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EAN : 9782020913676
180 pages
Seuil (13/03/2008)
3.66/5   85 notes
Résumé :
« – Tu sais Papa, moi, quand tu t’es arrêté de parler, j’avais 15 ans. A 15 ans, on a beaucoup de
souvenirs. Je me souviens de tout Papa.
– C’est notre secret ma petite fille…
– C’est quoi notre secret ?
– Que tu saches tout ça, et que moi je ne parle plus.
... Cette fois, je suis décidée. Je parlerai du silence de mon père. Je suis prête, j’en jubile presque.
J’ai même trouvé le titre : Le jour où mon père s’est tu ».
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Comment vivre avec l'ombre d'un père qui s'est tu depuis des années ? Et pas n'importe lequel, puisqu'il s'agit de Robert Linhart, le fondateur de l'Union des jeunesses communistes marxistes-léninistes (UJC), mouvement maoïste créé en 1966, puis de la Gauche prolétarienne avec Benny Lévy, et auteur du très célèbre livre L'Établi qui raconte son expérience de militantisme révolutionnaire au sein des usines Citroën.
Robert Linhart est donc l'une des figures du mouvement révolutionnaire en France dans les années 68. Une tentative de suicide en 1981 l'a plongé dans le coma pendant plusieurs mois, avant de le rendre à la vie quasiment mutique. Sa fille Virginie essaye d'échapper au silence, familial mais aussi médiatique, qui entoure le destin tragique de son père. Faire un livre sur lui, sur son expérience politique, le projet tourne court car elle sent que ses interrogations, si elles concernent son père, portent peut-être davantage sur son enfance et sur la manière dont les choix politiques de ses parents ont façonné les premières années de sa vie.
Les circonstances, puis le début d'une quête, l'amènent à rencontrer les enfants de cette génération 68 dont les parents ont vécu intensément l'utopie politique et révolutionnaire.
Le récit de Virginie Linhart se structure autour de ses interrogations : qu'a-t-il manqué à ces enfants qui passaient après le combat politique de leurs parents ? Quelle vie de famille ont-ils connue ? Comment leur enfance a-t-elle façonné leur rapport à la politique, à l'éducation, au travail ? Quel héritage ont-ils reçu de ces années mouvementées ?
Ce livre est avant tout un recueil de témoignages, ce qui en fait sa force et sa faiblesse. Le style de Virginie Linhart est clair, direct et les réponses qu'elle recueille auprès des gens de son âge sont elles aussi directes, voire grinçantes, et non dénuées d'humour, ce qui atténue la charge de certains propos. L'expérience politique enivrante des parents, leur engagement militant et leur rejet de la société bourgeoise a laissé des traces sur des enfants tiraillés entre les idéaux des adultes et la réalité d'un quotidien qui n'avait rien d'enchanteur et de sécurisant pour les plus fragiles.
Mais, même si le nombre de témoins et leur qualité (presque tous les enfants des grands leaders de ce moment de rupture politique et culturelle ont relevé le défi à l'exception des deux frères François et Pierre Geismar), ces témoignages ne sont passés qu'au crible de l'expérience personnelle de Virginie Linhart.
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Virginie Linhart est la fille de Robert Linhart, un des fondateurs du mouvement maoïste en France. Après une tentative de suicide en 1981, son père s'est muré dans un silence. On comprend que son père était bipolaire. En plein mai 68, il part en vrille et doit être interné en HP pour subir une cure de sommeil. L'auteur cherche à comprendre et entreprend de retrouver les enfants de quelques uns des leaders de mai 68, maoïste comme son père, ou trotskystes, ou anars. Ont-ils vecu la même enfance, comment s'en sont-ils "sortis", quel est aujourd'hui leur rapport à la politique, etc. Cette quête est un peu désordonnée, un peu "idéaliste", mais il n'empêche, c'est une démarche sincère et toujours à la fois modeste et obstinée. Elle rencontre parfois des refus, on lui dit que sa démarche n'a pas de sens ... mais elle persévère et trace ainsi peu à peu une génération de jeunes, enfants de la fameuse "generation 68" (cf les livres de Hamon et Rottman, où d'ailleurs la naissance de Virginie est évoquée !), dont les parents ont bien souvent laissé grandir leurs enfants sans leur accorder beaucoup d'attention. Virginie revient alors vers son père à la fin du livre et c'est sans soute le passage le plus poignant du livre.
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J'ai un goût très modéré (aucun goût pour dire les choses honnêtement ) pour les livres dont le sujet est l'auteur lui-même.
Mais Linhart est un nom qui sonne tellement positivement chez moi (entre Robert et Danièle dont les écrits respectifs sont des trésors pour tout sociologue du travail) que malgré le risque qu'à travers l'histoire De Robert je lise aussi, voire plus encore celle de Virginie, je me suis lancé.
J'en sors (mais est-ce une surprise ?) un peu déçu ; et notamment parce que le titre est un peu trompeur. Malgré quelques passages intéressants, mais trop rapides (et qui donnent envie de vite fermer le livre pour aller voir ce que Patrick Rotman et Hervé Hamon en disent dans Générations), j'ai trouvé beaucoup de redites, sur des points qui plus est qui ne font que renvoyer au mal-être persistant et mal compris de Virginie. J'ai, aussi, peu apprécié cette forme d'impudeur qui s'exprime régulièrement (et qui me fait précisément redouter ce type d'ouvrage) : si je ne doute pas qu'elle puisse avoir une vertu thérapeutique, je ne suis pas certain que les révélations publiques sur la sexualité débridée des uns et des autres, pire encore, les états psychiques de ses proches, soient légitimes : la transparence (si telle pouvait être la justification) : très peu pour moi. Un huis clos autour d'un canapé me semble bien plus digne.

