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Jean-François Sené (Traducteur)
EAN : 9782253120926
893 pages
Le Livre de Poche (05/11/2008)
4.14/5   63 notes
Résumé :
Plus de soixante-dix ans après le soulèvement militaire contre la République qui marqua le début de la guerre d'Espagne, Antony Beevor réussit un véritable tour de force en nous proposant, sur ce sujet encore brûlant, un livre capital. La terreur rouge, la terreur blanche, les règlements de comptes dans chaque camp, les interventions étrangères, intéressées (les Soviétiques et les nazis) et désintéressées (les Brigades internationales) sont racontés ici avec rigueur... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
The Battle For Spain
Traduction : Jean-François Sené

ISBN : 9782253120926

Sept-cent-soixante pages (plus une soixantaine de pages de notes et puis la bibliographie et les sources) pour raconter la tragédie de l'une des guerres les plus étranges, sinon la plus étrange, qui aient ensanglanté le XXème siècle. Eh ! bien, ce n'est vraiment pas trop, croyez-moi. En effet, que savons-nous de la Guerre d'Espagne ? Grosso modo, en France en tous cas et surtout de nos jours, on vous répondra : "C'était une guerre civile. A droite, il y avait les méchants avec le général Franco. A gauche, il y avait les bons avec les communistes espagnols. Les gentils communistes ont été battus parce qu'aucune grande démocratie européenne n'a accepté de les aider. Il n'y avait que l'URSS, ce Paradis de la démocratie, qui a accepté mais Staline, forcément, il avait tellement de soucis avec les trotsko-fascistes (sic), qu'il n'a pas pu faire grand chose. Après la victoire de Franco et des Affreux, ça a été un manque de démocratie absolue, les Espagnols étaient très malheureux et les prisonniers de guerre ont été horriblement traités."

Oui, en gros, c'est ça que vous entendrez alors que la situation, tant d'un côté que de l'autre, était sinistrement bien plus compliquée. le livre du Britannique Anthony Beevor, qui cherche à rester un observateur impartial, ne prend parti ni pour les uns, ni pour les autres mais pose l'affaire en des termes beaucoup moins simplistes et fait l'effort - ce qui déplaira à certains - d'éclairer notre lanterne. Il a eu d'ailleurs l'excellente idée de placer, au début de son ouvrage, une sorte de dramatis personae qui reprend, côté nationaliste (Franco) et côté républicain (Negrín), la liste des principaux mouvements qui s'opposèrent sous les deux étiquettes. Malgré tout, se plonger dans un livre de ce type et surtout aussi long, si vous n'avez pas déjà un peu tâté de la Guerre civile espagnole et pas seulement en lisant Malraux ou Hemingway, a des airs de gageure. Il faut du calme, de la patience ... et du temps. Prendre des notes serait aussi une bonne chose, même si vous avez dépassé depuis longtemps l'âge des cours à l'université.

Résumer ce livre n'est évidemment pas mon but. Simplement, j'aimerais poser tout net la question que tout le monde (à moins d'être un sectataire obligatoirement sectaire de l'extrême-gauche et des rares communistes qui survivent en France) se pose après lecture de "La Guerre d'Espagne" : pourquoi le Parti communiste soviétique, sous les ordres de Staline, a-t-il fait ça aux Républicains espagnols ? Avec les "conseillers" envoyés par Moscou pour les aider, entre autres, à mener une stratégie militaire efficace, les Républicains étaient vaincus d'office. Les "conseillers" soviétiques menèrent les troupes républicaines en dépit du bon sens, s'acharnant à leur faire perdre leur temps sur de petites poches de résistance au lieu d'aller de l'avant, tout ça pour ne gagner, au final, que quelques kilomètres carrés. Bien entendu, les échecs étaient imputés aux responsables républicains qui n'appartenaient pas au Parti, notamment aux "trostko-fascistes" ou "facho-trotskystes" (je n'y peux rien si ça me fascine, moi, ces mots-valise ! ;o) ) et la Propagande rouge allait bon train.

