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sur 2641 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
♫ Y a quelqu'un qui m a dit ♫ :
- "Lis-le ; tu verras, c'est magnifique ! A partir d'un drame personnel ( la mort en moto, de son mari , il y a vingt ans), elle en fait un truc universel."

L'appartement qu'on achéte, parce que la pierre , c'est un bon investissement.
Puis l'appartement qu'on revend parce qu'il est trop petit, qu'on veut un jardin, qu'on s'embourgeoise. ♫Madame rêve♫, de travaux d'embellissement, de déco, de murs à repeindre, de trucs à décaper. Mais madame culpabilise encore vingt ans après et nous livre l'enchainement des circonstances qui ont causées la mort de son époux bien-aimé , en égrainant les "si" et en déroulant les faits chronologiquement , implacablement , dans toute leur horrible banalité.


SI, elle n'avait pas voulu déménager, si elle n'avait pas réussi à avoir les clefs plus tôt. Si son frère n'avait pas mis la moto dans leur garage. Si la France avait interdit ce modèle de moto... Si son mari n'avait pas enfourché la moto...
( Là, j'avoue, Brigitte, sur le chapitre de la "moto -interdite- mais-pas-chez-nous", j'ai sauté des lignes.
(Vois -tu , aux motos, je préfére Babelio...)

Mais bon, je continue, Brigitte, vaillamment. Ton mari , ça avait l'air de quelqu'un de bien. Toi aussi. On a les mêmes références, tu sais et ça aide à entrer en empathie...
Ta douleur (vingt après...) est palpable. Tu es touchante Brigitte.
Très .
( Chez moi, on dirait que "tu me fends le coeur." ).
Et tous tes " SI", dans les dernières pages m'ont mis de l'eau plein les yeux...
Tu avais déjà écrit un roman sur la mort de ton mari, mais tu as éprouvé le besoin, de recommencer.
Parce que " La Maison" est encore une fois d'actualité.
Un promoteur gourmand menace de grignoter le soleil de ton jardin, alors le roman commence avec la vente de cette fameuse maison, celle que vous aviez acheté à deux, mais que tu as habité seule avec votre fils, la faute au destin, ou à pas de chance.

Et du coup , cela donne une construction remarquable au roman : la boucle est bouclée. le roman commence là où tout s' était fini... Une p... de bonne idée de plan !
La maison sera détruite, comme si ces vingt ans n'avaient pas existé. Pffffft... C'est dérisoire, parfois, le matériel...

Presque un journal, presque un portrait du disparu, presque un cadeau pour ce fils qui ne grandira pas avec son père. Un roman, presque comme un héritage, un album photo. Ce roman est un roman sur un disparu. Un roman, dont tu ne savais pas en le commençant, qu'il t'apporterait le Goncourt, la reconnaissance, une visibilité.

Car l'histoire des "SI" n'est pas finie, Brigitte...
SI ton Claude n'était pas mort, tu ne l'aurais pas écrit, tu n'aurais peut-être pas eu ce prix.( Mais tu aurais sûrement préféré...)
Mais s'il n'était pas mort, tu aurais écrit autre chose, tu aurais peut-être eu un prix etc...
SI, si , si...
On ne saura jamais.


Est-ce que ça méritait le Goncourt ? Je ne sais pas. C'est dur de juger, j'ai l'impression de juger ton chagrin...
Certains passages sont "chiants", certains sont plats, factuels, d'autres sont pleins de grace...

Certains lecteurs préféreront des auteurs capables de bâtir un monde imaginaire, trouveront que cela nécessite davantage de travail, d'imagination, de talent. Je crois que je fais partie de ceux-là. Mais après tout ce chagrin étalé ( palpable encore 20 ans après, même s'il est si digne), je me sens un peu minable de penser ça...









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J'ai écouté mille fois des mélodies lancinantes, des guitares saturées et des voix de femmes qui ânonnent : fa-mi-ré-fa-do-ré, pendant que des coeurs font : la-la-la-la-la-la mais jamais, jamais, je n'avais lu de roman nourri de : si-si-si-si-si-si… 23 « Si » dont un seul aurait pu empêcher une horrible tragédie et laisser se jouer la mélodie du bonheur.
Ce roman est le questionnement inéluctable de Brigitte Giraud pour repousser la responsabilité sournoise qui s'immisce dans chaque phase qui précède l'accident d'un proche.
Claude, son mari, s'est tué en moto. Wheeling fatal en 900 CBR Fireblade.

