Riquet À La Houppe n'est pas, et loin s'en faut, le conte le plus connu de son fameux auteur
Charles Perrault. J'aimerais pourtant attirer votre attention sur ce conte que je trouve assez injustement négligé, notamment par rapport à ses petits frères du recueil :
Contes de Ma Mère L'Oye.
C'est en effet un bien joli conte, féerique et philosophique comme je les aime, et qui, pour ne rien gâter et puisque ce n'est pas toujours l'habitude de la maison, se termine assez bien.
(Je me permets, bien que c'en soit presque indécent, pour les deux ou trois dont je faisais partie il n'y a pas si longtemps encore et qui ne connaissent pas ce conte, d'en rappeler succinctement le synopsis.)
Riquet est le fils d'une reine. Il est malin comme tout, plein d'esprit, mais il a le malheur de naître laid comme un pou et affublé d'une mèche de cheveux quelque peu disgracieuse, d'où son surnom de
Riquet à la houppe.
Une fée a néanmoins pris le temps de se pencher sur son berceau et rassure l'infortunée génitrice d'un tel paquet mal ficelé en lui assurant qu'en grandissant, il aurait le pouvoir de donner de l'esprit, autant que lui en possède à la personne qu'il aimera.
Dans le même temps et non loin de là, une autre reine donne successivement naissance à deux filles. L'aînée, belle comme un coeur et bête à manger du foin ; la cadette, laide à faire peur mais spirituelle comme pas deux.
En grandissant, tant leurs qualités que leurs défauts s'accroissent à telle enseigne que tout le monde s'émerveille de la beauté de l'aînée tout en reconnaissant l'étendue sans fond de sa bêtise, tandis que la triste figure de la cadette n'a d'égal que la subtilité de son propos.
Ce faisant, en société, après quelques minutes, les convives ont tôt fait de se tourner vers la cadette dont on peut presque oublier les traits lorsque viennent les paroles, tandis que l'aînée se trouve vite délaissée lorsqu'elle ouvre la bouche.
La mère se lamente de cet état de fait et, comme elle aussi reçoit la visite de la fée qui distribue les qualités, demande s'il n'y aurait pas moyen de transvaser un peu de l'esprit de la seconde en la première et réciproquement pour la beauté des traits.
Mais non, il n'y a pas moyen. Nonobstant, une fée usurperait sa réputation si elle n'était capable de quelque magie bienveillante ou sortilège avantageux. Aussi, rassure-t-elle la reine en lui confessant que sa fille aînée aurait le pouvoir de rendre belle la personne qui lui confiera son amour.
Je vous laisse deviner ce qui pourrait bien advenir et loue encore une fois la finesse du propos de Perrault qui met le doigt sur le processus d'aveuglement que génère l'édification d'un sentiment amoureux.
Une belle morale à méditer, mais ce n'est là que mon avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.