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Félix Bertaux (Traducteur)Charles Sigwalt (Traducteur)Geneviève Maury (Traducteur)
EAN : 9782253002697
153 pages
Le Livre de Poche (01/02/1978)
3.77/5   315 notes
Résumé :
Tonio Kröger est un jeune écrivain d'origine bourgeoise et bohème de nature. Esprit tourmenté, il mène une vie solitaire et comme séparée de celle des autres hommes. Il ne peut vivre sans constamment s'interroger sur soi-même, sur l’œuvre qu'il crée, sans se regarder vivre, alors qu'il n'aspire qu'à vivre comme ceux qui vivent sans y réfléchir, qui ne s'analysent pas, qui ne rêvent pas, qui se contentent de s'abandonner simplement à leurs instincts sociaux.
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Critiques, Analyses et Avis (38) Voir plus Ajouter une critique
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sur 315 notes
Tonio Kröger ne veut pas être un bohémien dans sa verte roulotte. Il veut être droit, sérieux et simple.

Seulement le don de l'écriture s'abat sur lui comme une malédiction. Anathème maternel, par son sang latin, la mère de Tonio lui lègue ce goût pour « les aspirations douloureuses », la « mélancolique envie » avec une pointe de « dédain » et « une très chaste félicité ». C'est son père, Kröger qui incarne la bourgeoisie commerçante et héréditaire dont il faut tâcher de perpétrer la prospérité.

Par cette longue nouvelle que l'on a pu qualifier de « ballade en prose » le jeune Thomas Mann, futur Prix Nobel de littérature allemand entraine son lecteur dans l'intimité de ses questionnements initiatiques, torpeurs sensuelles et désarrois existentiels aux influences philosophiques et à l'essence biographique indéniable.

De Lübeck à Munich le personnage principal de Mann veut considérer la vie non pas seulement comme un matériau, une bûche pour le feu de sa plume, mais pour ce qu'elle est : il « aime la vie ». Cela n'est jamais bon signe pour un artiste, surtout en 1903 où décadents et symbolistes ne peuvent réussir une oeuvre si la mièvrerie de bons et vrais sentiments l'emporte sur la froideur qu'exige l'esthétique et la distance ironique que l'on doit sacrifier au style.

La clairvoyance de l'artiste peut le dégoûter des conventions sociales et être source de déception perpétuelle, quand la lassitude ironique à l'égard de toute vérité ne manquera pas d'occire le faible élan vers la vie de l'artiste. Cela n'est pas sans évoquer le Wang-Fô de Marguerite Yourcenar, peinture sans concession d'un artiste accompli qui « aimait l'image des choses mais pas les choses elles-mêmes. »

Ces réflexions fleuves sur l'art et la vie, sur l'inaptitude de l'artiste à vivre et l'incapacité des gens qui vivent à produire une oeuvre artistique sont abruptement rompues par l'interlocutrice de Tonio Kröger, Lisaveta Ivanovna, qui l'affuble d'un label précurseur de « bourgeois bohème » ou plus exactement un « bourgeois fourvoyé ».

Plus encore que la belle Ingeborg, le miroir renversé de Tonio Kröger est son ami d'enfance Hans. Hans, comme un leitmotiv de la vie qui ne se pose pas de questions sur elle-même, qui ne fait pas le tour des carrefours de l'introspection jusqu'à s'étourdir, qui jamais ne se désaxe, ne renie sa sensualité et ses pulsions. Tonio veut à la fois qu'Hans reste comme il est, différent de lui et malgré tout renouvelle sans cesse ses vaines et douloureuses tentatives pour l'arracher à ses imageries de chevaux et lui faire connaître les méandres du désespoir d'un Schiller ou autre tragédie lyrique, prétextes pour l'attirer à soi et ne faire qu'un, sans succès.

Ce sentiment de rejet, de différence sourde, secrète, c'est également le sentiment de l'auteur de « La Mort à Venise » face à sa propre homosexualité à une époque où l'Allemagne la réprouve. Les indices égrenés dans l'ouvrage sont remarquablement analysés par l'académicien Dominique Fernandez dans l'un des chapitres d' « Amants d'Apollon ».
Cela rend encore plus cruel le décalage entre Tonio et les autres hommes, son rapport à la femme, son rapport amoureux à Hans, et les remords que lui donnent sa vie de "débauche". Sous ce jour plus prosaïque, moins sibyllin (censure oblige) ce n'est évidemment pas sa seule vocation artistique qui l'éloigne du reste de la société et l'écriture n'est pas la seule « malédiction » à s'abattre sur lui.
A cet égard, l'épisode obscur pour le lecteur, où Tonio est arrêté par la police, ou encore l'allusion à un banquier poète en prison pour un motif brumeux deviennent sous la plume et le contexte de répression légale de l'époque dressé par Fernandez bien plus clair, « vous artistes, vous m'appelez un bourgeois, et les bourgeois sont tentés de me mettre en prison ».

