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EAN : 9782070408382
246 pages
Gallimard (18/11/1999)
3.73/5   86 notes
Résumé :
Une main aux ongles laqués met de l'arsenic dans une tasse de café et un homme frôle la mort. Sous un éclairage implacable, de menus faits prouveront peu à peu que cette main est celle d'une victime plutôt que celle d'une criminelle. Simenon raconte avec une psychologie pénétrante le drame silencieux de la vie d'une femme.

Source : Folio, Gallimard
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Mais pourquoi diable ai-je attendu si longtemps pour découvrir "la vérité sur Bébé Donge" ?
En effet, ce court roman, très sombre, est un véritable joyau noir, ciselé par Simenon, qui nous entraîne dans les arcanes de l'esprit des deux principaux protagonistes Bébé et son époux François.

Quel est le mystère de ce couple si bizarrement assorti ?

Qui est Bébé ? une empoisonneuse (ce qu'on apprend dès le début), une jeune femme frivole et frigide, ou la victime d'un mariage mal assorti ?

Lui, un riche industriel, habitué à la réussite, à être obéi, taiseux et hautain.
Elle, la presque gamine épousée à l'aube de ses 17 ans, très naïve et ignorant tout de l'amour.
Eux, un couple apparemment heureux, vivant dans le confort bourgeois d'une reposante maison de campagne faite pour le calme, le bonheur domestique et la joie de vivre.

Avec une grande économie de moyens doublée d'une précision d'horloger, Simenon décortique avec sûreté et sobriété les mécaniques complexes du coeur humain et nous en livre une analyse impressionnante de justesse et de dureté.

A découvrir sans tarder, si ce n'est déjà fait !
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De Bébé Donge je ne connaissais que le film d'Henri Decoin, vu il y a bien longtemps et dont seul le visage à la beauté glacée de Danielle Darrieux me restait en mémoire. Heureusement car ainsi ma lecture n'a pas été parasitée par les images et le parti pris du film ! C'eût été dommage car j'ai découvert un roman d'une surprenante modernité tant dans la forme que dans les ressorts psychologiques mis en évidence par le récit.
Celui-ci s'attache à un couple, François Donge et Eugénie, que tous nomment Bébé depuis toujours. Lui, chimiste, industriel à succès, absorbé par son travail et par ses nombreuses maîtresses et elle, "un pastel ! Un être aérien, immatériel, sorti d'un recueil de poésies" uniquement centrée sur son fils de 8 ans, sur ses toilettes et sur la tenue de la maison de campagne, donnent une apparence lisse à leurs relations dépourvues de passion comme - semble-t-il - d'amour. Aussi lorsque Bébé tente d'empoisonner son mari c'est la déflagration. Surtout qu'à aucun moment elle ne nie son acte, mais se dit incapable de l'expliquer face au juge.
Sur son lit d'hôpital, François examine leurs années de mariage à la lueur de cette tentative de meurtre. Derrière la façade imperturbable que dresse Bébé face au monde, il commence à déceler les failles, les déceptions, les désillusions qui l'ont conduite au geste meurtrier. Ce faisant, il prend conscience de sa propre responsabilité dans la faillite de leur couple. Maintenue dans un état d'enfance par son surnom mais aussi par les principes de son mari, Bébé Donge n'avait pas d'autre choix que le meurtre pour se préserver de l'anéantissement. C'est paradoxalement en femme enfin libre qu'elle accepte l'emprisonnement.
Simenon montre une virtuosité extraordinaire en jouant avec les fils du récit, les temporalités et les points de vue pour décortiquer l'évolution d'une femme, son silencieux enfermement dans la réalité d'un mariage décevant et son sursaut de révolte salutaire. La force du roman est décuplée par le choix du point de vue du mari qui glisse du rôle de victime à celui de bourreau. La narration est sèche, centrée sur des faits, des détails qui soudain prennent une importance démesurée, comme sous l'effet d'un zoom photographique. La véritable personnalité de Bébé Donge se révèle par dévoilements progressifs tout en gardant toujours une part de mystère, de secret.
En révélant dès le début le nom de la coupable, l'auteur prend le contrepied des romans policiers habituels et débarrasse immédiatement le lecteur de la résolution de l'énigme. L'enquête, c'est François Donge qui la mène sur son couple, sur sa femme et sur lui-même. Mais le constat va au-delà de l'histoire des Donge et s'étend à une société entière qui cantonne la femme dans un rôle soumis et décoratif de "gardienne du foyer" alors que les maris s'auto-valorisent par leurs activités extérieures. le prétexte de la frigidité est lui aussi remis en cause par Donge : n'est-ce pas lui qui a suscité le dégoût de son épouse ? le roman a été écrit en 1940 mais son propos reste finalement très actuel !
Et cette lecture me conduit directement à la découverte impatiente des autres romans de Simenon !

