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EAN : 9782849507131
28 pages
Syllepse (20/01/2019)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Au Moyen-Orient, le Hezbollah libanais apparaît désormais comme un acteur politique et militaire incontournable. Au Liban, il est de tous les gouvernements et a acquis de fortes positions de pouvoir. Ses détachements armés qui luttent à la fois contre l’État islamique et soutiennent le régime despotique d’Assad, ont acquis un poids militaire digne d’une véritable armée.
Né comme l’expression politique des couches chiites libanaises pauvres et marginalisées pa... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Les pratiques d'une orientation favorable au néolibéralisme, à la division confessionnelle et le soutien militaire à la dictature syrienne

Dans son introduction, Joseph Daher aborde la création du Hezbollah, l'invasion du Liban par l'armée israélienne, la guerre civile, la résistance…

« Mouvement de masse doté d'un large réseau d'organismes de bienfaisance et de diverses institutions qui satisfont les besoins sociaux et offrent des services à la population, son influence sociale et politique au sein de la population chiite est bien plus importante que celle de son allié Amal ».

L'auteur analyse les caractéristiques du Hezbollah, son idéologie, ses pratiques sociales, son objectif « réactionnaire et confessionnel », sa modernité, « les fondamentalismes ne doivent pas être considérés comme des éléments fossilisés du passé. Bien qu'ils emploient des symboles et des discours de périodes antérieures, ils sont vivants, dynamiques et représentatifs de tendances contemporaines majeures, notamment en ce qui concerne la satisfaction des besoins culturels … Leur émergence doit donc être pleinement située dans le contexte politique, économique et social de la période contemporaine ».

Il souligne le contexte régional, les financements et l'industrie du pétrole, le recul des forces « progressistes », les répressions ; et pose des questions : « Comment expliquer les politiques et la pratique du Hezbollah en relation à l'économie politique du Liban et à la population chiite du pays ? Comment a-t-il pu construire une base de soutien massif parmi la population chiite ? Quelle est la nature des relations entre le Hezbollah et la République islamique d'Iran ? »

Il est important d'analyser les pratiques réelles, de ne pas en rester aux discours et aux idéologies, de ne pas céder aux orientalismes. Il s'agit bien ici d'une histoire des temps modernes, de politiques néolibérales, de « nouvelle bourgeoisie chiite », de large réseau d'institutions, d'activités militaires, d'engagement en Syrie en soutien à la dictature…

« L'objectif de cet ouvrage est d'appréhender le Hezbollah au travers d'une compréhension matérialiste et historique des mouvements issus de l'intégrisme islamique, en analysant l'évolution de ses structures organisationnelles, ses relations avec le système politique et de situer son évolution dans la formation étatique libanaise et les rapports de classes au sein de ce pays ».

Dans le premier chapitre, Joseph Daher propose une présentation historique, après le démantèlement de l'empire ottoman, « le Grand Liban fut placé sous l'autorité du Mandat français », une analyse du confessionnalisme, « une représentation politique sur une base confessionnelle et l'ancrage de la domination maronite dans les échelons élevés de l'Etat » des éléments de l'économie politique du Liban, « Les chiites avaient le plus faible niveau de représentation politique de toutes les communautés, et avant 1974 ils étaient très peu à exercer des responsabilités au niveau de l'Etat ». L'auteur parle du secteur des services et du sytème bancaire, de la bourgeoisie commerciale et financière, des profondes inégalités « sociales, régionales et confessionnelles », des modifications depuis indépendance, de l'impact des migrations, de la guerre civile (1975-1990) et des effets de dislocation sociale, de la place de la résistance palestinienne, de l'invasion israélienne en 1982, de la création du Hezbollah, de la légitimité que celui-ci acquiert dans la lutte militaire contre l'occupation israélienne, de ses « activités caritatives, médicales et éducatives », des liens avec l'Iran, des tensions et contradictions engendrées par ses choix politiques et sa « représentation » des couches pauvres chiites.

Contexte régional, géopolitique des puissances locales et internationales, domination du néolibéralisme et des prêts conditionnés par le FMI et la Banque mondiale, profondes inégalités « liées à la nature rentière et financière de l'économie » renforcées par les mesures néolibérales, évolution du Hezbollah sur le confessionnalisme et intégration dans les structures institutionnelles, clientélisme et corruption, défense de l'économie de marché et de la propriété privée, politique municipale, sources de financement, intérêts commerciaux, mutation de la « base sociale du Hezbollah », différenciation sociale dans la population chiite, développement économique du Hezbollah… L'auteur fournit de nombreux exemples permettant de saisir les évolutions, les nouvelles contradictions, les réalités derrière la phraséologie et les discours idéologiques.

