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Philippe Jaccottet (Préfacier, etc.)
EAN : 9782070419968
229 pages
Gallimard (02/10/2002)
4.44/5   17 notes
Résumé :
Air de solitude et autres écrits
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Après celle de son "Petit traité de la marche en plaine", la lecture d'"Un air de solitude" de Gustave Roud a été pour moi une très belle découverte. Écrivain et photographe reconnu en Suisse romande, ami proche de Charles-Ferdinand Ramuz, de Maurice Chappaz et de Philippe Jaccottet
Gustave Roud possédait une écriture austère et simple qui la rend encore aujourd'hui particulièrement attachante. Sans excès de forme, sans pensée intempestive, l'auteur témoignait et portait un regard singulier sur les paysages, sur toute la campagne environnante (ceux du Jorat vaudois, autour du village de Carouge où il a vécu durant toute sa vie), sur les hommes et les femmes aussi. Comme un désir jamais assouvi, l'auteur portait son attention, sa bienveillance sur ces êtres, sur des instants, sur tout un environnement, une nature figés dans une temporalité qu'il voulait croire éternelle mais qu'il savait éphémère. La prose de Gustave Roud n'élucide pas la solitude, le temps qui passe, la mort… Il y adjoint la beauté, la reconnaissance, l'attachement au monde paysan, aux êtres et à leurs travaux, aux villages, au rythme des saisons. L'auteur possédait
une belle et rare intuition de son temps, de tout ce qui l'entourait, il ne tranche pas, ne fait pas de choix entre l'intemporalité et la finitude des choses, il les rassemble, les unit. C'est parce que le temps nous échappe, qu'il se fait plus présent et plus beau encore. Influencé par le romantisme
allemand, Gustave Roud aimait souvent citer cette phrase de Novalis : "Le paradis est dispersé sur toute la terre. Il faut réunir ses traits épars". Faire usage de la poésie, la rendre essentielle, primordiale, c'est tout ce que contient la belle écriture de Gustave Roud dans "Un air de solitude".
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Ma meilleure lecture de 2021 et assurément ma découverte de l'année ! Gustave Roud, critique, traducteur, photographe mais aussi et surtout poète suisse, peu connu bien qu'il ait largement influencé le regretté Philippe Jaccottet (qui lui consacre d'ailleurs une préface merveilleuse). Il s'agit d'un recueil de poésie en prose plutôt classique et romantique, accessible à tous et toutes, qui m'a séduite par la grâce de son style, sa grande mélodie ainsi que la singularité de ses thématiques (la campagne, sa temporalité très particulière, le travail des paysans et plus largement la beauté des paysages du Haut Jorat où il a passé l'essentiel de sa vie).

