AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,54

sur 1554 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Un tourbillon joyeux et mélancolique de souvenirs dans le Paris des années 20, où malgré la pauvreté, le jeune Hemingway et sa première épouse ont été follement amoureux et heureux de vivre.
L'écrivain commença à rédiger ses " vignettes parisiennes " ( titre original de l'ouvrage ) pendant l'été 1957, mais l'introduction nous apprend que le livre, maintes fois remanié par les éditeurs, ne parut qu'en 1964, trois ans après le suicide de l'écrivain. Fort heureusement, le texte est maintenant réédité dans sa version d'origine, introduit par Sean Hemingway, son petit-fils.

Chaque " vignette parisienne ", fragment de vie, est un peu comme une coupe de champagne - avec plus ou moins de bulles, plus ou moins fraîche, issue d'un grand cru millésimé ou d'un simple assemblage - toujours élaborée avec précision, sans artifice ou effet littéraire. Un champagne peut-être un peu sec parfois, une écriture un peu trop épurée à mon goût par moments.

Largement autobiographique comme le dit lui-même Hemingway en introduction :
" Cet ouvrage contient des matériaux tirés des remises de ma mémoire et de mon coeur. Même si l'on a trafiqué la première, et si le second n'est plus. "
C'est en cela que l'oeuvre prend toute sa valeur et a suscité mon intérêt. On ne croise pas tous les jours Gertrude Stein, Scott Fitzgerald, Ezra Pound, James Joyce... que l'auteur ressuscite pour son lecteur de façon très vivante avec des anecdotes souvent savoureuses.
Hemingway nous livre ici par touches des éléments de sa méthode de travail en cours d'élaboration, et ça, c'est aussi tout à fait passionnant.

Ode à l'amour, l'amitié, l'inspiration artistique, le talent sans oublier une vue panoramique somptueuse sur Paris !

Commenter  J’apprécie          1131
Je suppose que j'ai pris ce livre en mains pour en revendiquer le titre, comme un exorcisme contre les manifestations guerrieres de differents camps, contre les tags antisemites qui souillent les murs de la ville.

Paris est une fete. L'edition francaise du livre arbore ce titre mais l'original c'est "A moveable feast". La fete y est mais elle est mobile, portable, elle ne se passe pas qu'a Paris, mais aussi en Autriche.

Laissons le titre et ouvrons le livre. C'est le dernier d'Hemingway, paru après sa mort, après son suicide. Sachant cela ma lecture en a ete influencee. J'y ai vu un chant de cygne ou Hem (comme l'appellent ses connaissances dans le livre) se rememore le temps enchante ou il etait capable d'aimer, de boire, de jouer, de boxer, de voyager, de lire, et en meme temps d'ecrire.

Mais je suis conscient que c'est une lecture tres conditionnee. En fait, tout le livre ne tourne peut-etre qu'autour d'une passion: l'ecriture. Et de la discipline qui en decoule et qu'il s'etait impose a Paris dans sa jeunesse. Ne jamais boire après manger, ni avant d'ecrire, ni pendant l'ecriture. Par contre, a la fin d'une journee feconde, il s'octroie un verre de kirsh. Il renonce au journalisme et a ses emoluments parce que ca gene le travail de l'ecrivain. Quand il s'apercoit que les courses de chevaux lui volent trop de temps, il arrete, malgre ce que ca lui rapporte – car il a des tuyaux. Quand il mire une jeune fille qui s'installe pres de lui au café, il pense " tu m'appartiens, comme Paris m'appartient, mais moi j'appartiens a ce cahier et a ce crayon".