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Bébé Donge, alias madame Donge, a tenté d'empoisonner son mari. Celui-ci s'en sort miraculeusement. Elle admet sans discussion sa tentative de meurtre, elle ne s'explique pas son geste, pourtant prémédité.
Le mari est dans un premier temps anéanti, mais il ne ressent aucune colère. Voilà deux personnages dont l'attitude est bien mystérieuse. L'auteur fait de magnifiques allers - retours équivoques pour relater cette fameuse affaire. Il conduit ce court roman magistralement. En quelques phrases, une nouvelle énigme émerge, les questions fusent : pourquoi est-il là? Pourquoi y retourne-t-il ? Pourquoi est-il pressé ?

J'ai été impressionnée par la qualité de cette écriture belle et désuette, qui m'évoque celle d'un Maupassant « moderne » de 1942, avec les expressions de l'époque. Pourquoi m'a-t-il été présenté comme un auteur mineur ? Parce qu'il écrivait des romans policiers ? Parce qu'il en écrivait tant que ses romans ne pouvaient être bons ? Ou parce qu'il a travaillé pendant la seconde guerre mondiale ?
L'acteur Bruno Solo, invité récemment à une émission de radio, avait fait de cette histoire une présentation si enthousiaste que je me suis précipitée pour la lire. Merci à lui.
Simenon est un écrivain génial, à continuer de découvrir, sans aucun risque d'ennui.
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Un après-midi de déjeuner dominical familial, François Donge, un entrepreneur d'une petite ville de province dans l'Aube, est pris de violentes douleurs à l'estomac quelque temps après avoir bu son café. Chimiste de formation, il reconnait immédiatement les symptômes d'un empoisonnement à l'arsenic et comprend que sa femme Eugénie, dite Bébé, vient de commettre l'acte. Aidé de son frère Félix, il fait appel au médecin qui réussit avec des lavages en urgence à juguler l'intoxication et l'envoyer à temps à la clinique où il est traité pour ses hémorragies multiples. Bébé Donge est immédiatement arrêtée et, dans le plus grand calme, confesse son crime et la préméditation de l'acte, bouleversant le reste de la famille.
Alors que François récupère à l'hôpital, il tente de comprendre les motivations de sa femme et refait mentalement le parcours de leur vie commune, depuis leur rencontre à Royan une dizaine d'années auparavant, le rapide mariage qui suivit et sa triste nuit de noce, et leur installation en province. François réalise qu'il a été un mari entièrement tourné vers son travail, sa réussite sociale bourgeoise, et l'assouvissement de ses envies sexuelles auprès de ses nombreuses maitresses dès le début de son mariage pour combler l'évidente absence d'entente sur ce terrain avec Bébé. Très vite le couple avait décidé d'une entière liberté au seul prix de la franchise. Ils décidèrent malgré tout d'avoir un enfant, ce qui ne combla toutefois pas le vide de la vie de Bébé. Seule la fréquentation de Mlle Lambert avait semblé enjouer Bébé Donge, jusqu'au jour où François, excédé de son omniprésence autour de sa femme, la renvoie de leur demeure. Moment décisif qui lui apparaît dès lors comme la cristallisation de la résolution prise par sa femme de le tuer.
Sur son lit d'hôpital, il en vient petit à petit à comprendre l'enfermement insupportable, la « cruauté morale » dans laquelle il a tenu sa femme et lui pardonne son acte : il se sent en réalité le seul coupable de cette situation. Son entourage ne parvient pas à comprendre ce revirement et les angoisses profondes dans lesquelles il tombe à l'approche du procès de Bébé. Justifiant au tribunal son acte par l'acculement dans lequel elle s'est trouvée et le sentiment que pour que cela cesse « c'était elle ou lui qui devait mourir » — et considérant toutefois qu'un jeune enfant à plus besoin d'une mère que d'un père —, elle est finalement condamnée à cinq années de travaux forcés. François réussit à l'entrevoir à la sortie du procès et Bébé lui déclare froidement toute la haine qu'elle éprouve pour lui. Plus aimant qu'il ne fut jamais, il décide d'attendre sa sortie de prison.
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"Combien de temps s'était-elle ainsi débattue contre le vide ?"

