Café-crime /
Jacques Lanzmann
Samuel Samuelson, cinquante-cinq ans, est le « nègre » du grand écrivain Jean-Marc Phillips depuis trente ans et un jour lui vient l'idée d'écrire pour lui sous son propre nom. C'est aussitôt la gloire avec son roman Négro-spirituel, et le passage sur toutes les antennes radio et télé. Quelle rage de vivre, quelle revanche sur l'obscur !
Jusque-là mari fidèle durant quinze ans, amoureux de sa femme et attentionné pour son couple de chats siamois, il ne résiste pas soudain à l'envie de rencontrer les lectrices qui lui envoient des courriers, et même de les séduire. Commence alors une vie de tourbillon, de rencontres clandestines avec de gourmandes lectrices enivrées de fantasmes et la remise en cause de sa complicité de plusieurs décennies avec son épouse Guyane pour satisfaire les exigences littéraires de Phillips.
La première lectrice visitée sera Karine, jeune danseuse malade ; une grande première, sorte de passeport pour l'aventure en quelque sorte. Et puis il y aura Mimi, dix-sept ans, le petite maraîchère avide d'acquérir une vraie expérience sexuelle, Kaki la clodocongolaise à la taille mannequin et au verbe surréaliste délirant et parfaitement maîtrisé, Viviane la concierge et son mainate, Géraldine et son bébé…
Mais quand l'affaire dérape et que l'épouse suspecte quelque dérive, arrive un moment où il faut la respecter, la sauver, retourner à la haute fidélité, « cette symphonie où graves et aigus, harmonieusement balancés, s'écoutent des deux oreilles dans l'auditorium conjugal. » Quand sonne l'heure de la révolte de l'épouse, notre auteur peut se demander à quelle sauce il va être dévoré et quel supplice Guyane va lui faire subir.
Un bon roman sous forme de confession impudique et drôle, plein d'amour et d'humour, de tendresse et de sensualité, illuminé par d'inoubliables portraits de femmes et un style talentueux. Un bon moment de lecture avec un épilogue bien surprenant.