Les faits rapportes ne sont pas peut-etre pas rigoureusement autobiographiques, vu que l'auteur lui-meme indique dans sa preface q'on peut considerer le livre comme une oeuvre de fiction. Pour moi ils sont autobiographiques dans leur essence, sinon dans les details. Un americain pour qui Paris est un décor ou se rencontrent des Anglophones. Dans tous les portraits qu'il brosse (entre autres Gertrude Stein, Ezra Pound, Ford Madox Ford, Scott Fitzgerald), pas un francais (j'en ai peut-etre rate un?). Enfin, pas un ecrivain francais. Que des garcons de café et des concierges. C'est un peu choquant, l'autosuffisance anglosaxonne. Mais je me resaissis vite et je me dis qu'au XXeme siècle Paris n'aurait pas ete tout a fait Paris sans les etrangers, du moins en litterature. Bien sur Fargue garde une place de choix dans mon coeur, et beaucoup d'autres que je ne nommerai pas pour que ca ne devienne pas une liste. Mais Paris sans tous ces americains de la "generation perdue"? Sans Miller? Paris sans les "mitteleuropeens" de l'entre-deux-guerres? Sans les flaneries dans ses passages a la Walter Benjamin? Sans les saouleries dans ses cafes a la Joseph Roth? Sans les sudamericains de la seconde moitie du siècle? Sans le Marelle de Cortazar? Sans ces chinois qui s'y decouvrent et finissent par y recevoir le Nobel? On a fete Paris dans toutes les langues. Et ca continuera. Paris a ete une fete. Paris est une fete. Paris sera une fete. Paris continuera d'etre accueillant. Pourvu que les tags disparaissent.
Commenter  J’apprécie          8213
De quoi sont faits nos souvenirs
ET
qui s'en soucie ?


Paris est une fête” n'est pas un roman à thèse. C'est un livre qui se prétend autobiographique et qui décrit ces années, juste après la première guerre mondiale, que Hemingway avait passé à Paris. L'auteur ne nie pas avoir largement retravaillé la réalité.

Il s'agit d'une collection de vignettes décrivant des conversations, des séances d'écriture au café, des repas parfois mémorables, toujours très arrosés, des vacances prises en Suisse ou à la Côte d'Azur,avec sa femme et leur bébé : le cheminement qui mène le journaliste-écrivain à abandonner le journalisme et sa précarité toute relative pour tenter l'aventure de l'écriture, connaître une franche misère, mais, peu à peu, se construire une certaine aisance. Nous sommes encore loin des parties de pêche en haute mer et des safaris en Afrique !

Paris, même s'il n'est pas un personnage au sens balzacien du terme, est toujours présent à l'arrière-plan: le Luxembourg, le boulevard Saint-Michel, l'église St. Etienne-du-Mont, voir la librairie Shakespeare & Company ou la Brasserie Lipp. Paris, qui change, virevolte, tournoie, surprend mais reste toujours elle-même. Quelle meilleure scène pour cet homme curieux de la vie, affamé d'expériences, mais surtout obsédé d'écriture ? Il y croise bon nombre d'auteurs, de peintres et de rédacteurs, observant chacun, parlant avec tous, se protégeant derrière un humour sec comme le gin le plus pur. Souvent, il les juge, en mettant quelques balles dans le mille.

Hemingway lui-même se montre en homme calme, quoique colérique, sûr de son talent, de sa force, des succès à obtenir, de son couple même. Rien ne peut le dévier de sa trajectoire : “ tu as écrit, tu écriras encore… “ se dit-il quand l'inspiration vient à manquer.

L'auteur écrit ces lignes à l'autre extrémité de sa vie. “Paris est une Fête” montre déjà un Hemingway passablement alcoolisé. Dans les dernières vignettes, on descend un ou deux verres de rhum le matin, en travaillant, puis le déjeuner est précédé d'un ou deux apéritifs , arrosé d'une ou deux carafes de vin par personne, vous prendrez bien un petit digestif, l'après -midi on se promène, on rencontre des amis, on passe au café, un petit whisky par ci, un cognac par la, et puis il y a le repas du soir et d'éventuelles sorties. Dans la mesure où les finances le permettent. Les finances, justement, vont de mieux en mieux. Quand Hemingway écrit “Paris”, plus de trente années plus tard, c'est un homme à la santé chancelante. Un homme qui souffre, aussi, d'une dépression sévère. A tel point qu'on lui a prescrit des électrochocs. Vers cette fin des années cinquante, c'est une thérapie qui efface progressivement la mémoire à long terme, et qui aplanit les émotions. Exactement ce dont vit un écrivain.Ainsi est-ce l'Hemingway du crépuscule qui nous conte les aurores de sa vie d'auteur, telles qu'il veut s'en souvenir. Un testament ? Non, sans doute une série de contes plus ou moins véridiques, comme le sont nos souvenirs du bon vieux temps.






