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EAN : 9782350686066
Cairn (02/03/2018)
4.08/5   25 notes
Résumé :
Comment a été découvert le xocoatl, "boisson des dieux" chez les Aztèques ? L'envoûtant Cacao nous entraîne sur la route du chocolat : du Mexique à Bayonne, en passant par Saint-Domingue. Lune, au cœur brisé par la disparition en mer de son fiancé, tient les rênes des négoces de son grand-père David Alvarez, descendant de marranes réchappés de l'Inquisition espagnole.
Mais un jour de 1761, les autorités de Bayonne défendent aux Juifs de tenir boutique et même... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Il est vrai que le sujet me plaisait d'emblée - l'histoire du chocolat - et que j'ai de bons souvenirs de Bayonne, ville près de laquelle j'ai vécu longtemps, mais même sans cela, c'est un livre très agréable et instructif, presque un roman d'aventure, touffu et plein de surprises, riches en personnages hauts en couleurs.

Nous sommes à Bayonne en 1761, et cela va mal dans le quartier Saint-Esprit, soit pas dans le centre, mais de l'autre côté du pont, là où tentent de vivoter, tant bien que mal, ceux qu'on appelle les Portugais, c'est-à-dire les Juifs. Il existait alors toute une communauté à Bayonne, exilés d'Espagne ou du Portugal où ils subissaient les foudres de l'Inquisition - cela se terminait souvent sur un bûcher. La famille de David Alvarez Sarmento vit du chocolat, presque tous ses membres en ont la passion chevillée au corps, notamment Lune, sa petite-fille. Seulement, les échevins et commerçants bayonnais "du cru" ont décidé de faire interdire tout commerce dans la ville, et de faire édicter des statuts qui ne favorisent qu'eux.

Ainsi commence un long procès, qui s'étendra jusqu'en 1766, dont nous suivons les démêlés, à la fois par des extraits de vrais documents, et par les carnets de "Pompon", c'est-à-dire Raphaël, ou "le Nabot", un Nain adopté par David, et amoureux secret de la belle Lune. Les délibérations des échevins de Bayonne ayant lieu à l'Hôtel de Ville, nous avons accès à ces temps de l'action par d'astucieux procédés, car Cacao est un roman polyphonique : le récit est mené aussi bien du point de vue de David, l'aïeul, Lune, Raphaël, que d'Adrien Gaspard, qui doit rédiger le mémoire contre les Juifs. Par Adrien nous connaissons les coulisses des menées politiques du maire et de ses édiles, des réponses des avocats ; Raphaël espionne aussi pour son compte, grâce à son avantageux métier, chasseur de rats.

Découragés, désespérés par la situation, les membres de la famille Alvarez et leur réseau familial, amical, travaillent à contrer, jusqu'à intenter une action en justice de leur côté, les sévères conditions édictées par les commerçants, et le harcèlement incessant dont ils sont victimes. A côté de cela, il y a le cacao - il faut aller le chercher sur les quais, le travailler, puis confectionner le chocolat à base de recettes éprouvées dont les Juifs ont le secret. Et justement... S'il était possible de prouver que le cacao, ce sont eux, les Juifs, qui l'ont introduit à Bayonne ? Cela ne résoudrait-il pas leurs problèmes ? C'est dans une course à l'histoire familiale qu'ils se jettent, dans l'adversité mais aussi l'amour...

Michèle Kahn fait oeuvre d'historienne et nous restitue avec bonheur le Bayonne du VIIIème siècle, c'est un régal de voir ces scènes intimes et lieux familiers se déployer sous nos yeux. L'écriture est classique, sans effets de manche, mais sensuelle et gourmande, elle nous fait ressentir les bruits, les odeurs, et surtout le goût du cacao. L'alternance de points de vue différents dans chaque chapitre rend l'ensemble rythmé, varié. J'ai été touchée par la personnalité et le malheur de Raphaël, celui qui du reste écrit le mieux, qui en dépit d'une naissance contraire, est doué, intelligent et sensible. Nous voyageons aussi dans les traditions, la culture juive, ce que j'ai trouvé intéressant, ainsi que l'élargissement à des temps historiques plus vastes, par le biais des ancêtres de David, comme la conquête des "Indes", la colonisation de Saint-Domingue, et bien sûr l'Espagne de l'Inquisition.

