Il y a Prix Goncourt et Prix Goncourt...
Ce roman est intéressant et nous maintient dans une cellule en compagnie d'un autre prisonnier. On ne saura pas avant la fin du récit pourquoi le personnage principal, Paul, est enfermé, ni pour combien de temps ; en revanche, on comprend vite que son encombrant compagnon, Patrick, n'est pas un enfant de choeur et qu'il risque, lui, de rester longtemps encore sous les verrous.
L'intérêt de ce livre réside dans la description des rapports entre les deux prisonniers, dans la découverte progressive par chacun d'eux des qualités de l'autre (alors que, a priori, tout les oppose) et dans le contraste entre leurs deux modes d'évasion (fictive). Patrick ne rêve que de chevauchées en moto de grosse cylindrée ou de "fendre en deux" ses contradicteurs, alors que Paul reçoit les visites imaginées de sa femme et de sa chienne et offre ainsi au lecteur de découvrir progressivement sa vie antérieure.
Paul est un honnête homme qui a eu, on le devine, un comportement répréhensible, mais qui a toujours eu le goût du travail bien fait, le soin du détail et, par dessus tout, une bienveillante attention aux autres. Ses réflexions sur le bonheur nous touchent par leur bon sens et leur sincérité. Celles de Patrick, moins nuancées, nous font souvent rire.
Malgré le réel talent de
Jean-Paul Dubois, que ce soit pour décrire les belles envolées (réelles) d'amour de Paul avec sa compagne ou l'inexorable dégradation du climat dans l'immeuble dont Paul est le gardien, ou encore le contraste entre les deux protagonistes et la justesse du rendu de leur cohabitation forcée, je ne vois pas en quoi ce roman, de bonne tenue certes, mais pas magistral, mérite le Prix Goncourt.
Deviendrais-je trop exigeant à force d'avoir la chance de lire de bons, et parfois d'excellents romans ? Comme tout un chacun, "je reste roi" de mes joies et "de mes chagrins", et j'admets qu'il en soit de même pour les membres de l'
Académie Goncourt. Peut-être ont-ils voulu récompenser l'auteur pour l'ensemble de son oeuvre (que je ne connais pas), mais, dans ce cas, il eût fallu le dire explicitement.