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EAN : 9782072844164
80 pages
Gallimard (23/05/2019)
3.67/5   6 notes
Résumé :
"Si rien n'est plus manifeste que l'inconscient, depuis que Freud a passé, il résidait bien moins en nous, pour moi, pour d'autres, qua notre porte, dans les choses qui nous assiégeaient, leur dureté, leur mutisme, la tyrannie qu'elles exerçaient sur nos sentiments, les pensées qu'elles nous inspiraient forcément." Pierre Bergounioux s'explique ici sur un certain éloignement, et d'abord géographique, vis-à-vis de la psychanalyse, que le nom de Freud, gravé dans le m... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique

En soixante pages, avec son écriture tellurique, obscure, nourrie par les contours et les accidents des roches et de la géologie corrézienne, Pierre Bergounioux nous explique pour quelles raisons, bien qu'il ait été en contact avec elle, et qu'elle ait été en mesure d'apporter des éléments de réponse à ses maux et ses tourments, la rencontre avec la psychanalyse n'a pu se faire.
Leur relation a commencé dès l'enfance lors de la diffusion à la télévision d'un film de Bergman où l'un des personnages mentionne le recours à un psychanalyste. le terme reste dans la mémoire de l'auteur.
Cela se poursuit ensuite en cours de philosophie, puis dans les nombreux livres lus pendant ses jeunes années, et à Paris, fortuitement, lors d'un séjour à l'hôtel du Brésil où a séjourné Freud lorsqu'il travaillait avec Charcot.
Mais Bergounioux ne s'appesantit pas sur la définition de la psychanalyse, son contenu, ses finalités. Il ne porte sur elle aucun jugement. Juste, peut-être, ressentons-nous de sa part une petite touche de regret quant au fait de ne pas l'avoir suivie.
De quoi nous parle-t-il alors dans ce livre publié dans la collection Connaissance de l'inconscient ?
De son enfance dans ce Limousin agricole, pétri de traditions millénaires, où les paysans marqués par le destin de faire corps avec la terre et la matérialité des "choses", usaient de peu de mots pour dialoguer, et ne portaient pas de regard sur eux-mêmes et sur la mutation qu'ils devaient opérer pour entrer dans l'ère de la modernité. Il s'agissait d'une période où les adultes taiseux ne répondaient pas à ses questions et pendant laquelle les seules sorties de ces terres noirâtres consistaient à s'extraire des plateaux pour partir à la pêche avec son père.
Pour mettre fin à ce silence assourdissant, le jeune Bergounioux s'immerge bientôt dans les livres de la bibliothèque de la sous-préfecture, puis dans ceux qu'il achète à profusion lors de son entrée dans la vie professionnelle. Il s'extraie de la glaise, des schistes, du monde des non-dits, en entreprenant un long parcours solitaire dans l'univers des mots et du langage.
Nous comprenons alors, qu'ayant trouvé dans l'écriture, son ancrage dans la réalité et avec l'extérieur, et donc sa propre thérapeutique, Bergounioux, du fait également d'un décalage culturel, ne pouvait envisager un recours à la psychanalyse.
Un beau texte concis et dense, qui éclaire et apporte un merveilleux écho aux résonnances immémoriales de Miette.


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Comme souvent chez Bergounioux, c'est un livre court, et comme presque toujours, un retour aux origines porté idéalement par une prose méandreuse, épaisse, profonde, géologique, comme chargée de limon, et pourtant parfaitement claire et exacte, un mélange laïc de matériel et de spirituel, exotique à force de perfection.
L'hôtel auquel le titre renvoie est un de ceux qu'a fréquenté le Sigmund Freud. Ce dernier n'apparaît pourtant dans le livre que comme une figure lointaine, un astre pas tout à fait mort, encore lumineux, mais d'une autre galaxie: la grande ville cosmopolite. Pour tirer au clair les raisons de la névrose provinciale dont il est affectée, on comprend vite que Bergounioux n'a pas su, pu, voulu "pousser la porte" de ce cabinet-là , mais a plutôt choisi d'ouvrir les livres de géographie, d'histoire, de sociologie (c'est notamment chez le Dr Bourdieu qu'il trouvera les lumières propres à le soulager), puis d'en écrire lui-même. Pourtant, même si ce livre est l'histoire d'un rendez-vous manqué avec la psychanalyse, il me paraît parfaitement à sa place dans sa collection phare, et pas seulement comme un clin d'oeil décalé, ou un lapsus éditorial, mais bien parce qu'il est fidèle à son titre-programme: "Connaissance de l'inconscient".
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
On a tout dit des couleurs, de leurs effets sur notre humeur. La pierre à bâtir, d'un grain très grossier, friable, avait la nuance bistre du soir, des feuilles mortes, des taches de vieillesse, des anciennes photographies, des pages jaunies. Et comme c'est le monde extérieur qui donne le ton, il s'ensuivait que j'étais ordinairement mélancolique, même aux beaux jours, même à midi. Les murs parlaient éternellement du crépuscule, d'octobre et, par une sorte de rétroaction de leur image sur les choses, il me semblait, parfois, que j'étais mort et ne le savais pas, comme ces gens qu'on voyait, sur de vieux clichés, sous le soir couvert où paraissaient s'être passés leurs jours.
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J'ai douté d'y voir plus clair dans ce qui nous était arrivé d'emblée. J'en doute toujours. Des mondes à peu près fermés les uns aux autres sont brusquement entrés en contact. Le nôtre aurait pu l'emporter, donner le ton, nos usages et nos vues, notre langue s'imposer à l'extérieur. Nous aurions grandi, vécu en paix. Mais ce fut l'inverse. De là un trouble profond auquel les remèdes qui pouvaient nous parvenir du dehors, eux aussi, étaient impropres à remédier parce que indissociables de leur cadre matériel (à peine), cendreux, marmoréen, symbolique. C'est pourquoi je n'ai jamais poussé la porte d'un psychanalyste.
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Vidéo de Pierre Bergounioux
Cette semaine, Augustin Trapenard est allé à la rencontre de Pierre Bergounioux à l'occasion de la sortie en poche de son livre "Le Matin des origines" aux éditions Verdier. Ce merveilleux ouvrage célèbre l'ancrage profond dans ses racines, dans les terres du Quercy entre Lot et Corrèze, où l'auteur a grandi, dans la chaleur de la maison rose et au sein des paysages qui ont façonné son être. Ces souvenirs, imprégnés dans sa mémoire, représentent une part essentielle de son identité qui demeure là-bas. À travers ces pages, Pierre Bergounioux évoque avec justesse le lien puissant que la terre tisse avec nos souvenirs et nos émotions, révélant ainsi le pouvoir des lieux familiers pour donner du sens à notre passé et à nos moments les plus heureux. Il était donc évident qu'Augustin Trapenard se déplace au coeur de cette histoire, sur les contreforts du plateau des Millevaches, dans sa maison de Corrèze pour un retour aux origines de la vie et de l'écriture.
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