« Aussi la vie est-elle pour moi un peu pénible ». L'histoire du fils du consul Kröger est donc aussi le témoignage audacieux, largement inédit en 1903, mais appelé à se poursuivre, avec notamment l'élève Törless de Robert Musil en 1912, d'un mal-être homosexuel.
Ironie du sort, c'est le propre fils de Mann, Klaus, écrivain aussi, qui revendiquera une homosexualité que son père a lui toujours gardée dans la pénombre de ses équivoques littéraires.

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Fils du consul Kröger, figure éminente de la grande bourgeoisie locale et entrepreneur prospère, Tonio Kröger est un adolescent puis un jeune homme que sa nature inquiète et tourmentée, sa lucidité douloureuse et sa sensibilité extrême prédisposent aux angoisses, à la mélancolie, à une perception raffinée et anxieuse du monde et de la vie comme aux méditations rêveuses et nonchalantes, à la musique et à la lecture des poètes. Ses préoccupations, ses centres d'intérêt et la nature de ses plaisirs font de lui un être à part et comme égaré, “étranger au monde et supérieur à la vie consciente et muette”. “Je suis pris entre deux mondes, n'appartiens à aucun, dit-il, et c'est pourquoi les choses sont si difficiles pour moi.”

Et la route, pour lui, sera longue, dans ce singulier voyage à la rencontre de lui-même avant d'arriver - peut-être - à vivre sans rien renier de son essence profonde et à exprimer pleinement sa vocation d'écrivain et d'artiste en dépit des contingences prosaïques et brutales d'un monde qui se refuse à lui…

Écrit en 1903, deux ans après la monumentale saga familiale des “Buddenbrook”, "Tonio Kröger", dont la famille est justement apparentée aux Buddenbrook, en prolonge d'une certaine façon l'histoire. Roman d'apprentissage dans lequel Thomas Mann avait mis beaucoup de lui-même et qui, à ce titre, lui était particulièrement cher, "Tonio Kröger" place au coeur du récit le questionnement de son auteur sur la littérature, l'écriture et la place de l'artiste au sein de la société bourgeoise de son temps.

Touchant par son personnage, profond par ses réflexions existentielles, artistiques et philosophiques et séduisant par son romantisme un peu décadent, "Tonio Kröger" est un roman un peu oublié aujourd'hui - écrasé peut-être de part et d'autre par “Les Buddenbrook” et “La Montagne magique” - qui mérite d'être redécouvert, ne serait-ce que pour la qualité de son écriture, les interrogations intemporelles qu'il suscite et l'attachement indéfectible qu'avait Thomas Mann pour ce texte, à tous égards magistral.

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Bref, intense et sublime à la fois. Telles sont les qualités d'une bonne nouvelle littéraire et, assurément, Thomas Mann les maitrise à merveille. Il faut admettre que ce grand auteur n'a pas son égal – ou si peu – pour sonder l'âme humaine, mais pas nous en montrer les noirs tréfonds, non ! Plutôt la beauté des esprits tourmentés, comment les élans brisés du coeur, l'envie, l'égoïsme, la passion retenue et le sentiment d'incompréhension peuvent se développer artistiquement. Avec sa nouvelle «Tonio Kröger», il nous le prouve encore. Pas besoin d'une saga de grande envergure, seulement la vie en condensé !

Le héros éponyme est un être à part, la dualité incarnée. Fils d'un banquier allemand, au tempérament nordique, austère, raisonnable, et d'une artiste espagnole, au tempéramment latin, aimant jouer du piano et de la mandoline. Évidemment, il ne pouvait que tenir davantage de sa mère plutôt que de son père. « Mais, sous le bonnet de fourrure rond de Tonio, dans un visage brun aux traits d'une finesse toute méridionale, s'ouvraient deux yeux sombres, délicatement ombragés, aux paupières trop lourdes, à l'expression rêveuse et un peu hésitante… » (p. 12) Même son prénom, Antonio, lui rappelle qu'il est tout le contraire de ses amis. En particulier le blondinet Hans Hansen, qui respire la santé, la force, la vigueur. Âme sensible, il en souffre beaucoup.

