Sigmaringen raconte l'installation du gouvernement de Vichy en Allemagne via Belfort en août 1944. le Maréchal Pétain et sa suite quittèrent Vichy le 20/08/44 à 7 heures du matin et firent une première halte à Belfort. le Maréchal quitta la France sur ordre des Allemands et donna à son départ des allures de bousculade afin de donner l'image d'un prisonnier malmené et quelque peu rudoyé, mais c'était une mascarade ourdie par son état major pour se donner un peu de dignité.
Sigmaringen est le nom de l'immense et hétéroclite château de la seconde branche des Hohenzollern-Sigmaringen (la branche catholique et souabe).Le château de Sigmaringen arborait le drapeau français à partir du 7 septembre 1944 et il avait le statut d'extraterritorialité, ce qui enlevait à tous ses résidents la condition de prisonniers. Mais ces français étaient dans une situation ambiguë car l'entretien de la colonie française au château était assuré par une avance faite par le clearing des échanges économiques entre la France et l'Allemagne. À Sigmaringen, Pétain adopte une prétendue position de prisonnier et refuse tout acte qui le mettrait en contradiction avec cela et Laval fuit toute action ayant un air d'acte de gouvernement. Les Allemands, à défaut de pouvoir utiliser Pétain et Laval dans leurs fonctions politiques, pensaient se donner au moins une impression de légalité.
A la suite des manigances de Ribbentrop, l'ancien Ambassadeur allemand pour la France, Otto Abetz, était tombé en disgrâce et Laval a dû alors quitter Sigmaringen, en décembre 1944. Laval, par son attitude en retrait, était un frein, un facteur de démotivation et de démoralisation parmi la colonie française et l'autorité allemande l'a désavoué.
Quant aux autres vichystes (Jean Luchaire, Fernand de Brinon, Marcel Déat, Jacques Doriot, Joseph Darnand, le docteur Bernard Ménétrel, l'amiral Bléhaut, le général Debeney, Jean Bichelonne, Maurice Gabolde, Paul Marion, etc) ils complotaient en permanence, se querellaient et n'avaient que des ambitions personnelles contrariantes et ce jusque tard dans le conflit.
Au printemps 45 Hitler vivait sa défaite terré dans son bunker de la Chancellerie. de sa politique avec la France, il aurait dit…"c'est à l'égard de la France que l'erreur de notre politique a été la plus complète. Il ne fallait pas collaborer avec eux. Cette politique qui les a servis nous a desservis. ..Notre devoir était de libérer la classe ouvrière, d'aider les ouvriers de France à faire leur révolution. Il fallait bousculer impitoyablement une bourgeoisie de fossiles, dénuée d'âme comme elle est dénuée de patriotisme"...
En avril 45 le Maréchal reprend la route vers la France via la Suisse. Il refusera de rester en Suisse comme l'aurait souhaité De Gaulle et se rendra directement en prison en attendant son jugement par la Haute Cour de justice. Une question qui a pesé lourdement lors des procès de Pétain et Laval, était l'incertitude suivante: étaient-ils partis de France en août 1944, en complices, en otages ou en victimes? La propagande allemande avait travaillé une partie de l'opinion vers une version tendant à propager l'idée que Pétain et Laval avaient suivi librement les Allemands.
L'avis de l'historien Cointet à la fin de l'ouvrage est intéressant…"c'est l'acharnement à tenter de maintenir du sens à ce passé qui explique l'étonnant activisme déployé par les naufragés du temps de Sigmaringen. Seuls, Pétain et Laval ont fait exception, par leur abstention même. Leur erreur: penser pouvoir justifier ce passé dans la lumière aveuglante des temps nouveaux".
Une lecture très intéressante à faire, l'histoire d'un passé peu connu à découvrir. Les faits vieux de 80 ans sont encore douloureux et font état d'un passé très sombre.
Un livre bien construit qui ne se contente pas d expliquer la période de 8 mois d'occupation du château par la commission regroupant les derniers collaborationnistes.
En effet, l historien croise un ensemble de sources permettant de comprendre comment les collaborationnistes ont cru jusqu au bout à la possible victoire de l Allemagne. C'est une lecture qui rend perplexe face à ces hommes qui continuent de prendre des décisions alors qu'ils n ont absolument plus aucun pouvoir. Leurs haines réciproques et leur logique de justification de leur action frôle le ridicule.
Les Déat, Doriot, de Brinon etc sont étudiés a travers leurs journaux et certains témoins. l'historien met également en relation grâce aux archives, leurs parcours avec la défaite allemande et les avancées des alliés.
C est donc un ouvrage sur les dernières heures de la collaboration française en Allemagne ou chacun cherche à obtenir le meilleur poste auprès des autorités elles mêmes dépassées par la défaite.
Une très bonne synthèse offrant un panorama d ensemble de cette courte période (été 1944; printemps 1945).
Très bonne analyse de la fin du gouvernement de Vichy et de la collaboration française . Très bien documenté et d'une écriture simple , sans surcharge inutile en dates ou lieux cet essai se lit comme un roman .
.Ce livre de 2003 est intéressant à plus d'un titre : d'abord un aperçu sur une période courte mais particulièrement chaotique de notre histoire . Ensuite un coup de projecteur sur l'âme politique : ces hommes emportés dans le tourbillon de la défaite , la ruine de toutes leurs espérances et qui se déchirent pour des titres de papier crépon et des couronnes en papier doré ne peuvent que nous faire mieux comprendre l'acharnement de politiciens en dépit de toute logique ( suivez mon regard) ….
Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell