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EAN : 9782081270664
126 pages
Flammarion (09/10/2013)
4.02/5   42 notes
Résumé :
Cet essai est né d'une rencontre avec des chefs indiens d'Amazonie. Que pensons-nous qu'ils ne pensent pas ? Que savent-ils que nous ignorons ? La science nous sauvera-t-elle, et son progrès n'est-il qu'heureux ? Ou bien est-elle devenue la cause de toutes sortes de méfaits ? Ces questions suscitent des débats d'autant plus vifs que les « accidents » se multiplient (nucléaire, dérèglement climatique, vache folle?). Pour Étienne Klein, c'est la question même du proje... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Après avoir croisé la route d'une petite délégation d'Indiens d'Amazonie venus chez les occidentaux défendre leur mode de vie et la préservation de leur territoire, Étienne Klein réalise qu'il existe des manières différentes d'appréhender notre monde et notre environnement, celle des Kayapo, privilégiant d'avantage l‘équilibre et l'harmonie entre l'Homme et la nature, mettant en avant une sorte de perception écologique et mystique de l'univers. La science occidentale, se dit alors Étienne Klein, soustrait l'homme de son milieu naturel, dont il n'est plus que l'observateur extérieur, tenant la nature à distance afin de pouvoir rester objectif dans la recherche de la vérité, mais aussi dans le but de pouvoir l'asservir. Et ce mode de fonctionnement, avance-t-il, nous le devons à Galilée.
Galilée a compris le premier que la nature obéissait à des lois qui existent en dehors de nous-mêmes, et que ces lois étaient de nature mathématique. Évidemment, une telle prise de position n'a pas eu l'heur de plaire au pouvoir religieux de l'époque, et Galilée a dû se désavouer et renoncer à quelques idées trop modernes et en avance sur son temps.
La démarche scientifique moderne initialisée par Galilée a permis le développement de la technologie, puis de la logique industrielle aboutissant à une mise en coupe réglée de la nature, n'obéissant plus qu'à des intérêts économiques, politiques ou militaires, à des exigences de profit immédiat, loin de la candeur initiale d'une science ne visant que la connaissance pour la connaissance.
Bien conscients des catastrophes annoncées (ou déjà produites) dues à la course au « progrès » (la catastrophe de Fukushima, les OGM, la pollution, le dérèglement climatique…), nous ne portons plus le même regard sur la science, considérée, à tort ou à raison, comme responsable, et le désamour de nos contemporains pour la science, nous dit Etienne Klein, est bien réel. La science par ailleurs sait se faire discrète derrière les innovations technologiques actuelles (le Smartphone, le Blue ray, le GPS…) et ses détracteurs, souvent friands de nouveautés high-tech, campent sur leur position consumériste et veulent rester des consommateurs et surtout ne pas comprendre au nom de quelle formule magique tout cela fonctionne.
Étienne Klein dénonce la course à la rentabilité immédiate, la priorité donnée au court terme, confisquant de facto la possibilité d'une réflexion dans la durée, de tâtonnements et d'explorations hasardeuses nécessaires à la recherche fondamentale. Il constate le changement de fond néfaste qui s'opère lorsque la question « Est-ce vrai ? » est progressivement remplacée par la question « A quoi cela va-t-il servir ? ». En science fondamentale, les grandes avancées du siècle passé permettant de mieux décrire notre monde (on peut citer, comme toujours, la physique quantique et la relativité) à aucun moment ne pouvaient déclencher chez leurs concepteurs l'intuition d'une retombée technologique quelconque telle que le laser, l'IRM ou le GPS, et les physiciens de l'époque, d'ailleurs, se gardaient bien de faire des pronostics en la matière.
L'auteur s'insurge avec raison contre la désaffection par les étudiants de filières scientifiques, dont les pouvoirs politiques n'ont sans doute pas encore mesuré toutes les conséquences sur notre avenir. Il déplore la perte de notoriété du « scientifique », qui cède aujourd'hui sa place au footballeur ou à l'artiste de variété.
