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EAN : 9791032907788
160 pages
L'Observatoire (10/03/2021)
3.41/5   62 notes
Résumé :
« On est tous des additionnés », affirmait Romain Gary dans Pseudo. Rachel Khan ne le sait que trop bien. Noire, gambienne, d'origine musulmane et catholique par son père, blanche, juive et française par sa mère, elle est fière de se dire « racée ». Mais comment vivre cet excès de « races » à l'heure des replis identitaires où seule la radicalité importe ? Comment se positionner avec ce « pedigree » alors que l'injonction est de choisir un camp ?

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Je ne me doutais pas qu'un jour, je pouvais être jugé non sur ce que j'ai fait dans mon existence, mais sur ce que je suis : un mâle blanc hétérosexuel (vade retro satana). Cadre supérieur au coeur d'une grande agglomération urbaine ou paysan creusois crève-la-faim, peu importe, ces mâles blancs doivent rendre compte des « crimes » commis par leurs aïeux, mettre un genou à terre en signe d'éternelle repentance, supporter stoïquement l'injure parce qu'elle est justifiée, quand bien même il faudrait pour cela remonter jusqu'aux croisades…
J'ai lu « Racée » pour essayer de comprendre ce radicalisme identitaire des minorités dites « visibles », ethniques ou d'origine sexuelle. Ces minorités qui exigent que « deux clans s'opposent. Ceux qui seraient strictement identiques, « nos frères », et les autres, la cause de tous les drames. »
Essayer de comprendre cette recherche absolue d'homogénéité, ces revendications victimaires et souvent outrancières qui inondent les réseaux sociaux, la signification de mots à la connotation vaguement stalinienne, émasculateurs, comme « intersectionnalité » ou « déconstruction » …
Mais ce livre écrit par la très courageuse Rachel Khan (les haineux victimaires lui en ont mise plein la figure) m'a apporté bien plus. Beaucoup plus. D'une certaine manière, il m'a réconcilié avec moi-même.
Avec comme fil conducteur les propos sages et provocateurs de Romain Gary ou d'Émile Ajar ou d'autres identités prises par ce personnage flamboyant, avec beaucoup de poésie et de drôlerie, Rachel Khan démonte ces mots qui enferment, qui rétrécissent, qui accusent, qui rejettent pour en promouvoir avec vitalité et sans haine d'autres : intimité, création, désir. Des « mots qui réparent », des mots qui recousent, des mots qui ont des bras grands ouverts, des mots qui apaisent, qui additionnent, qui font sourire, qui aiment…
Rachel Khan a parlé avec beaucoup de tendresse de ses origines, cette mosaïque de religions, de langues, de pays, de couleurs. Moi, je suis le fruit improbable de paysans corses madrés et de grands bourgeois bordelais. Par quel hasard, par quel chemin tortueux ces gens-là se sont-ils rencontrés ? C'est cette histoire que j'aimerais lui raconter, avec son lot de drames, de défaites, de mystères et de jours heureux.
En chacun de nous, il y a une grande Comédie Humaine.

