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EAN : 9782246832867
216 pages
Grasset (17/05/2023)
4.02/5   28 notes
Résumé :
Tony / Nita. Le jour / la nuit. Noisy / Paris.
L'un est un jeune type de cité, il vit encore chez ses parents et rêve de devenir comédien mais passe des castings sans succès. L'autre est une drag-queen adulée. Elle illumine les soirées de la capitale, mais, comme Cendrillon, doit, à l'aube, quitter ses beaux atours pour disparaitre sous les traits de Tony. Pile et face d'une même médaille, l'un vit en jogging et parle en argot quand l'autre est une diva qui ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Le jour, il est Tony, jeune babtou des cités de Noisy-le-Grand, et la nuit, à l'insu de ses copains et de tout son quartier, il devient la Reine Nita, une drag-queen dont les boîtes de nuit s'arrachent la présence fascinante. C'est son prof de théâtre, Freddy, qui l'a initié. C'est que Tony se rêve comédien, a tourné dans quelques clips ou courts-métrages et fait de la figuration. Mais pour l'instant impossible d'en vivre et, à vingt-trois ans, il doit rester habiter chez son beau-père Bernard qu'il déteste. Tony arrivera-t-il à prolonger son grand écart entre la vie de la cité et les nuits parisiennes ? ● le problème avec Zarca c'est qu'il a fait des livres tellement forts, comme Chems (2021) ou La Nuit des hyènes (2022) que lorsqu'un nouveau paraît, on s'attend à autant d'intensité, autant d'adrénaline… ● Indéniablement, Drag est un cran en-dessous, même si le roman reste très bon, bien meilleur par exemple que Laisse tomber la nuit d'Agnès Mascarou (2022) sur le même thème. ● J'ai trouvé que la mise en place de l'intrigue occupait bien trop de pages. L'histoire ne commence vraiment qu'à la page 91, et on en est déjà presque à la moitié. C'est étonnant de la part de Zarca qui sait habituellement si bien bâtir une tension narrative. ● Quant au fond, pour la Reine Nita, être drag c'est de l'art et ça n'a rien à voir avec l'orientation sexuelle (Tony est hétéro) : « ce niveau de métamorphose, c'était clairement de l'art, de la performance en barre. J'ai ressenti une émotion de gamin, celle que j'éprouvais quand je jouais au policier, à Sangoku, au ninja ou au pirate. L'excitation de me plonger dans la peau de quelqu'un d'autre, d'un héros, le temps d'une récré ou d'un aprèm au centre aéré. » ● En ce qui concerne les racailles des cités, Zarca a l'art de la formule : « Des mecs hardcore, des fouteurs de merde comme lui. La France sait pas tenir ce genre de lascars. Pays de lâches qui perd ses burnes. » ● Son style est toujours aussi percutant, très oral, avec beaucoup d'argot des cités et de verlan ; quand c'est bien fait, j'aime beaucoup. Et c'est bien fait.
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Aujourd'hui je vais évoquer Drag le nouveau roman de Johann Zarca. Il est l'auteur de plusieurs romans et polars underground et trash comme La nuit des hyènes, Chems ou Paname underground. Avec ce nouvel opus l'auteur semble s'assagir, l'histoire d'un jeune gars de banlieue qui devient drag-queen n'est pas nimbée de sexe et d'ultra violence.
Drag est le roman d'une émancipation, d'une acceptation de soi et d'une délivrance. Tony est originaire de Noisy, c'est un français des quartiers à la virilité exacerbée lorsqu'il est avec ses potes. Il rêve de devenir acteur mais de casting en audition il ne parvient qu'à jouer dans de modestes courts-métrages. Sous l'influence de son professeur, Tony va accepter de se métamorphoser et devenir Nita. Au début ce n'est pas simple, il a du mal à oser l'idée de se travestir. Bien entendu cette vie secrète se déroule à Paris, loin de Noisy. Paris est un miroir attirant, il fantasme d'y vivre : « sorti station Bonne-Nouvelle, je descends la rue d'Hauteville puis tourne dans la rue de l'Échiquier. J'aimerais tellement habiter là, je kiffe le quartier. » Progressivement il se prend au jeu et déclare : « je suis votre altesse, Reine Nita, et la nuit m'appartient. Quand le soleil dort, je cajole les coeurs écorchés. Les ténèbres apportent leur lot de souffrances et les fêtards manquent trop souvent d'amour : du crépuscule jusqu'à l'aube, je suis là pour essuyer leurs peines. » Pour Tony l'avenir s'écrit à Paris, il fréquente d'autres créatures de la nuit aussi envoutantes que lui. Ses exhibitions nocturnes dans des cabarets et des boites lui valent un début de notoriété sur les réseaux sociaux. A force de mytho (vis-à-vis de sa daronne et de ses potes) il parvient à cloisonner ses deux vies. Mais le mensonge ne dure pas, il va se faire griller par ses potes du quartier (il a oublié son sac de sport avec sa perruque, ses chaussures à talons et ses fringues exubérantes) et devenir persona non grata sur place. Il est expulsé par son beau-père qui lui interdit de revoir sa mère et sa soeur. Avec ses nouveaux amis il découvre l'entraide et la solidarité. Il devient pleinement Nita : « c'était ouf, c'était dingue, j'étais transformé, Tony avait disparu. Personne pouvait me reconnaitre derrière ce masque, personne. J'ai scotché longtemps devant la glace. A ce niveau de métamorphose, c'était clairement de l'art, de la performance en barre. » Il va participer à un concours inspiré par les émissions RuPaul Drags Race pour devenir la drag de la francophonie. Cette épreuve est une sorte de chemin de croix, la tension est à son comble d'autant que Tony est menacé et violenté par d'anciens de Noisy. Se glisser dans les oripeaux de Nita prend du temps : « pendant plus de deux plombes, je me maquille, je trace, je blende et je blushe, m'applique pour le contouring et la pose des sourcils, me dessine une bouche gracieuse. Enfin, j'enfile ma plus belle robe de bal, noire et scintillante, échancrée. » Avant l'épreuve décisive il raconte : « je dégaine une lingette et me débarbouille la gueule comme je peux, à l'arrache. Je balance ma fourrure sur le lit et je pense à mon casting, demain, que j'ai pas intérêt à foirer si je veux sortir de cette galère. » le style de Zarca utilise beaucoup de verlan (certains termes argotiques des cités sont tellement triturés qu'il est parfois difficile de trouver l'étymologie et de comprendre le sens exact) et des punch lines, il néglige les négations. Bien que littéraire le texte est très contemporain et empreint d'oralité.
Drag est un roman intéressant mais beaucoup moins coup de poing que les autres oeuvres littéraires de Zarca. le portrait du jeune protagoniste est touchant, son parcours social illustre bien la difficulté de sortir du carcan du modèle social du quartier et de l'enfance. Ce texte peut se lire comme une ode à l'acceptation de la différence, sans jugement normatif.
Voilà, je vous ai donc parlé de Drag de Johann Zarca paru aux éditions Grasset.