Commenter  J’apprécie          731
Ces vignettes parisiennes (et en l'occurrence on a du mal à croire que le mot n'ait aucun lien étymologique même vague avec le jus de la treille) qui décrivent assez peu la capitale, voire ne s'y déroulent pas, donnent à voir une ville où l'on grelotte, mais tendre aux pauvres qui peuvent se réfugier dans ses cafés, et propice aux écrivains dont la concentration au mètre carré est proprement sidérante.
Il vaut mieux éviter de découvrir Hemingway par ce livre : ces miettes de vie peinent à intéresser si le lecteur n'est pas familier de l'écrivain. Lorsque c'est le cas, au contraire, il est difficile de ne pas être ému par cette confession toute en retenue qui parle de la difficulté d'écrire. L'auteur redécouvre des notes prises au temps de sa jeunesse et oubliées au fond d'une malle : d'où la profonde mélancolie d'un texte qui prend acte de la disparition de toute chose. La jeunesse, l'amour, l'amitié et même Paris, cette « fête mobile » du titre original ne sont plus qu'un lointain souvenir entaché par la mort et la déloyauté. La fête est finie. L'apprenti écrivain prêt à se passer de manger pour gagner en acuité est désormais un auteur consacré dont les dernières oeuvres n'arrivent pas à la cheville des premières. L'amoureux a trahi la femme aimée. Les amis sont morts et il est difficile de ne pas penser au coup de feu par lequel Hemingway mit fin à ses jours en lisant certaines pages. Celles sur Fitzgerald sont férocement drôles, mais d'une férocité qui vise la vie et non l'ami. Celles sur le poète Ernest Walsh sont d'un cynisme absolu (donc très drôles) mais comment pourrait-il en être autrement quand un homme vous a annoncé que vous étiez fait pour la vie alors même que vous songez à vous flinguer ?
« Quand il me demanda si je voulais une autre douzaine de ces huîtres plates, comme il les appelait, je dis que j'en reprendrais avec grand plaisir. Il ne se soucia pas de se montrer marqué par la mort, devant moi, et j'en éprouvai quelque soulagement. Il savait que je savais qu'il était tubard, et que tout entubeur qu'il était, il crèverait de sa tubarderie, et il ne chercha même pas à tousser, ce dont je lui fus reconnaissant étant donné que nous étions à table. »
Si Paris est une fête, c'est celle du grand Meaulnes : parfaite et impossible à retrouver.
Commenter  J’apprécie          432
Hemingway relate dans ce livre autobiographique ses années de vaches maigres avant d'être reconnu comme le grand écrivain qu'il est.
Le voici donc, avec sa toute jeune femme Hadley puis un peu plus tard leur fils Bumby dans le Paris des années 20, misant aux courses hippiques dans l'espoir de se faire un peu d'argent, passant les vacances d'hiver en Autriche en tant que pionniers du ski touristique.
Tout jeune écrivain, il découvre petit-à-petit son style - l'épuration des adjectifs étant une règle absolue - dans les cafés où lui et confrères s'installent pour travailler. Il n'est pas seul: il y fréquente la grande et susceptible Gertrude Stein, aperçoit de temps en temps James Joyce en famille déjeunant chez Michaud, rencontre Cendrars à la Closerie des Lilas, devient l'ami d'Ezra Pound, entend parler de Picasso, et se souvient, enfin, de drôles d'aventures avec Scott Fitzgerald. C'est d'ailleurs l'un des passages les plus savoureux du livre, bien qu'il n'y soit pas vraiment tendre avec l'auteur à succès de Gatsby le Magnifique!
Il y apparaît comme souffreteux, hypocondriaque, faible, lunatique et manipulé par sa femme Zelda, mais ce passage du livre vaut le détour!
Les chapitres sont assez inégaux dans leur intérêt et plus ou moins bien rédigés... si j'ai moins aimé les passages de sa vie à Paris du temps du bonheur, j'ai apprécié ceux en autriche, et surtout les derniers fragments contradictoires de ses tentatives.
Intéressant, c'est vrai, mais plutôt anecdotique.
Commenter  J’apprécie          390
En littérature aussi, il est bon de varier les plaisirs donc les genres et l'appréciation d'un livre est parfois très dépendante de celui qui l'a précédé.
En enchaînant "Paris est une fête" juste après l'ennuyeux Jonathan Dee, je me sens vraiment à la fête.
Heureux choix que je viens de faire en flânant, au cours de mes pérégrinations estivales, dans la merveilleuse librairie "Le bleuet" à Banon et occasion unique de compléter la pile amaigrie de mon stock de vacances.
Ne nous égarons pas et revenons à Hemingway.
Préfacé par le fils et le petit-fils de l'auteur, le roman, entre souvenirs et fiction, est un condensé d'anecdotes, de fragments de vie essentiellement à Paris et à Schruns, célèbre station autrichienne de sports d'hiver, de rencontres avec des personnalités de l'entre deux guerres croisés à Paris, comme Gertrude Stein, Scott Fitzgerald et bien d'autres.
Dans cette première période de sa vie parisienne Hemingway (Hem) était jeune marié de sa première épouse (il en eut quatre) à qui il rend hommage, celle qui a partagé ses années de bohème , d'insouciance et de formation au métier d'écrivain.
En naviguant allégrement dans son passé, l'auteur donne un aperçu de sa vie mouvementée, de son goût de l'aventure et de sa fascinante personnalité.
A l'issue des dernières lignes, je n'ai qu'une envie, relire l'œuvre qui a fait sa gloire et lui valut le prix Nobel en 1954.
Commenter  J’apprécie          360
L'art de vivre à la parisienne

