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EAN : 9782073028655
48 pages
Gallimard (23/03/2023)
4.08/5   6 notes
Résumé :
"Pas de shabbat, pas de dimanche pour les machines. Et les hommes suivent au rythme infernal du cirque consumériste. Et ça se dit libre."Jean RouaudAlors que le débat sur la place du travail dans nos vies anime à nouveau la société française, il est utile de nous remémorer le jour de paresse que, selon les Écritures, s'octroya le Créateur au septième jour de la Genèse. Cette sagesse n'est certes pas celle des hommes, occupés depuis le Néolithique, et l'invention gén... >Voir plus
Que lire après Shabbat, ma terre : Trois propositions pour repousser le jour du désastreVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
L'auteur fait trois propositions sur le ton du pamphlet : la première se rapporte à la nécessité du repos prônée par la Bible, où Dieu se reposa après la Création. C'est le néolithique qui, empiriquement, après avoir éprouvé qu'une terre qui a donné une fois avec abondance s'épuise peu à peu, comprit l'intérêt de la jachère, jusqu'à ce que notre XXème siècle découvre qu'en l'empoisonnant, on peut la stimuler.

Jusque-là, j'ai imaginé avec enthousiasme pouvoir donner à lire cette oeuvre aux élèves de Seconde qui doivent étudier les discours et la littérature d'idées.

Cependant la deuxième proposition est le véganisme ou du moins le végétalisme. Impeccable argumentation et qui ne me fait pas cadeau des petites lâchetés comme trouver très bien ses idées et ne pas les appliquer. Or dans une région où les aficionados sont surreprésentés, où les domaines de chasse sont nombreux et les "omnivores" font 98,4% de l'effectif, je n'ai pas vraiment envie de me battre avec des parents d'élèves qui m'accuseront de faire "du prosélytisme" auprès de leurs enfants, ou avec les 0,6% de parents végans qui me reprocheraient d'avoir ôté du corpus ce si salubre chapitre 2 intitulé "Bien-être animal, bien-être des consciences" (j'y ai songé). Rouaud y fustige l'hypocrisie de ceux qui voudraient apporter des aménagements à cette pratique (l'équivalent du film bucolique aux sacrifiés de Soleil Vert) au lieu de l'interdire directement.

La troisième proposition, qui renoue avec la première, mais dans le domaine des retraites, est encore trop chaude d'actualité politique pour que je ne la tente dans ma profession. Elle s'appuie en tout cas à nouveau sur la Bible pour rappeler que ce sabbat est un jour où l'Humain n'est pas censé arriver complètement à bout : il doit pouvoir physiquement et mentalement, spirituellement, jouir de son repos ; elle plaide pour une refonte de la retraite, qui rappelle l'approche de Friot, vue rapidement.

J'avais quelques préjugés sur Jean Rouaud, sans l'avoir jamais lu, et le trouver en apôtre de la décroissance, voire du véganisme m'a stupéfiée. Mais les chiffres et les proportions cités sont impitoyables et si le jour du désastre est plus proche d'année en année, je pense qu'effectivement, suivre ces trois préconisations pourrait freiner les choses. Depuis Rousseau jusqu'à Rouaud, le nombre d'intellectuels qui ont fait dater du néolithique le début de la fin (dans des domaines très variés) est impressionnant. J'aimerais citer le tiers du livre, ce qui ne serait pas juste pour un opuscule de 42 pages, et illégal. Il me reste à conseiller de le lire à ceux qui s'intéressent aux thèmes évoqués ci-dessus, et aux autres éventuellement.
Lien : http://aufildesimages.canalb..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Carpe diem. C'est tout ? Juste profiter du jour qui passe ? Mais ça, cette injonction, ne pas se soucier du lendemain quand aujourd'hui est déjà un problème, hormis pour les oiseaux du ciel et les nantis, c'est précisément ce qui constitue la pierre d'inquiétude de la majeure partie de l'humanité. (...) On peut fixer une date de départ en retraite, mais sa date de fin relève de la loterie de la vie. Problème, cette roue de la loterie est truquée. Lors d'un retour au pays natal, j'ai vu mourir Abilio et Bébert qui venaient tous deux de passer la cinquantaine, d'avoir inhalé pendant des années, l'un les vapeurs toxiques de cales de bateaux et l'autre les vernis d'un atelier de menuiserie. Tous deux, poumons dévastés. Ce qui revient à dire que deux moribonds ont cotisé pour les gens en bonne santé. On n'appelle pas ça la justice.
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L'exploitation des hommes, des animaux, du sol, des forêts, c'est la grande innovation dont se flatte le néolithique. Exploiter jusqu'à ce qu'il n'ait plus rien à tirer, des hommes, des animaux, du sol et des forêts. Et on applaudit, on s'extasie. Grâce à l'invention géniale de l'agriculture, nous ne serions pas morts de faim, grâce à quoi nous nous sommes multipliés, grâce à quoi nous roulons à 130 km/h sur les autoroutes qui sont, avec les espaces bitumés, bétonnés, autant de bâillons posés sur le sol, l'empêchant de respirer, de proliférer, grâce à quoi nous exploitons les enfants congolais pour extraire le précieux coltan dont se nourrissent les systèmes informatiques, volons la jeunesse des femmes bengalis qui assemblent dans des conditions concentrationnaires les pièces de nos vanités, profitons des prisonniers du Laogai chinois et de tout un monde de "petites mains", cachées dans les enclaves de pauvreté, pour assouvir notre besoin de frivolités, grâce à quoi nous expédions dans l'espace des divisions de rubikubs qui formeront bientôt un anneau lumineux métallique autour de notre terre, ce qui nous empêchera de voir le soleil se refléter sur Vénus. À cause de quoi notre planète, pillée, étrillée, vidée, crie grâce.
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Ce fut longtemps bon comme ça. Il n’y avait que les variations climatiques des millénaires pour modifier l’aspect originel. Ce qui en d’autres temps s’accompagna de froids polaires, ce dont profitèrent quelques membres de tribus nomades pour se poser et s’initier au dessin sur les parois de grottes à la température plus clémente. Ceux-là, qui n’avaient pourtant pas lu la Genèse, avaient déjà remarqué que le repos était une donnée essentielle de la vie. La vie avait même son repos terminal, que nous appelons la mort et, eux, le passage peut-être, car terminal pas forcément. S’ils prenaient exemple sur la période de l’année la plus redoutée, dépouillant la terre de sa coiffe végétale, ne laissant que des fleuves de glace et des champs de neige, ce que nous nommons l’hiver, annoncée par un raccourcissement préoccupant des jours au point de craindre qu’ils se réduisent à rien, de se retrouver en étau entre une nuit éternelle et la terre, comme plus tard on le racontera dans la mythologie grecque – mais sans doute que la crainte des Grecs anciens venait de beaucoup plus loin –, ils avaient constaté qu’il n’était pas nécessaire de désespérer, qu’après l’hiver succédait la régénérescence formidable du printemps. Ainsi sous sa couche neigeuse une nature verdoyante se préparait pour les beaux jours. Comme si la terre elle-même avait éprouvé le besoin de souffler, de faire, oui, le mort après la débauche extravagante de l’été et ses nuages de moustiques, abandonnant peu à peu sa luxuriance, ses feuilles tombant au sol comme des larmes sur un visage endeuillé. Ceux-là savaient qu’il ne fallait pas s’y fier, que cette mort était une fausse mort, juste une longue nuit dans le long jour de la terre.Ce fut longtemps bon comme ça. Il n’y avait que les variations climatiques des millénaires pour modifier l’aspect originel. Ce qui en d’autres temps s’accompagna de froids