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Perchée sur ses talons hauts, drapée, fardée, pailletée, Reine Nita souveraine répand la joie sur les nuits parisiennes, coupe de champagne en main, admirée, enviée, aimée.
Enragé, défoncé, paumé, Tony court après la vie dans ses jours de banlieue, de shit, de violence.

« Mais je suis pas con, je sais qu'elle me prend pour sa pote, Reine Nita. Sinon, elle me calculerait pas. (…) Tony c'est quelqu'un d'autre, un type qu'elle connaît pas encore. J'espère qu'elle l'aimera bien. »

Tony grandit comme il peut dans une cité de Noisy, mère triste, beau-père dur, une soeur handicapée, la pauvreté. Des conneries qui auraient été plus grosses s'il n'avait croisé celui qui allait devenir « son daron » : Freddy, le prof de théâtre du quartier. Il se réfugie chez lui pour échapper à sa vie et s'en construire une autre. Il se rêve comédien, star. Freddy l'initiera au drag, avant de mourir brutalement. Comment affronter la violence quotidienne sans ce guide, ce mentor qui permet de croire aux possibles, aux issues de secours, à l'émancipation par la culture, les textes et le jeu ?

Je découvre Johann Zarca, après avoir vu passer sans encore les lire « Chems » ou « Paname underground » dans ce roman qui s'empare des mouvements de la culture queer - le drag vu par le prisme de RuPaul's Drag Race - pour les transporter sur le champ du roman sociologique. C'est une réussite parce que c'est intelligent et sans concessions. Parce qu'il est perdu au point de ne souffler qu'en incarnant un personnage drag auquel il refuse catégoriquement de s'identifier, qu'il se sent hors de sa vie le reste du temps, submergé par une profonde colère, Tony est un personnage terriblement attachant. le thème de la quête de soi et du conflit intime des identités sociales est ici formidablement renouvelé, sans facilités ni caricatures. Dans le cadre d'une proposition de lecture sociale de l'opposition entre Paris et sa banlieue, l'auteur cisèle un roman efficace, rapide, haletant.

« Tu crois que tu te déguises en Reine Nita, mais peut-être que tu es une reine qui se déguise en Tony. »
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A l'heure du succès de l'émission de télé Drag Race France et de la notoriété de ses queens lé-gen-daires - Nicky Doll, Paloma ou Keiona en tête - il fallait bien un roman pour entériner définitivement cet art dans la pop-culture actuelle. C'est chose faite avec "Drag" de Johann Zarca. Plongez dans les délires de paillette de Reine Nita, une queen de papier, reine des nuits parisiennes ! Mais aussi dans les déboires et les mythos de Tony, l'homme derrière la drag-queen, jeune comédien, banlieusard de Noisy-le-Grand, initié au drag et au théâtre par Freddy, celui qui l'a tiré de la misère dans laquelle il vivait. Reine Nita / Tony : deux mondes bien séparés, qui vont se télescoper le jour où Tony est démasqué par ses potes de cité.
C'est terriblement bien écrit : dans un style chiadé quand Reine Nita prend la parole, un style bien caillera quand Tony s'exprime. Cela donne un roman à la fois tendre, rythmé et bien dans notre époque. Vous n'y connaissez rien à l'art du drag ? Vous associez à tort drag-queen, trans et gay ? Lisez "Drag" d'urgence ! Vous adorez Cookie Cunty et Kam Hugh (et vous savez de qui je parle quand vous lisez cette chronique !) ? Lisez "Drag" d'urgence !
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Je décerne à Drag le prix du livre « envoûtant » mention « oublier de descendre à sa station de métro » et ceci à deux reprises en moins de quarante huit heures, le temps qu'il m'a fallu pour le dévorer.
Avec une expérience de dix ans de théâtre amateur, j'ai identifié et apprécié la juste description du processus de création d'un personnage et aussi des masques que l'on porte parfois malgré soi. J'ai découvert le monde des drag queen : extravagant, beau, éclatant mais aussi encore souvent difficile. Je fais mienne la devise du personnage :« Fière et digne ».
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Freddy racontait que l’identité existait pas, qu’elle était pas figée, que je pouvais être qui je voulais, quand je voulais. “On performe dès la naissance, c’est le jeu social, tout le monde joue la comédie. Alors Reine ou Tony, au final, c’est du pareil au même.” Un jour, Freddy m’a même dit “tu crois que tu te déguises en Reine Nita mais peut-être que tu es une reine qui se déguise en Tony “. Bullshit.
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