20 ans plus tard, elle partage sa tristesse et son émoi, cherche les causes du drame et recommence sans fin les épisodes où les « si » auraient pu faire plier le destin.
Ce roman fait également revivre l'année 99 en musique, Claude était responsable de la discothèque de Lyon : Blur ou Oasis, PJ Harvey ou Dominique A, Iggy Pop ou Death in Vegas. Toute une époque imprégnée de New Wave où Chirac croquait encore des pommes et s'enfilait des « Corona », où Elie Kakou me faisait mourir de rire avec Mme Sarfati pendant qu'il mourrait du Sida et où Paco Rabanne prévoyait que pendant l'éclipse, si la station Mir s'écrasait sur la terre, ce serait la fin du monde.
Brigitte Giraud l'a réellement souhaité tellement sa douleur fut forte.
Finalement : « Noël au balcon, Paco Rabanne », j'adorais…
Il n'y a pas de « si », juste le livre de la rédemption de cette femme à la solide détermination mais de là à recevoir le « Goncourt » …
« On ne sait jamais ce qui serait arrivé si ce qui est arrivé n'était pas arrivé. »





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Je me souviens avoir lu un précédent livre de Brigitte G. ( dont j'ai lu déjà beaucoup d'oeuvres ) où elle évoquait ce drame , la mort accidentelle de son mari Claude le 22 juin 1999, d'une brutalité inouïe , c'était «  À présent » .

Un récit de deuil qui disait sa rage et sa détresse , je crois en 2001.

Une dernière fois, elle tente ——-dans ce récit tendu comme un arc ,——-en faisant pour ainsi dire le tour du propriétaire , de comprendre les événements qui y ont conduits .

Vingt ans après , une fois le désastre consommé , ces événements se transforment en «  SI » destin, hasard , coïncidences ? , une multitude de «  SI » comme un genre de litanie tout à fait obsédante , entêtante , pour les survivants , une réalité au conditionnel passé .

Signature de l'acte de vente,accident, déménagement , Obsèques .Chaos résume t- elle aujourd'hui …

Et si il avait pris sa moto, et pas le bolide rangé dans son garage par le frère de Brigitte G? .
Et s'ils n'avaient pas parié modestement sur leur avenir en achetant cette maison ?
Brigitte G rappelle que c'est ELLE surtout qui voulait bouger,….

Et si il avait su qu'il ne devait pas aller chercher son fils à l'école? Et si , et si ?
Ces «  Si » , sont une invitation au souvenir , une façon de retenir le temps encore un peu, comme si chercher des signes , des indices pouvaient donner un sens au drame .
Sans trahir et surtout sans oublier , cette enquête lui permet de tourner enfin la page, de tenter d'en finir avec la culpabilité , s'autoriser à être vivante et oser de nouveaux vertiges …

Dans ce récit pur , fascinant du mystère dont sont composées nos vies, l'auteure dépasse sans doute son histoire personnelle pour nous dire l'universalité de la perte, puis de la reconstruction .

C'est une déclaration. d'amour touchante, complice ,pudique, où chaque chapitre décrit une foule d'émotions à fleur de peau ,des bonheurs dans le souvenir , petites esquisses de sourire , invitation à retenir le temps avant l'irrémédiable , quand la vie va beaucoup trop vite ——-le couple pressé avait oublié que vivre était dangereux ——électrisé par la perspective du déménagement .
En phrases délicates elle écrit sobrement , comme à son habitude ,d'une façon moderne , complice , pudique toujours ……la puissance de l'écriture et sa vérité préservent le souvenir et mettent la mort derrière soi..

«  La maison était devenue le témoin de ma vie sans Claude » .

«  Comme si c'était un privilège ,comme si cette liberté marquait une nouvelle fois la supériorité du Français sur le monde entier. C'est eux qui les fabriquent ,mais c'est nous qui en mourons . Un peu comme les armes que l'industrie française envoie par - delà les océans » .

