«
Une vie de homard » est un roman de
Erik Fosnes Hansen, l'un des écrivains norvégiens les plus réputés actuellement. Tels les homards coincés dans leur bocal avant le passage inéluctable dans un marmite d'eau bouillante, les personnages du livre évoluent en vase clos dans un grand hôtel, où progressivement tout vacille et se désagrège.
Svedd, le narrateur, est un adolescent qui vit dans un hôtel tenu par ses grands-parents, en Norvège. Hélas, malgré l'énergie déployée pour maintenir en état l'établissement, les temps sont durs, les clients se font rares. Svedd est un brave garçon, dévoué et mature; il enchaîne les corvées, sous la houlette du cuisinier, Jim, et vole même au secours du banquier local, victime d'un malaise lors d'un dîner officiel, pour tenter de le ranimer.
Roman d'initiation, qui montre un jeune homme en train d'affûter progressivement sa conscience du réel, «
Une vie de homard » est aussi le récit de la fin d'un monde, incarné par les deux grands-parents. Ces deux mouvements contraires, inspiration pour l'un, expiration pour les autres, adviennent simultanément – la mort du banquier, dès la première page, marquant le début d'un processus de délabrement inéluctable.
Dès lors, le lecteur se place au niveau de Svedd en observateur de l'effondrement programmé, témoin de faits un peu bizarres, enquêteur dilettante à la recherche de son passé familial. En grandissant, il passe de la collection de timbres à la photographie, signe de son désir de capter les instants, les indices peut-être. Dans l'hôtel existe en effet une chambre au nom mystérieux, dont Svedd ne parvient pas à ouvrir la porte – on ne peut s'empêcher de penser à la chambre de Barbe-Bleue, et la narration vient alors flirter avec le conte.
Mais s'il devait y avoir une morale à cette histoire, il faudrait plutôt la chercher du côté du regard jeté sur la réalité ; s'ils s'entourent d'une carapace protectrice, ‘façon homard', les personnages font aussi preuve d'une myopie persistante, arrangeant les évènements à leur sauce, dans une sorte de déni de la réalité permanent. Ainsi Svedd, ne voit-il dans la jeune cliente de l'hôtel, Karoline, qu'une ‘gamine collante', alors qu'il aurait pu avec elle, s'autoriser à ressentir les premiers émois de l'adolescence.
«
Une vie de homard » est ainsi un roman tout en nuances et en subtilités, agréable à lire, avec des personnages attachants, un brin d'humour – et sous la ‘carapace' de l'intrigue, on ressent la sensibilité de l'auteur, et son empathie pour ce microcosme perdu dans les montagnes norvégiennes. Pour la suite, cliquez sur le lien !
Lien :
https://bit.ly/2OVKTqw