Je mettrais deux très légers bémols : d'une part, c'est un récit au présent, et dans un roman historique, je trouve cela dommage ; d'autre part, il faut un peu s'y retrouver dans les noms espagnols et portugais, et l'arbre généalogique de la famille. mais cela tombe bien ; il est reproduit au début du roman. Peu s'en faut que cela ait été un sans faute, et un coup de coeur inconditionnel, je vote 4,5/5.
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Voilà un roman au titre et au résumé qui mettent l'eau à la bouche mais qui pourtant m'aura laissée un peu sur ma faim. Ce n'est pas que je n'ai pas aimé ma lecture, au contraire, mais j'ai eu un mal fou à entrer dans l'histoire et j'ai donc mis un temps fou avant de commencer à réellement apprécier ce que je lisais. Pourquoi ? Tout simplement parce que je m'attendais à autre chose.

Je m'attendais à une grande fresque familiale de cette famille juive qui aurait importé le
chocolat en Europe et tout particulièrement en France. Je pensais donc trouver un traitement linéaire de l'histoire c'est-à-dire racontée dans l'ordre chronologique , de la découverte du cacao au Mexique à l'importation en France. Or l'auteur a fait le choix d'un traitement différent. Michèle Kahn ancre essentiellement son récit à Bayonne au XVIIIème. Les éléments concernant l'histoire du chocolat n'apparaissent que sous forme de lettres, journaux intimes et souvenirs des personnages. Résultat : seules quelques pages traitent véritablement de ce qui m'intéressait à l'origine dans ce roman.
En fait, j'ai eu plus l'impression de lire un roman sur l'histoire de la communauté juive de Bayonne au XVIIIème siècle que sur l'histoire du chocolat. Et bien que ce soit très intéressant pour l'amatrice d'Histoire que je suis, ce n'est pas ce que je voulais lire. D'où ma déception.

Néanmoins, Michèle Kahn est tout de même parvenue, malgré ces difficultés, à me faire entrer dans son récit grâce à son incroyable talent pour retranscrire l'atmosphère et l'ambiance de l'époque. Elle décrit à merveille son décor, l'agitation des rues, la lumière, la température, les odeurs, les bruits, on s'y croit vraiment ! A tel point que je n'ai pu me retenir de faire une grimace de dégoût de temps à autre.
Ses personnages sont également bien dessinés. Sans passer des pages et des pages à nous décortiquer leur portrait psychologique, Michèle Kahn réussit par son style à les rendre très vivants, par exemple en retranscrivant les accents ou les tics de langage ou en détaillant leurs petites manies. On connaît particulièrement le personnage de Pompon à travers son journal. En effet, la narration alterne entre plusieurs points de vue, principalement celui de Lune, d'Adrien, de son grand-père et de Pompon.

C'est donc un récit très en relief que nous sert l'auteur de Cacao, richement documenté et grâce auquel on apprend beaucoup. Un glossaire, une bibliographie ainsi qu'une note de l'auteur retraçant en quelques lignes le parcours de création de son livre permettent au lecteur de prendre la mesure du travail effectué.
Grâce à ce roman, j'en sais plus sur comment le chocolat nous est parvenu et j'ai notamment appris qu'on devait son introduction en France aux Juifs d'Espagne ayant fui l'Inquisition. C'est donc grâce à ces familles de Portugais exilées ( ainsi appelait-on les Juifs d'Espagne) que Bayonne est devenue le premier centre français de production de chocolat, sa consommation étant par la suite popularisée par la reine Anne d'Autriche épouse de Louis XIII et infante d'Espagne qui était très friande de ce breuvage auquel on attribuait surtout des vertus thérapeutiques (on trouvait des pastilles de chocolat dans les pharmacies).

Donc voilà, un très bon roman historique bien écrit mais auquel j'ai trouvé qu'il manquait un certain souffle épique. J'aurais aimé suivre les aventures de cette famille du début jusqu'à la fin et non seulement par petites bribes. Cela m'a un peu gâché mon plaisir et c'est fort dommage. Je l'aurais sans doute plus apprécié si je n'avais pas eu ces attentes précises.

