu. Colonne de gauche, l'histoire du point de vue israélien, la colonne de droite le point de vue palestinien. Un trait sépare les deux colonnes. Ce trait vertical de séparation m'a fait immédiatement pensé à un mur : Dieu (Yahweh, Allah) sait combien les murs ont leur importance dans cette histoire désespérante. Il s'agit moins du Mur Occidental de Jérusalem (celui dit des Lamentations par les israéliens et dit d'al-Bouraq par les palestiniens) que de ces bétonnages à miradors qui prolifèrent dans cette région.
Les deux récits semblent se regarder en chien de faïence (contrairement aux deux personnages de la couverture qui se tournent le dos, affairés aux soins de leur racines). L'effet produit sur le lecture n'est pas vraiment d'assister à un dialogue bien que la réalisation de cet ouvrage soit le produit d'un dialogue. le lecteur se sent en surplomb. Il voit le mur vu d'en haut, cette ligne qui sépare les deux colonnes de la page. Cette maquette paraît vouloir flatter le lecteur en lui donnant le point de vue de Dieu. Position intenable.

Nous voici donc devant un ouvrage d'histoire parallèle mais peut-être pas tout à fait dans l'esprit de l'émission du regretté Marc Ferro sur Arte. Mais c'est au lecteur de faire la part des choses. Ce n'est pas simple pour un lecteur français qui ne manquera pas de s'interroger sur l'effet produit par les éditions en hébreu et en arabe de ces textes.
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Riche idée que celle-là : non pas la confrontation - le terme serait malvenu - mais la mise en parallèle de deux versions malheureusement inconciliables d'une même histoire, celle du conflit israélo-palestinien. Et c'est bien de cela qu'il s'agit, au propre comme au figuré, puisque la version israélienne et la version palestinienne se font face, l'une sur les pages de gauche, l'autre sur les pages de droite, de ce livre unique en son genre. le but étant l'apaisement, chacun a eu soin de mesurer ses propos.

Trois étapes clés sont au programme : la déclaration Balfourt de 1917, l'indépendance d'Israël en 1948 et la première intifada en 1987. le livre sorti récemment chez Liana Levi est la réédition de l'original paru 20 ans plus tôt. J'espérais une petite mise à jour et n'ai trouvé qu'une mince postface. En fait, il s'avère que ce livre a été suivi par d'autres tomes. Pour les étapes ultérieures, il reste donc à espérer une traduction prochaine en français.

Le livre était destiné aux écoliers de ce petit coin de terre si âprement disputé, ce qui explique le nombre réduit de pages et le niveau relativement élémentaire des propos.

Ses auteurs avaient-ils tort d'espérer en ses effets bénéfiques ? La situation ne semble guère s'être améliorée depuis. On parle toutefois de plus en plus sur nos ondes de manifestations anti-gouvernementales. Il faudrait se pencher sur la question de savoir si la jeune génération y est plus présente que les anciennes.

Je remercie l'éditeur pour son envoi dans le cadre de l'opération Masse Critique.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Mandats [dans le glossaire palestinien p. 86]

Suite à la Conférence de paix tenue à Paris en 1919, les Alliés approuvèrent le système des mandats par lequel la Société des Nations léguait aux grandes puissances le soin d'introniser des gouvernements dans les anciens territoires des États défaits. Cela devait allier la reconnaissance de l'indépendance totale des nations précédemment dirigées par la Turquie et l'Allemagne, conformément aux principes du président Wilson, et l'intention des pays européens vainqueurs de se partager ces territoires, en vertu des accords secrets conclus pendant la guerre.

Mandat [glossaire israélien p. 88]

Mot qui signifie procuration, autorisation. Dans le contexte historique, il désigne l'autorisation donnée par la Société des Nations à certains pays de gouverner et diriger une région, afin de conduire progressivement ses habitants, d'abord à se diriger eux-mêmes, puis à l'indépendance. (Exemple : le Mandat britannique en Palestine).
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Emprunté à la médiathèque, acheté pour le cdi
Comprendre le point de vu juif et arabe sur le conflit israëlo-palestinien.
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