Ce n’est pas en connaissance de cause que j’ai ouvert cet ouvrage.
Pour moi la formule évoquait Saint Augustin, une figure que j’apprécie et je suis donc plongée sur l’ouvrage sans l’examiner plus avant.
Je suis donc restée quelque peu perplexe en me retrouvant avec un ouvrage de philosophie entre les mains…il y a longtemps que je n’ai plus ouvert un manuel de philosophie.
J’ai dû m’aider du dictionnaire maintes fois, cependant la lecture de monsieur Jerphagnon est fort plaisante et sa façon de nous prendre la main pour nous emmener à la découverte de l’histoire des idées et des idéaux transformerait le pire des cancres de la classe de philo en érudit.
Parfum de collège et de syllabi, nostalgie, rires, pensées et sourires, c’était là un beau moment de lecture
Monsieur Jerphagnon ce livre fait de vous un « O capitaine, mon capitaine » pour l’élève avide de découvertes que j’étais restée sans le savoir.
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Lire Jerphagnon, c'est élargir son esprit au plus grand nombre d'époques possibles en compagnie d'un érudit aussi intègre que malicieux.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
"Rome a grandi sous trois régimes.
La monarchie d’abord (- 753 à - 509) ; mais le règne du dernier Tarquin rendit les Romains allergiques au mot même de roi, comme en témoignent Tite Live et Cicéron.
Vint alors la république sénatoriale (- 509 à - 27). En droit, l’exécutif était réparti entre magistratures électives : consuls, questeurs, préteurs, censeurs. En fait, sur fond de conquêtes (Afrique, Gaule, Espagne, Orient hellénistique) profitables aux intérêts des grandes familles plus qu’au « peuple romain », la démocratie tourna vite à l’oligarchie ploutocratique, peu soucieuse de la «Rome d’en bas»... D’où plus d’une crise entre possédants et proletarii, gens qui ne pouvaient compter que sur leur descendance (proies) pour vivre. L’instauration d’un tribun de la plèbe ne suffira pas à normaliser les rapports. Et quand on voit Caton l’Ancien, parangon de la vertu ancestrale, énumérer dans son Traité d’agriculture « la vieille vache, le vieil esclave » comme biens sur quoi ne pas perdre à la revente, on comprend mieux l’épisode Spartacus (73-71 av. J.-C.). Et l’on est moins tenté de voir la République romaine comme on l’imaginait en 1789. Ajoutons l’absence d’une administration responsable dans les territoires conquis, ce qui ouvrait la voie à tous les détournements ; la montée en puissance des légions, dont les chefs étaient tentés de se mettre à leur compte ; la prolifération aussi des aventuriers de la politique dans une société instable. Ainsi, on ne s’étonnera pas que, de scandales en empoignades et règlements de comptes entre factions, la République ait basculé dans une guerre civile de cent ans.
Puis ce fut la mise en place de ce qu’on appelle l’empire (27 av. J.-C. à 476).
«Rome doit beaucoup aux guerres civiles», chante Lucain dans la Pharsale... Et, paradoxalement, un régime qui va prolonger de cinq siècles son destin. Vainqueur à Actium (31 av. J.-C.) d’Antoine, qui autrement, en compagnie de Cléopâtre, se fût approprié tout l’Orient romain, le jeune Octave, un petit-neveu de César, prend les affaires en main. Un coup d’Etat ? Que non ! Il savait trop ce qui était arrivé à oncle Jules pour avoir tenté, à ce qu’on disait, de restaurer la monarchie. On ne touche pas à la république. Le Sénat, les élections, les magistratures, tout reste en place, garanti
SPqR . Simplement, Octave se laisse confier tous les pouvoirs par le Sénat, avec en plus l’air de les refuser. A la rigueur, il veut bien être princeps, le premier des sénateurs. De tout cela, il s’explique dans les Res gestae, un testament gravé ici et là en latin et en grec. Du grand art : les apparences sont sauves, les fantasmes démocratiques aussi, et cette géniale astuce des magistratures rassemblées sur une seule tête va être reconduite cinq siècles durant par cinquante-huit « princes » aussi différents qu’il se peut. Tous porteront le nom de César et le surnom d’Auguste, dont Octave, le premier, fut décoré. Ce que nous appelons « l’empire » était né.
Lucien Jerphagnon – Roma Aeterna – dans Connais-toi toi-même p. 98-99
Allbin Michel - 2012"
Nulle part dans l'histoire, l'homme n'aura pris de sa condition plus exacte connaissance que dans la civilisation grecque, ne l'aura traduite avec pareil génie dans les cosmogonies, les épopées, les tragédies, la philosophie. Cela même valut aux Grecs un rayonnement à nul autre pareil.
Qu'il y ait du mal dans ce monde, ce n'est pas douteux, mais il n'est que privation du bien. A chacun de s'en délivrer par l’ascèse et par la contemplation philosophique , et non en cédant à des mirages inconsistants où le philosophe ne voit qu'un charlatanisme spirituel.
Savoir parler en public ne signifiait pas seulement s’exprimer sans bafouiller, mais aussi et surtout capter l’attention de l’auditoire et décocher comme une flèche l’argument qui fait mouche s’il est pointé où et quand il faut.
Rien de plus grec que le mot d’ordre Kairon gnôthi, « Repère le moment » ! Aussi cette denrée nouvelle et surfine que proposait l’enseignement des Protagoras, Gorgias, Hippias, Prodicos, Antiphon, Thrasymaque et autres, suscita-t-elle dans le monde politique une formidable demande, un remaniement complet des habitudes de pensée, et aussi une violente réaction allergique dont les effets, comme nous venons de le dire, se font encore sentir de nos jours.
Tyrans ou démocrates, les gens de pouvoir ont toujours eu le souci d'une uniformité allant dans le bon sens ,le leur.
Lucien Jerphagnon / Raphaël Enthoven - Rencontre avec un érudit généreux