Le vieil homme et le peintre.
On ne connaissait pas encore
Agnès Desarthe et ce premier album photos qui ne contient pourtant que
Cinq photos de ma femme, s'avère très prometteur.
Max a dépassé les 80 balais et s'ennuie un peu depuis qu'il s'est retrouvé veuf, ses deux enfants perdus à l'autre bout du monde.
Obsédé par le souvenir de son épouse, le voici à deux doigts de dialoguer avec son fantôme.
Max prend le diable à bras par les cornes et, armé de quelques photos de sa défunte (cinq pour ceux qui ont suivi), se met en tête de faire peindre son portrait.
Notre ami Max (les présentations faites par
Agnès Desarthe auront vite fait de nous transformer en ami de Max), notre ami Max se met donc en quête du peintre qui saura lui restituer le je ne sais quoi du regard de son épouse (un je ne sais quoi que l'on ne voit même pas sur les photos - vous voyez ?).
[...] Il se réjouissait à l'idée de la fixer enfin, de caler son joli visage triangulaire dans un cadre doré et de passer des heures, en son immobile compagnie, à discuter en silence.
En homme consciencieux, Max consultera même plusieurs artistes.
Voilà on vous a tout dit. C'est à dire rien.
Car ce roman d'
Agnès Desarthe, ce petit bijou, ne peut guère se résumer.
Il faut, au rythme du vieux Max, se laisser porter par la prose, la presque poésie, de l'auteure : tout cela pétille d'intelligence et de fraîcheur (on dirait du champagne), d'humour et d'auto-dérision.
L'esprit rappelle un peu celui d'
Echenoz même si le style est bien différent.
Les chapitres voient défiler les trois ou quatre peintres que Max va consulter, ses cinq photos en poche. Autant d'occasions pour des rencontres insolites, de savoureux dialogues et de pertinentes digressions.
Ce n'est pas une galerie de portraits, mais une galerie de peintres.
On se doute bien que l'on n'obtiendra guère plus que quelques images et quelques souvenirs de l'épouse défunte : on sait bien que ce n'est pas la destination ou le portrait qui importent mais le voyage et les rencontres faites en chemin. Finalement on en apprendra beaucoup plus sur Max que sur sa femme, un Max qui tel Dorian Gray, semble rajeunir au fil des chapitres et de sa quête du portrait idéal.
Les différentes rencontres sont un peu inégales (celle du couple d'étudiants par exemple) mais les derniers chapitres avec la vieille dame (Nina) sont un véritable feu d'artifice : on jubile à la lecture des dialogues entre ces deux vieux philosophes.
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http://bmr-mam.blogspot.fr/