AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782072939426
112 pages
Gallimard (15/04/2021)
3.61/5   9 notes
Résumé :
La mort n’a jamais tenu une grande place dans ma vie consciente. Je n’y pense guère et m’en préoccupe encore moins. Mourir au dernier moment, comme disait Céline, avec le courage et la dignité que j’ai vus aux bêtes, avec leur simplicité, voilà ce que je souhaite.
À l’adolescence, alors que je ne m’en souciais pas davantage, il m’arrivait toutefois de me réveiller en sursaut la nuit avec la pensée qu’il allait falloir mourir un jour. Puis ces réveils disparur... >Voir plus
Que lire après Un peu profond ruisseau…Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Il s'agit pour moi d'une lecture improbable, car je n'avais jamais entendu parler de l'auteure auparavant, encore moins de l'ouvrage. Mais ma grande soeur, psychanalyste, m'a chaudement recommandé cet ouvrage, en m'expliquant que l'intérêt n'était pas de tout comprendre mais d'en piocher des points qui résonnent… J'ai laissé traîner un temps, chargée d'une pile à lire sans cesse renouvelée. Puis, durant les vacances, je me suis laissé entraîner dans cette lecture atypique.

Alors qui est Catherine Millot, indépendamment du fait qu'elle a été la dernière compagne de Lacan, ainsi que l'une de ses disciples ? C'est une psychanalyste française, assez réputée, ayant écrit beaucoup d'essais, reconnue pour la fluidité de ses propos et sa capacité à écrire en « association libre », comme le veut le travail thérapeutique. Fondamentalement, je n'en sais pas davantage, n'ayant jamais rien lu de sa main et étant inculte en termes d'écrits psychanalytiques.

Un peu profond ruisseau fait écho à un vers de Mallarmé « Un peu profond ruisseau calomnié la mort ». En effet, Catherine Millot fait partie des malades du coronavirus du tout début de l'épidémie, soit au début du mois de mars 2020, avant même que le premier confinement ne soit prononcé. Hospitalisée, sous oxygène, elle vit une expérience unique dans un monde totalement étranger et apeuré face à ce virus inconnu. Ce monde complètement flippé dans lequel nous avons baigné où les malades étaient visités par les médecins en tenue de cosmonautes… À l'époque, Catherine Millot pense qu'elle va y passer, que la mort arrive. Étrangement, alors que la nouvelle n'est pas des plus réjouissantes, l'auteure se sent apaisée, proche de l'extase dans cette chute sans retour. Cet abandon la questionne : pourquoi tant de sérénité ? Certes, d'autres ont écrit sur le sujet, mais elle se sent interpellée.

En véritable psychanalyste, l'écrivaine revient sur son parcours. Dès sa naissance, elle pense avoir été victime d'une envie de mort de la part de ses parents. Puis, très rapidement, le médecin de famille l'a déclarée comme condamnée. Qui plus est, sa mère, adulte, n'a pas marqué d'attachement particulier à sa fille, au point de l'avoir laissée plus ou moins sciemment contracter la tuberculose (et donc y passer !). Vous l'aurez compris, l'auteure interroge son rapport à la mort, mais aussi également son rapport à sa mère, centenaire, toujours en vie, déclarée sur le chemin de la mort à plusieurs reprises mais toujours en vie cependant !

Il n'y a pas grand-chose à tirer de cet ouvrage, dans le sens où il ne répond pas à une interrogation générale. On suit ici le chemin de « travail » d'une femme sur son propre rapport à la vie, à la mort, à l'abandon et à la joie que l'on peut en tirer. Certains passages ont résonné chez moi en vertu de ma propre histoire, comme d'autres résonneront chez vous en fonction de la vôtre. Il reste toujours néanmoins une chose particulièrement intéressante : interroger son propre rapport à la grande faucheuse, de notre premier cri de nourrisson à aujourd'hui.