Ce qui ressort surtout de l'attitude des membres du Komintern, c'est qu'ils voulaient par-dessus tout instaurer une véritable "dictature du prolétariat" en Espagne et y implanter le communisme à la soviétique. Mais ils n'ont absolument pas tenu compte des caractéristiques du peuple espagnol. Si le courage, voire l'héroïsme, fut grand et farouche des deux côtés, les Républicains étaient peut-être un peu plus "débraillés", un peu plus ... hum ... comment dire cela sans vexer personne ? ... "siestiques" que leurs homologues à droite (plus disciplinés, semble-t-il, pas assez toutefois pour ne pas provoquer l'indignation de leurs alliés allemands, beaucoup plus stricts question commandement et tenue des uniformes). C'est ainsi que deux tempéraments, deux Histoires s'affrontaient avant même d'affronter l'"ennemi" . Les nationalistes ont eu la chance d'avoir un Franco à leur tête, c'est-à-dire, qu'on approuve ou pas ses opinions, un homme volontaire et qui savait la plupart du temps où il allait. du côté républicain, ils n'en eurent pas de pareil, rien que ces foutus conseillers soviétiques et membres étrangers, mais communistes à mort, du Komintern (comme le Français André Marty), lesquels, après avoir littéralement épuisé des Brigades internationales enthousiastes et naïves, après les avoir envoyées à la boucherie, finirent par s'éclipser parce que, devant l'affaire de la Tchécoslovaquie et la peur honteuse qu'inspiraient Hitler et son régime aux démocraties européennes, Staline se dit que, en définitive, mieux vaudrait s'allier avec ... l'allié de Franco.

Du livre de Beevor, il ressort aussi très clairement que, tant l'Italie et l'Allemagne d'un côté que l'URSS de l'autre, utilisèrent le conflit interne espagnol pour expérimenter les armes, en particulier aériennes, qu'elles utiliseraient quelques années plus tard dans une guerre devenue mondiale. La Guerre civile espagnole fut en ce sens une sorte de "laboratoire" pour les puissances de l'Axe comme pour Staline. Si les belligérants espagnols s'en rendaient compte, quel que fût le parti auquel ils appartenaient, que pouvaient-ils y faire ? Franco a tenté de laisser le moins possible de terrain à ses deux "alliés", rognant par la suite sur le remboursement des dettes contractées. Et, quelle que fût la dureté du régime franquiste, on n'ose penser à ce que l'Espagne serait devenue si les Républicains - ou plutôt l'URSS derrière eux - l'avaient emporté. Finalement, le peuple espagnol - il s'en aperçut sur la fin - n'a eu que le choix entre deux dictatures. Pas question de privilégier l'une aux dépens de l'autre. Mais à ceux qui évoquent la répression franquiste après la victoire, on peut toujours objecter que, chez les Républicains, les conseillers de Staline et les officiers communistes ne se sont pas gênés, pendant le déroulement de la guerre, pour abattre froidement tous ceux qui, pourtant "à gauche", ne partageaient pas leur point de vue sur quoi que ce fût. Ces gens ne tuaient pas parce que les soldats et les officiers non-communistes refusaient de se battre : ils les exécutaient - y a-t-il un autre mot ? - parce que leur bon sens ou simplement leur idéologie politique originelle (pour les anarchistes du POUM et les syndicalistes de l'UGT par exemple), s'opposaient à la pensée stalinienne.

Tout cela, répétons-le, en pleine guerre, alors que le sort pouvait encore jouer en faveur de ces Républicains qu'ils prétendaient être venus "aider" ...

Evidemment, ayant, par mes origines paternelles, quelques connaissances de la Guerre civile en Espagne, j'étais au courant de certains points "délicats." Mais la démonstration de Beevor est implacable : il ne justifie en rien la répression franquiste, bien sûr mais on sent tout de même son mépris envers ces gens du Komintern et ces communistes espagnols purs et durs qui, en fait, pour la plus grande gloire du Parti, ont lutté contre leur pays. Franco avait, pour reprendre une expression célèbre, "une certaine idée" de l'Espagne mais au moins, il croyait en ce qu'il faisait, il croyait en l'Espagne. Dussé-je m'attirer les foudres de certains , je répèterai désormais que, du côté républicain, beaucoup trop de personnes croyaient au Parti communiste soviétique mais certainement pas en l'Espagne. Les agissements "internes" de ces gens-là dans le conflit en est la preuve à la fois accablante et incontournable : ce n'est pas toujours celui qui crie le plus fort "¡ Arriba España !" qui est vraiment un patriote ! Une leçon sur laquelle, aujourd'hui, en France, beaucoup d'entre nous méditent depuis déjà longtemps - et sur laquelle de plus en plus de Français qui aiment leur pays commencent à se pencher, malgré les discours des politiciens.

Car ne vous faites pas d'illusions : tous les beaux parleurs communistes qui avaient embouteillé les rangs des Républicains durant la Guerre civile - dont la plus célèbre, "la Pasionaria" - ne se sont pas gênés pour fuir Madrid en avion à temps, avant que ne débarquent les troupes franquistes. "Ils ne passeront pas," peut-être mais, un fois qu'"ils" sont passés, eh ! bien, chacun pour soi et Dieu, s'Il existe, reconnaîtra les siens !

De l'autre côté, on ne saurait trop reprocher à Franco, qui avait fait carrière en Afrique, d'avoir utilisé contre ses compatriotes la furie des regulares arabes, ces "Rifains" que, quelques années plus tôt, le gouvernement espagnol combattait avec acharnement. En ce qui concerne son alliance avec Hitler, rappelons que les deux hommes ne s'aimaient guère et que Franco a toujours traîné les pieds pour livrer des juifs espagnols à son "allié." Et puis, Staline aussi a fini par s'allier au Führer, non ? ... Quant à ses rapports avec Mussolini, selon Beevor, le sanguin Duce trouvait l'Espagnol horriblement paresseux en matière militaire (il y eut en effet quelques batailles où Franco eut le tort de laisser l'ennemi récupérer des forces). C'est parfois assez curieux mais on a l'impression, au fur et à mesure que l'on avance dans sa lecture, que l'alliance de Franco avec Hitler et Mussolini était presque "contre-nature" et que seule l'opportunisme du Caudillo et de ses partisans la lui avait dictée.

Que dire encore de ce texte ? Il est passionnant, vous l'avez compris. Il est assez ardu mais sans jargon spécialisé. Il dérange par son désir de reconstituer les événements tels qu'ils furent et par le fait que, l'auteur le souligne, au contraire de ce qu'il se passe habituellement, ce sont les vaincus qui ont écrit (réécrit ?) l'histoire de la Guerre civile espagnole. Beevor s'oppose aussi à la croyance - presque un mantra - qui veut que les Brigadistes aient joué le rôle que leur ont prêté des journalistes et des écrivains prêchant de toutes façons pour leur chapelle. Et quand on sait quelle importance eut, pour un George Orwell comme pour un Arthur Koestler, qui partirent combattre en Espagne avec des idées bien communistes et en revinrent pour le moins fortement troublés, tout ce qu'ils vécurent justement dans les Brigades internationales et dans les combats auxquels ils se retrouvèrent mêlés, on se dit qu'il est essentiel, surtout de nos jours, d'approfondir nos connaissances sur la Guerre civile espagnole.

N'attendez plus : lisez "La Guerre d'Espagne", d'Anthony Beevor. ;o)
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La guerre d'Espagne, le conflit censuré de l'histoire officielle, la guerre qui dérange. Comme toute science humaine l'histoire est très sensible à l'idéologie, à des a priori conceptuels, philosophiques, politiques...
Ainsi la seconde guerre mondiale a commencé en juillet 1936 en Espagne (voire en Chine lors de l'agression du Japon en Mandchourie qui n'est pas différente de l'attaque de Pearl Harbour...). Affirmer que la guerre a commencé le 03 septembre 1939 cela présume qu'avant cette date, c'était la paix... C'est faux et "accessoirement" très peu respectueux pour les milliers de victimes de cette "paix". C'est oublier l'invasion par les troupes allemandes, de l'Autriche, de la Tchécoslovaquie, c'est oublier les souffrances des millions de Chinois (Nankin...) C'est oublier la guerre d'Espagne, où les troupes militaires, allemandes, italiennes russes se sont affrontées sur le sol espagnol.
Si cette guerre est oublié c'est notamment pour ne pas mettre en évidence que l'Angleterre a été un allié objectif de l'Allemagne nazie par anticommunisme. Par la tartufferie du "non interventionnisme" l'Angleterre et la France, en refusant d'aider la République alors que l'Allemagne et l'Italie intervenaient massivement, ont poussé le gouvernement républicain espagnol dans les bras terribles de Staline qui a fait régner la terreur en Espagne, dans la continuité des purges qui ensanglantaient l'URSS à la même époque. le soutien de l'URSS.a non seulement provoqué des crimes et des violences abominables dans le camp républicain mais a été un désastre militaire.L'essai d'Antony Beevor expose avec talent et minutie tous les évènements militaires politiques qui ont jalonné ces pages dramatiques pour l'Espagne et l'Europe. L'aide allemande te italienne ont été décisives et ces engagements ont aussi permis aux troupes allemandes de "modéliser" leur stratégie du "blitzkrieg" la terreur (Guernica...)et des actions combinées aviation/blindés qui allaient mettre à genoux l'armée française et l'Europe. le moins que l'on puise dire est que les spécialistes français et anglais n'ont tiré aucune leçon alors que les Allemands livraient au grand jour leur doctrine avec le succès que l'on sait. Par rapport à ces précédents ouvrages comparables (Stalingrad, Berlin ...) la lecture de cet ouvrage est un peu plus difficile car nécessitant pas mal de point s de repère sur cette période. Il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un livre remarquable qui mérite de mon point de vue la note maxi
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La guerre d'Espagne, ce conflit injustement oublié des livres d'histoire, noyé qu'elle fût dans la seconde guerre mondiale et ses innombrables batailles et drames. C'est oublier que cette guerre fût le laboratoire à grande échelle des tactiques et techniques utilisées par les futurs belligérants.