«  Ça fait vingt ans et ma mémoire est trouée.Il m'arrive de te perdre ,je te laisse sortir de moi…. »
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" Il y a ces lames de fond qu'on n'a pas vu venir, qui enflent et viennent vous engloutir quand vous avez le dos tourné. "


- à l' image d'un accident ou d'une lecture, hasards (?) percutants -


Vingt ans séparent l'écriture de Vivre vite et l'accident de moto qui a tué Claude, compagnon de l'auteure, père de Théo


Refaire le chemin à l'envers,
Retourner à l'avant accident,
Aux temps insouciants,
Ajouter des --- Et Si et si et si ?
Vaines tentatives d'explication
Trop tard pour conjurer le sort;
Peut-être faire exister Claude encore
encore un peu, avant de le laisser partir.


Vingt ans déjà,
Vingt ans seulement.


Une porte se (re)ferme.

Celle d'une époque, d'une tranche de vie, d'une quête et d'une maison.


Brigitte abdique aux désirs béton des promoteurs et vend la maison devenue symbole du fil la reliant à Claude.
'Après de longues hésitations: "Should I stay or Should I go" ? comme la musique qu'il écoutait à s'en faire péter les tympans
Si Claude n'a jamais eu le temps d'y vivre, il en a hanté longtemps chaque pièce, chaque instant, chaque pensée, telle une obsession:
Trouver une raison, un coupable à sa mort absurde


Lyon. 22 juin 1999. Un homme se hâte pour aller chercher son fils.
Lyon, 22 juin 1999, 16h25. Sur la route, une moto dérape.
Lyon, 22 juin 1999, 21h30. "Nous n'avons rien pu faire"
- Claude, un sac plastique et un perfecto déchiré -


Vivre vite fait voyager sur la trame d'un film personnel rembobiné 1001 fois à coups d'interrogations, de doutes, d'hypothèses au fil de 23 chapitres courts commençant tous par: (Et) Si --- ? Ils renvoient à l'histoire intime, familiale et amicale de Brigitte, Claude et Théo, avant. Avant l'accident. Sur quelques heures, quelques jours ou plus loin en arrière.


Tout se mélange: "La maison, les clés, le garage, ma mère, mon frère, le Japon, Tadao Baba, la semaine de vacances, Hélène, mon service de presse --- ça commence à faire un sacré bordel"


Le ton employé par l'auteure est suffisamment pudique que pour sonner juste et faire résonner en nous ces questions, même si les 'histoires de chacun sont différentes', - et Si ?!? -, que nous sommes certainement nombreux à nous être posées (j'en fais partie)


Vivre vite touche, remue par les émotions suscitées - ressuscitées, en même temps qu'il se fait témoin, clin d'oeil, avec l'impression de feuilleter un album-photos ou de ressortir de son bac un vinyle (redevenu à la mode, les temps changent)


Par ses références: musicales (quel plaisir à l'écoute, que ce soit Dominique A, les Sex Pistols ou The Clash), sociales (volonté de sortir des banlieues, d'accéder à la propriété, à un certain confort), sociétales (évolution/diktat des rôles féminins/masculins, cool attitude, équilibre professionnel/familial), même le King, Stephen, y fait une courte apparition ,Brigitte Giraud rappelle ici toute une époque, "ante" smartphone, réseaux, internet: celle des années 80, 90 --- celle d'avant la fin du monde, enfin, la fin du XXe S (Paco, son talent et ses prédictions) --- jusqu'à l'Eclipse (ah ces fameuses lunettes) ---


Vingt ans se sont écoulés.
Quitter la maison, c'est aussi te laisser filer.
'Après ce si long voyage


Une lecture qui m'a rappelé la vague de nostalgie et les émotions ressenties avec le Petit Frère, au rayon BD
" Autoroute, vacanciers, remorques, bateaux à moteur, couples, enfants, la vie qui coule comme d'un robinet d'eau tiède. ---- La vie des autres "


Première rencontre avec l'auteure qui nous ouvre la porte de leur "maison" (Lyon, le monde des motards,..) comme pour mieux la refermer, apaisée.


