Je ne m'attendais pas à découvrir un destin d'artiste exceptionnelle. Chacun sait que
Jane Birkin fut principalement une égérie, reconnaissant elle-même avoir eu la chance d'être dotée d'un physique "à la mode" de son époque. Je ne m'attendais pas non plus à une "ravissante idiote", caractérisation qui lui aura sans doute été souvent donnée, car pour vivre la vie qu'elle a vécue il fallait quand même, dans le contexte du début des années 60, être dotée d'une certaine force de caractère. Et là j'ai été plutôt déçue. Non pas que
Jane Birkin soit une ravissante idiote mais que plutôt l'orientation qu'a prise sa vie n'avait finalement pas grand-chose de profondément original. Birkin est née en effet au sein de l'une de ces familles dont l'Angleterre a le secret, quelque part entre l'aristocratie et la bohême artistique, sa mère, notamment, ayant été une actrice de théâtre de renom. Milieu relativement aisé et enfance passablement ennuyeuse (passer le cap du premier cinquième du bouquin n'est pas une mince affaire tant cette lecture m'a semblé dénuée d'intérêt). Par la suite, évidemment, les choses s'animent un peu : la rencontre toute jeune avec
John Barry, bien plus âgé qu'elle, qui en fait une sorte de trophée dont il se lassera vite, Birkin tombant par ailleurs dans le piège de la femme adoratrice attendant son Seigneur et maître à la maison, espérant le retenir en lui faisant la cuisine. Dans son journal elle le quitte, elle a l'honnêteté d'ajouter une note signifiant qu'en réalité c'est lui qui lui aura en quelque sorte signifié son renom. Barry ne fut probablement pas un pervers narcissique mais un homme collectionnant les femmes et tout ce qui va avec la gloire à son époque, certainement pas prêt alors à se caser et encore moins avec une immature comme Birkin à l'époque. Elle se retrouve donc seule avec l'enfant, Kate, qu'elle a eue de
John Barry et ne tardera pas à rencontrer
Serge Gainsbourg qui en fera sa "chose". Compagnon autoritaire et auto-centré, il ne comprendra vraiment l'importance de Birkin dans sa vie, après douze ans de vie commune, que lorsqu'elle le quittera pour
Jacques Doillon. La relation avec Gainsbourg est relatée à la fois avec force détails (jamais très intimes toutefois et c'est sans doute une bonne chose) et en pointillés car il s'agit d'extraits de journaux qui n'ont pas été tenus quotidiennement et dont certains se sont perdus. Au final l'intérêt de ce livre me semble limité, même pour les fans des protagonistes. On se rend compte que leur époque fut un âge d'or pour les artistes, que l'argent coulait à flots et que les beuveries s'enchaînaient les unes aux autres. J'ai été surprise de découvrir une Birkin nettement moins accessibles, bien plus bourge aristo (ses origines sans doute) que je ne m'y attendais : les nurses pour s'occuper de ses filles, Kate et Charlotte, les réflexions involontairement méprisantes (qui m'ont fait penser à...
Marie-Antoinette) à propos d'un paysan vivant seul avec sa mère, le récit de sa déception lorsqu'un commerçant accepte la grosse somme d'argent proposée par Gainsbourg pour un objet décorant sa vitrine et auquel ce commerçant était attaché (et Birkin de conter sa "déception" vis-à-vis du commerçant, étrange renversement de perspective alors que son homme était probablement bien plus blâmable pour son cynisme). Ces traits désagréables du personnage n'empêchent toutefois pas un certain courage, celui d'avoir quitté Gainsbourg qui devenait Gainsbarre et dont on devine qu'il a dû lui faire subir des violences domestiques. J'ai apprécié sa retenue dans ce récit-là et au final je pense qu'il s'agit d'un itinéraire de femme plutôt honnête même si beaucoup moins libre et originale que ce que l'on pourrait penser au premier abord...