Qui mieux que Antony Beevor pouvait s'atteler à la gigantesque tâche de décrire ce qui s'est réellement passé durant ces quelques années? Car c'est bien un récit plus qu'exhaustif que nous livre ici l'historien britannique. Tout y est décortiqué.

Les raisons du conflit tout d'abord ou comment l'Espagne monarchique portait en elle les germes du conflit à venir. de cet empire qui dominait autrefois une grande partie de l'Europe et du monde et qui n'est plus que l'ombre de lui même à la veille de la guerre.

Le volet politique du conflit ensuite ou comment les différentes sensibilités politiques trouvèrent un endroit où s'affronter avant l'heure. Car Franco n'est pas apparu comme par magie dans l'Espagne d'avant guerre de même que les communistes, supportés un temps par Moscou, ne tenaient pas forcément l'Espagne sous leur botte.

La guerre, les batailles et ses conséquences pour finir. Où l'on voit comment les dissensions au sein des forces républicaines les mena à la ruine et à s'entre-déchirer, où les nationalistes armés par le IIIeme Reich disposaient d'un équipement bien supérieur à leurs frères d'en face. La résistance acharnée des anarchistes qui défendirent les colonnes de réfugiés lorsque la guerre fût perdue. Les atrocités enfin, dans chacun des camps, avec son lot de drames et de tragédies.

Tout cela, Antony Beevor nous le conte avec justesse et impartialité. Oh bien sûr il serait aisé de prendre la défense du camp républicain face aux hordes fascistes. Pourtant comme le rappelle l'auteur: dans une guerre civile le gagnant tue d'avantage de personnes que le perdant et il y a fort à parier que les républicains se seraient lancé dans une vaste épuration si la guerre avait tournée en leur faveur.

Plus qu'un simple livre d'histoire, il s'agit véritablement d'un grand récit épique, d'une immense tragédie préfigurant celles à venir en Europe, et une histoire émouvante que nous livre ici Antony Beevor. A ceux qui ne l'auraient pas lu, n'hésitez plus une seule seconde.
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Antony Beevor, né en 1946, est à la fois un officier (formé à Sandhurst, le St Cyr britannique), un historien rigoureux, capable d'explorer les sources les moins accessibles, et un journaliste apte à dégager les faits essentiels pour faire comprendre une situation complexe.

Dans ses ouvrages consacrés à la Seconde guerre mondiale, à Stalingrad, à Berlin, à Paris libéré, ainsi qu'à l'Espagne de la guerre civile, il ne se place pas du point de vue des gouvernants ou des chefs, mais de celui des hommes, des femmes, des enfants souvent broyés par des décisions prises en haut lieu, sacrifiés à la gloire de machos sans scrupules (Hitler, Staline, Franco, Negrin, etc…) et de leurs arrangements politiques.

Comme tous les historiens de l'Espagne, il analyse les raisons du retard économique et social accumulé au XIXème siècle, mais il va plus loin en décrivant la véritable haine sociale, culturelle, religieuse, qui oppose patrons, propriétaires terriens, mineurs, ouvriers agricoles et industriels, clergé catholique et intellectuels francs-maçons.

C'est cette haine qui produira, dès le 18 juillet 1936, une « guerre des deux Espagne », commençant par un grand massacre de ceux qui représentent localement l'ennemi, et tout simplement de ceux qui se trouvent au mauvais endroit au mauvais moment. Avec ces 200.000 morts, la guerre ne pourra plus être arrêtée.

La classe ouvrière européenne (et américaine) exprime sa solidarité en s'engageant dans les Brigades internationales, dirigées par les Communistes, qui auront 10.000 morts au combat. Parmi les Etats, seul le Mexique du Président Cardenas agira pour la République. L'URSS de Staline le fera aussi, mais en subordonnant son action à ses intérêts, notamment à la fin de la guerre.