Lien : http://booksandfruits.over-b..
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Ce roman historique foisonnant se déroule (pour l'intrigue principale) dans les années 1760 à Bayonne. Dans cette ville, la communauté "portugaise", entendez les juifs réfugiés en France après avoir fui l'Inquisition et les persécutions en Espagne et au Portugal, s'est spécialisée dans l'importation et la vente du cacao et du chocolat (à boire), substance revigorante et raffinée qui fait le bonheur des bourgeois bayonnais. Mais les vexations infligées à ces non-chrétiens s'accentuent et restrictions et interdits se multiplient ... jusqu'à ce que l'interdiction de faire commerce de chocolat dans la ville ne vienne frapper de plein fouet la famille Alvarez Sarmiento. Commence alors pour David, le patriarche, sa petite-fille Lune et Raphaël, nain recueilli par la famille depuis longtemps, une quête de mémoire et de patience pour remonter les méandres de l'Histoire et prouver à tous que le cacao a bien été rapporté des Amériques et introduit en France par leurs ancêtres. A travers les siècles et les océans, nous suivons donc les périples de différents membres de la famille Alvarez Sarmiento. Et c'est par les voix alternées de Lune, David et Raphaël que cette histoire se découvre.
Je dois avouer que j'ai tourné autour de ce livre quelques semaines en lisant de petits morceaux à la fois, avant de finalement m'immerger dans les méandres de la quête de David et Lune. Les récits d'aventures (la rencontre de Moctezuma et de Cortès), l'enfance du patriarche à Saint-Domingue se mêlent à la vie de nos protagonistes dans cette Bayonne de la fin du XVIIIème siècle. La place de la religion, les tractations politiques et judiciaires résonnent fortement dans l'histoire de cette famille juive. On s'attache aux personnages de Lune et de son grand-père, mais également à celui du petit Raphaël, le nain chasseur de rats, qui confesse ses souffrances de vivre adulte dans un corps d'enfant, qui lui interdit à jamais l'amour auquel il aspire. La langue est riche et travaillée (mais petit bémol pour le lexique en fin d'ouvrage qui explique les mots en italique, pour ma part, j'aurai préféré des notes de bas de page pour ne pas interrompre ma lecture). Et l'histoire du cacao, passionnante !
Merci à Babelio et aux éditions CAIRN pour la découverte de ce livre !
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Un voyage au pays du chocolat.
À travers un dialogue avec les esprits, David Alvarez, chocolatier juif installé au faubourg Saint Esprit lès Bayonne, nous entraîne sur la route du chocolat, du Mexique à Bayonne.
On suit l'histoire comme on suivrait une fine odeur de chocolat.
Un récit riche en descriptions qui sont disséminées tout au long du récit et qui apporte une certaine douceur poétique comme l'odeur du chocolat qui emplit la pièce quand on le prépare.
Ces petites touches atténuent la violence des tensions entre Juifs et Bayonnais. Les premiers ayant apporté le savoir sur le cacao et les seconds, catholiques, souhaitant s'installer dans le quartier attribué par le Roi. Une lutte intestine, les uns arguant des décisions royales sur leur installation, les autres mettant en avant leur origine pour s'installer dans le quartier des chocolatiers.
Un récit où se mêle amour du chocolat, bataille de territoire, peur de l'envahissement, déchirement entre religions.
Une découverte, pour ma part, ne connaissant pas Bayonne et son histoire avec le chocolat.
J'ai beaucoup aimé l'écriture de l'auteur, à la fois historique mais aussi poétique.
A lire avec une bonne tasse de chocolat fumant...

