Auteur d'une oeuvre importante – avec toujours
la poésie trônant en majesté –, l'écrivain au sourire
malicieux et généreux,
Georges-Emmanuel Clancier
vient de s'éteindre ce mercredi 4 juillet 2018 , à l'âge
de 104 ans.
Au journaliste
Jérôme Garcin, qui lui a rendu visite en
2013, ce vieil homme digne, à l'esprit encore preste
et toujours agile, disait avoir préparé sa dernière demeure :
"ce sera au cimetière Montparnasse, dans une tombe sur
laquelle sera gravée, en guise d'épitaphe, un distique tiré
d'un de mes poèmes :
" Nous qui sommes trace éphémère
Dans la merveille et dans l'effroi ".
Mais laissons plutôt la parole – poétique ‒ à ce grand
petit bonhomme, évoquant si justement " des ruisseaux
bondissant dans la ronde écolière,", ainsi que ces
" Croisées de vies, … Avançant, …vers l'oubli, la joie
au ras des gouffres ", enfin cette " éclosion si brève
Et de l'éternelle pulsation ". :
" Ruisseau dansant des voix écolières
Tant de lumière une fois encore à promettre
Le bonheur.
Ô monde trop vieux, trop las,
Reprends tes billes, reviens jouer dans le matin
Ce jeu pour nous léger : à la vie à l'amour.
Ils sont partis déjà maints compagnons de l'espérance
— Nous la chantions ensemble au plus clair du naufrage,
Respirons pour leurs ombres cet instant de clarté :
Il naît du ciel et des sources de leurs voix
Si proches, sous le miroir du temps à jamais,
Des ruisseaux bondissant dans la ronde écolière.
p.36
Croisées des vies ; l'instant de l'une
À l'ombre d'une autre entrelacé.
Étoile, grondante étoile à mille branches,
Corps en croix bienheureux l'un à l'autre cloués.
Traversée longtemps à l'heure incertaine
Pareille à quelque aveugle quête affamée
Avançant, errant à l'estime, aventure
Vers l'oubli, la joie au ras des gouffres.
p.44
" Pour un instant où soleil et nuit
S'enlacent,
Pour un instant déjà sombré,
Rencontre au coeur de l'élan,
Affrontement
D'une histoire à la folie pareille,
Indéchiffrable récit
Magnifié d'enfance
Mot à mot insensé de l'amour,
Affrontement dans la foudre
D'une éclosion si brève
Et de l'éternelle pulsation.
p.150-151