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EAN : 9782707317254
172 pages
Editions de Minuit (06/10/2000)
3.64/5   18 notes
Résumé :
De Joachim du Bellay à Marguerite Duras, les plus grands écrivains de notre littérature ont connu des moments de faiblesse et ont raté certaines de leurs œuvres. Histoires aberrantes, personnages inconsistants, style boursouflé, vers boiteux – ces textes plongent tout lecteur sensé dans la consternation.
Comment ces auteurs en sont-ils arrivés là ? Tenter de répondre à cette question conduit à interroger, avec l’aide de la psychanalyse, les mystères de l’acte... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Pierre Bayard a de l'audace, c'est le moins que l'on puisse dire, et ses titres sont autant de provocations.
De Joachim du Bellay à Marguerite Duras, les plus grands écrivains de notre littérature ont connu des moments de faiblesse et ont raté certaines de leurs oeuvres. Histoires aberrantes, personnages inconsistants, style boursouflé, vers boiteux – ces textes plongent tout lecteur sensé dans la consternation.
Comment ces auteurs en sont-ils arrivés là ?
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Définitivement impertinent et toujours aussi ludique dans ses démonstrations, le professeur de français à l'université de Paris VIII partage sa passion des lettres et multiplie les références. Mais le problème, c'est que cet essai est suffisamment convaincant pour provoquer l'effet inverse du carnet d'inspiration. Car si j'ai lu chacun des auteurs de son panel mais ai fait l'impasse sur les oeuvres ratées dont il propose l'amélioration, je n'ai pas pour autant l'intention de m'y aventurer en refermant ce livre...
L'article complet sur mon blog.
Lien : https://touchezmonblog.blogs..
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Parmi les exemples les plus caractéristiques de cet effet d'époque, on pourrait citer le LIEU COMMUN, auquel notre temps, héritier de Flaubert, est particulièrement sensible, attentif à ce qui se répète malencontreusement d'une œuvre à l'autre.
De nombreuses œuvres […] souffrent de l'incapacité de l'auteur à faire entendre sa voix, noyée dans un discours partagé avec lequel il ne parvient pas à prendre ses distances.
[…]
Plus qu'une pensée commune ou dépourvue d'originalité, le lieu commun — qu'il s'exprime sous la forme d'une véritable réflexion ou tienne à une situation ou un personnage — est en effet une PENSÉE MORTE, c'est-à-dire une pensée que l'auteur n'a pas forgée lui-même, mais dont il a hérité, consciemment ou à son insu, et qu'il s'est contenté de reproduire sans y imprimer sa marque.
Or il importe de remarquer que le lieu commun est moins une pensée morte en soi qu'une pensée qui meurt avec le temps, lequel accentue ou même produit le sentiment de répétition. En effet, le passage du temps met les œuvres en perspective et les restitue à une histoire de la littérature qui accentue cruellement ce qui se répète. Mais il fait aussi surgir des répétitions, puisque d'autres œuvres ont été écrites dans l'intervalle, et ce qui n'était pas lieu commun à l'origine a fini, avec le temps et ses redites, par le devenir.
À l'entendre, au-delà de sa signification ordinaire, en un sens moins restreint qui lui ferait désigner tout ce qui manque d'originalité dans une œuvre, le lieu commun apparaît ainsi largement comme un produit du temps, ou, si l'on veut, comme ce lent mouvement de mise à mort que le temps effectue en gangrenant peu à peu les parties vives d'un texte. En cela, le temps ne se contente pas de modifier notre perception de l'œuvre, il modifie l'œuvre elle-même.

B) RÉFLEXION, Chapitre III : Le temps des œuvres.
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Par ce fait, le sentiment de ratage — c'est-à-dire le sentiment que l'œuvre n'est pas à la hauteur de nos attentes — mobilise plus qu'un autre sentiment esthétique le registre inconscient de l'insuffisance, du défaut, de la castration. Ce qu'exhibe l'œuvre ratée, perçue en palimpseste avec les autres œuvres du même auteur, c'est ce qu'elle aurait dû ou pu être, c'est donc CE QUI LUI MANQUE. Par essence associé au regret de ce que l'œuvre n'est pas et qui organise de part en part la réception, le ratage est moins un état de l'œuvre qu'un affect du lecteur.
Or TOUTE ŒUVRE LITTÉRAIRE NOUS REPRÉSENTE INCONSCIEMMENT, ou, si l'on veut, parle essentiellement de nous. Non que la parole qu'elle porte sur nous soit antérieure à notre rencontre avec elle, mais parce que le mouvement de la lecture privilégie en elle tout ce qui renvoie à notre personne et à notre histoire. Il est donc vraisemblable que l'œuvre ratée est insupportable par la représentation en miroir qu'elle offre de nous-mêmes, le spectacle déplacé de nos propres échecs.
Si l'on prend l'exemple auquel nous sommes plus habitués à réfléchir, celui du chef-d'œuvre, il est probable que son appréciation, avec tous les excès de sympathie qu'il suscite, s'ancre dans notre relation à nos instances idéales. Le chef-d'œuvre, par sa plénitude, incarne à la fois ce que nous voudrions faire et ce que nous voudrions être. En nous renvoyant à une image heureuse de nous-même, il comble notre narcissisme. Même si l'œuvre est une peinture de la désolation humaine, c'est une représentation de complétude qu'elle offre au lecteur par la juste forme qu'elle est parvenue à inventer.