Étienne Klein reste pantois devant l'un de ses étudiants qui « ne sent pas » les théories d'Einstein, pourtant vieilles d'un siècle et immanquablement en accord avec les preuves expérimentales qui se sont accumulées depuis, et constate avec stupéfaction que pour cet étudiant, le ressenti personnel se situe au même niveau de crédibilité que la théorie de la relativité ! On peut donc ne plus croire aux messages de la science, qui est aujourd'hui concurrencée par les thèses « relativistes » (rien à voir avec la relativité, il s'agit ici de promouvoir d'autres approches et de les hisser au niveau de la science : le vaudou, l'astrologie, la numérologie, l'intuition… la science n'étant qu'un point de vue parmi d'autres, ni plus louable, ni plus proche de la vérité que les autres).
Mais Étienne Klein fustige également le « scientisme », qui incite à croire béatement que la science permettra de résoudre tous les maux de notre époque (y compris apporter des réponses aux catastrophes provoquées par les technologies qu'elle a contribué à créer).
Enfin, l'auteur rappelle ce qui n'est pour moi qu'une évidence : la science ne peut être tenue pour responsable des aspects moraux de l'utilisation qui est faite de ses retombées technologiques. La science n'est pas plus responsable du drame de Fukushima que de la décision de larguer une bombe sur Hiroshima ou Nagasaki.
Dans ce petit ouvrage réactualisé par une préface inédite (et sans doute enrichi de quelques paragraphes ajoutés suite à la découverte récente du boson de Higgs…) le scientifique Étienne Klein pousse de nombreux cris d'alarme : c'est le blues de l'homme en blouse.
Tous les débats qu'il suscite dans cet essai sont intéressants et pertinents, et il les expose avec sa clarté et sa lucidité habituelle.
La science est-elle réellement en danger et allons-nous bientôt la « liquider » ?
On peut à mon avis nuancer ce pessimisme. En lisant cet essai, j'ai eu l'impression que l'auteur faisait l'amalgame entre « science » et « course à l'innovation technologique », et, pire encore, entre « profit » et « connaissance ». Pour moi, les dérapages du monde moderne (les catastrophes écologiques, la pollution…) proviennent surtout du culte de l'argent et du business, et non de la science. La science ne s'occupe en principe que d'enrichir nos connaissances, alors que c'est surtout l'innovation technologique et la production industrielle qui enrichissent le portefeuille des actionnaires, donc des décideurs, pas toujours éclairés, donnant lieu par là même aux excès et aux effets pervers cités plus haut. La science peut donc à mon avis rester pure et belle, et même porter des valeurs positives telles que la curiosité, le désintéressement, la rigueur et l'élégance (des démonstrations, des modèles…).
Mais en disant cela, je ne fais peut-être que déplacer le problème. Merci en tout cas à Étienne Klein pour ce bouillonnement d'idées, propice aux réflexions personnelles, qu'il parvient à faire tenir dans ce très court essai facilement lisible par tous.
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Étienne Klein tente dans cet essai de dédiaboliser la science, trop souvent associée à la technologie, dont le capitalisme est friand. Il tente par un plaidoyer convaincant de replacer la science sur son piédestal et de la relier à ses vraies valeurs qui renvoient à une quête de la vérité, rompant avec l'image actuelle de la science, créatrice des armes des méchants de ce monde, toujours au service des magnats des hautes technologies qui se livrent un combat sans merci pour mieux duper le reste de la planète sans se soucier le moins du monde de la durabilité de cette dernière.

Avec un vocabulaire clair et précis, Étienne Klein entreprend de convaincre son lecteur par des remarques pertinentes et touchantes, on en viendrait presque à embrasser la science qui, il le rappelle pourtant avec clairvoyance, ne sera pas la solution à tous nos problèmes.

Réconcilier la science et l'humanisme ? Allons-nous liquider la science a le mérite de dresser le portrait d'un scientifique conscient des questions de notre société qui s'attire sans peine la sympathie de son lecteur.
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Très bon vulgarisateur et un discours très bien structuré. J'ai adoré l'idée de la science défendue dans ce petit livre. Etienne Klein nous débarasse de plusieurs préjugés tenaces ainsi que de quelques contradictions qui s'opposent injustement à la science. Une lecture qui fait plaisir et un bonhomme fort sympathique !
