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EAN : 9782070765102
166 pages
Gallimard (28/03/2002)
3.67/5   3 notes
Résumé :
Ce recueil rassemble cent trente poèmes pour la plupart inédits de Guillevic, écrits entre novembre 1994 et décembre 1996. La première partie de l'ouvrage est composée de soixante poèmes, revus par l'auteur au cours de l'été 1995. La seconde partie contient soixante-dix poèmes datés du 24 septembre 1995 au 10 décembre 1996. Son état de santé préoccupant, puis sa disparition brutale le 19 mars 1997, n'ont pas permis au poète de les retravailler comme il l'aurait souh... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Quotidiennes, c'est un recueil de poèmes d'Eugène Guillevic, poète breton qui a signé cet ouvrage comme à chaque fois de son seul nom Guillevic, nom qui sonne comme celui d'un sol à la fois rocailleux et marin de Bretagne.
Quotidiennes, ce sont comme des missives écrites en regardant un ciel à travers une fenêtre qui traverserait les saisons, un lien, un trait d'union, une passerelle...
Elles sont ma première incursion dans l'univers de ce poète. Elles sont une parole presque chuchotée, presque à mi-voix, à mi-chemin entre ciel et terre. Elles m'ont touché au coeur.
Ces poèmes viennent tardivement dans l'oeuvre du poète, au soir de sa vie, écrits entre novembre 1994 et décembre 1996, ce sont sans doute les tous derniers, Guillevic déjà malade depuis quelques années mourra le 19 mars 1997. Quotidiennes a été publié quelques années après la mort de Guillevic, grâce à sa veuve Lucie Albertini.
Ici Guillevic tutoie le règne végétal et le règne animal, de préférence insectes ou oiseaux, quelque chose qui vole, qui embrasse le ciel et l'espace, qui se pose sur son regard prêt à se fondre dans le paysage.
Le minéral aussi entre dans ce dialogue, un rocher parfois surgit à fleur de mots, qui ressemble peut-être à ceux d'une plage de son enfance, du côté de Groix ou de Carnac, lorsqu'il était encore un peu étranger au monde...
Ces poèmes, dépouillés, presque nus, sont des battements d'ailes qui questionnent l'intime et l'universel.
Voir avec les yeux d'une guêpe, ressentir avec l'étreinte d'une forêt, le chant d'un rossignol, la courbure d'un acacia...
Ici, l'étonnement presque candide tient lieu de beauté.
La musique de ces poèmes est touchante car on y devine l'émotion d'une fin prochaine.

« Moi je sais qu'un jour
Je vais mourir,
Toi, tu ne dois pas le savoir. »

Guillevic n'a pas eu le temps de retoucher les derniers poèmes de ce recueil et c'est peut-être mieux ainsi.
La vie est ailleurs peut-être, autour de lui, mais c'est comme un autre monde plus intime qui se construit au fond de lui, ce sont des pages presque quotidiennes qui viennent se lover dans l'intériorité silencieuse d'un poète au soir de sa vie.
Et tandis que la mort approche pour y faire son nid, les mots d'un poème sont peut-être désormais la seule manière d'y faire face, se fondre dans les yeux d'une guêpe ou le chant d'un oiseau et s'y plaire à jamais...

« Autrefois,
Quand j'étais gamin,
Je me sentais étranger au monde,
C'était
Comme si je n'en étais pas –

Et je me suis appliqué
À m'incorporer à ce tout.

Maintenant où s'approche ma fin ;
Et je le sais, je le vis,

Maintenant
Je n'ai plus d'effort à faire
Pour sentir pleinement le monde
Seconde après seconde.

Il est là , je suis en lui,
Je suis à lui,
En lui, je me plais. »

Il y a des endroits au monde où le ciel est plus grand. Un livre de poésie, par exemple...
Ce que j'ai aimé dans cette rencontre avec Guillevic, c'est qu'il n'est plus devant le paysage, mais dedans, et brusquement dans cette communion intime avec la beauté de la nature, c'est le paysage qui est dedans lui.
"La beauté sauvera le monde", disait Dostoïevski.
La beauté du monde entre parfois en nous pour nous sauver et seule peut-être la poésie sait poser les mots qu'il faut pour dire ce voyage intérieur.
Ici les mots de Guillevic sont traversés de douceur et d'apesanteur. Oubliés de lui-même.
Face au vivant, on n'est jamais seul, jamais lourd, même si près de la mort, surtout si près de la mort...
La mort attendra encore un peu, l'amour est là à proximité des mots, l'amour de celle qui lui a peut-être tenu la main une dernière fois, fermé les yeux et qui nous a transmis ces toutes dernières missives comme un chant offert au monde.