Eugénie dite Bébé empoisonne François, son mari. Hospitalisé, l'époux mortifié essaie de comprendre. Qu'incriminer ? La différence d'âge, d'éducation ? Des appétits charnels antagonistes ? Une sujétion patriarcale ? Une jalousie morbide ? le désir d'être libre ? On ne connaîtra jamais tout à fait les véritables motivations de l'évanescente Bébé... Et si son amour, à force d'humiliations, transi, quasi congelé, s'était figé en un bloc de haine ?

Dans cet examen nécropsique d'un couple, Simenon confronte deux natures. François est un terrien, lascif et sûr de lui, tandis que l'aérienne Bébé doute en permanence. Frigide parce que mal aimée, intrusive parce qu'outragée, elle se débat dans son mariage comme un insecte dans l'eau (terrifique leitmotiv du roman).

La prise de conscience tardive du mari intoxiqué à l'arsenic se traduit par une invasion de points suspensifs : la pensée avorte, les phrases se désagrègent, les souvenirs se dissolvent... le style indirect libre, cher à Simenon, insuffle ici des ruptures de tons énervantes : les détails obstruent l'essentiel et les non-dits exsudent leur venin.

Donge, songes, mensonges... le roman poudroie, jaune orpiment, rouge réalgar, blanc mort aux rats... On ne se mithridatise pas contre un amour bafoué.

Sensationnel.
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
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Citations et extraits (30) Voir plus Ajouter une citation
Dire qu'à cause d'Olga Jalibert, qi avait un corps dur et savoureux comme une prune et qui se lançait dans l'amour, comme dans la vie, avec une ardeur insolente, François avait dû serrer cent fois la main du docteur, manger à sa table et bridger avec lui !
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a été très malheureuse… murmura François toujours immobile.
— Tant pis pour elle !… On fait chacun son bonheur ou son malheur…
— Ou bien ce sont les autres qui le font…
— Qu’est-ce que tu veux dire ?
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Il y a une façon de marcher à côté d’un homme… Il y a une façon, dans la conversation, de se tourner vers lui et de soutenir son regard… Il y a, dans l’abandon des corps, fût-ce aumilieu de la foule…
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les empoisonnements sont, neuf fois sur dix, quatre-vingt-quinze fois sur cent, des crimes dictés par l’intérêt… Dans les cinq autres cas, il s’agit d’une femme qui veut se débarrasser d’un mari gênant pour épouser son amant… C’est ce que nous voyons, par exemple, dans les fermes : une paysanne qui veut épouser son valet et qui a recours à la taupicine pour se rendre veuve…
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Une famille venait de passer derrière la barrière. Le père portait un gamin sur ses épaules. La mère en traînait un autre à la remorque. Cela sentait la poussière du chemin, la sueur et le jambon tiédi des sandwiches, le vin coupé d’eau des gourdes.
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Quel grand écrivain est l'auteur de près de 200 romans, l'inventeur de 8 000 personnages, et surtout, par quel livre pénétrer dans ce palais colossal ?
« La neige était sale », de Georges Simenon, c'est à lire au Livre de poche.
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