et rend un très bel hommage à Claude,
à leur histoire,
à leur amour,


comme un aurevoir
un dernier regard
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Le Goncourt 2022 a été attribué à Vivre vite suite à une séance interminable de tirs au but, 15 à 14 face au mage du Kremlin, le coup de pied du président comptant double. Et si le mage n'avait pas obtenu le prix de l'académie, s'il n'était pas question d'égalité et de femmes si peu souvent primées, si et si et encore si. Justement il est question de si dans ce récit, une litanie de si enchaînée en structure qui cache surtout un gros pourquoi plein de détresse éternelle. Pourquoi le malheur peut-il frapper comme ça, sans prévenir, briser une existence si heureuse. Ce récit est terrible, poignant, construit habilement en chapitres qui revisitent le passé, de la météo aux évènements familiers en passant par ceux mondiaux - si Stephen King était mort lors de son accident quelques jours avant, Claude aurait-il enfourché la Honda du diable -, plein de si rétroactifs qui nous plongent dans l'espoir momentané de prolonger avec eux leur vie heureuse dans ces années 90, bercée de musique et de vie urbaine branchée. Mais à chaque fin de chapitre d'un si particulier, le couperet de la réalité est là, imperturbable. Non Stephen King n'est pas mort quelques jours avant, oui il a fait beau en ce 22 Juin 1999, oui Claude on ne sait trop pourquoi a enfourché la moto du diable, oui c'est bien Brigitte qui a dit à sa mère qu'il y avait une place dans leur garage, oui cette honda 900 CBR était bien interdite au Japon, trop légère pour sa puissance infernale, oui c'est bien Brigitte qui a absolument voulu déménager, Brigitte l'a voulue cette maison du bonheur avec garage au lieu d'un appartement dans Lyon, elle s'est même démenée pour l'avoir. Un fil terrible et bouleversant de ressassements lancinants dans un cerveau si humain, naturellement habilité à recenser les relations de cause à effet, enchaîné dans une succession dramatique de faits pourtant si anodins en les scrutant à la loupe, marqué à jamais, par le sceau du destin résumeraient certains.
Un beau Goncourt en tout cas, un récit de l'intime haletant et poignant qui se lit d'une traite le coeur serré, aussi bon que le mage du Kremlin il m'a semblé, même si bien différents et sans être les chefs-d'oeuvre du siècle..
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«Vivre vite, mourir jeune»

Dans ce roman bouleversant, couronné par le Prix Goncourt 2022, Brigitte Giraud revient sur ce jour de 1999 qui a coûté la vie à son mari Claude. Une exploration jusqu'à l'obsession qui est d'abord une superbe déclaration d'amour.

À la veille de l'attribution du Prix Goncourt, Marianne Payot faisait des rumeurs qui donnaient Brigitte Giraud et Giuliano da Empoli au coude à coude. Pour une fois la rumeur était fondée puisque c'est finalement Brigitte Giraud qui l'a emporté! La romancière, qui a fêté lundi ses 56 ans, mérite amplement ce prix. Son roman se lit d'une traite, un peu comme l'histoire qu'il raconte: «Accident. Déménagement. Obsèques. L'accélération la plus folle de mon existence.»
C'est au moment de signer la vente de la maison achetée avec son mari Claude que les souvenirs reviennent. Cet accident de moto qui a coûté la vie à son compagnon le 22 juin 1999. Ce jour où il a fallu emménager avec son fils et sans lui et où toute sa rage s'exprimait à coup de masse, pour faire place nette. Détruire des pans de mur, c'était aussi exprimer toute sa souffrance. Au fil des mois et des travaux, l'apaisement est venu. Mais beaucoup de questions sont restées sans réponse.
Alors «on rebrousse chemin, on revient hanter les lieux, on procède à la reconstitution. On veut comprendre l'origine de chaque geste, chaque décision. On rembobine cent fois. On devient le spécialiste du cause à effet. On traque, on dissèque, on autopsie. On veut tout savoir de la nature humaine, des ressorts intimes et collectifs qui font que ce qui arrive, arrive.»
C'est, pour reprendre la belle formule de Jérôme Garcin, l'heure de «conjuguer son passé au conditionnel», avec des «si». Si son frère n'avait pas laissé là cette moto Honda 900 CBR – dont la puissance avait fait peur au fabricant qui ne l'autorisait que sur circuit au Japon – l'accident n'aurait jamais eu lieu. Un premier «si» suivi de nombreux autres, chapitre après chapitre, et qui concernent leurs emplois de temps respectifs, la météo, la technologie. Pour tenter de surmonter «ces lames de fond, qu'on n'a pas vues venir, qui enflent et viennent vous engloutir», pour conjurer la détresse et le manque, l'absence et les remords. le tout symbolisé par cette maison qui ouvre et referme ce roman bouleversant qui se pare d'une autre qualité, celui de retracer une époque où les smartphones n'existaient pas.
Brigitte Giraud, qui n'est que la treizième femme couronnée par l'Académie Goncourt, réussit à combiner le noir du deuil et l'écriture blanche. Elle redonne vie à celui qui hante ses jours. Et fait d'un deuil une éblouissante déclaration d'amour. Claude peut alors rejoindre les ombres et sa veuve entrer dans la lumière.