Plus encore, j'ai cru voir dans ce récit une belle occasion de disserter sur l'opposition classique (depuis que Benjamin Constant l'a formulé ainsi) entre la liberté des anciens et celle des modernes, entre ces deux générations, les soixante-huitards et leurs enfants, abordant de manière plus analytique le rapport à la politique, au temps privé et à ce qu'on en fait, à l'éducation, etc. Un beau et vrai sujet de sociologie politique que Virginie Linhart avait amplement les moyens d'exploiter. Dommage (pour moi).
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Robert Linhardt est surtout connu grâce au livre L'établi qui raconte son expérience d'intello allant à l'usine dans les années 1970. C'était la grande mode à l'époque de partager les souffrances des travailleurs pour mieux les sensibiliser au combat politique. Il reste que le témoignage de son expérience dans les usines Citroën est formidablement intéressant (disponible au éditions de Minuit).

Sa fille nous offre dans ce livre un retour très personnel sur 68, les mouvements gauchistes de l'époque, l'évolution des participants et de leurs enfants. C'est un récit très attachant car c'est aussi une recherche sur son père.

Cet homme, brillant normalien, a été un des dirigeants de la gauche prolétarienne (maoïste), très proche de Louis Althusser. Il est devenu mutique et dépressif et sa fille le redécouvre grâce à cette enquête et aux témoignages de ses compagnons de lutte.

Virginie Linhardt nous raconte la période 68 en creux, au travers des témoignages des enfants des militants. Elle confronte sa propre histoire à celles des fils et filles des dirigeants gauchistes de l'époque (Krivine, Geismar, Castro...).

On retrouve pas mal de points communs : les enfants ont été sacrifiés à la Cause, n'ont pas connu de vie familiale structurée, certains ont vécu dans les communautés, mais à tous, les parent ont demandé l'excellence scolaire. Adultes, ils rejettent presque tous le militantisme, sont plutôt progressistes mais donnent une éducation stricte à leurs enfants.