« Ce besoin de clamer
Que je cherche quelque chose de plus,
De total –

Où le monde tout entier
Chanterait par toi

L'espèce de royaume

Que le soleil couchant
Ferait avec les océans et les terres,

Et avec toi aussi, mon amour,
Si tu le voulais bien,

Nous deux chantant
Le bonheur presque là. »
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
On dirait
Que la terre s'est faite elle-même

Dans un espace que, matière émue,
Elle s'est choisi dans l'infini

Entre le soleil,
La lune, les étoiles,

Un espace où pouvoir
Mettre de la vie, de sa vie,

Et envoyer dans le noir
Tout autour d'elle

Cette vie qu'elle sent en soi
Un peu trop fort en elle.

Et c'est ainsi qu'elle a fait
Tout cela qui la distrait

De l'invasion
Perpétuelle du noir
Dans son corps exigeant.
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Voici que dans cette journée
Le ciel d'azur proclame
qu'il va s'ouvrir,

Que nous allons voir
Ce dont nous ne savons
Rien que l'existence,

Que ce sera la grande révélation,
L'éblouissement où nos profondeurs
Se laisseront dévoiler

Et nous vivrons alors
Selon ce désir fou
Qui est en nous ―

Cela s'annonce tous les jours
Et chaque jour nous espérons
Que ce sera pour aujourd'hui.

1995
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Je ne t'ai jamais dit
Que je t'aime en tout,

Dans le brin d'herbe
Comme dans l'océan,

Peut-être plus dans le quotidien
Que dans l'exceptionnel,

Mais tu es dans tout,
C'est partout ton habitacle

Dans la cathédrale
Comme dans le brin d'herbe.

Certes, j'aime la chose
Pour elle-même,

Mais cela ne m'empêche pas
De t'aimer en elle.
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Insensé:
Je rêve d’être l’azur
Et de là-haut regarder
Vivre les hommes.

Pour me calmer
Je me dis que l’azur
Ne se préoccupe pas de nous

Et que d’ailleurs
Il ne sait même pas
Ce qu’il fait là,
Même pas qu’il existe.

― Moi, si j’étais l’azur
Le monde serait-il
Mon atelier ?
(1995)
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Il s’agit toujours d’avancer,
Mais avancer dans quoi ?

Pas seulement
Dans cet espace
Qui s’étale devant toi
Et que tu crois connaître,

Non, avancer
Dans un nouvel espace
Dont tu ne désires
Que ce que dit ton besoin,

Un espace qui toujours
te demandera de l’aimer,

De te fondre en lui,
Vous deux portés par cet amour
Qui vous engloutira
Dans ce qui nous appelle.
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Vidéo de Eugène Guillevic
VICTOR POUCHET - LA GRANDE AVENTURE - 18 questions sur la vie et la poésie
« le fil c'est peut-être une histoire très simple : tragi-comédie en cinq actes et deux personnages. L'un régulièrement menace de partir. L'autre se contente d'écrire des poèmes, dans l'espoir absurde de l'en empêcher. » Dans le roman-poème La Grande aventure, Victor Pouchet déroule une histoire à la fois bouleversante et légère en vers : une rencontre, des micro-aventures qui prennent des proportions de l'univers, des angoisses cosmiques, chansons tristes et verres de vin. Cette conférence-performance est l'occasion de traverser le livre et l'aventure de son écriture à travers une série de questionnements poétiques (ou presque) qui concerneront entre autres choses l'hypnose, Georges Perros, les récits épiques, Eugène Guillevic, les imprimantes laser avec option wifi, le doute et les chips au vinaigre.
À lire – Victor Pouchet, La grande aventure, Grasset, 2021.
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