Ce fascinant recueil compte plusieurs auteurs : tout d'abord les différents auteurs des 140 lettres réunies dans ce volume et donc principalement de
Stefan Zweig à sa future seconde épouse, Lotte Altmann, mais aussi de sa première épouse, Friderike Burger, à lui et de
Stefan Zweig à Hannah Mayer, la belle-soeur de Lotte et ensuite le biographe de Zweig, Oliver Matuschek, qui a écrit le texte entre les lettres, des réflexions sur le rapprochement entre Stefan et Lotte en fin de volume, ainsi que des notices biographiques des membres de la famille Zweig et Altmann mentionnés dans les lettres.
C'est également Oliver Matuschek qui a réussi à y rassembler une multitude de photos dont certaines tout à fait exclusives.
Les lettres couvrent la période allant de 1934 à 1940, soit depuis le départ forcé de
Stefan Zweig de son domicile à Salzbourg en Autriche pour l'Angleterre jusqu'au départ, fin juin 1940, de Stefan et Lotte pour les États-Unis et le Brésil et leur
adieu au continent européen.
La toute première lettre de Stefan à Lotte date du 1er mai 1934, la dernière de Stefan et Lotte à Martha Kahn, qui s'occupait de la maison du couple à Bath, au sud-ouest de l'Angleterre, porte comme date le 25 juin 1940.
La belle phrase du titre du recueil sort de la lettre de Zweig à la "Chère Mademoiselle Altmann" du 4 mars 1935 (page 95).
La grande valeur du livre réside dans la présentation d'un
Stefan Zweig à une période particulièrement difficile de sa vie, après l'avènement d'Hitler au pouvoir en Allemagne, le rattachement de son pays natal au Reich, son interdiction de publication comme juif, la pénible séparation et divorce de son épouse Friderike, ses déplacements incessants entre Salzbourg, Vienne, Budapest, Zurich et Londres.
Nous faisons la connaissance d'un homme qui, malgré de nombreuses pressions et exigences incompatibles, continue courageusement ses efforts littéraires. Durant cette phase mouvementée de son existence, Zweig a écrit ses livres sur
Erasme de Rotterdam (1934),
Marie Stuart (1935), "
Conscience contre violence" (1936),
Magellan (1938) et "
La pitié dangereuse"(1939), sans compter un recueil de biographies en 1937 ("
Hommes et destins") et la préparation de sa superbe biographie
De Balzac.
Comme un des écrivains les plus considérés et populaires de son temps,
Stefan Zweig a été un homme fort sollicité un peu partout et le destinataire d'une correspondance incroyablement abondante. C'est dans ce contexte qu'a d'ailleurs commencé son attachement à Lotte, qui, comme sa secrétaire à partir de 1934, lui a été d'un énorme secours, en dépit d'une santé plutôt délicate.
Un attachement qui a résulté dans une belle histoire d'amour, un mariage, le 6 septembre 1939, et une fin commune à Petrópolis au Brésil, le 23 février 1942.
Grâce à l'admirable travail d'Olivier Matuschek et l'excellente traduction par Brigitte Cain-Hérudet, je peux recommander vivement ce recueil de lettres à toute lectrice et à tout lecteur qui aime l'oeuvre de
Stefan Zweig, toujours autant populaire 81 ans après sa mort.