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"Avec des si,,," L'autrice a décidé de revendre la maison, elle en profite pour disséquer, vingt ans après, les faits, les propositions, les évènements, qui ont amené à l'accident ayant causé le décès de son mari. On peut y réfléchir toute sa vie, ressasser, tenter de déculpabiliser, relativiser. Ça n'y change rien ! c'est là, irréversiblement. Beau récit, fort intéressant, qui met en perspective toutes ces causes, leur prédominance et surtout leur conglomérat. Tout ne serait que fortuit ? Est-ce un seul élément déclencheur en particulier ou l'excentricité, l'illogisme ou l'imprévisibilité aussi, dans la multitude des derniers mots, des dernières décisions ? ou bien chaque minute a sa part équitablement, inséparable processus jusqu'à la dernière ? Qu'est-ce qui fait basculer vers le drame ? Que des questions, pas de réponse. Au moment de fermer les cartons, elle emballe vaisselle et autres linges, mais aussi photos, souvenirs, chagrins, solitude, rage, etc. Il est temps de quitter ce lieu marqué de l'absence.
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Vivre vite, un concept rock'n'roll pour un livre qui ne l'est pas du tout même si le protagoniste principal, accidentellement décédé, aimait le pas du côté sauvage de Lou Reed.

Le sujet (est-il nécessaire de le rappeler tant la couverture médiatique de l'obtention du Goncourt a permis de l'exprimer dans tous les formats): l'autrice, Brigitte Giraud, dissèque les différents éléments qui ont mené à l'accident mortel de son compagnon comme s'ils étaient écrits par un destin inéluctable qu'aucun échappatoire ne pouvait contrer, (pas de peau, d'échappement), tant leur juxtaposition improbable semble avoir voulu s'articuler dans ce seul et unique but.

Le hasard ne fait pas toujours bien les choses contrairement à ce que laisse penser le dicton populaire, mais, y a-t-il réellement un hasard ?

Une très très belle écriture pour cette auto mise en abîme d'une femme broyée par les mâchoires d'un enchaînement de faits ordinaires, vulgairement banals, insipides même pour certains mais qui, pourtant, vont conduire au drame fatal.

Avec un tourne-vicieux, elle démonte, ensorcelée, le mécanisme d'une horlogerie diabolique dont les roués rouages ont décidé de la déchiqueter, de la broyer, de l'engrener par ce doigt qui tient le stylo d'où sortiront les phrases se répondant du tac au tac avec une mécanique méchamment huilée qui ne risque pas de s'enrayer, huile maudite de vidange.

Sur le mode du ‘si…', elle découpe les tranches du temps qui a immédiatement précédé le funeste accident, se donnant, en grande partie, le rôle de maîtresse de la cérémonie macabre (si JE n'avais pas…). le sablier est retourné, le temps est à la fois compté et conté.

Et elle s'en veut.
Et elle s'en vient à se culpabiliser d'avoir été le bras innocemment armé de cette spirale infernale qui va l'aspirer (avant de l'inspirer), d'être l'oeil du cyclone qui va regarder sa vie se dévaster en prenant celle de Claude, son mari plutôt passif qui lui à laissé les rênes de leur attelage lancé à un train d'enfer sur les pentes bitumées de la lyonnaise croix rousse.