La génération des leaders de 68 a pas mal évolué et s'est aussi embourgeoisée, mais certains sont restés sur le coté de la route, incapables d'évoluer et de s'intégrer à la société. Leurs enfants ont quasiment tous choisi un mode de vie en opposition avec eux, la seule idée qui soit intégrée est le féminisme et l'égalité hommes-femmes.

Tout au long de ce livre, l'auteur découvre les raisons profondes de certains de ses choix personnels et professionnels. Elle se livre avec beaucoup de pudeur et nous dévoile aussi l'évolution de son père brillantissime intellectuel qui a explosé en plein vol.
Lien : http://jimpee.free.fr/index...
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le récit de Virginie Linhart s'attache à interroger les fils et les filles dont les parents engagés politiquement avec son père dans la fin des années 60, avaient vécu cette période. Son père Roger Linhart pionnier du mouvement Maoiste en France c'est muré dans le silence après une tentative de suicide avortée. Sa fille donne la parole aux enfants des compagnons de son père et dresse un portrait original de cette période effervescente. Ces témoignages montre que malgré des enfances loin des sentiers battus chacun s'est finalement construit. Ces rencontres vont permettre aussi à Virginie Linhart de comprendre son père et de trouver la sérénité. Touchant, instructif, émouvant un récit de grande qualité.
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Citations et extraits (51) Voir plus Ajouter une citation
"La jalousie, c'est vraiment de la merde, il faut s'en émanciper, il faut réussir à vivre autrement, le couple, c'est nul..." Dans les communautés où nous passions nos vacances avec nos parents, c'était un leitmotiv. Je me souviens précisément de deux hommes en particulier qui portaient le projet. Et l'un a piqué la femme de l'autre - bien sûr ça ne se disait pas comme ça à l'époque ! Mais le fait est. Cependant, pas de problème, ils sont restés amis et d'ailleurs ils vivent encore ensemble. Après il y a eu une autre femme, pas de problème non plus... Quand aux enfants : ils étaient à tout le monde... Moi ce que j'ai remarqué, c'est que c'était comme une communauté de singes : il y avait un mâle dominant, dont toutes les femmes étaient amoureuses et qui couchait avec toutes, et les autres mâle se faisait arnaquer. L'abolition des rapports de forces était un des thèmes privilégiés en ce temps. Je crois au contraire que les rapports de forces étaient magnifiés ; petite, j'observais ces sentiments, le désir, la jalousie, l'enthousiasme amoureux, et je les décryptais. Ils y avait toujours un gagnant et des perdants.
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et puis cette tentative de suicide en 1981, et depuis le silence. Mon père a arrêté de parler. Il est devenu quasiment mutique...
Roland : Et gentil, surtout ! Alors qu'il était méchant...
Moi : Méchant : Méchant ???
Roland : Oui, méchant, comme tous les gens qui ont une intelligence extrème. J'aimais bien Robert, mais j'étais assez moqueur parce qu'il avait un sérieux un peu ridicule. Ceux qui ont choisi Lacan s'en sont sortis, ceux qui ont choisis Althusser ne s'en sont pas vraiment sortis ! Ton père était un glorieux qui se mettait en danger. Un grand chef de guerre. En même temps, il fait partie de ces gens qui, entre le réel et la théorie, choisissent la théorie. À l'époque, ils étaient tous pris dans le délire des structures, "le sujet était pris dans la structure", ils adoraient ça, c'était une possibilité de manipulation formidable. Ils ont été fous de structuralisme, et d'Althusser. Althusser osant écrire à propos de 68 dans l'Humanité : " Le mouvement est contraire à la théorie"! Sauf que le mouvement était là ! Ils avaient une passion abstraite pour la pensée, surtout celle de Marx : "la pensée de Marx est toute-puissante parce qu'elle est vraie", répétaient-ils ! Ils avaient une passion scientiste pour le marxisme, et ils ont loupé ce qui pointait en 68 : l'individu. Ils se sont enchaînés à une pensée qui n'avait rien à voir avec 68, alors que 68 c'était l'individu déchaîné.