Pour apprécier ces "vignettes parisiennes" à leur juste valeur, prenez ce recueil sous votre bras et partez flâner dans les rues des quartiers Odéon-Saint Germain, Montparnasse et vers la place Contrescarpe.
Vous allez alors voir le Paris des années 20 reprendre vie . Avec ses cafés, brasseries, librairies, tous ces endroits où Hemingway avait pris ses habitudes lorsqu'il était correspondant pour des journaux américains et loin encore de la renommée et de la gloire.
L'argent ne coulait pas à flots mais ce fut une période à la fois festive et constructrice pour le futur Nobel.
Il y rencontre Gertrude Stein qui le prend sous son aile et qui l'assimilera à une génération perdue d'écrivains, Francis Scott Fitzgerald avec lequel il vivra quelques aventures sur les routes françaises, Sylvia Beach la libraire incontournable pour les anglophones, mais aussi James Joyce, Ezra Pound, Paul Valery ou encore André Gide.
Il prend beaucoup de notes de ses sejours parisiens et les consignera dans des carnets qu'il ne récupérera qu'en 1956. Hemingway a la mémoire vacillante et ne souvient plus d'avoir laissé deux valises au Ritz depuis 1928.
Ces notes lui serviront de base à la restitution de ce temps retrouvé dans ces chroniques où la réalité subit toutefois les assauts du temps.
Mais on y retrouvera dans un style très épuré l'ambiance et l'atmosphère de ces quartiers de la rive gauche d'une ville qu'il considère comme libre et moderne.
"Paris est une fête" initialement titré "vignettes parisiennes" sera finalement édité à titre posthume et maintes fois remanié par les editeurs.
Ce formidable témoignage d'une belle époque ne sera présenté dans sa version d'origine qu'en 1961 par les éditions Gallimard.



Commenter  J’apprécie          310
Comme beaucoup, c'est le film de Woody Allen, Midnight in Paris, qui m'a donné envie de me plonger dans ce livre d'Hemingway mais aussi le livre Alabama Song, version romancé de la vie de Zelda Fitzgerald par Gilles Leroy, que j'avais littéralement dévoré et adoré.

Hemingway nous parle ici de sa vie, de son travail d'écrivain et de ses rencontres dans la capitale française dans les années vingt, de 1921 à 1926 pour être précis. Les chapitres les plus intéressants sont bien sûr ceux concernant ses rencontres avec des personnalités telles que Gertrude Stein, Ezra Pound, Sylvia Beach et bien sûr Scott Fitzgerald.

