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Jean-Baptiste Godon (Traducteur)
EAN : 9782940701087
480 pages
Editions des Syrtes (03/02/2022)
4/5   4 notes
Résumé :
Cette correspondance révèle une facette méconnue de la personnalité de Maxime Gorki, qui a entretenu des relations fortes avec ses fils. Elle dévoile son intimité au-delà du mythe forgé par la propagande soviétique. On y trouve des conseils, des reproches, l'humour et la poésie d'un père aimant qui tente de transmettre à ses fils ses valeurs d'humanisme et de travail, partage ses pensées les plus critiques sur le siècle, la guerre et la révolution, sa vision du mond... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Santo Antão (Cap-Vert), le 3 avril 2022
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Chères éditions des Syrtes, cher Babelio,
je tiens tout d'abord à vous remercier pour l'envoi de ce livre de correspondances entre le Père Gorki et ses fils, je vous assure l'avoir lu avec la plus grande attention possible.
Ici, nous sommes plutôt « à l'abri » de l'actualité, facilitant peut-être une lecture de l'Histoire passée faisant abstraction de celle en train de s'écrire. J'ai bien conscience de la relative vacuité de ce genre d'assertion, mais j'en profite pour vous demander des nouvelles, vous qui souffrez sûrement de la situation… Editer Zakhar Prilepine doit forcément avoir des conséquences… Je suis heureux d'avoir pu lire son « Certains n'iront pas en enfer » avant que les choses ne dégénèrent irrémédiablement.
Je vous prie de m'excuser pour le temps passé avant de vous répondre; mes mains ne servent plus dernièrement qu'à défricher et rouler de lourdes pierres; elles tremblent légèrement à se concentrer sur des touches de clavier.
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Votre livre est forcément passionnant, tant la personnalité, et l'incroyable destin, de chacun des trois individus échangeant est forte. Les évidents allers-retours entre Histoire et intime rythment à merveille la majorité des lettres reproduites.
Mais, parce qu'il y en a quelques-uns, je dois vous soumettre les éléments qui m'ont déplu, en toute franchise, ceux-ci concernant le travail d'édition et de mise en forme réalisé.
Votre introduction se concentre avant tout sur le résumé des vies de chacun, aide précieuse à entrer dans le bain, mais que vous trouverez utile de répéter le long d'une longue litanie de notes de bas de page. C'est bien le coeur du problème, tous ces astérisques, jamais totalement résolu dans l'histoire de la littérature, terreur du lecteur de Pléiade, dont certains auteurs comme Danielewski ou Foster Wallace en ont exploré jusqu'aux limites. On en vient à tenter de les ignorer, renonçant à des précisions sur un tel, qu'on aura sitôt oublié trois missives plus loin, risquant ainsi de louper celles qui présentent un véritable intérêt. Tout ceci est bien-sûr relatif, mais l'interrogation reste : n'aurait-il pas été plus judicieux de ventiler cette introduction entre les lettres, supprimant ainsi une bonne moitié de ces petites interruptions ?
Il en va de même pour l'agréable et émouvant cahier central, regroupant de belles reproductions de photographies et de courriers, sur un papier plus épais que le reste. On comprend bien les problèmes techniques ou de coût d'avoir tout regroupé de la sorte, regrettant toutefois qu'elles ne soient pas accolées aux lettres correspondantes, aérant ainsi l'ensemble.
Le fait que le fils biologique porte le nom de plume de son père Alexei : Maxime , n'arrange pas le lecteur, parfois en baisse d'attention devant une série de lettres résumable à du « who's who ».
Il aurait peut-être fallu expliquer, voir justifier davantage la sélection des pièces; bref oser un travail d'éditeur plus « voyant », à la manière du regretté Jacques Catteau, si vous me passez cette invocation pouvant être prise pour déplacée.
Reste avant tout la découverte de ce fils adoptif ayant fait carrière dans la Légion Etrangère, Zinovi, à la vie plus incroyable qu'un héros romanesque.