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68 comme façon pour les enfants des juifs rescapés de sortir du statut de survivants, pour affirmer leur appartenance au monde des vivants… (…) Les survivants ne parlent pas. Mes grands-parents se sont tus, mon père également par la suite, et moi aussi, de façon différente pendant longtemps. Je revois soudain tous ces gens que j’ai rencontrés au cours de ma vie, comme ils aimaient me raconter combien mon père était un orateur fascinant, le meilleur, le plus fort, imbattable sur le plan de la rhétorique, on ne parvenait jamais à l’interrompre, on n’avait jamais le dernier mot. C’était douloureux de les entendre. Je comprends maintenant que dans ces années 68 mon père a vécu pleinement dans le monde des vivants, et que c’était bon, et que c’était drôle, et que c’était excitant. Je crois désormais que mon père parlait en ce temps comme jamais dans sa famille personne ne s’était autorisé à parler. Que cela devait être formidable de tant parler, de se soûler de paroles alors qu’il avait été élevé dans le silence. Puis son statut de survivant l’a rattrapé et lui a cloué littéralement le bec. Et le nôtre dans la foulée.
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J'avais plongé dans le roman d'Olivier Rolin, Tigre en papier, qui retrace l'histoire d'une poignée de militants maoïstes de ces années-là. Je m'étais bien sûr identifiée à cette jeune fille qui cherche auprès du narrateur un témoignage sur son père, mort lorsqu'elle était enfant : "Alors toi, évidement, son "meilleur ami" ... tu es le premier témoin appelé à la barre... (...) Dis-moi qui il était. Mais, Marie, je ne peux pas te parler de lui sans te parler de nous. Je ne sais pas comment te faire comprendre ça, on n'était pas tellement des "moi", des "je", à l'époque. Ça tenait à notre jeunesse, mais surtout à l'époque. L'individu nous semblait négligeable, et même méprisable. Treize, ton père, mon ami éternel, c'est l'un des nôtres. Un des brins d'une pelote. Je ne peux pas le débrouiller, le dévider, l'arracher de nous, sinon je le ferais mourir une seconde fois. Sans nous son image se fanerait - sans nous "nous", toutes nos mémoires s'effacent."
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Mais je crois pouvoir dire aujourd'hui que le pouvoir en tant que tel, je n'ai pas le goût pour ça. Or, je suis assez convaincu que pour faire avancer les choses, pour faire des réformes, il faut le pouvoir. Et pour avoir du pouvoir, il faut l'aimer : il faut aimer diriger, aller au conflit, ne pas couper les cheveux en quatre. Il est impossible de réformer sans pouvoir. C'est peut-être la raison pour laquelle les gens de 68 sont nombreux à s'être fracassés sur ces arcanes-là. Je crois vraiment qu'ils avaient une vision du pouvoir qui ne collait pas avec l'idée des réformes. Aujourd'hui, je vois la politique comme quelque chose de moins magique que ce que je voyais avant. J'ai compris que le milieu politique et le milieu intellectuel n'ont pas les mêmes enjeux, ils ne se parlent pas tellement. Et finalement, ça s'explique bien. Pour faire de la politique et des réformes, ce n'est pas la peine d'être un intellectuel ou d'avoir été influencé par les idées d'un intellectuel. Faire de la politique, c'est gouverner une cité au quotidien. Au ministère de l'Éducation nationale, il y a un million de fonctionnaires, trois mille personnes de l'administration centrale, on peut avoir des idées formidables sur les réformes qu'il faut faire, n'empêche qu'il y a des hommes, des habitudes de travail, une culture. Les évolutions sociales et historiques sont très longues. Ou alors on fait comme au Cambodge et c'est la catastrophe. Alors, comme moi ce qui m'intéresse ce sont les idées, j'en suis arrivé à la conclusion que le mieux pour l'instant est d'aller au bout de certaines idées, ce qui est autre chose qu'une note de quatre pages que l'on fait pour le ministre, aussi bonne soit-elle.
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