polaires, ce dont profitèrent quelques membres de tribus nomades pour se poser et s’initier au dessin sur les parois de grottes à la température plus clémente. Ceux-là, qui n’avaient pourtant pas lu la Genèse, avaient déjà remarqué que le repos était une donnée essentielle de la vie. La vie avait même son repos terminal, que nous appelons la mort et, eux, le passage peut-être, car terminal pas forcément. S’ils prenaient exemple sur la période de l’année la plus redoutée, dépouillant la terre de sa coiffe végétale, ne laissant que des fleuves de glace et des champs de neige, ce que nous nommons l’hiver, annoncée par un raccourcissement préoccupant des jours au point de craindre qu’ils se réduisent à rien, de se retrouver en étau entre une nuit éternelle et la terre, comme plus tard on le racontera dans la mythologie grecque – mais sans doute que la crainte des Grecs anciens venait de beaucoup plus loin –, ils avaient constaté qu’il n’était pas nécessaire de désespérer, qu’après l’hiver succédait la régénérescence formidable du printemps. Ainsi sous sa couche neigeuse une nature verdoyante se préparait pour les beaux jours. Comme si la terre elle-même avait éprouvé le besoin de souffler, de faire, oui, le mort après la débauche extravagante de l’été et ses nuages de moustiques, abandonnant peu à peu sa luxuriance, ses feuilles tombant au sol comme des larmes sur un visage endeuillé. Ceux-là savaient qu’il ne fallait pas s’y fier, que cette mort était une fausse mort, juste une longue nuit dans le long jour de la terre.
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Les révolutionnaires, dans leur acharnement voltairien à en finir avec "l'infâme" (...), supprimèrent la semaine de sept jours (donc l'héritage biblique) pour la remplacer par le décadi. Autrement dit, au lieu de cinquante-deux dimanches chômés, il n'en restait plus que trente-six. Du côté du patronat, on commence à se frotter les mains, à considérer avec "intérêt" ces ultras. La Révolution a du bon. On voit que ce sont d'honnêtes bourgeois qui la dirigent après les exactions de la populace à laquelle on a laissé le sale travail de déblaiement des institutions en place. D'autant que l'Ancien Régime bondieusard ajoutait aux cinquante-deux dimanches vingt-cinq fêtes religieuses, également chômées, sachant qu'il était interdit d'obliger un homme ou une femme à travailler le jour du Seigneur. Voltaire bien sûr, mais aussi Montesquieu s'en étaient alarmés, qui dénoncèrent les "effets pervers" de ce pieux repos accordé aux travailleurs.
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Car la manne financière résultat de la consommation de viande et de lait est vertigineuse. Plus de soixante-dix milliards de têtes de bétail. Ce qui, nous seulement fait des dégâts avant d'arriver dans l'assiette (cet élevage concentrationnaire est responsable d'une pollution atmosphérique et terrestre égalant la grande chaudière à ciel ouvert des énergies fossiles) mais il faut les abreuver, les soigner, les nourrir, à quoi on consacre quatre-vingts pour cent des terres cultivées, et cultivées sans ménagement pour le sol et la santé. On ne va pas s'embêter à épiler à la pince un champ de soja, vaste comme un département, de ses mauvaises herbes. Roundup pour tout le monde. Qui, transitant par les animaux martyrs, finit de toute façon par nous passer à travers le corps.
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À l'occasion du Forum des libraires 2023, Olivier Nora, Président-Directeur général, présente la rentrée littéraire des Éditions Grasset - @editionsgrasset7893
Au programme de la rentrée d'automne 2023 : 0:00 Introduction 1:01 *_perspective(s)_ de Laurent Binet* 1:15 *_À ma soeur et unique_ de Guy Boley* 1:29 *_l'enragé_ de Sorj Chalandon* 1:55 *_Rose nuit_ d'Oscar Coop-Phane* 2:30 *_strange_ de Geneviève Damas* 2:50 *_Le Jour des caméléons_ d'Ananda Devi* 3:06 *_Adieu Tanger_ de Salma El Moumni* 3:17 *_Le Grand Feu_ de Léonor de Récondo* 3:47 *_Comédie d'automne_ de Jean Rouaud* 3:58 *_Croix de cendre_ d'Antoine Sénanque* 4:11 *_Impossibles adieux_ de Han Kang* 4:39 Conclusion
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