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EAN : 9782130504061
384 pages
Presses Universitaires de France (01/05/2000)
4/5   2 notes
Résumé :
Présentation de l'éditeur
Nietzsche a découvert un continent, celui de la Volonté de Puissance - et nous l'avons perdu. Délibérément, consciencieusement perdu, avec un acharnement à la mesure de l'effroi qu'il nous inspire. Car nous n'aimons pas savoir qui nous sommes, nous n'aimons pas marcher à visage découvert, la poitrine nue, vêtus de notre seul courage ; en bons pharisiens, en bons démocrates, en bons hypocrites, nous nous glissons le long des murs, fur... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
NIETZSCHE, LA RENAISSANCE DE LA TRAGÉDIE.ENTRETIEN AVEC BERNARD EDELMAN, QUI A TROUVÉ UN COMMENCEMENT ET UNE TERRIFIANTE ACTUALITÉ CHEZ LE PHILOSOPHE DE «L'ETERNEL RETOUR», EN LE LISANT COMME «POUR LA PREMIÈRE FOIS». BERNARD EDELMAN, NIETZSCHE, UN CONTINENT PERDU, PUF, 368 PP., 139 F.
Par Robert Maggiori
— 10 février 2000 à 22:21
Assurément, Bernard Edelman a plusieurs vies. le jour, il est avocat

et juriste, spécialisé ­ depuis le droit saisi par la photographie, longtemps le «label» de son travail ­ dans toutes questions touchant les brevets et la propriété littéraire, les droits de la presse et des biotechnologies. le soir, il est philosophe du droit, occupé à dire ce que le droit dit de l'homme, et à suivre les mutations auxquelles le droit est contraint par les nouveaux pouvoirs que la science donne à l'homme. La nuit, il visite les maisons des philosophes: celle de Kant, et, aujourd'hui, celle de Nietzsche. Nietzsche, un continent perdu vient de paraître. Bernard Edelman y tente un pari presque impossible: lire Nietzsche comme «pour la première fois», avec des yeux non pas naïfs mais préparés à n'être aveuglés ni par ce que sa pensée produit d'éblouissant ou d'incantatoire ni par ce qu'elle produit d'effrayant. Il en résulte un livre très nietzschéen, dans son ton et son style d'abord, dans sa méthode de «ressassement», dans ses audaces enfin, puisqu'Edelman n'hésite pas à promouvoir de nouveau, en un sens qu'on laissera découvrir, les thèmes mêmes de la volonté de puissance, de l'«homme futur», de la surhumanité qui ont valu à Nietzsche d'être un temps maudit.

Vous cherchiez quoi, dans la «maison de Nietzsche»?

Mon désir en écrivant cet ouvrage était de redonner à la pensée de Nietzsche toute sa cohérence, en prenant en considération tous les fragments posthumes, où l'on trouve, à mon avis, tous les soubassements de l'oeuvre. On a trop souvent utilisé Nietzsche à des fins partisanes ou à des fins purement narcissiques. C'est, d'ailleurs, un très curieux destin philosophique, sur lequel on pourrait s'interroger. Comment rétablir la cohérence? En posant à Nietzsche des questions toutes simples, naïves même: où est-ce que ça commence? Comment ça se poursuit? Comment est-ce que cela s'achève? Ou, dit autrement, quel espoir peut donner Nietzsche, lui qui est le philosophe du tragique «amor fati»?

C'est curieux de vouloir chercher, chez le philosophe de l'«éternel retour», un" commencement.

Certes, les mêmes catégories, le Bien, le Mal, le Moi, la Conscience, tournent et retournent sans cesse chez Nietzsche, sont perpétuellement revisitées dans l'anthropologie, la morale, la religion, la biologie. Et son oeuvre est comme un organisme vivant, dont on ne peut pas dire qu'il débute ici ou là. Pourtant je suis persuadé que, dans son travail même, Nietzsche commence comme les présocratiques, c'est-à-dire par une théorie du cosmos. Seulement, ce n'est point le chaos héraclitéen, par exemple, mais le chaos de la physique contemporaine, celle qui vient après Newton, celle qui est annoncée par la thermodynamique. Et c'est dans sa réflexion sur le cosmos qu'il découvre la volonté de puissance, qui est un principe physique, comme Deleuze l'a pressenti. Passant du cosmos à la vie ­qui est une «erreur» au regard du chaos puisque le temps intervient­ Nietzsche pense en biologiste. Et, là encore, il est le fils de son temps: Lamarck, Darwin, sont passés par là. Tout le problème consistera à penser le passage de la volonté de puissance ­ concept de la physique ­ du chaos au vivant. En deux mots: comment l'énergie du cosmos se transforme-t-elle en énergie vitale, dès lors que cette énergie est saisie par le temps?