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N'ayant pour le moment lu que son « Tempête sur le ville », que vous avez nouvellement traduit et édité sous son titre original, « Le bourg d'Okourov », et l'ayant beaucoup apprécié, votre ouvrage a confirmé mon envie de plonger dans l'oeuvre du Père Gorki, évidemment en lisant prochainement son grand roman, « La Mère », elle plutôt absente de cette histoire de père et fils…
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D'ici le prochain de vos livres entre mes mains, je vous embrasse et vous remercie encore.
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Paul
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P.S: il y a beaucoup de babéliotes curieux, et plutôt fouineurs, et pour qui certaines coïncidences appellent parfois à des interrogations… com muit' respeit'… bijinho.
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La correspondance des grands écrivains est parfois décevante : leur vie privée qu'on imaginait trépidante s'avère banale, leur personnalité peu engageante, leur pensée étriquée... Rien de cela ici. L'histoire des Gorki est une course haletante : on passe par les barricades de la révolution, les tranchées de la Grande guerre, le désert de l'Atlas, les mines du grand Nord canadien, la dolce vita de Capri... Grâce aux réponses des fils à leur père, qui sont également publiées, on a l'impression de lire un roman épistolaire ou un dialogue philosophique, imaginé par le romancier. Entre père et fils, ils parlent de tout : de la guerre, de la révolution, de la Russie et de l'Europe, des femmes, de la littérature, d'argent...
Ces lettres privées révèlent d'ailleurs des visions politiques et philosophiques très différentes de celles habituellement attribuées à l'écrivain prolétarien. Gorki y dénonce la "sanglante litanie" de la révolution et ses "folles atrocités", "l'anarchisme zoologique" de Lénine et Trotski, le "fanatisme aveugle" des "poltrons, voleurs, et crapules" bolcheviques... Ses réflexions sur la guerre en Europe et le retournement de l'ordre mondial sont malheureusement très actuelles... Il écrit en 1924 : "C'est une période trouble pour l'Europe, foyer de la culture mondiale : elle est attaquée de toutes parts, de plus en plus vigoureusement par des hommes qui acquièrent sa technique et demeurent étrangers à son esprit.. à l'image de la Grèce ou de la Rome antiques, est-elle appelée à se dissoudre dans la masse des hommes nouveaux ? Ils sont un milliard. Et il va de soi qu'ils ont le droit de vivre comme ils l'entendent." Etonnant... Il faudrait lire ou relire Gorki avec un oeil neuf, il y a dans ses écrits beaucoup de matière à réflexion sur notre siècle.
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On m'a offert ce livre que, ne connaissant rien de Gorki ou de l'histoire russe, je n'aurais pas forcément eu l'idée d'acheter. A tort... le contexte politique très agité de l'époque rappelé dans la préface est intéressant et donne une dimension tragique à leur correspondance mais il n'est pas indispensable pour saisir ce qui pour moi est l'essentiel du livre. C'est un témoignage émouvant sur les liens entre parents et enfants, l'affection et les (res)sentiments qui peuvent s'exprimer dans la correspondance et continuer grâce à elle de faire vivre leurs relations malgré le temps, la distance et leurs profondes divergences. Gorki commence à écrire à ses fils quand ils sont encore enfants (au début, ils ne répondent pas) et s'obstine à leur écrire très régulièrement jusqu'à la fin de sa vie, pendant plus de trente ans. Il y a dans ces lettres ce qui fait leur quotidien: des conseils, des histoires drôles, des chansons, des reproches, des reflexions philosophiques, des déclarations d'amour enflammées et des disputes... C'est saisissant de voir comment le style des lettres évolue dans le temps, comment la personnalité de ses deux fils très différents se construit peu à peu dans l'ombre de leur père, d'abord timidement comme des enfants, puis des adolescents et s'affirme enfin à l'âge adulte. Gorki, le plus souvent absent physiquement pendant leur enfance et leur adolescence, réussit grâce à ces lettres édifiantes à être omniprésent dans la construction des ses fils et à établir avec eux des relations d'une incroyable intensité. Ce livre est un exemple d'éducation à distance (et dans la durée) pour les parents qui n'ont pour une raison ou une autre pas la possibilité de voir leurs enfants tous les jours. le joli carnet photo complète très bien le texte.