Pourquoi les grandes démocraties de l'Europe occidentale, le Royaume Uni et la France, ainsi que les Etats Unis, ont-ils refusé leur aide, pour l'équipement au moins, au gouvernement légitime de l'Espagne, appliquant une politique de non-intervention alors que les troupes de l'Allemagne nazie et de l'Italie fasciste étaient déployées en Espagne ?

L'image communiste et anarchiste de la République y a été pour quelque chose, de même que les intérêts économiques anglais en Espagne, ou la faiblesse de la majorité de Front populaire en France, ou encore les manoeuvres du lobby catholique au Congrès américain.

Pourquoi la République a-t-elle perdu la guerre ? Beevor démontre que, quelle que soit la bravoure et l'esprit de sacrifice de ses combattants, la République a été constamment inférieure en termes d'armement (artillerie, blindés, aviation de chasse et de bombardement), de stratégie et de tactiques d'emploi (grandes offensives frontales mal coordonnées donc sanctionnées par des pertes énormes) et même d'intendance (faute d'organisation, les soldats de la République souffraient de froid et de faim).

A cet égard, la chute de la République espagnole était une leçon pour les démocraties : les tactiques aériennes et terrestres du corps expéditionnaire allemand (Légion Condor) préfiguraient celles qui seraient employées en 1940 contre la Grande-Bretagne et la France.

Mais, pas plus que la République espagnole, elles n'ont compris ce qui les attendait.

Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Ils sont près de 500 000 à être venus en France pour fuir les violences de la Guerre d'Espagne. Et pourtant, on la connaît mal, cette guerre. Dans son style si facile à lire, Antony Beevor remédie à cela.
La tâche n'est cependant pas aisée : il s'agit bien d'une guerre civile impliquant plusieurs idéologies, partis politiques et nations étrangères. Les principaux protagonistes ont (évidemment !) tous des noms espagnols qu'on a du mal à mémoriser et distinguer. Comme tout livre d'histoire, davantage de cartes auraient aidé à la compréhension.
On apprendra ici les causes premières du conflit (chute de la royauté, crise économique, etc.), son déroulement (aides internationales accordées et refusées à un camp ou à l'autre, stratégies, etc.) et ses conséquences (répression, diaspora, etc.).
Avec l' "aide" stratégique soviétique, d'une stupidité et d'une brutalité sans nom, les Républicains ne partaient pas gagnants. de plus, les peurs d'un état communiste en Europe de l'ouest et de froisser l'Allemagne nazie ont bloqué l'aide des démocraties chrétiennes (France, Royaume-Uni, USA). de leur côté, les Nationalistes ont bénéficié d'une aide efficace de l'Allemagne (et un peu moins efficace de l'Italie) et de l'expérience militaire de ses dirigeants.
Pour résumer la thèse de Beevor : ce n'est pas vraiment Franco qui a gagné, mais plutôt la République qui a perdu...
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
[...] ... Sous la direction du NKVD, le SIM se livra à des atrocités inhumaines. Les nationalistes exploitèrent ces faits en les exagérant, créant ainsi une légende noire. Cependant, si tous les documents furent détruits, les témoignages oraux et les dénonciations incessantes de Manuel de Irujo et de Pere Bosch Gimpera ne laissent aucun doute sur les méthodes d'interrogatoire "scientifiques" employées par les soviétiques. Les méthodes du SIM avaient évolué depuis les tabassages à coups de tuyaux en caoutchouc, les traitements à l'eau bouillante ou glacée et les simulacres d'exécution des premiers temps. Le sol des cellules était aménagé de façon que les arêtes vives des briques blessent les pieds des prisonniers nus qui y étaient détenus. Des bruits métalliques, des couleurs, des lumières étranges et des sols en pente créaient des phénomènes de désorientation et de perte des sensations. Et si cela écouait, ou si les interrogateurs étaient pressés, il y avait toujours "la chaise électrique" et "la caisse à bruits", mais ces moyens risquaient de rendre les prisonniers fous trop vite.