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Habitante de cette belle contrée qu'est le Pays Basque et travaillant à Bayonne, me plonger dans cette histoire a été une formidable aventure.
Tout d'abord, en savoir un peu plus sur l'histoire de cette ville si belle et vivante, mais aussi sur ce qui en fait la renommée (en-dehors de ses fêtes ; ) ), c'est-à-dire le chocolat que nous continuons à déguster si régulièrement aujourd'hui. Et ensuite, se promener avec enchantement au nom des rues et des quartiers toujours d'actualité mais en les transposant au XVIIIème siècle est un petit plaisir très agréable.
En-dehors de ce petit côté local, j'ai sincèrement aimé suivre l'histoire de la famille Sarmiento-Alvarez, tous fascinés et passionnés par le chocolat et voulant en faire prospérer la circulation et l'étendre au monde entier.
Au-travers des persécutions subies par les Portugais bayonnais pour que les "vrais" Bayonnais, notables, échevins et négociants locaux en retirent tout le bénéfice de cette denrée au succès fou, l'auteur nous retrace toute l'aventure vécue par ces familles juives pour que ces cabosses arrivent en Occident et soit utilisée comme en Amérique du Sud.
Le côté sombre de l'histoire bayonnaise est ici mi en avant et est très intéressante et fort bien écrit car tous les personnages principaux du livre prennent la parole au fur et à mesure des chapitres et le côté romancé amène un petit plus qui ravit forcément la lectrice que je suis.
En conclusion, un très réussi roman historique.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Cependant, malgré les humiliations qu'incarne le pont Saint-Esprit, Lune adore le traverser : long, large et solide, il s'attire l'admiration des visiteurs. Des bancs sont scellés aux rampes, où l'on s'arrête pour respirer l'air de la mer toute proche, observer au passage les voitures ou les vaisseaux battant pavillons étrangers, admirer les hautes maisons de pierre qui bordent la place Gramont.
Calèches, cabriolets, chaises à porteurs, piétons et cavaliers circulent dans une humeur joyeuse. Des carrosses se croisent à grand-fracas, filant qui vers Madrid, qui vers Paris. Venues de Capbreton, des charrettes à boeufs croulent sous le poids de corbeilles qui dégorgent de mulets landais. Les bateliers de l'Adour se chantent pouilles tandis que vocifèrent les cochers. Une cruche de terre posée sur leur tête fière, les servantes de maisons bayonnaises rapportent l'eau puisée à la fontaine de Saint-Esprit.

(Page 19)
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Le Saint-Esprit est bâti de leur façon en belles maisons, hem, et ils se sont rendus les maîtres du courtage par où ils savent tout le fort et le faible de chaque particulier. S’ils parvenaient à leur objet, hem, il ne se passerait pas beaucoup d’années que toute la ville leur appartiendrait, hem, et que les autres habitants ne sauraient y subsister ; outre leurs intrigues et leurs moyens, hem, rien ne les distrait des affaires, ni bienséances, ni charges publiques, ni corvées et tant d’autres choses ; tout, au contraire, hem, les met dans le cas d’employer universellement leurs moyens aux affaires.
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Sous ses yeux, les conquistadors affrontent dans un corps à corps sanglant des diables aux visages peints en rouge, blanc et noir, à grands panaches, tambours et trompettes. Lesquels s'élancent sur eux tels des chiens enragés, tenant à deux mains des sabres affilés, des épées d'obsidienne longues comme des espadons, tranchantes comme des rasoirs, ou décochant des grêles de pierres, de flèches, de pieux à bout grillé.
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Maudite goutte qui empêche maître Sallenave de chausser son pied, qui le condamne à clopiner quand ce n’est pas à marcher avec une béquille ! Et à quoi ressemblent ses pauvres soupers, privés de vins, ragoûts, fritures, viandes salées, légumes secs, artichauts, tout ce qu’il aime ! Le voilà qui bave comme un vieux limaçon à l’idée d’un plat de veau aux huîtres… Ayant veillé à se purger trois ou quatre fois le mois avec du sirop de roses pâles, et à prendre tous les matins à jeun neuf gousses d’ail, il se croyait guéri lorsque son orteil s’est mis à gonfler de nouveau.
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Avez-vous vu errer sur le port, commence David d’une voix lointaine, un marin toujours escorté d’un sapajou et d’un perroquet à l’œil rond et à la voix moqueuse ? Avez-vous déjà croisé le grand nègre à nez aplati, peau douce et luisante, couleur chocolat et cheveux crêpés, apprenti tonnelier venu sur l’ancien continent s’instruire d’un métier ? Moi, riche négociant, il m’est souvent arrivé d’envier ces gens de peu car ils sont promis à revoir les Îles. Il est trop tard à présent pour y penser, mais c’est là-bas que j’aurais voulu mourir, à l’ombre d’un cocotier…
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