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Un essai dont j'espérais beaucoup mais qui, en dehors des nombreuses citations et des bribes de poèmes sur lesquelles s'appuie l'auteur, ne m'a pas apporté grand-chose sinon l'impression que m'inspirerait un saumon remontant à contre-courant un torrent pour me démontrer qu'on peut nager tout à aise autrement qu'en suivant le cours de l'eau.
Rachel Khan est plurielle.
Noire par son père.
Blanche par sa mère.
Sénégalaise et Gambienne par son père.
Polonaise par sa mère.
Musulmane et animiste par son père.
Juive par sa mère.
Ex-athlète de haut niveau.
Juriste.
Essayiste.
Comédienne.
Consultante sur LCI.
Etc etc etc
Ah... j'oubliais l'essentiel : elle est femme ; une femme féministe qui ne l'est pas vraiment... une femme antiféministe... sans aller jusque-là.
Et de tous ces petits morceaux de mosaïque, Rachel Khan fait de sa personne ( humour... oui et non ) une femme "racée".
Son essai tend donc à démontrer qu'on peut être racée sans être racisée, que le racisme ce n'est évidemment pas bien... mais que l'antiracisme dévoie la cause qu'il est supposé défendre... par ses prises de positions, certaines de ses postures, sa dialectique... son verbe.
"Les mots doivent normalement servir nos échanges. J'ai remarqué que depuis quelques années, certains mots nous séparent alors qu'ils devraient nous recoudre."
Ainsi part-elle en guerre contre ces mots qui divisent : "souchien", "afro-descendant", intersectionnalité", "diversité", "mixité et non-mixité", "vivre-ensemble"
"Toute une série de mots nous font – c'est mon intuition – aller vers un drame, vers une séparation. Et au lieu de nous soulager, ces mots ravivent nos blessures et nos souffrances."
Telle est la thèse qu'elle déploie tout au long de cet essai, avec pour credo : "Les discriminations se combattent toujours dans l'ouverture et vers la lumière et non pas en pointant les anciens bourreaux comme c'est le cas aujourd'hui".
Et pour ne pas être uniquement dans l'indexation, dans la dénonciation, Rachel Khan tempère sa démonstration en terminant sur un éloge du silence :"Aujourd'hui, on vit dans le vacarme, dans un monde où il faut beaucoup parler. Il y a une libération de la parole, ce qui est une bonne chose dans certains cas, mais lorsque l'on est dans une succession de monologues, on ne s'écoute plus. Il faut pourtant beaucoup de silence pour échanger car on ne peut pas tous parler en même temps".
Une lecture où il m'a semblé alterner des réflexions intéressantes avec du verbiage dans lequel notre pauvre saumon boit quelquefois la tasse.
Nuances et complexité ont du mal à se faire une place dans cette époque bousculée et chaotique ; Rachel Khan s'y essaye... sans que j'accroche totalement à sa démonstration dans laquelle il y a ou trop de saumons ou pas assez d'eau.
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Quel courage d'affronter ainsi les "identitaires " à la Rokhaya Diallo, ou les "indigènes de la République" en affirmant son refus de se faire assigner à la place que ces gens là veulent imposer à ceux qui partagent sa couleur de peau! Elle savait bien qu'elle n'aurait que des injures à y gagner, comme tous ceux que ces nouveaux racistes qui se prétendent antiracistes considèrent comme des traitres à la "cause".

"La cause" fait d'ailleurs partie des "mots qui séparent" (avec "souchien", "racisé" et d'autres) qu'elle analyse avant de passer aux "mots qui ne mènent nulle part" ("vivre-ensemble", diversité", etc), en faisant passer dans cette réflexion sur les mots, toute la profondeur d'une pensée que la richesse de son parcours de sportive de haut niveau, juriste de haut vol, collaboratrice d'hommes politiques d'ampleur nationale, directrice d'association, écrivain, actrice, ... lui a permis de développer.

Quel dommage qu'elle se laisse aller (le résultat d'un attachement immodéré et difficile à comprendre à la lecture de Derrida et d'autres philosophes également impénétrables?) à écrire, de temps à autre, quelques phrases incompréhensibles.

Que le lecteur se rassure, cela n'arrive pas si souvent que cela, même si la densité de ces passages abscons augmente vers la fin de l'ouvage, dans les "mots qui réparent" et dans la conclusion.

Mais il est toujours plus difficile de donner les directions à suivre pour remédier aux défauts que l'on analyse que de les décortiquer, et il reste que c'est déjà, vue de la manière originale qu'a Madame Khan de voir cela, une excellente matière à réflexion dont il serait dommage de se priver.

C'est donc une lecture que je conseille vivement.
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Une saine et intelligente réflexion particulièrement bien construite sur l'imposture de la posture des identitaires généralement mélanodermes, qui se prétendent victimes de tout et de n'importe quoi.

Ceux-là usent de mots violents qui séparent et piègent les éternels culpabilisés qui usent, quant à eux, de mots prudents ou creux qui ne mènent nulle part.

Convoquant les plus grands esprits de notre culture (Glissant, Garry/Ajar, et bien d'autres), Rachel Khan trouve plus constructif, plus humain, d'user plutôt de mots qui réparent et qui, en définitive, affirment notre humanité commune...

Bravo Madame Khan ! J'ai aimé, comme j'ai apprécié votre "soeur" Madame Mabrouk.

