AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Jean-Christian Bouvier (Traducteur)
EAN : 9782072882517
368 pages
Gallimard (08/10/2020)
4.01/5   170 notes
Résumé :
Devenu veuf, Shigezo est recueilli par son fils et sa belle- fille. Et c'est sur celle-ci, Akiko, que va reposer cette lourde charge, avec les problèmes concrets que cela implique. Mais alors que le vieil homme glisse vers une seconde enfance, elle découvrira qu'il symbolise peut-être l'amour le plus authentique, le plus désintéressé qu'elle ait jamais connu.
Que lire après Le crépuscule de ShigezoVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (37) Voir plus Ajouter une critique
4,01

sur 170 notes
5
15 avis
4
18 avis
3
2 avis
2
0 avis
1
0 avis
Bonjour à tous mes ami(e)s de la Tour de Babel, oui, à chacun son tour, c'est bien ça? ;-)
De retour d'une semaine de froid en Ariège, mais on s'en fout, tout est beau en Ariège même le froid surtout quand il neige et que les Pyrénées s'ornent de belles calottes blanches!

Je vais donc vous parler de ma dernière lecture, une petite japonaiserie, eh oui, encore une! Un roman que j'ai beaucoup apprécié :
Le crépuscule de Shigezo, écrit à l'époque où on ne connaissais pas encore ce que l'on appelle à présent la maladie (on pourrait même dire tous les troubles) Alzheimer. On disait que les vieux perdaient la tête, on parlait de démence sénile, de retour en enfance.
Le principal personnage de ce roman n'est pas Shigezo mais sa belle fille, Akiko. C'est elle qui va subir les terrifiantes conséquences du vieillissement rapide de Shigezo qui devient de plus en plus dépendant. Elle va y perdre toute son autonomie, elle qui se voyait en femme autonome, heureuse de pouvoir exercer un métier!
Ce livre traite bien sûr du vieillissement de ces personnes agées dans le Japon des années 60, problème qui va apparaître de plus en plus crucial pour un pays à la population viellissante.
Mais c'est, à mon avis, surtout un récit sur la condition de la femme qui, à cette époque, est encore soumise à une tyrannie qui cache son nom. Ce n'est pas le fils de Shigezo qui va s'occcuper de son père, ce n'est pas lui qui va arrêter de travailler pour veiller sur ce vieux qui ne cesse de fuguer et commettre des actes insensés!
C'est la pauvre Akiko qui va s'occuper de torcher son beau-père, de trouver des solutions afin qu'il ne soit jamais isolé quitte à ce qu'elle arrête de travailler.

Roman écrit avec beaucoup de finesse, beaucoup de délicatesse et qui aborde ces sujets douloureux avec une grande sensibilité!
Merci à mon pote Jérôme pour m'avoir donné envie de lire cette belle histoire!
Je le recommande sincèrement!
Commenter  J’apprécie          5330
Akiko, dactylo dans un cabinet d'avocats, vit avec son mari et son fils dans un quartier tranquille de Tokyo. Très organisée, elle réussit tant bien que mal à concilier travail et famille. Quand sa belle-mère décède brutalement, ce fragile équilibre est mis à mal par les soins nécessaires à Shigezo, son beau-père. A quatre-vingt-quatre ans, Shigezo était jusque-là un homme égoïste et acariâtre qui n'avait jamais de mots assez durs pour critiquer sa belle-fille. Désormais, il est atteint de sénilité et ne peut plus vivre seul. Démunie face l'administration japonaise qui offre très peu de solutions pour accueillir les personnes âgées, Akiko est contrainte de mettre sa carrière en pause pour veiller sur lui. La charge est lourde mais heureusement le caractère de Shigezo s'est adouci, il se comporte dorénavant comme un enfant docile et un lien privilégié se crée entre eux.