Dis comme ça, j'ai conscience que j'ai peu de chances de vous donner envie de le découvrir alors je vais laisser Philippe Jaccottet vous résumer son oeuvre : “Roud a cité souvent, et on ne peut éviter de le faire après lui, ce fragment de Novalis qu'il a traduit ainsi : « le Paradis est dispersé sur toute la terre, c'est pourquoi on ne le reconnaît plus. Il faut réunir ses traits épars. » Ce fragment est une des clefs de son oeuvre ; un passage d'une « Lettre » à son éditeur [...] le complète : « La poésie (la vraie) m'a toujours parue être.. une quête de signes menée au coeur d'un monde qui ne demande qu'à répondre, interrogé, il est vrai selon telle ou telle inflexion de voix ».
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Tenter de dire la campagne d'ici, le travail et le repos des paysans, les saisons qui se nuancent, la quête semble simple, elle creuse une solitude habitée de présences difficiles à reconnaître. Les errances et les promenades, dans le Jorat, sur la route aux arbres assassinés, entre Missy et Saint-Aubin, près d'une auberge où s'ennuie une serveuse triste, sur la tombe d'un camarade de service, sont le retour vers ce qui clignote, apparaît, vif et éternel, puis part, souvenir à recréer par les mots. La poésie de Roud est mystique, expression rêvée d'une vérité frôlée dans un arbre, un champ de blé, un chant d'oiseau. Elle parle aux morts pour ressaisir une éternité jadis ressentie. Elle est sans âge, à la fois échec et réussite, sens et absence, beauté et vanité de toute tentation de tout dire.
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La très belle, lumineuse et simple préface de Philippe Jaccottet permet de comprendre le lyrisme de Gustave Roud, poète des Géorgiques, des saisons, du lent rythme paysan du travail et des saisons. Il donne à voir une plénitude du monde, une harmonie paradisiaque, mais dans ce geste même, il indique qu'il n'en fait pas partie, qu'il est seul et exclu de ce grand Tout. de cette tension entre le paradis et le chant de celui qui en est chassé naît le plus beau des lyrismes.
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Cette deuxième tentative d'aborder la poésie fut bien plus heureuse. Au départ je cherchais "Petit traité de la marche en plaine" suggéré par David le Breton mais je me suis rabattu sur cet ouvrage disponible.
Il s'agit d'un recueil de textes publiés entre 1927 et 1967 la plupart du temps de prose poétique.
Ce poète et photographe suisse roman nous chante la vie pastorale et les travaux de la ferme. Il est presque obsédé par les moissons et nous décrit les différents visages de la nature au fil des saisons.
On hume les grains qui s'accumulent dans les granges et le fumier. Ces lignes remplies de mélancolie tentent de nous faire entrer en contact avec le monde des morts par les chants des oiseaux.
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Je crois que l'homme au plein de sa vigueur et de sa force, et qui le sent assez pour ne douter pas de son regard, de son ouïe, est, à la lettre, un aveugle et un sourd. Je crois que seuls certains états extrêmes du corps : fatigue (au bord de l'anéantissement), maladie, invasion du cœur par une subite souffrance maintenue à son paroxysme, peuvent rendre à l'homme sa vraie puissance d'ouïe et de regard. Nulle allusion, ici, à la parole de Plotin : "Ferme les yeux, afin que s'ouvre l’œil intérieur." Il s'agit de l'instant suprême où la communion avec le monde nous est donnée, où l'univers cesse d'être un spectacle parfaitement lisible, entièrement inane, pour devenir une immense gerbe de messages, un concert sans cesse recommencé de cris, de chants, de gestes, où tout être, toute chose est à la fois signe et porteur de signe. L'instant suprême aussi où l'homme sent crouler sa risible royauté intérieure et tremble et cède aux appels venus d'un ailleurs indubitable.
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On trébuche, avec des battements de bras si secs qu'ils suscitent, hors de chaque arbre, de chaque haie, un orage d'oiseaux vite apaisé. Et resurgi tout crispé de sa longue nuit de bise et de ciel nu, le pays lui aussi cède au choc du regard, retrouve cette paix d'après l'accomplissement, cette douceur un peu lasse par où il glisse avec lenteur vers le repos. D'herbe en herbe le givre redevient rosée ; au-delà des touffes d'aulnes et de frênes, un vent de nulle part joue avec les fumées villageoises et, tout au bord du ciel, les montagnes dessinées à la neige flottent sur un banc de brume bleue si fragile et si triste que le cœur n'ose plus.

(extrait de "Bouvreuil") - p.77
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Le pied n'est pas sûr dans les sentiers du matin, aux prairies de décembre. Un gel mince a pailleté la terre des ornières ; ce registre miroitant des passages de la veille, chars, chevaux, laboureurs, redevient boue au premier choc. On trébuche, avec des battements de bras si secs qu'ils suscitent, hors de chaque arbre, de chaque haie, un orage d'oiseaux vite apaisé.

Bouvreuil, p. 77
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La guerre crée un présent que nous n'avons pas choisi. En dehors des obligations civiques et de charité qu'il nous impose, il nous laisse tout loisir pour fuir dans la poésie ; la guerre qui menace notre vie menace ce que nous aimons le plus dans la vie : la poésie. Les poètes reprennent ainsi une singulière actualité, car jamais nous ne les aurons lus avec plus de ferveur.

p.73
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A l’instant même où cesse la pluie, un chant de fauvette commence, liquide et pure comme elle, goutte à goutte au cœur des feuilles. La toison des prairies jusqu’à l’horizon scintille et fume sous un rai de soleil blanc. Louange de l’eau, louange de la lumière : pas une fleur ne garde le silence. Et que nous est-il demandé sinon de PARTICIPER, immobile, tête levée et lèvres closes ? L’abandon, le don, cela seul. Et la faux n’est pas loin, ces fleurs le savent.
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Videos de Gustave Roud (12) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Gustave Roud
À l'occasion de la parution des oeuvres complètes de Gustave Roud aux éditions Zoé, découvrez la vie, l'oeuvre et le pays de ce grand poète suisse.
Avec Daniel Maggetti, co-directeur des oeuvres complètes de Gustave Roud, Bruno Pellegrino Ecrivain, chercheur en littérature de langue française, Claire Jaquier, co-directrice des oeuvres complètes de Gustave Roud
Retrouvez la collection : https://www.mollat.com/livres/2653451/gustave-roud-oeuvres-completes
Note de musique : © mollat [Winterreise] 7. Auf dem Flusse (On the River) © Youtue Audio Library Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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