Pat.
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Lire Racée préfacé par Dupond-Moretti a été une expérience étonnante. C'est trouver ma pensée mis sur le banc des accusés. Intersectionnelle de ventre, white plus ou moins gauchiste aussi, sans doute plus en tout cas que droitiste. Bien pensante, je coche aussi. Bref, pas a priori le genre de texte qui va me caresser dans le sens du poil. Juste à la préface déjà Dupond Moretti dans son hommage m'avait bien crispé.
Et pourtant j'ai été touchée par l'écriture, par l'aspect pluriel de l'autrice. Parce qu'elle déborde des cases et qu'en tant que débordant régulièrement des miennes je ne peux que comprendre qu'elle refuse de s'y laisser enfermer.
Je suis homme et princesse (il est mention dans le livre d'une norvégienne qui serait un cheval). J'ai décidé vers la fin de lecture d'être un peu plus blob également. Ces êtres qui sont entre l'animal, le végétal et le champignon qui foutent un joyeux bordel dans les belles petites boites que les scientifiques s'obstinent à construire pour ranger le vivant.
On est ce qu'on se définit être jusqu'à la prochaine mise à jour. Si Rachel Khan est racée, elle est la mieux placée pour pouvoir s'auto définir et je fais rentrer sa définition d'elle même comme je souhaite qu'on fasse entrer la définition de moi même comme tel sans chercher à en enlever, sans chercher à en rajouter, sans chercher à en modifier au plus juste possible.
J'aime bien rencontrer des gens différents de moi ça me force à me repenser. Je reste intersectionelle de ventre mais enchantée d'avoir pu lire une autre singularité dans toutes sa richesse et ses nuances.
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Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Par exemple, " racisé.e " ou " afro-descendant.e " me font froid dans le dos. Il a pourtant fallu que je les avale, ces termes, au point de devenir une " femme de couleuvre " à l'écriture faussement inclusive mais si excluante, mes cher.e.s ami.e.s, qu'elle n'a trouvé comme solution pour asseoir l'égalité entre les hommes et les femmes que le point final, empêchant la discussion. De plus, cette sorte d'écriture ( un cauchemar pour les dyslexiques, noirs ou non) impose paradoxalement une lecture hachée, donc coupée de nos congénères mâles, et qui nous fait passer après " E ", puisque la lettre qui nous caractérise se met toujours à la fin. De la même manière, nous voici, avec de nouveaux mots, soi-disant pertinents pour lutter contre les discriminations, alors qu'ils sont eux-mêmes discriminatoires. Concernant l'égalité raciale, il y a une importation massive de mots tout droit venus des Etats-Unis, à consommer sur place, à avaler et à répéter sans réfléchir, sans regarder ce qu'il y a dedans, par culpabilité ou par faiblesse. Cette dernière étant " une force extraordinaire à laquelle il est très difficile de résister* ".

* Emile Ajar, Gros-Câlin.
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Ô Races, ô des espoirs !
Je suis racée.
Voilà tout.
Non pas, comme le définit " Le Petit Robert ", parce que j'aurais des qualités propres à mon pedigree ou que mon élégance naturelle m'offrirait, de fait, un port de tête altier. Non. Je suis racée parce que je porte en moi plusieurs racines que certains prennent pour des races. Telle un Arlequin coloré ou une barbe à papa sucrée, c'est par un excès de race que je suis racée.
Femme européenne et africaine à la fois, binationale, française et gambienne, juive aux origines chrétiennes et musulmanes, animiste avant l'islamisation de l'Afrique de l'ouest, blanche et noire, je veux aujourd'hui annoncer la couleur : je suis bien dans ma peau. Heureusement d'ailleurs, car si j'étais raciste avec toutes ces "races" à l'intérieur, ce serait inévitablement la haine de soi.
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Qui peut partager l'existence d'un Brassens focalisé pendant six jours sur le pied manquant d'une chanson ? Voilà la vie du créateur, un enfer.
L'échec sourit en coin. Gary se tue pour mettre fin à ses pseudos.
Ironie du sort, ces artistes nous réparent chaque jour. Je veux croire que c'est dans nos yeux contemplant leurs chefs-d'œuvre que se trouve la clef nécessaire à la réparation. C'est la vie de l'œuvre, condition essentielle à celle de l'artiste, qui y participe. Seule une création partagée permet de recoudre.
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Liberté, liberté chérie où le droit de ne pas être d'accord est banni, le dialogue impossible, au risque d'être considéré comme un harceleur, un réac, une Négresse de maison ou, mieux, un Bounty, noir dehors, blanc dedans.
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(p.66)
Martin Luther King, qui a joué un rôle majeur pour l'égalité aux États-Unis, se voit régulièrement, même après son assassinat, accusé d'avoir fragilisé la cause. Parce qu'il est non-violent, il est assimilationniste. Parce qu'il a changé de nom, il est pour le déracinement, contrairement à Malcom X, dont la lettre do patronyme dénonce la déportation. Parce que son père est un pasteur bourgeois, son statut social rend son engagement suspicieux. Parce qu'il sort avec des Blanches, il est certain que ses désirs ne vont pas dans le sens de la cause. Enfin, parce qu'il préfère dire "américain" plutôt "qu'afro-américain", et parce qu'aujourd'hui une journée nationale lui est consacrée aux États-Unis, il y a anguille sous roche d'une collaboration avec l’establishment blanc. Bref, parce qu'il prône la tolérance, le dialogue, la paix et l'amour, c'est un suppôt des dominants.
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