Dans ce magnifique roman, Sawako Ariyoshi traite du difficile sujet de la prise en charge de la vieillesse dans la société japonaise des années 70. Les structures pour accueillir les personnes âgées sont rares, la tradition voulant que les plus jeunes s'occupent de leurs aînés. Mais les mentalités ont changé, Akiko n'est pas une femme au foyer. Elle aime son travail même s'il l'oblige à jongler avec ses responsabilités d'épouse et de mère. Car, si on accepte dorénavant que les femmes exercent une activité professionnelle, la famille reste traditionnelle. Il ne viendrait jamais à l'idée de son mari de faire la cuisine ou le ménage ou de s'occuper de son père. Donc quand Shizego n'est plus capable de vivre seul, la question ne se pose même pas. Akiko va devoir se sacrifier pour s'occuper de lui. Ses jours et même ses nuits sont entièrement consacrés à son beau-père dont l'état se dégrade rapidement. Modèle de dévouement, elle s'interroge aussi sur son avenir, l'allongement de la durée de vie, sa propre vieillesse et la peur d'être un jour un poids pour son fils.
Cinquante ans après son écriture, ce roman est toujours d'actualité et la charge mentale des femmes n'a pas changé. S'il est souvent dur, il est aussi plein de tendresse et d'humilité et rend un vibrant hommage aux capacités d'abnégation, de résilience, d'adaptation et de don de soi des femmes.
C'est cru, réaliste mais aussi tendre et poétique. Une belle leçon de vie.
Commenter  J’apprécie          534
S'il est vrai que "la vieillesse est un naufrage", ainsi qu'a pu l'imager le général De Gaulle avec la pertinence qu'on lui connaît, Sawako Ariyoshi nous entraine quant à elle avec beaucoup de réalisme sur cet esquif de perdition qu'est la sénilité.

"Face à la vieillesse, il faut que quelqu'un fasse des sacrifices". Cette affirmation, son héroïne Akiko se l'est entendu dire par l'administration nippone en charge des personnes âgées. Une manière de lui faire comprendre que le Japon des années 70 n'avait pas anticipé l'augmentation de la durée de vie et que ses structures d'accueil étaient débordées. Un problème qui reste plus que jamais d'actualité dans les pays développés. L'heureuse perspective d'une espérance de vie allongée n'est pas sans avoir de nombreuses contre parties. Sawako Ariyoshi ne nous en épargne aucune. Ce qui fait de ce roman un véritable mémoire sociologique sur les inconvénients de l'allongement de la durée de vie, la prise en charge des personnes qui du troisième âge sont devenues celles du quatrième.

Vivre vieux est une chose, le faire en bon état de santé physique et mentale en est une autre. le supporter économiquement par la société encore une autre. Même si je reconnais l'excellente qualité de cet ouvrage, je ne dirai pas qu'il est un bonheur de lecture tant rien ne nous est épargné des affres de la vieillesse y compris les plus avilissantes.

Le crépuscule de Shigezo nous projette dans le contexte de la société japonaise des lendemains de la seconde guerre mondiale. Si cette société ressort traumatisée de l'ère des catastrophes dans laquelle l'a projetée un régime archaïque tyrannique et se confronte alors à la mutation soudaine de son ouverture à la culture occidentale, elle n'en est pas pour autant déjà débarrassée de ses traditions et coutumes ancestrales, en particulier pour ce qui concerne le statut de la femme et la considération due aux anciens.

Les occidentaux du 21ème siècle ont fait de leurs ascendants vieillissants des fardeaux dont ils se déchargent volontiers dans les mains d'établissements spécialisés. La cohabitation des générations sous le même toit est désormais exceptionnelle. Ces mêmes occidentaux ne peuvent donc que s'ébahir au spectacle de l'investissement, tournant au sacrifice, d'une femme cumulant vie familiale et professionnelle au profit d'un beau père sénile. le père de son époux allant jusqu'à troubler ses nuits de sommeil avec ses turpitudes et autres corvées d'hygiène qu'imposent les incontinents. Belle et surprenante abnégation à l'égard d'un homme autre fois odieux avec elle, un homme qui n'avait de cesse de la dénigrer par le passé.

Cet ouvrage aborde tous les aspects de la prise en charge de la vieillesse sans omettre dans la réflexion des enfants la perspective de leur propre fin de vie, au spectacle de la déchéance qui amoindrit leur parent. Ce qui fait dire au mari de Shigezo que les hommes devraient disparaître dès le jour de leur départ à la retraite, les femmes étant en son esprit plus à même de supporter la solitude et perspective d'une vie improductive pour la société. Expression du machisme nippon quant à la place qu'il avait attribuée à la femme dans la société, la famille. Machisme dont le but est surtout de faire écran à un défaitiste patent, et inavouable.
Mais cet ouvrage n'aborde heureusement pas la vieillesse que sur un plan physiologique ou sociologique. Akiko s'avère être d'une exemplarité de dévouement rare et finit par s'attacher à ce vieillard à qui la sénilité a redonné des comportements d'enfants attendrissants. Même si un soupçon de superstition motive son engagement au service du vieil homme, qu'elle envisage "comme une sorte d'initiation religieuse ou d'illumination […] au service d'un dieu vivant", l'attachement réciproque du vieillard et de sa belle fille finit par trouver des accents de sincérité dans la solitude qui est la sienne face à un époux qui manque de solidarité face à l'épreuve.