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En 2008, Étienne Klein prit la plume pour écrire ce court essai afin de défendre ce qu'il appelle l'esprit de la science, qu'on se gardera de confondre avec un "scientisme" béat ou une confiance aveugle dans la technologie. Presque quinze ans plus tard, force est de constater que ce texte est plus que jamais d'actualité, tant le besoin de nuance est important sur cette question comme sur beaucoup d'autres. Un petit livre qu'on peut relire sans hésiter et qui sera une bonne base de discussion constructive.
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Un livre bien écris. Les idées d'Etienne Klein dans ce livre sont claires, sublimes, tantôt illustrées par des anecdotes indiennes tantôt par les histoires de peuple des îles ce qui reflète l'idée que M. Klein est non seulement un grand intelectuel de science mais aussi un giantesque globe-trotter.
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Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
Un jour, au terme d'un cours donné devant deux cents étudiants, alors que je venais de terminer au tableau un calcul de relativité restreinte montrant que la durée d'un phénomène n'est pas la même pour tous les observateurs (ce qu'on appelle la « dilatation des durées »), un jeune homme demanda la parole : « Monsieur, personnellement, je ne suis pas d'accord avec Einstein ! » J'imaginai qu'il allait défendre une théorie alternative, donner des éléments pour remettre en selle l'idée d'un éther luminifère qu'Einstein avait mise à mort, bref qu'il allait argumenter. Je l'invitai donc à s'expliquer : « Je ne crois pas à cette dilatation des durées que vous venez de calculer, se contenta-t-il de répondre, parce que je ne la... sens pas ! » Là, j'avoue, j'ai dû encaisser le choc : ce jeune homme avait suffisamment confiance dans ses intuitions et sa subjectivité pour penser qu'elles lui permettaient de contester un résultat que près d'un siècle d'expérimentation et d'objectivation avait permis de valider. Du haut de ses vingt ans, il pensait mieux savoir ce qu'il faut penser du temps qu'Einstein lui-même, qu'il n'avait sans doute jamais lu. En somme, à ses yeux, les énoncés de la science ne devaient être que des récits comme les autres, en grande partie arbitraires, qu'on peut donc contester en n'invoquant que son seul « ressenti » épidermique, sans autre forme de procès. J'ignorais que la subjectivité triomphante pouvant tant peiner à s'incliner devant ce qu'il faut appeler « l'objectivité scientifique ».
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Ce n'est que dans la seconde moitié du XXe siècle qu'on a vraiment pris conscience qu'il existe une ligne de partage entre science et valeur, et ce constat a sournoisement modifié notre rapport à la science. Chez ceux qui l'apprécient pour ce qu'elle est, il a engendré une sorte de dégrisement salutaire, libérateur même. Mais chez les autres, ce dégrisement a pris la forme d'un sentiment de déception, dû à un malentendu : on avait chargé la science de tâches morales ou politiques qu'elle est impuissante à remplir. Les questions relatives à nos valeurs, m'a-t-on souvent expliqué à la fin de mes conférences, sont celles qui nous importent le plus, car c'est autour d'elles que nous déterminons nos actes, construisons nos aspirations, nos projets. Dès lors, si la science se montre incapable de nous fournir les références dont nous avons besoin, si elle éclaire le vrai mais sans pouvoir lui conférer un sens, il n'y a rien d'étonnant à ce que nous relativisions ses conquêtes, où n'y prêtions que peu d'attention.
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En un demi-siècle à peine, nous sommes passés d'un régime où science et technique étaient liées, mais demeuraient distinctes l'une de l'autre, à l'empire d'une vaste technoscience, c'est-à-dire à un régime où les deux perdent leur autonomie. Cette technoscience est d'une efficacité incontestable. Elle est même devenue le moteur principal de la puissance, de toutes les formes de puissance : économique, politique, militaire. Mais voit-on que ce mouvement de fond modifie en profondeur l'exercice et les finalités de l'activité scientifique ? Désormais, il s'agit soit de montrer que les recherches menées conduiront à des résultats utiles, soit de promettre que ceux-ci pourront l'être un jour. La question centrale n'est plus : « Est-ce vrai ? », mais « A quoi cela sert-il ? ». Ainsi, s'installe l'idée que la valeur d'une connaissance nouvellement acquise ne se mesure qu'à l'aune de ses éventuelles retombées concrètes. Lorsque j'écoute certains argumentaires, j'en arrive même à me demander si l'activité scientifique a encore pour but principal de nous rendre le monde intelligible, de créer des concepts, d'en tester la pertinence : on encourage surtout les chercheurs à faire breveter leurs découvertes, à établir des passerelles avec l'industrie, et on finance les équipes sur projets, tout cela dans l'espoir de mieux répondre aux exigences de la compétition internationale.