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Quelles vies incroyables ! Cette correspondance inédite retrace comme un roman d'aventure ou d'espionnage la vie extraordinaire du clan des Gorki : le père écrivain prisonnier de sa célébrité (Alexeï), son fils légitime, tchékiste dilettante (Maxime), son fils caché, légionnaire et manchot (Zinovi), ses femmes au service des renseignements soviétiques et britanniques, à travers un demi-siècle de guerres et de révolutions entre la Russie et la France, l'Italie, le Maroc, l'Amérique, et l'océan Pacifique. Je ne connais pas d'écrivain dont la vie soit aussi tumultueuse et il se peut qu'il n'y en ait jamais eu. le plus étonnant, c'est la tendresse infinie, l'humour et la légèreté qu'on trouve dans ce dialogue de trente ans entre un père et ses fils malgré leurs destins contraires et tragiques. du coup le livre est assez difficile à classer : c'est à la fois le récit biographique de la saga familiale des Gorki dans le chaos du 20ème siècle, un recueil de correspondance intimiste où s'expriment les sentiments les plus profonds, et une oeuvre littéraire à trois auteurs car la langue employée par Gorki et par ses fils révèle un souci de la forme et du verbe fleuri que l'on trouve rarement dans les correspondances. Certaines lettres sont magnifiques. Une lecture passionnante qui donne une image très précise, de l'intérieur, des relations entre trois hommes aux destins exceptionnels.
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Gorki est un auteur russe qui, dans son oeuvre, reproduit les pensées du prolétariat de son pays. On connaît généralement seulement cette facette de l'écrivain, c'est-à-dire la vision très politique de ses écrits. Ainsi, cette correspondance inédite, qui rassemble les 216 lettres qu'il a échangées avec ses fils, nous dévoile un être plus humain et complexe. On entre dans son intimité et on découvre les relations qu'il avait avec ses deux fils. On y lit les conseils qu'il a pu leur donner, les valeurs qu'il a voulu leur transmettre mais aussi des remarques sur l'actualité politique de la Russie. On vacille ainsi entre réflexions personnelles et réflexions plus sérieuses. Se constitue, de ce fait, un portrait assez ambivalent et réaliste de cet auteur qu'il me tarde de découvrir davantage avec le reste de son oeuvre.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Mon fils, Il y a la guerre et tous ces journaux qui insufflent à la jeunesse l’idée selon laquelle tuer un homme est un acte de bravoure. Il est éprouvant de vivre dans ce monde, éprouvant et terrifiant. Et toi, tu marches au pas ? J’imagine, mon cher, comment cela t’est pénible. Mon bien-aimé, mon seul ami, écoute-moi, réfléchis : je n’ai, de toute ma vie, jamais engagé quiconque à prendre patience. Je n’ai, au contraire, fait que souffler et crier au visage de tous : battez-vous, n’attendez pas ! Et voilà que je dois dire à mon fils, un être que j’aime et que j’ai appris à respecter : prends patience ! Tu sais comme il me coûte de te dire cela. J’ai peur pour toi : je redoute que tu perdes patience et gâches ton existence par un acte irréfléchi. Alors que, je le sais, il y aura dans ta vie tant de bonnes choses, je le sais ! J’aimerais que tu goûtes à tout ce qu’il y a de meilleur, que tu vives des jours exquis… Porte-toi bien, mon enfant, et reste sage ! Dans les jours les plus difficiles de ma vie, et il y en eut beaucoup, j’ai vaincu par mon sang-froid.