Il n'existe pas d'estimation fiable du nombre total de personnes détenues par le SIM, ni des pourcentages, encore qu'il soit quasi certain qu'il y eut plus de républicains que de nationalistes. On disait que quiconque critiquait l'incompétence militaire soviétique ou les pilotes volontaires étrangers avait autant de chance de se retrouver accusé de trahison qu'une personne qui s'opposait au communisme pour des raisons idéologiques. Le ministre de la Justice, Manuel de Irujo, démissionna le 10 août 1938 pour protester contre les procédures frauduleuses, mais resta au sein du gouvernement comme ministre sans portefeuille. Ces pratiques judiciaires et surtout les méthodes du SIM atterraient également beaucoup d'autres républicains éminents, mais Negrín rejetait toute critique de l'activité du SIM comme propagande ennemie. Il faudra attendre 1949 pour qu'il reconnaisse devant le journaliste américain Henry Buckley qu'il avait eu tort. ... [...]
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En outre, les attachés de presse nationalistes étaient loin d'être tous aussi subtils et courtois que Luis Bolín. Un de ses successeurs, Gonzalo de Aguilera, comte d'Albe et de Yeltes, propriétaire terrien de Salamanque, se déplaçait en Espagne nationaliste dans une Mercedes jaune avec deux fusils à répétition sur le siège arrière. Il annonça fièrement un jour à un visiteur anglais que «lorsque la guerre civile avait éclaté, il avait fait s'aligner les ouvrier de sa propriété, en avait choisi six et les avait abattus devant les autres – "pour encourager les autres, vous comprenez"»
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Au cours du mois d'octobre 1936, les nationalistes concentrèrent leurs meilleures troupes pour une nouvelle offensive sur la capitale à partir du sud-ouest. Leur avancée implacable fit croire que la République était mortellement atteinte, mais la Défense de Madrid devint rapidement partout en Europe le cri de ralliement de tous ceux qui craignaient et haïssaient les forces triomphantes du "fascisme international". Le slogan communiste, "Madrid sera la tombe du fascisme", avait une extraordinaire force émotionnelle et la bataille pour la capitale allait aider le parti à arriver au pouvoir.
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Toute possibilité de compromis (lors des élections de février 1936) avait été ruinée par le soulèvement révolutionnaire de la gauche (en 1934) et sa brutale répression par l'armée et la Guardia Civil. Le ressentiment était trop puissant de part et d'autre pour permettre à la démocratie de fonctionner. Les deux bords employèrent une rhétorique apocalyptique qui canalisait les attentes de leurs sympathisants vers une conclusion rapide et non politique. Largo Caballero déclara: "Si la droite remporte les élections, nous irons tout droit à la guerre civile ouverte." La droite, on ne s'en étonnera pas, réagit de semblable façon.
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[...] ... Le phalangisme différait du nazisme et du fascisme par son caractère profondément conservateur. Mussolini employait des symboles romains et une imagerie impériale dans ses discours pour des raisons de simple propagande. La Phalange, de son côté, recourait à une phraséologie moderne et révolutionnaire tout en demeurant fondamentalement réactionnaire. L'Eglise était l'essence même de la Hispanidad (l'"ibéricité"). Le nouvel Etat "tirerait son inspiration de la religion catholique qui est traditionnelle en Espagne." Les symboles de la Phalange étaient ceux de Ferdinand et d'Isabelle : le joug de l'Etat autoritaire et les flèches de l'anéantissement pour éliminer l'hérésie. Elle ne fit pas qu'emprunter des symboles mais s'efforça de ranimer la mentalité castillane. Le phalangiste était censé être "à moitié moine, à moitié soldat."

Cependant, le mouvement déchiré entre des éléments nationalistes et socialistes, souffrait d'une espèce de schizophrénie. José Antonio attaquait "la banqueroute sociale du capitalisme" et dénonçait les conditions de vie des ouvriers et des paysans. Mais il jugeait que le marxisme était une idéologie répugnante parce qu'il n'était pas espagnol et parce qu'une lutte des classes ne pouvait qu'affaiblir la nation. Le pays devait être solidement uni dans un système où l'employeur ne pourrait pas exploiter l'employé. Tantôt José Antonio faisait de vaines avances en direction du socialiste Prieto et de la CNT. Tantôt il rappelait à Franco la remarque d'Oswald Spengler selon laquelle, en dernier ressort, la civilisation avait toujours été sauvée par un peloton de soldats. Mais une civilisation qui doit être sauvée par des militaires est l'image que se fait un conservateur d'un monde parfait, et non d'un national-socialiste révolutionnaire. ... [...]
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Vidéo de Antony Beevor
Extrait de "D-Day et la bataille de Normandie" de Antony Beevor. Parution numérique le 25 novembre 2020.
https://www.audiolib.fr/livre-audio/d-day-et-la-bataille-de-normandie
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