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Cet activisme fébrile qui rythme la technoscience donne l'impression qu'elle ne vise plus que l'innovation pour l'innovation, et ne la fait plus apparaître que comme une sorte d'agitation autoentretenue dont la seule finalité serait sa propre intensification. L’État, qui pilote pour une grande part cette réorientation de la recherche, rêve-t-il encore d'autre chose que de brevets et de percées technologiques ? Il s'agit d'abord de servir l'économie, surtout dans un contexte de tensions budgétaires.
La recherche a certes besoin d'une politique, mais elle ne se pilote pas comme une automobile, encore moins comme un train. Si on veut qu'elle soit féconde, il faut surtout lui accorder de la liberté : ce n'est pas en perfectionnant les bougies qu'on a inventé l'électricité. Les grandes ruptures, difficilement programmables, viennent rarement d'une démarche d'amélioration. En règle générale, l'esprit scientifique ne peut exister que s'il suscite des spéculations désintéressées, n'ayant d'autre objet que la connaissance pour elle-même. En outre, si cette ferveur spéculative venait à s'émousser, les hautes technologies aujourd'hui si prisées ne survivraient que le temps que durera la force d'inertie de l'impulsion culturelle qui les a créées, tel un personnage de Tex Avery filant en ligne droite au-dessus du vide, jusqu'à ce que la force de pesanteur, reprenant ses droits, précipite sa chute.
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D'autant plus que le temps indispensable à l'analyse réclame désormais une forme d'ascétisme. Car à toute heure du jour et de la nuit, la distraction est là, à portée de bouton, de clavier ou de télécommande, qui vient faire écran (c'est le mot) à la réflexion.
Il s'agit d'une affaire de prolifération, mais non nucléaire : à force de singer, de s'autocélébrer, à force de promouvoir la vétille comme épopée du genre humain, les formes modernes de la communication se transforment en une vaste "polyphonie de l'insignifiance". Elles produisent une sorte de magma informel que nul message élaboré, construit, raffiné, ne parvient plus à transpercer.
Je ne peux m'empêcher d'établir un lien entre ce panorama et un fait évoqué dès les premières pages de ce livre : les étudiants, dans presque tous les pays occidentaux, rechignent de plus en plus à s'engager dans des carrières scientifiques. Ce phénomène commence à inquiéter les autorités, car s'il avait vocation à durer, il pourrait mettre en péril le rayonnement et la crédibilité des laboratoires de recherche, ainsi que la compétitivité des entreprises (sans parler d'une éventuelle pénurie d'enseignants qualifiés). Les commentateurs qui tentent de l'expliquer parlent d'une "désaffection" à l'égard de la science.
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Vidéo de Étienne Klein
Où en est-on de l'exploration de la planète rouge ? Y enverra-t-on bientôt des hommes ? Comme l'a écrit notre invité Francis Rocard : "Certains pensent que l'entreprise est impossible. Pourtant, l'impossible est aujourd'hui en préparation."
Pour aborder toutes ces questions passionnantes, Etienne Klein reçoit : Francis Rocard, astrophysicien et responsable du programme d'exploration du système solaire au CNES. Virgile Malarewicz, jeune docteur en planétologie martienne, dont le travail de thèse a porté sur la formation et l'évolution de la croûte primitive martienne.
Visuel de la vignette : le film "Seul sur Mars" ("The Martian"), sorti en 2015. L'acteur américain Matt Damon incarne l'astronaute Mark Watney resté seul sur la planète rouge dans un campement. (TWENTIETH CENTURY FOX) / AFP
#mars #astronomie #espace __________ Retrouvez d'autres grands entretiens scientifiques par ici https://www.youtube.com/playlist?list=PLKpTasoeXDrr_Kd-8Hzj20Jo6qwhHOKI7
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