LA maison pas à vendre qui se libère, l'appartement tout juste acheté déjà revendu, les clés remises en avance, le garage emprunté par le frère, la moto japonaise interdite à la vente…au japon…

Le problème, avec les livres hautement médiatisés, c'est que l'essentiel est déjà connu avant même d'en ouvrir la première page. Cela dit, celui-ci tient bien la route (si j'ose écrire) car malgré cela, malgré la virginité envolée, le plaisir de lire reste entier, le style simple et direct faisant mouche combien même le sujet est préalablement dévoilé, défloré.

Vivre vite' se lit vite, parce qu'il est court déjà, mais surtout parce qu'il est construit comme ces kits préfabriqués dont tous les éléments bien usinés s'emboîtent avec aisance, évidence, en toute simplicité, parce que ça DOIT se monter comme cela, la notice le dit, pas de place pour l'improvisation, tout est ECRIT.

 Finalement, ici tout était cris, de rage, de détresse et de désespoir mais raconté sans pathos excessif, avec recul parfois, intensité toujours.

Et SI cet accident était justement écrit dans la destinée de son autrice pour qu'elle puisse, vingt après, jouir de l'obtention d'un prix littéraire diaboliquement prestigieux ?!

VERTIGINEUX, je ne voudrais pas être dans sa tête, devoir ce succès ultime à la mort de son aimé, VERTIGINEUX !
 
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Vingt ans après, elle cherche encore.
Brigitte n'a pas fait complètement le deuil de son compagnon Claude, tué dans un accident de moto le 22 juin 1999. Elle s'en veut de cette mort et cherche par tous les moyens à trouver comment celle-ci aurait pu être évitée. Elle se culpabilise !
Si, si, si oui bien sûr, avec des si on refait le monde mais le destin fait que ces si ne servent à rien, la tragédie est arrivée et c'était l'heure.
En écrivant ce roman, cette enquête, je me demande si elle vide son chagrin ou si elle le ravive ! Elle est intransigeante avec elle-même : si je ne m'étais pas absentée, si j'avais téléphoné…. Mais elle n'y changera rien. La seule chose qui aurait pu éviter cet accident était imputable à Claude, il n'aurait jamais dû emprunter la moto de son beau-frère !
J'ai tout de même été un peu déçue, si on ressent le manque de l'autre, Brigitte insiste trop sur la technique il suffit de chercher la fiche de la moto et on aura tout ! J'attendais un peu plus de sentiments de ressenti psychologique.
Malgré tout son écriture est profonde et impeccable, c'est la première fois que je lis cette auteure et c'est une vraie professionnelle, elle sait employer les bons mots et son récit est addictif, j'ai eu hâte de connaître la fin qui m'a laissée sur ma faim !
Un très bon livre, très bien écrit, il se lit facilement, mais valait-il le prix Goncourt ? J'en ai lu de meilleurs. Pour répondre à cette question, il aurait fallu que je lise les autres nominés.
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Je n'avais pas tellement envie de le lire ce livre. Je n'aime pas trop ce type de témoignage alors j'avais un a priori ; trop triste, trop intime, trop mélancolique.
Et puis, une amie me l'a prêté et je me suis laissée embarquer par ce récit d'avant deuil.
Et si les événements des jours précédents n'avaient pas été ceux-là et si une seule seconde avait pu être modifiée : On devient fou à ressasser ça.
Je me suis retrouvée en 1999 avec les mêmes souvenirs : les groupes de rock, les disques qu'on emprunte à la médiathèque, boire des coups en terrasse avec les copains, l'absence de portable, la vie de jeunes parents, les relations frère/soeur, l'an 2000 qui approche, Paco Rabanne qui prévoit la fin du monde, la Croix-Rousse et l'éclipse qui arrive.
Alors oui c'est nostalgique et un peu triste aussi mais rien n'est larmoyant.
L'écriture est élégante.
Et moi, je vais au travail à pied ou en bus. J'emprunte le boulevard des Belges, lieu de l'accident, alors forcement, je le verrai maintenant autrement.
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