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Mon cher fils, tu m’effraies ! Je m’acquitte de mes obligations « papales » en te livrant autant de sages et bons conseils qu’il se peut. Sois heureux et cesse de ficher dans tes bottes ces grands clous qui te remontent jusqu’au menton… Tu (me) maudi(s) car tu es « fils » et car je suis « père ». C’est un jeu d’outrages : les « fils » maudissent leurs « pères », et les « pères », leurs « fils ». Le jeu est assommant mais inévitable, car ni les uns ni les autres n’ont su en trouver de meilleur jusqu’à présent. Je t’ennuie avec mes histoires ? Ici encore, on n’y peut rien, tous les pères sont barbants. Parce qu’ils sont plus âgés que leurs fils, plus dégarnis, et parce qu’ils ont toujours mal quelque part… Comme je ne suis pas très sérieux, je ne souffre que du dos, mais je suis sûr qu’avec le temps, je souffrirai partout où il se doit. Je me laisserai alors pousser une barbe rousse, grincerai des dents et hurlerai à ton visage : « Tais-toi, fils, je sais tout mieux que toi ! » Quels joyeux jours en perspective…
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Citoyen et camarade, fils de moi,
Comme je suis ton père légitime, je réponds devant les hommes et devant Dieu de ton éducation, merde ! Je commence : mon fils, ne mange pas tant d’argent ! C’est parfaitement contre-indiqué, cela te gâtera le caractère et l’estomac. L’estomac surtout ! Comme tu es un vieux chauve marxissique, tu sais que l’estomac est la base matérielle de toute chose, et que le reste n’est que superstructure. Ensuite : tu ne dois t’éprendre ni de femmes ni de liqueurs. Les unes et les autres contiennent du poison. Des trois plaisirs de la vie : le vin, la femme et le chant, ce dernier est de loin le plus inoffensif. Avec ta voix charmeuse, tu pourrais empoisonner plusieurs milliers de tes semblables. Alors, chante maintenant !
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Mon bon garçon,
Maman m’écrit que tu collectionnes maintenant les fleurs : c’est parfait ! Lorsque tu connaîtras les rudiments de la botanique, les fleurs auront plus d’intérêt à tes yeux, tu comprendras qu’elles sont vivantes, que la vie est partout autour de toi, que tu es toi-même plongé dans ses flots vifs et allègres, et que l’homme que tu es, est la créature la meilleure, la plus attachante, la plus raffinée qui soit dans l’éternel bouillonnement de la vie.
Plus tu t’immergeras dans ces flots, plus tu comprendras les choses et plus riches seront ton âme et ton esprit. Tu graviras alors une montagne du haut de laquelle un tableau merveilleux s’offrira à tes yeux, où chaque touche sera de toi. Comme je te le dis, gamin !
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Ce que je sais de la Russie (…) m’incite à penser que la vie y est odieuse et barbare, que l’être humain y est dégradé à l’extrême et ne fait l’objet d’aucune considération… D’où viendra la Lumière qui éclairera le cœur des hommes de Bonté et d’Amour ? Nous avons beaucoup de choses à apprendre en Afrique des Arabes et des Berbères. Je suis frappé et sincèrement touché par l’attention, la magnifique attention humaine et le respect qu’ils témoignent les uns pour les autres (…) La compréhension sacrée et l’émerveillement serein qu’ils éprouvent devant la beauté et la grandeur de la nature m’émeuvent aux larmes.
(Zinovi Pechkov, Kasba Tadla, 3 juin 1924)
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La « Lumière qui éclairera le cœur des hommes de Bonté et d’Amour » ne peut venir de nul autre que de l’homme, la plus rusée des bêtes sauvages terrestres. Cette « Lumière » ne faiblit pas, elle brûle au contraire d’un feu toujours plus vif. Nul doute qu’elle finira par réduire en cendres la culture européenne avant que celle-ci ne renaisse comme le phénix. Nous devons nous préparer à une époque de tragédies renversantes en comparaison desquelles toutes les tragédies du passé ne sont que bagatelles et jeux d’enfant.
(Gorki, Sorrente, 13 juin 1924)
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Videos de Maxime Gorki (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Maxime Gorki
Gorki et ses fils, correspondance (1901-1934) , traduit du russe et préfacé par Jean-Baptiste Godon, est paru aux éditions des Syrtes.
Près de dix mille lettres de la main de Maxime Gorki sont conservées par les archives de l'Institut de la littérature mondiale de Moscou. La présente correspondance inédite entre l'écrivain et ses fils représente 216 lettres échangées entre 1901 et 1934.
Plus d'info sur https://editions-syrtes.com/produit/gorkietsesfils/
Nos remerciements à la Bibliothèque russe Tourguenev à Paris pour avoir gracieusement accueilli le tournage.
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