À ce point de l'histoire, je me demandais où l'auteur Thomas Mann voulait amener ses lecteurs. Quand Hans glisse son bras sous celui de Tonio tout en lui jetant un regard à la dérobée, et que ce dernier se sentit subitement des dispositions très tendres à son endroit, je me suis dit que c'était le début d'une amitié masculine très… exclusive. Surtout que Tonio pense aux vers qu'il a écrit, à son âme sensible et son tempérament d'artiste... Bon, ça fait un peu macho, j'en conviens. Ceci dit, j'étais dans l'erreur. Hans s'en va, laissant le jeune homme dans une perplexité désarmante.

Et moi encore plus ! Au chapitre suivant, Tonio est en extase devant la jolie Ingeborg Holm, aux yeux bleus et aux cheveux blonds. Décidément, c'est une idée fixe. Et il en devient torumenté, hanté. Malheureusement, sa mère puis son père meurent, le laissant seul, et il doit quitter sa ville natale, travailler un peu dans le commerce avant de s'abandonner à l'art en Italie. Mais tout ne tourne pas comme prévue et il est difficile de se défaire d'une éducation, même son amie Lisaveta le lui dit : « Vous êtes un bourgeois engagé sur une fausse route, Tonio Kröger, un bourgeois fourvoyé. » (p. 69) On revient à cette dualité, à ces antipodes qui constituent son tempérament : le bourgeois contre l'artiste. Alors le jeune homme la prend au mot et part retrouver une partie de lui-même au Danemark, sur les traces de Hamlet…

C'est du romantisme par excellence ! « Mais dans la mesure où sa santé s'affaiblissait, son sens artistique s'affinait, devenait difficile, délicat, exquis, fin, irritable à l'égard de la banalité et extrêmement susceptible dans les questions de tact et de goût. » (p. 45) Tout cela alors qu'une soif de pureté et d'honnêteté le travaille. Ma foi, c'est un héros digne de Goethe, Musset ou Hugo ! Surtout avec ce questionnement sur la vie d'artiste, de poète, incompris de ses pairs et de ses contemporains, qui ne trouve sa place nulle part.

Je ne vais en faire un résumé interminable. Il suffit de dire que Kröger voyagera beaucoup en peu de temps et vivra plusieurs péripéties. Mais partout, ce qu'il cherchera en vain (même s'il n'en était pas conscient d'abord), c'est l'image de cette jeune fille aux cheveux blonds. Il s'en rend compte à la toute fin et l'écrit à son amie Lisaveta. J'ai été assez surpris de voir l'histoire se terminer ainsi. C'est très convenable. Seulement je n'avais aucune idée qu'il s'agissait d'une nouvelle. Je n'étais rendu qu'à la moitié du bouquin ! À peine une centaine de pages !

Les autres nouvelles sont intéressantes mais pas autant que la première. Je retiens un peu celle intitulée «Le petit Monsieur Friedmann», encore une histoire d'amour impossible et qui finit dramatiquement. Peut-il en être autrement pour un jeune homme tourmenté ? Certains diront certainement qu'elle se termine mal, ça dépend des goûts. Moi, je trouvais cette fin étrange mais tout de même appropriée. Pour ce qui est des autres nouvelles… Bof ! Elles sont beaucoup plus courtes (à peine une dizaine de pages), ce qui fait qu'on a moins le temps de s'attacher aux personnages. Ou pas du tout ! Elles se confondent un peu dans ma mémoire, déjà leur souvenir s'estompe. Il y a court et trop court, Thomas Mann m'a un peu déçu avec ces dernières nouvelles.
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J'ai entrepris la lecture de ce texte afin de découvrir Thomas Mann, n'ayant encore rien lu de cet auteur allemand réputé. Bien m'en a pris de suivre les conseils de Patrick Schindler, auteur de Klaus Mann ou le vain Icare et de commencer par ce Tonio Kröger à la fois oeuvre de fiction, transposant les débuts de l'auteur lui-même, et découverte d'une forme littéraire insolite.

Court roman ou nouvelle ? 116 pages avec ce qu'il faut de notes très intéressantes pour raconter à la troisième personne des épisodes de la vie d'un adolescent de la bourgeoisie allemande, fils du consul Kröger, à la recherche de son identité. Il est formé de 9 chapitres se présentant chacun comme une nouvelle, le lien s'éclairant à la fin. C'est tout à fait particulier, original et réussi.

