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EAN : 9782707186874
198 pages
La Découverte (23/09/2015)
1/5   1 notes
Résumé :
Ce livre est d'abord une réaction au processus qui mène la France au bord de l'abîme, sur fond d'angoisses identitaires et de nostalgie de grandeur. Comment en est-on arrivé là ? À cette fragmentation de la société, à ces tensions intercommunautaires, au ressac effrayant de l'antisémitisme, du rejet de l'islam et de la haine de soi ? Comment en est-on arrivé à une logique de repli généralisée ? Comment la France a-t-elle pu céder en quelques années à la hantise d'un... >Voir plus
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A en croire Nicolas Bancel, Pascal Blanchard et Ahmed Boubekeur, la société française est entrée dans l'ère du Grand repli. Hantée par le spectre du déclin, elle se recroqueville sur une identité mythifiée, celle des « Français de souche », et sur la haine de l'autre. Cette idéologie racialiste, sinon carrément raciste, est alimentée par le discours des élites politiques et médiatiques. Elle percole dangereusement dans la société française alimentant une lepénisation rampante des esprits dont témoigne par exemple l'antisémitisme décomplexé d'une Dieudonné.
Le Grand repli est une idéologie de combat qui entend répondre à une violence par une contre-violence. La violence c'est la peur du Grand remplacement. La théorie a été forgée par Renaud Camus en 2010 et reprise notamment par Eric Zemmour dans son succès de librairie « le suicide français » : l'identité française serait menacée par le métissage. Pour répondre à cette violence, une contre-violence s'impose. C'est l'altérophobie, la haine de l'autre, le juif hier, le musulman aujourd'hui.
Les auteurs insistent sur la centralité de l'islamophobie chez les tenants du Grand repli. Les musulmans incarnent désormais l'ennemi intérieur, d'autant plus dangereux qu'il se cache à l'intérieur du corps national à protéger. Faisant fond sur les travaux de Thomas Deltombe , de Mathieu Rigouste et de Bertrand Godard , ils séquencent cette phobie en trois périodes. Les premières vagues d'immigration maghrébine pendant les Trente glorieuses sont l'ère du mépris : les musulmans n'ont pas droit de cité dans la république gaullienne et pratiquent leur religion en cachette. Avec la crise, la fin de l'immigration économique, la sédentarisation des familles maghrébines et sahéliennes, naît le temps du soupçon : les croyants, dont la foi devient plus visible, sont suspectés de constituer la « cinquième colonne » d'un islam téléguidé de l'étranger. L'échec de la gauche comme de la droite à structurer l'islam de France conduit à la période actuelle : l'ère de la peur. Cette peur s'exprime à travers ce que les auteurs qualifient, non sans outrance, de « rage laïcarde » (p. 35). Loin de favoriser le vivre-ensemble, la laïcité serait facteur d'exclusion, renvoyant tous ceux qui ne se plient pas à ses règles, de plus en plus contraignantes, à une marge honnie.
Le Grand repli fonctionne comme un système de poupées russes ou de vases communicants. La laïcité cache en fait l'exclusion de l'islam. le « problème musulman » renvoie à la crise des banlieues. La ghettoïsation, l'apartheid géographique sinon racial fait ressurgir un imaginaire colonial. Et c'est ce dernier point qui est le plus stimulant et le plus polémique dans le travail de ces trois auteurs. Depuis une quinzaine d'années ils explorent, dans de nombreuses publications dont nous avons rendu compte ici la rémanence du fait colonial. L'immigré aujourd'hui, disent-ils, est traité comme le colonisé hier. L'inquiétude qu'il inspire au « Français de souche » justifie qu'un traitement dérogatoire lui soit appliqué : ses doits civiques (le droit de vote), individuels (la liberté religieuse), sociaux (le droit au travail, à un logement décent) sont bafoués. Une même « situation coloniale » – au sens où l'entendait Georges Balandier – perdure entre des citoyens et des indigènes qui vivent côte à côte mais pas ensemble.
Comment sortir du Grand repli ? Comment restaurer le vivre-ensemble ? Les auteurs et leurs collègues de l'Association pour la connaissance de l'histoire de l'Afrique contemporaine (ACHAC) le répètent sans être entendus : en évoquant sans fard le passé colonial de la France afin que tous les enfants de la République s'y reconnaissent. Ce « passé qui ne passe pas » doit être enseigné dans les écoles : la réforme des programmes scolaires laissant plus de place à l'histoire de la colonisation va dans le bon sens. Il doit être montré dans les musées : après l'inauguration du mémorial ACTe en Guadeloupe reste à espérer qu'un lieu de mémoire soit inauguré en métropole, qui ne cède ni à la nostalgie ni à la repentance.
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Vidéo de Nicolas Bancel
Modération: Pascal BLANCHARD, historien Intervenants: Nicolas BANCEL, professeur à l'université de Lausanne, Sandrine LEMAIRE, agrégée et docteur en histoire de l'Institut universitaire européen de Florence, Alain MABANCKOU, écrivain et enseignant, Erik ORSENNA, écrivain et membre de l'Académie française
Pendant plus de deux siècles, de 1750 à nos jours, de l'ancien empire colonial à la dernière décolonisation (1980, avec les Nouvelles-Hébrides), l'empire colonial a fait partie du quotidien des Français. Affiches touristiques ou de recrutement militaire, expositions coloniales et universelles, manuels scolaires et propagande dans les écoles, couvertures de livres et de magazines, presse et brochures de propagande, photographies et cartes postales, jeux de société et bandes dessinées, publicités et films, monuments et statues, peintures et émissions de radio… tous les supports ont participé à cette apologie de l'Empire et de la « Plus grande France ». Cette histoire a traversé les générations et nous questionne à l'occasion du 60e anniversaire des indépendances, elle a engagé des budgets majeurs, a déclenché des conquêtes et des guerres sans fin, et cette histoire interroge aussi désormais la République et l'histoire contemporaine de la France à travers les débats mémoriaux actuels. Cette histoire est une histoire française. Une approche inédite sur le passé colonial de la France qui participe au travail de déconstruction en cours sur l'héritage de la colonisation, et qui nous permet de regarder autrement ce passé et les héritages dans le présent. Voir moins
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