Jo la Frite

Lien : http://coincescheznous.unblo..
Commenter  J’apprécie          30
Voyage sur les rivages de la mort et du néant, "un peu profond ruisseau ..." d'après Mallarmé.
Catherine Millot, psychanalyste, expose dans ce court texte les réflexions que lui a inspiré le fait d'avoir frôlé la mort au début de l'épidémie de Covid.
Je ne donne pas ici la principale raison qui a fait que Catherine Millot s'est sentie apaisée alors qu'elle pensait sa mort très proche ; je l'expliquerais mal et préfère vous laisser le découvrir.
Je retiens pêle-mêle son attirance pour Samuel Beckett écrivain du Néant, sa surprise sans reproche sur les réactions de certains médecins débordés et désemparés en début d'épidémie, sa gratitude envers certaines infirmières et infirmiers, sa description de la grande vieillesse de sa mère tenue par une puissante pulsion de vie .....
Texte un peu surprenant, qui m'a laissé interrogateur dans un premier temps, qui peut faire effet après infusion.
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
« La mort n’a jamais tenu une grande place dans ma vie consciente. Je n’y pense guère et m’en préoccupe encore moins. Mourir au dernier moment, comme disait Céline, avec le courage et la dignité que j’ai vus aux bêtes, avec leur simplicité, voilà ce que je souhaite. »

On peut mourir chez soi, dans son jardin, un matin d’été en mangeant un croissant après avoir cueilli une framboise, c’est parfait, ou à l’hôpital, c’est plus fréquent, mais au fond peu importe, puisque le Christ prend toujours le visage du dernier venu, qu’il s’agisse d’un ou d’une aimé(e), d’un voisin de chambre, d’un infirmier, d’une interne, d’un agent de salle, d’un pompier, d’un urgentiste.

L’écrivain et psychanalyste Catherine Millot a failli mourir du Coronavirus, je ne le savais pas, et, même si nous ne nous sommes vus que quelquefois, j’aurais éprouvé à sa brusque disparition beaucoup de peine.

Je l’ai donc remerciée d’être en vie, et d’avoir écrit le si beau récit de sa confrontation avec la mort, c’est-à-dire aussi avec le désir de vie au plus intime de soi, Un peu profond ruisseau…

Ce titre mallarméen – « Un peu profond ruisseau calomnié par la mort. » – donne au petit ruisseau qu’est la vie la valeur d’un absolu.

Soudain, le confort se brise, il faut appeler SOS Médecin, il n’y a que le temps de jeter quelques livres dans son sac (des Dostoïevski traduits par André Markowicz), le réel frappe toujours à la porte d’une façon impérieuse.

Il faut partir,, à l’hôpital Cochin par exemple, qui, en ces débuts de pandémie en France, n’est pas encore saturé.

« La décision fut prise de m’admettre dans un service de réanimation afin d’être proche d’un respirateur en cas d’aggravation. »

Il faut alors penser concrètement à la mort, aux directives anticipées, à tout ce bazar assommant des fins de vie.

« Je me retrouvai seule, confie Catherine Millot, avec l’idée que j’allais peut-être mourir, qui me laissait étrangement sereine. Il était deux heures du matin. Je regardais le local exigu dans lequel je me trouvais et me disais qu’il y avait, certes, des lieux plus « sexy » pour mourir. »

Oui, ce n’est pas faux, mais qui a fréquenté lors d’assez longs moments les hôpitaux leur trouve un air aussi désespérant qu’étrangement vrai dans leur banalité aseptisée.

Voilà la loi, et seule compte désormais la force spirituelle qu’il nous reste.

Mourir est peut-être plus facile lorsqu’on a lu comme l’auteure les stoïciens, et médité intensément les mystiques (Madame Guyon, Etty Hillesum…) mais chaque chose en son temps, et trop se précipiter manquerait d’élégance.

« Portée par la grande égalité de tous devant la mort, je vivais en paix, au cœur de cette nuit, dans le vide qui s’ouvre devant soi quand on n’a plus d’avenir. »

Une pandémie virale ravage la planète, on ne meurt pas tout à fait seul, l’un est l’autre dans la vie nue du vaisseau fantôme qu’est l’hôpital aux heures les plus angoissantes de la nuit.

Les médecins ne sont pas toujours délicats, qui sont devenus des techniciens, mais il y a des exceptions, des douceurs incroyables, des regards, des gestes, des paroles, qui sauvent tout, et font ressentir une immense gratitude envers le personnel soignant.