L'action se déroule au départ à Lübeck, port de la mer baltique (ville où Thomas Mann est né). Introduction des oppositions de caractères entre Tonio Kröger - jeune artiste en proie au doute et introverti - et son camarade Hans Hansen - qui lui profite de la vie ordinaire sans se poser de questions. Tonio est amoureux de la belle Ingeborg Holm qui l'ignore. La leçon de danse, en présence de celle-ci, animée par un maître de danse grotesque et sûr de lui, François Knaak, est mémorable.

Puis Tonio se livre « à la puissance de l'esprit et du verbe » à Munich, « qui lui promettait grandeur et réputation ». Il y rencontre l'artiste Lisaveta Ivanovna, en tout point l'opposée du bourgeois Tonio Kröger. Elle est l'artiste d'origine étrangère qui vit sa vocation sans état d'âme, loin des contraintes familiales. Tonio vient lui dire qu'il retourne vers le nord, 13 ans après l'avoir quitté. Il est maintenant un poète célèbre et revient à Lübeck. Superbe séquence quand il visite la maison familiale devenue « Bibliothèque populaire ». Puis, il part s'aérer au Danemark, afin de retrouver, dit-il, des consonances du nord : « un accord de harpe de la plus poétique pureté. »

Tonio voyage en bateau vers le Danemark. Il séjourne à Copenhague puis s'embarque de nouveau dans la direction du nord, le long des côtes de Seeland jusqu'à Helsingör. Il demeure quelques temps « dans une station de bains de mer » à Aalsgaard, dans une sorte de pension, où des jours tous semblables s'écoulent, « jusqu'à ce qu'il se passe quelque chose. »
L'imprévu lui fournit l'occasion de faire le bilan de ce cheminement intérieur en parallèle à ces voyages.

La plume élégante de l'auteur analyse la solitude de l'artiste alors que l'histoire familiale imposait un tout autre destin. On a là une réflexion affutée sur l'art et sa place dans la société. Tonio Kröger – c'est bien sûr Thomas Mann lui-même – oppose vie ordinaire, bonheur simple et malédiction de la connaissance, tourment créateur, synonymes de solitude et d'incompréhension.

Le style est impressionnant, certainement dû également au talent des traducteurs et traductrice, et permettant de comprendre l'énorme succès de cet auteur à son époque. Les répétitions, leitmotivs participent à une musicalité envoutante du texte.

Thomas Mann (1875 – 1955) a mis toute sa personne dans cette nouvelle, pas étonnant qu'il ait affirmé la préférer entre toutes. Il écrit sur sa jeunesse à Lübeck, puis son départ à Munich alors qu'il a seulement 17 ans à la mort du père en 1891, un riche négociant en grains dont il devait prendre la suite. Il était alors écartelé entre l'aspiration à coller à l'histoire familiale et le désir de vivre et réfléchir. Au départ, il a écrit sur son milieu, la bourgeoisie allemande, puis sur l'Europe avant que l'histoire ne l'oblige à aller plus loin et l'emmène vers un humanisme engagé. Sont exprimées avec force dans ce récit les tensions en rapport avec un père allemand appartenant à l'élite commerçante et politique, et une mère germano-brésilienne plutôt mondaine et artiste. Il a eu le prix Nobel en 1929 pour Les Buddenbrook. Exilé aux États-Unis en 1938, il est la voix au plus haut niveau d'une Allemagne non nazi, une posture me rappelant Charles de Gaulle à Londres – en tant qu'artiste au pouvoir d'action beaucoup plus limité...

La vie et l'oeuvre de cet auteur sont imbriquées et en font une figure incontournable de la littérature européenne. Cette lecture de Tonio Kröger m'a évoqué par bien des points tout ce que j'ai aimé chez Émile Zola. Thomas Mann reprend à sa façon, en s'en différenciant, en le prolongeant – il arrive quelques dizaines d'années après – le naturalisme, le romantisme et se fait porte-parole de nouvelles valeurs s'éloignant des valeurs bourgeoises traditionnelles. On saisit ici un superbe reflet de la littérature allemande de cette époque, riche et inventive, qui sera détruite par le nazisme, mais toujours présente dans les livres, avec la possibilité pour nous lecteurs, curieux et passionnés, de la faire vivre par nos lectures et nos échanges.