B) RÉFLEXION, Chapitre IV : La décision de ne pas aimer.
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Si l'on pose, comme nous l'avons fait ici, que la rencontre avec l'œuvre ouvre l'espace d'un dialogue interfantasmatique, c'est ce dialogue qui prime dans la manière dont le lecteur se détermine par rapport à l'œuvre, quels que soient ses efforts de justice intellectuelle pour tenter d'échapper aux particularités du jugement personnel.
Cette position éminemment relative va au rebours du courant dominant de l'esthétique — que l'on pourrait qualifier de " kantien " —, qui postule plus ou moins explicitement le caractère universel du jugement de goût, et donc la possibilité d'une entente concertée entre lecteurs de bon sens et de culture semblable dans la définition de critères d'appréciation. Position qui méconnaît la place de l'inconscient et la spécificité du rapport au fantasme, en postulant qu'il existerait un site extérieur à l'œuvre, d'où il serait possible de l'apprécier objectivement hors de tout effet de subjectivité.

B) RÉFLEXION, Chapitre IV : La décision de ne pas aimer.
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Parler d'une œuvre comme réussie, c'est d'abord dire en quoi elle nous émeut sur un plan inconscient, c'est-à-dire combien nous reconnaissons dans la fantasmatique qui la sous-tend des éléments de notre propre imaginaire. Toutes les raisons plus ou moins objectives que nous pouvons être amenés ensuite à faire valoir pour justifier notre appréciation — comme la qualité esthétique de tel trait formel — ont surtout une fonction de mécanisme de défense, pour dissimuler que nous sommes avant tout sensibles dans une œuvre à ce qui nous concerne nous-mêmes.
Être concernés sur un plan fantasmatique, c'est percevoir dans les œuvres, derrière leurs intrigues officielles, les grands fantasmes humains — présents avec des variations dans toutes les cultures —, comme l'œdipe, la castration, la séduction, la scène d'origine, le roman familial, fantasmes que nos œuvres illustrent abondamment si on les lit à la lumière de la psychanalyse. C'est-à-dire des canevas où chacun retrouve, dans un déploiement à chaque fois singulier, des éléments de son histoire familiale et des relations premières qu'il a anciennement entretenues avec ses proches, dans la jubilation ou la souffrance.

B) RÉFLEXION, Chapitre IV : La décision de ne pas aimer.
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Un excès de présence de l'auteur, dans la diversité des désordres qu'il suscite, perturbe chez le lecteur, en tout cas chez nous, le mouvement d'adhésion à l'œuvre. Quasiment agressé par une écriture trop explicite, trop visuelle, qui lui impose la netteté d'un univers quand elle ne le prend pas à parti personnellement, il ne dispose pas des marges nécessaires pour rêver ou simplement demeurer lui-même.

C) AMÉLIORATION, Chapitre I : Éloignement.
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Nancy Murzilli invite Pierre Bayard & Yves Citton
Dans l'essai de Nancy Murzilli, la fiction est analysée sous le prisme d'une expérience de pensée. Raconter des histoires, jouer au pirate, interpréter un personnage de théâtre ou un rôle social, faire des projets, mentir, rêver, parler aux fantômes ou aux anges, communiquer avec le règne animal, lire l'avenir dans les tarots ou dans les astres, jeter des sorts, écrire des romans… Souvent perçues comme des échappatoires au réel, ces opérations mentales nous permettent de « savoir » et d'« agir » sans utiliser les moyens ordinaires d'information.
En avril et avec la complicité de la comédienne Anne-Laure Sanchez, Nancy Murzilli tirait les cartes à la Princesse de Clèves. Pour cette deuxième rencontre, elle invite deux « personnages » de son livre, Pierre Bayard et Yves Citton, chercheurs reconnus pour leurs travaux sur les fictions littéraires et sociales.
« Tout écrivain qui a discuté un peu longuement avec un lecteur attentif connaît cette expérience d'inquiétante étrangeté où il se rend compte de l'absence de correspondance entre ce qu'il a voulu faire et ce qui en a été compris. » Comment parler des livres que l'on a pas lus ?, Pierre Bayard
À lire – Nancy Murzilli, Changer la vie par nos fictions ordinaires, Premier parallèle, 2023 – Pierre Bayard, Et si les Beatles n'étaient pas nés ?, éd. de Minuit, 2022 – Yves Citton, Altermodernités des Lumières, Seuil, 2022 – Yves Citton, Faire avec. Conflits, coalitions, contagions, Les liens qui libèrent, 2021.
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