A travers le personnage de François Sturel, c'est tout le boulangisme que fait revivre Maurice Barrès (qui fut lui-même député boulangiste). Sturel est un idéaliste, qui rêve d'une régénérescence de la France par la victoire du général Boulanger. Cependant, le chef nationaliste échoue avant de se suicider, en 1891, sur la tombe de sa maîtresse, à Ixelles (Bruxelles). Sturel dénonce les tares d'une société corrompue, notamment le scandale de Panama, mais sa mystique et son sens du devoir se heurtent pathétiquement à ces réalités triviales. Evidemment, c'est Barrès qui parle, qui nous expose ses idéaux et ses désenchantements.
Après avoir lu ce roman engagé, "roman de l'énergie nationale", j'ai mieux compris l'épisode boulangiste. Bien que les temps soient autres, il y aurait certainement des analogies à souligner avec ce début du XXIe siècle, même si, en France, un "appel au soldat" ne semble plus à l'ordre du jour... après celui qui eut un aboutissement heureux, en mai 1958.
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C'est la suite des Déracinés, que je trouve encore meilleure, puisqu'elle parle de l'avènement et de la chute du général Boulanger, qui en résumé, est un homme qui par sa prestance et sa critique de l'ordre établi, parvient à obtenir un soutien populaire massif, mais qui n'a pas l'envergure d'un homme d'Etat et se fait totalement balayer par une histoire de coeur. J'ai préféré cette suite au premier tome dans la mesure où Barrès se contente de rapporter les faits relatifs à Boulanger au travers d'un des personnages du premier tome, Sturel, qui connaît également une carrière politique auprès de Boulanger ainsi que quelques amourettes, mais sans en faire une théorie politique de portée générale. le style est impeccable.
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« Les soldats partageront leur pain avec les grévistes ! » Aux destinées prodigieuses de ce mot sur tous les chemins de la France, il apparut que ce jour-là le général Boulanger avait parlé en français. Non seulement il s’exprimait avec la générosité, la netteté, la cordialité du Français, mais il employait à la tribune du Palais-Bourbon des expressions vraiment françaises, en place de ce jargon vague, que chacun écoute, recueille avec admiration peut-être, sans que personne touche une réalité.
On peut seulement craindre que cette culture de la conscience, ce noble souci de sa dignité ne donnent à un être une trop haute idée de sa personne morale, et par là une vision de soi-même disproportionnée avec sa place dans le monde.
MAURICE BARRÉS - ESTELLE ANGLADE TRUBERT