Les portraits qu'il brosse sont sans doute proche du réel, son souhait, mais rarement flatteur pour les intéressés. Quand Gertrude Stein, connue pour partager sa vie avec une femme, lui explique la différence entre les homosexuelles hommes et femmes, accrochez-vous, on est bien loin du politiquement correct « Ce qui importe, c'est que l'acte commis par les homosexuels mâles est laid et répugnant ; et après ils se dégoûtent eux-mêmes. Ils boivent ou se droguent pour y remédier, mais l'acte les dégoûte et ils changent tout le temps de partenaire et ne peuvent jamais être vraiment heureux. […] Pour les femmes, c'est le contraire. Elles ne font rien qui puisse les dégoûter, rien qui soit répugnant ; et après elles sont heureuses et peuvent vivre ensemble. »

Certains passages particulièrement intéressants nous permettent de découvrir la façon dont Hemingway travaille et perçoit le processus de création « Quand j'écrivais quelque chose, j'avais besoin de lire après avoir posé la plume. Si vous continuez à penser à ce que vous écrivez, en dehors des heures de travail, vous perdez le fil et vous ne pouvez le ressaisir le lendemain. Il vous faut faire de l'exercice, fatiguer votre cops, et il vous est recommandé de faire l'amour avec qui vous aimez. C'est même ce qu'il y a de meilleur. Mais ensuite, quand vous vous sentez vide, il vous faut lire afin de ne pas penser à votre oeuvre et de ne pas vous en préoccuper jusqu'au moment où vous vous remettez à écrire. J'avais déjà appris à ne jamais assécher le puits de mon inspiration, mais à arrêter alors qu'il y avait encore quelque chose au fond pour laisser la source remplir le réservoir pendant la nuit. » On découvre les doutes qui le tenaillent «Je savais qu'il me fallait écrire un roman. Mais cela me semblait une entreprise impossible, quand j'avais tant de difficultés à écrire des paragraphes […]. Il fallait d'abord écrire des récits plus longs, comme on s'entraine pour des courses plus longues. »

Ecrivain désargenté après avoir renoncé au journalisme pour se consacrer à son travail de romancier, il nous montre que la faim peut modifier sa perception des choses « J'ai appris à comprendre bien mieux Cézanne et à saisir vraiment comment il peignait ses paysages, quand j'étais affamé. Je me demandais s'il avait faim lui aussi lorsqu'il peignait […] ». On apprend aussi que Sylvia Beach, propriétaire de la célèbre librairie Shakespeare & Co, lui permet de se faire prêter les livres à moindre frais et d'approfondir sa connaissance des auteurs russes en particulier.
Sa réponse à quelqu'un qui lui fait part de sa difficulté à écrire nous donne une idée de ce qu'il peut penser des critiques en général : « Ecoute, si tu ne peux pas écrire, pourquoi ne pas te faire critique littéraire ? » de là, à penser qu'il considère les critiques comme des écrivains ratés, il n'y a qu'un pas…

A propos de Fitzgerald, je dirai que leur relation tient de l'attraction-répulsion, un mélange d'admiration et de rejet face à ce que représente l'auteur de Gatsby le magnifique. On le sent tantôt admiratif de son talent, tantôt jaloux de son succès, le tout assaisonné d'une bonne dose de mépris. Il le décrit de manière équivoque, presque séduit « un visage mi-beau mi-joli […] cette bouche si troublante pour qui ne connaissait pas Scott et plus troublante encore pour qui le connaissait. » mais conclut en le décrivant un peu court sur pattes. Il ne le ménage pas non plus quant à la façon dont il recycle certaines de ces nouvelles entre autre « Il m'avait raconté à la Closerie des Lilas comment il écrivait des nouvelles qu'il croyait bonnes, et qui l'étaient effectivement, pour le Post, et comment ensuite il les modifiait avant de les soumettre à des magazines, sachant exactement par quels trucs transformer ses nouvelles en textes publiables dans tel ou tel périodique. J'avais été scandalisé et l'avais traité de putain. » Pendant le fameux périple à Lyon, il nous dépeint un Fitzgerald, hypocondriaque, puéril, en un mot un boulet qui de plus ne tient pas l'alcool…

