Dans l'art d'épingler les personnalités du monde politique ou du monde culturel Serge Joncour est passé maître.
Même en partant d'une simple poissonnerie, il est possible pour ce filou de Joncour de traquer par un détour incongru une arrête qui risque de compromettre le haut personnage dans un incident diplomatique.
Certes la maison d'édition nous avait prévenu, "La brochure, ils n'ont qu'à la refiler à l'auguste, à l'autre Nobel du bord de mer, quitte à le dédommager en nature, puisqu'il paraît que le bonhomme est du genre à priser l'océan."
Les Combi, poissonniers de père en fils, sont à l'apogée de leur ascension sociale, en ayant gagné une place de choix : Livrer le Miramar.
Pour tenir dans le Lavandou, il faut aussi une notoriété digne d'être admirée, et une élégance capable de dissiper toute odeur de poisson frais ; la hantise des poissonniers et des Combis.
Le jeune combi en ressent les relents quand il vient livrer en scooter par le parking des pensionnaires.
Aucune reconnaissance des clients du Miramar, ces salauds-là s'envoient pourtant à diner du Combi à longueur de journée, accueillant chaque fois la prise "dans l'extase de la communion".
Et pourtant, cette vocation qui remonte loin dans la généalogie, de cette lignée d'ancêtres supposés de l'Adriatique et de leur pieuse vertu, grâce à une Belle Plaquette devait devenir chanson de geste et conter l'histoire des Combis.
Le Nobel a gommé toutes les légendes.
"Rien au sujet de cette savante alchimie du patronyme qui nous aurait transmués du celtique au transalpin, distillant l'alcool fort du Combi en partant de ces vieilles souches qu'étaient les Combenec'h et les Bilawen"p 114.
le Nobélisé tombé hier dans l'hébétude d'un manque total d'inspiration, relève les ouïes, le jeune combi lui a donné 200 pages de savoureuses anecdotes, plus proche de l'évasion fiscale que de l'insoumission, bien plus que le fumet tenace d'un court-bouillon.
Pourtant le Nobel, piégé au jeu des citations, était bien celui qui avait le plus de mal à s'en remettre, au point qu'il délaissait toujours son assiette et continuait de ruminer fébrilement. Humilié, il insista comment dites-vous vous appeler déjà ? Ibabourne... Non franchement je ne vois pas. Eh vous publiez chez qui ?
Juste le club des Loisirs
Et oui sachez que je pars justement pour les besoins de "La Famille Combi", le temps de faire une petite tournée promotionnelle, une vingtaine de villes tout au plus, après quoi je reviendrai...
En plus je me doutais bien que Plouhenec'h, c'était un nom à consonances. Ce gars-là, c'était bien un Breton avant d'être un Nobel... Dans ces conditions, pas étonnant qu'il se soit servi de nous pour virer dans la thèse, pas étonnant qu'il nous ait fait le coup de la dissémination flatteuse des peuples...
P 114
Plutôt que de chialer comme tout le monde je basculai dans l'éclat, celui de l'irrépressible rire, fou de surcroît, celui-là même que l'on dit être du cétacé.p 120
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Les gens ont toujours tendance à surestimer les auteurs, surtout ceux qui lisent, alors que dans le fond le moindre propos que chacun se tient à soi-même, le moindre embryon de considération, tout cela est en soi, pure littérature , les pensées qu'on rumine en sont le récitatif, et nos séquences de colère, d'enthousiasme ou de divagation fondent les arias. Maintenant, quant à la mise en forme de tout ça, la valeur stylistique ou la finesse de l'articulation, elle n'est jamais déterminante, et ne s'affirme pas tant dans le choix strict des mots, que dans la façon de les agencer.
Pas une vie d'assumer ses ancêtres, pas une vie de faire reluire l'antériorité,
d'autant que la vérité vraie de cette histoire, signe que les lignées procèdent pour beaucoup de la mégarde, c'est que les nôtres auront tout bonnement confondu le cap Horn avec le rocher de Gibraltar.
La nature, c'est le complément de l'humain, c'est ce qui met de la couleur au décor et distrait des galets, la nature, c'est ce qui nous plante des pelouses vertes et fait l'air ventilé, mais en vertu du principe qui veut que toute chose dispense son utilité en sus de ses charmes, la nature, en attendant de la supplanter, c'est encore ce qu'on a de mieux pour trouver à bouffer. Que ce soit dans l'ordre du végétal ou de l'animé, tout se digère et se transmute, tout nous rassasie dans un climat de santé, si l'on excepte bien sûr les élaborations complexes et plus ou moins transgressées.
Qu'on soit bien sûr d'une chose, puisqu'en ces temps de gloires faciles quantité d'idoles nous encombrent, pour ce qui est des distinctions littéraires, il est clair qu'elles décuplent les êtres qu'elles encensent, qu'elles soulignent d'un éclat qui ne vient pas seulement des métaux qu'elles annoncent. La classe. Cela dit, on n'imagine pas non plus refiler le Nobel à un subalterne, un indigent mal sapé à l'épouse en ruine.
Plutôt que de chialer comme tout le monde
je basculai dans l'éclat, celui de l'irrépressible rire,
fou de surcroît, celui-là même que l'on dit être du cétacé.
p 120
À l'occasion du Forum des libraires 2023, Anna Pavlowitch, directrice des éditions, présente la rentrée littéraire d'Albin Michel - @VideoAlbinMichel
Au programme de la rentrée d'automne 2023 :
- Psychopompe d'Amélie Nothomb
- À Dieu vat de Jean-Michel Guenassia
- Le Pavillon des oiseaux de Clélia Renucci
- Les Heures heureuses de Pascal Quignard
- Chaleur humaine de Serge Joncour
- L’Épaisseur d'un cheveu de Claire Berest
- Les Amants du Lutétia d'Emilie Frèche
- Les Grands Enfants de Régis de Sà Moreira
- Paradise Nevada de Dario Diofebi
- Illuminatine de Simon Bentolila
- Le Diplôme d'Amaury Barthet
0:00 Introduction
0:16 Que vous évoque la rentrée littéraire ?
0:59 Selon vous, est-ce un risque de publier des primo-romanciers en période de rentrée littéraire ?
Un événement @livreshebdo_ avec le partenariat de @babelio
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