Nietzsche physicien et biologiste?

Puis anthropologue, car il lui restera à passer du vivant à l'homme, à l'histoire de l'homme, au destin de l'homme. Ainsi, il me paraît avoir restitué, au niveau le plus général, le parcours philosophique de Nietzsche. Mais une chose est la restitution du parcours, une autre l'analyse précise et circonstanciée de chaque moment de ce parcours. Là où il me semble avoir innové, c'est dans l'attention portée aux analyses concrètes de Nietzsche, qu'il s'agisse aussi bien des analyses très fines qu'il fait de la constitution de l'instinct, de la conscience, etc., que des analyses proprement sociales ­ je pense à sa théorie du travail, de la classe ouvrière, de l'éducation" Quelles considérations de Nietzsche vous paraissent le plus «actuelles»?

Nietzsche nous enseigne cette chose assez effrayante que l'homme est un animal qui s'éduque, un animal d'élevage et d'auto-élevage. Et tout ce qu'il nous dit sur l'instinct grégaire, la peur de la liberté, l'effroi du destin qui nous précipite dans la vitesse ­ aller vite pour, surtout, ne plus penser ­ me semble cruellement contemporain. Enfin Nietzsche est évidemment un moraliste, mais un moraliste d'un type un peu spécial. C'est, à ma connaissance, le seul grand philosophe qui nous permet de penser, rigoureusement, la bioéthique, à savoir une éthique qui accepte totalement, radicalement, que nous sommes au premier chef des êtres biologiques. En quel sens prenez-vous à votre compte l'idée qu'aurait sonné pour l'humanité «l'heure de midi»? Vous écrivez que nous serions parvenus à l'ère, «à nouveau lumineuse», d'une «volonté de puissance active, gonflée de sève, prête à éclore». Ne craignez-vous pas qu'on vous reproche quelque adoration du «surhomme»?

Nietzsche n'est pas une «idole» et je ne suis pas «idolâtre». Mais une chose est sûre: nous vivons à l'heure d'aujourd'hui un immense gâchis, une immense dégradation. La démocratie ne parvient plus, dans ses formes actuelles, à régler cette déperdition d'énergie, la mondialisation nous transforme en «humanité inhumaine». Nietzsche ouvre une voie: celle de la «surhumanité». Je pense qu'il s'agit là d'une figure de salut désespéré. Cette voie, en tout état de cause, est un appel. A nous d'inventer d'autres réponses.

Robert Maggiori
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Pour ceux qui s’appelaient eux-mêmes les « Véridiques », il n’y avait ni bien ni mal, ni raison ni déraison, ni humanité ni inhumanité : tout se produisait dans la plus grande simplicité, dans la plus grande nudité (…). Être ingénu, « cru », aussi évident que la vie même, ressentir une sorte de « divination du corps », tout approuver de soi-même, aller jusqu’au « grand abîme, le grand silence grec p.126.
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Une nature déshumanisée devrait être pour nous l’expérience du bonheur, c’est-à-dire de ce sentiment pur du hasard, de l’aléatoire, de l’incongru, de l’imprévisible. Si on emprisonne la vie dans la pensée, elle devient un fardeau insupportable p.19
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En revanche, lorsqu’il est aux mains des faibles, il est agi par une volonté de puissance réactive ; il s’impose alors comme le garant des valeurs grégaires : il est « utilitaire et calculateur », gestionnaire, mercantile, anti–individualiste p.229
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Le travail du généalogiste consistera donc à briser « les belles formes » de la métaphysique, « la belle conscience », les « beaux sentiments », pour retrouver la monstruosité, le grouillement, la luxuriance p.66
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Qu’est-ce que la vie a à faire avec la logique, la raison, la grammaire, le sujet ou l’objet, elle qui ne connaît que la volonté de puissance ? p.55
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