Quant à Zelda, la femme de Scott, qu'il considérait comme étant nuisible au talent de son mari, il lui consacre un chapitre. Et dès la fin du précédent chapitre, on sent que son portrait va être particulièrement relevé à la façon dont il termine en apothéose comme pour annoncer la descente en règle qui va suivre «Je ne connaissais pas encore Zelda et ne savais point, par conséquent, quels terribles atouts Scott avait contre lui. Mais nous ne tarderions pas à le savoir. » Il la compare physiquement à un rapace, le faucon. On constate que la haine qui les opposait n'est pas une légende. Il nous dépeint une sorte de harpie castratrice ravi que son mari ne soit plus en état d'écrire «Zelda sourit […] quand elle le vit boire du vin. J'ai appris à très bien connaitre ce sourire. Il signifiait qu'elle savait que Scott ne pourrait pas écrire ». Il la décrit insatisfaite de la taille du sexe de Fitzgerald. Selon lui, c'est encore une façon pour elle de démolir Fitzgerald « -Mais pourquoi a-t-elle dit ça ? -Pour te rendre incapable d'initiative. » Il rassure son ami mais s'y attardera un chapitre entier, rien de moins. Un ami n'aurait-il pas plutôt passé cet épisode sous silence ? L'histoire a démontré par la suite que Zelda, qui écrivait aussi, a sans doute été plus victime que bourreau, son mari ne s'étant pas gêné pour piller ses écrits.

Au final, l'écriture d'Hemingway m'a beaucoup plu. Son regard sur le couple Fitzgerald m'a particulièrement intéressé. Les portraits sont sans concession. Il nous rend familiers tous ces personnages qu'il a croisé durant son séjour parisien et nous fait découvrir et partager leur mode de vie. Mais même s'il fait aussi parfois preuve d'autocritique, on ne peut pas dire que son regard acéré sur eux le rende très sympathique.



Lien : http://bouquins-de-poches-en..
Commenter  J’apprécie          260
Hemingway fouille ici dans sa mémoire, alors que journaliste et apprenti écrivain, il séjourne à Paris avec sa famille durant les années vingt. Sans le sous, il vivotait, mangeait peu, gagnait parfois au jeu, ce qui lui permettait de satisfaire quelques goûts de luxe comme d'aller aux courses par exemple. Un choix de vie. Soit vivre normalement, soit se priver et faire la fête dans le beau Paris.

On suit un Hemingway très dynamique dans ses itinéraires toujours semblables. Promenades dans la ville, écriture sur un coin de table dans un bar, rencontres d'écrivains. Ce qui m'a le plus touchée, ce sont les récits qui racontent l'amitié entre Hemingway et Fitzgerald, deux tempéraments pourtant aux antipodes l'un de l'autre. Fitzgerald manquant de confiance en lui-même, hypocondriaque, angoissé,… exaspérant un Hemingway insouciant et confiant. Certaines situations sont très amusantes et le duo de ces deux écrivains est assez loufoque. J'ai trouvé ces deux portraits profondément humains et proches de nous, parce que c'est ce que la vie a de plus beau : les paradoxes.

J'ai également apprécié le texte « Ecrire à la première personne » où Hemingway parle de la part autobiographique que le lecteur pense voir dans les écrits d'un auteur lorsqu'il s'exprime à la première personne, alors qu'évidemment il se trompe. Il parle aussi de l'origine de son inspiration.

Ce livre est un bon moyen de rencontrer Hemingway en tant que personne. Il m'a aussi donné envie de lire un roman de l'auteur, le Soleil se lève aussi, dont il parle dans son recueil, et Gatsby le magnifique, de Fitzgerald, une oeuvre, qui eut un succès colossal.


Commenter  J’apprécie          240
Hemingway nous invite dans le Paris des années 20, où la société des écrivains américains s'y retrouvait. Ainsi, on suit les rencontres d'Hemingway avec la célèbre et implacable Gertrude Stern, mais également Sylvia la libraire bienveillante, Scott Fitzgerald, Blaise Cendrars, ...

Hemingway vit alors pauvrement, nourri par son travail d'écriture, ses exigences, ses inspirations, son amour pour les peintures de Cézanne, ses déambulations dans le Paris gourmand et culturel.

L'écriture de ce livre a été reprise plusieurs fois, comme des souvenirs qui reviennent et sont rajoutés, sans mélancolie, avec un brun de nostalgie et surtout du bonheur d'avoir vécu toutes ses rencontres, dévoré les plats français et bu aussi. On se promène, on se questionne avec lui.
Ce fut une belle ballade parisienne, en compagnie de grandes personnalités, qui nous donne envie de nous pencher sur chacune d'elle.
Commenter  J’apprécie          220




Lecteurs (4371) Voir plus



Quiz Voir plus

Paris est une fête

En quelle année est paru ce texte ?

1963
1964
1965

10 questions
91 lecteurs ont répondu
Thème : Paris est une fête de Ernest HemingwayCréer un quiz sur ce livre

{* *}