S'il faut savoir faire face à tous les stades de la vie et assumer ce que notre nature nous impose de dégradant autant que de sublime, alors cet ouvrage de Sawako Ariyoshi est non seulement un hommage à la force de la femme dans la confrontation avec les épreuves de l'existence, mais aussi un regard lucide sur cette courte période, ce périple terrestre, au cours de duquel une âme trouve refuge dans un corps, et puis s'en va.
Commenter  J’apprécie          402
Shizego, rigide patriarche élevé à l'ère Meiji, ne pouvait apparemment pas saké sa bru Akiko mais depuis qu'il a de la fuite dans les idées, elle semble être sa seule référence. Cette femme moderne, qui ne veut pas être une femme au foyer, va se dévouer pour prendre en charge ce barbon lorsque sa belle-mère décède brutalement. Un vieillard qui doit être nourri, occupé, couché, recouché, rerecouché, lavé, torché, soigné… Et bien sûr, il y a le reste : son métier, son fils lycéen, les autres tâches de la maison. Des coups de main ? Oui, parfois… Son mari ? le fils de Shigezo donc… Pétrifié par cette image de ce qu'il risque de devenir, il est aussi efficace à gérer le quotidien qu'un énarque ne l'est à nettoyer une écurie. Akiko, aussi, se pose des questions sur le déclin mais elle agit surtout. Alors Akiko est harassée…
« Le crépuscule de Shigezo » est un roman sur la difficulté inhérente à la prise en charge de la dépendance, une chronique féministe qui dépeint avec minutie les contraintes du quotidien dans une société qui répond mal aux attentes des citoyens en général et des citoyennes en particulier.
L'originalité de ce roman tient d'abord au fait, vous l'aurez compris qu'il se situe au Japon. Ce pays fut le premier état, à l'exception du Vatican qui demeure un cas à part, à être confronté au vieillissement de sa population. le crépuscule des vivants au pays de soleil levant : quelle ironie ! Ce petit bijou, ce récit si simple et si universel, écrit en 1972, (mais réédité en 2018 précision ignorée dans la présentation de Babelio) est d'une étonnante actualité par sa réflexion sur les enjeux sociétaux et intimes liés au grand âge. La démence sénile étant l'aspect le plus douloureux. En 1972, c'était le terme qui désignait cette altération du discernement dans les cabinets médicaux avant que la maladie identifiée par Alois Alzheimer ne devienne un terme quasi-générique. Dans la famille, nous utilisions une formule plus imagée « Il n'a plus sa tête », terrible métaphore pour les enfants d'alors.
Vertige de la littérature, il est émouvant de penser qu'Akiko, aujourd'hui, est peut-être la pensionnaire d'un de ces Ehpad nippons où le personnel est essentiellement constitué de robots. Dommage que Sawako Ariyoshi soit morte si jeune, le crépuscule d'Akiko aurait, sans nul doute, constitué un autre magnifique livre.
Commenter  J’apprécie          4510
« Bonjour les Babélionautes ! Aujourd'hui, on part au Japon avec un roman signé par Sawako Ariyoshi, le crépuscule de Shigezo.

Or donc, quelle vie active que celle d'Akiko ! Elle travaille à temps plein, garde sa maison impeccable et cuisine pour son époux et son fils qui termine le lycée. Sa belle-mère meurt brutalement et la charge de Shigezo, son beau-père dur et mauvais devenu gâteux, échoit désormais à sa famille… Comment s'en sortir, aussi bien sur le plan psychologique que financier ?

-Bah tu galères, voilà comment tu t'en sors.

-Tu as raison ! Mais avant, je dois dire que j'ai été frappée du portrait de famille. J'ai l'impression de gens qui cohabitent sans éprouver de sentiments forts les uns pour les autres parce qu'ils n'en ont pas le temps. Akiko se consacre sans faiblir à une multitude de tâches, Nobutoshi, son mari, est absorbé par son emploi, Satoshi, le fils, prépare son entrée à l'université… Ils vivent ensemble, sans avoir le temps de parler. Chacun reste un peu isolé des autres.