Pour Catherine Millot, la tâche de vivre devient épuisante, chaque acte demandant des efforts démesurés, fors la lecture et l’envoi de textos aux proches, à l’aimée.

Peu à peu, la force de vie grandit de nouveau, tapie au fond du gouffre comme une barque de secours.

Le corps possède des ressources que nous expérimentons peu, préférant quelquefois, souvent, déléguer notre capacité d’auto-guérison à des puissances extérieures.
Commenter  J’apprécie          20
Kant et avant lui Burke ont développé, avec la notion de sublime, ce paradoxe du plaisir que nous prenons à la contemplation de ce qui peut nous détruire. Kant parle, à ce propos, de "plaisir négatif" et Burke propose le terme "delight". Tous deux notent que plus le spectacle est effrayant, plus le plaisir est grand, mais à condition d'être à l'abri, comme le disait déjà Lucrèce.
Sublime est, ainsi, le spectacle des éléments déchaînés. (...)
Plus encore que Kant, Burke est sensible au malin plaisir que recèle le sublime. Selon lui, "il n'est guère de spectacle que nous recherchions avec plus d'avidité qu'une calamité extraordinaire et rigoureuse." Il se dit même "convaincu que les malheurs et les douleurs d'autrui nous procurent du délice (delight) et qu'il n'est pas de faible intensité. (...)
Une "horreur délicieuse", telle est la meilleure définition du sublime.
Commenter  J’apprécie          100
(A propos de sa mère très âgée)

Je ne cesse de me demander quelle est cette étrange pulsion de vie qui la tient, dans la diminution de toutes ses capacités, la réduction à presque rien de sa vie. Cet amenuisement, me dis-je, est peut-être une concentration. L'entièreté de sa vie resserrée, ramassée en un point, sur l'ici et maintenant, sur l'instant présent, est une forme de plénitude. La réduction à l'élémentaire dégage la pure essence, l'irréductible du désir de vivre. Être vivant est un absolu qui ne requiert ni comment ni pourquoi. J'en viens à me dire que la grande vieillesse, la sénilité même, est une sorte d'ascèse, non éloignée de ce qui m'a captivée chez les mystique.
Commenter  J’apprécie          133
Pendant les longs mois où j'étais occupée par ma mère, je lisais "La cérémonie des adieux" de Simone de Beauvoir, et relisais "Les derniers jours d'Emmanuel Kant" de Thomas De Quincey, qui est le grand chef-d’œuvre du déclin, où l'humour et le tragique se côtoient. Mais c'est surtout Beckett qui m'a retenue, en particulier sa correspondance, dont j'ai passé des mois à lire et relire les quatre volumes, ainsi que sa biographie par James Knowlson. Une vie exemplaire sur la voie de la simplification à laquelle toute vie devrait tendre, me disais-je.
Commenter  J’apprécie          130
Le fait d'être nue sous le regard de deux hommes en avait perdu toute signification érotique et leurs gestes prenaient pour moi le sens d'un acte d'humanité envers le prochain démuni que j'étais devenue : une œuvre de miséricorde, qui me rappelait le tableau de Caravage, au Pio Monte de Naples, que j'avais longuement contemplé autrefois avec Paola. C'était réconfortant et doux, et me donnait un sentiment de gratitude. Ce sentiment, d'ailleurs, je devais l'éprouver durant toute mon hospitalisation.
Commenter  J’apprécie          131

Videos de Catherine Millot (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Catherine Millot
Catherine Millot vous présente son ouvrage "Un peu profond ruisseau..." aux éditions Gallimard.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2526219/catherine-millot-un-peu-profond-ruisseau
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
Visitez le site : http://www.mollat.com/ Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux : Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/ Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat Linkedin : https://www.linkedin.com/in/votre-libraire-mollat/ Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/ Vimeo : https://vimeo.com/mollat
+ Lire la suite
autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (23) Voir plus



Quiz Voir plus

Oh, Antigone !

Comment se prénomme la sœur d'Antigone ?

Sophie
Hermine
Ismène

10 questions
3099 lecteurs ont répondu
Thème : Antigone de Jean AnouilhCréer un quiz sur ce livre

{* *}