Joseph Daheranalyse, entre autres, les relations entre le Hezbollah et la « société civile chiite », les structures de cette organisation, la prédominance des religieux, la centralisation extrême et la forte hiérarchisation, les activités de « soutien social », la « capacité à apporter une aide concrète à la population civile à la suite des conflits et des guerres », les investissements dans les activités de reconstruction, les nouvelles institutions religieuses, les espaces ouverts à la jeunesse marginalisée, la conception particulière de la religion « liant le soutien au parti et le respect des obligations religieuses », les « attributs de légitimation », les liens institutionnels reliant le parti et un réseau d'écoles.

L'auteur utilise, en référence aux analyses d'Antonio Gramsci les notions de « consentement et de coercition ». Il me semble important de revenir sur la notion de consentement, en regard des apports des féministes (en particulier, Nicole-Claude Mathieu ou Geneviève Fraisse).

Quoiqu'il en soit je souligne les passages sur les « normes sociales de comportement social », les conceptions de l'« islam authentique » réduites aux versions chiites, les violentes intimidations, le rôle spécifique attribué aux femmes, la complémentarité contre l'égalité, la codification des frontières entre sexes, la restriction des « interactions » mixtes, le refus de soutenir la législation en faveur de l'égalité des femmes dans la famille – et celle de reconnaissance du viol conjugal -, la stigmatisation des divorces…

L'histoire du mouvement ouvrier libanais, les organisations syndicales, la restructuration de CGTL sur une base confessionnelle, les discours trans-classiques et les références religieuses, les grèves, les alternatives et la répression, « Il est de plus en plus clair que le Hezbollah, comme les autres partis politiques du pays, agit concrètement pour empêcher toute émergence d'un mouvement populaire transconfessionnel qui serait en mesure d'affronter plus radicalement les questions sociales et économiques »

Un chapitre est consacré à l'appareil militaire du Hezbollah, l'appareil de sécurité extérieure (ASE), les activités de résistance à l'Etat d'Israël, l'utilisation des armes contre des « acteurs libanais rivaux », l'usage permanent des armes dans la vie politique interne libanaise, l'organisation proto-étatique du Hezbollah, les orientations de statu quo « du système confessionnel politique et économique »…

Je souligne particulièrement le chapitre sur « le Hezbollah et les processus révolutionnaires au Moyen-orient et en Afrique du Nord », le prisme de l'« affrontement de civilisation », le soutien militaire à la dictature syrienne, l'armement et sa sophistication, les relations entre « le Hamas, le Hezbollah et l'Iran », la priorité donnée aux intérêts politiques propres plutôt qu'aux engagements de solidarité avec les opprimé·es, la préférence du Hezbollah « au retour du statu quo d'avant les soulèvements populaires »…

Il faut, comme le rappelle, Joseph Daher dans sa conclusion, le Hezbollah « dans son contexte politico-économique, dans ses relations avec le système politique confessionnel, avec l'Etat, avec les processus révolutionnaire de la région, avec les luttes ouvrières et les droits ». J'ajoute le droit à l'auto-détermination des populations. le Hezbollah défend une conception conservatrice des relations sociales, pas seulement une légitimation de la domination masculine sur les femmes. Cette organisation, peu démocratique, ne participe en rien à la construction d'alternatives émancipatrices au système capitaliste et confessionnel au Liban.

« Ce livre avait pour objet de démontrer que le Hezbollah et plus généralement les mouvements islamiques ne sont ni révolutionnaires ou progressistes, ni des groupes terroristes, mais des partis animés par des intérêts qui peuvent être expliqués par une approche matérialiste si on ne se concentre pas sur leur seule idéologie ».
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
les fondamentalismes ne doivent pas être considérés comme des éléments fossilisés du passé. Bien qu’ils emploient des symboles et des discours de périodes antérieures, ils sont vivants, dynamiques et représentatifs de tendances contemporaines majeures, notamment en ce qui concerne la satisfaction des besoins culturels … Leur émergence doit donc être pleinement située dans le contexte politique, économique et social de la période contemporaine
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Comment expliquer les politiques et la pratique du Hezbollah en relation à l’économie politique du Liban et à la population chiite du pays ? Comment a-t-il pu construire une base de soutien massif parmi la population chiite ? Quelle est la nature des relations entre le Hezbollah et la République islamique d’Iran ?
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L’objectif de cet ouvrage est d’appréhender le Hezbollah au travers d’une compréhension matérialiste et historique des mouvements issus de l’intégrisme islamique, en analysant l’évolution de ses structures organisationnelles, ses relations avec le système politique et de situer son évolution dans la formation étatique libanaise et les rapports de classes au sein de ce pays
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Ce livre avait pour objet de démontrer que le Hezbollah et plus généralement les mouvements islamiques ne sont ni révolutionnaires ou progressistes, ni des groupes terroristes, mais des partis animés par des intérêts qui peuvent être expliqués par une approche matérialiste si on ne se concentre pas sur leur seule idéologie
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Il est de plus en plus clair que le Hezbollah, comme les autres partis politiques du pays, agit concrètement pour empêcher toute émergence d’un mouvement populaire transconfessionnel qui serait en mesure d’affronter plus radicalement les questions sociales et économiques
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