******
Chronique avec ses illustrations (couverture du livre et pensées, carte du voyage de Tonio dans le nord) ainsi que le lien vers la chronique de Klaus Mann ou le vain Icare (avec le commentaire de l'auteur) dans le blog Bibliofeel ou page Facebook et Instagram à clesbibliofeel.

Lien : https://clesbibliofeel.blog
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L'auteur nous présente avec brio, dans ce très court roman, quelques moments idéaux typiques de la croissance existentiale d'un artiste bourgeois nommé Tonio Kröger.
Ce dernier, ballotté par les vents et marées où baigne la barque de son existence, fait face à son angoisse en préservant de son mieux l'équilibre instable de son âme sensible.
Il prend au sérieux aussi bien la réflexion que l'immédiateté, persistant presque héroïquement à les garder toutes deux en tension existentielle, au lieu de les unifier en une fadeur confortable.
Cette conscience malheureuse destinale de l'exception, état de conscience récurrent chez les personnages de Mann, me semble provenir d'un regard pathologiquement conscient d'une transcendance...un temple érigé à un Dieu inconnu...
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Citations et extraits (47) Voir plus Ajouter une citation
- Ne me parlez pas de vocation, Lisaveta Iwanowa! La littérature n'est pas une vocation, mais une malédiction, sachez-le. Quand cette malédiction commence-t-elle à se faire sentir? Tôt, terriblement tôt ; à une période de la vie où l'on devrait encore avoir le droit de vivre en paix et en harmonie avec Dieu et avec l'univers. Vous commencer à vous sentir à part, en incompréhensible opposition avec les autres êtres, les gens habituels et comme il faut ; l'abîme d'ironie, de doute, de contradictions, de connaissances, de sentiments qui vous sépare des hommes se creuse de plus en plus, vous êtes solitaire et désormais il n'y a plus d'entente possible. Quelle destinée!
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L'expérience l'avertissait que ce qu'il éprouvait là était l'amour. Mais, quoi qu'il sût parfaitement que l'amour lui apporterait beaucoup de souffrances, de tourments et d'humiliations, qu'il détruisait la paix de l'âme et remplissait le cœur de mélodies, sans qu'il fût possible de leur donner une forme harmonieuse et créer dans le calme une œuvre achevée, il l'accueillit tout de même avec joie, s'abandonna tout entier à lui, et le nourrit avec toutes les forces de son âme, car il savait que l'amour rend riche et vivant, et il aspirait à être riche et vivant plutôt qu'à créer dans le calme une œuvre achevée.
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Il se livra tout entier à la puissance qui lui apparaissait comme la plus élevée sur terre, au service de laquelle il se sentait appelé: la puissance de l'esprit et du verbe qui règne en souriant à la vie inconsciente et muette. Il se donna à elle avec sa juvénile passion.
Elle aiguisa son regard (...), elle lui ouvrit l'âme des autres et la sienne propre, le rendit clairvoyant, lui montra l'intérieur du monde, et ce qui se trouve tout au fond, sous les actions et les paroles.
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Il suivit le chemin qu'il devait suivre, d'un pas indolent et irrégulier, en sifflotant et en regardant au loin, la tête inclinée de côté et s'il fit fausse route, c'est que pour certains êtres il n'existe pas de chemin approprié.
Quand on lui demandait ce qu'il pensait devenir, il donnait des réponses variables, car il avait coutume de dire qu'il portait en lui les possibilités d'une quantité d'existences, jointes à la conscience secrète qu'elles étaient au fond de pures impossibilités.
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Le fait que Tonio aimait Hans Hansen et avait déjà beaucoup souffert par lui. Celui qui aime le plus, est le plus faible et doit souffrir;son âme de quatorze ans avait déjà appris de la vie cette dure leçon;et il était ainsi fait qu'il remarquait très bien des expériences de ce genre, qu'il les notait en lui-même,et y trouvait dans une certaine mesure du plaisir, sans du reste régler sa conduite personnelle en conséquence, ni en tirer d'utilité pratique.Il trouvait aussi de telles leçons beaucoup plus importantes et beaucoup plus intéressantes que les connaissances qu'on l'obligeait à acquérir à l'école, et il employait la plus grande partie des heures de cours passées dans les salles de classe aux voûtes gothiques, à épuiser tout ce que ces découvertes pouvaient lui faire éprouver et à en approfondir complètement la signification.
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