Le roman dresse également un état des lieux de la vieillesse au Japon avec son lot de difficultés : le manque de structures, de solutions, la détresse des ménages modestes démunis face à une situation accablante. J'avais lu Les dames de Kimoto sans comprendre pourquoi un bandeau présentait l'autrice comme la Simone de Beauvoir du Japon.

Je le saisis mieux avec ce roman : Sawako Ariyoshi expose comment une situation va affecter la vie d'une femme. Il est attendu qu'Akiko se sacrifie pour Shigezo. Elle est vampirisée par ses obligations familiales et se retrouve déchirée entre ses aspirations et ses contraintes.

-Quelle déprime, ce bouquin…

-Hé bien non, justement. Oui, la vie d'Akiko plonge toujours plus loin dans la difficulté, mais reste teintée d'ambivalence, entre dégoût, tristesse, rite initiatique et superstitieux. Shigezo devient un enfant, un poids, mais aussi un dieu qu'on ne peut pas négliger. Un dieu incompréhensible, mystérieux, dépendant d'elle pour exister.

-Déidamie, tu divulgâches, vilaine moche !

-Meuh non, c'est en quat' de couv' et c'est l'un des enjeux du texte !

Akiko va finir par éprouver une forme d'amour pour cet être qui autrefois la maltraitait. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Saint-Exupéry et au Petit Prince : « C'est le temps que tu as perdu pour ta rose qui rend ta rose si importante. » Plus elle prend soin de lui, plus il prend de l'importance.

Et, détail non négligeable, le roman exploite le sens de l'odorat ! Un de plus à ma collection !

-Ah oui, super ! Odeurs d'urine, d'excréments, de pourriture… si vous êtes trop sensible à ça, ne lisez pas ce roman, vous en prendrez plein le nez. Pas d'odeur positive pour équilibrer un peu !

-Pas faux… Quoi qu'il en soit, je me réjouis d'avoir rencontré les livres de cette autrice ! le crépuscule de Shigezo constitue un objet hybride entre l'exposé et le roman, écrit avec finesse et intelligence. Passionnant, à mon humble avis. »
Commenter  J’apprécie          331

Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Depuis qu'elle vivait près du vieux couple, elle savait qu'un jour elle connaîtrait l'épreuve du deuil, mais confrontée à la réalité de la mort, elle n'avait pas ressenti la grande douleur attendue dans ces cas-là. Elle avait tout simplement découvert que mourir coûtait cher... (p. 59)
Commenter  J’apprécie          160
On prétend souvent que les hommes perdent leurs moyens physiques et que les femmes partent du cerveau, mais ce n’est pas vrai. Eux, ils restent inactifs à la maison après la retraite mais, nous, nous continuons à faire travailler nos muscles et notre cerveau avec la lessive et la couture. C’est pour ça que les femmes sont rarement gâteuses. Quoique avec les machines à laver automatiques, qui sont peut-être bien pratiques, je ne dis pas le contraire, les femmes dans le futur risquent fort de vieillir plus vite.
Commenter  J’apprécie          81
"Est-ce que les femmes d'autrefois avaient été contraintes d'être ainsi les esclaves patientes de leurs maris? La vie de sa belle-mère supportant jusqu'au bout en secret la sénilité de son mari s'était arrêtée tout à coup par un jour de neige, sans une plainte et sans un regret. Mais pouvez t-on appeler cela une "vie"? Les femmes désormais n'accepteraient plus de se sacrifier... "
Commenter  J’apprécie          101
Tout le monde est d'accord au centre : si M. Tachibana est devenu sénile, c'est qu'il n'a pas fait travailler son corps ni son cerveau. Il devait être fainéant autrefois, voilà ce que l'on dit. Si on se maintient en forme, on peut faire reculer l'échéance mais, lui, il a dû faire travailler sa pauvre femme et se tourner les pouces pendant des années ! On prétend souvent que les hommes perdent leurs moyens physiques et que les femmes partent du cerveau, mais ce n'est pas vrai. Eux, ils restent inactifs à la maison après la retraite mais, nous, nous continuons à faire travailler nos muscles et notre notre cerveau avec la lessive et la couture. Quoique avec les machines à laver automatiques, qui sont peut-être bien pratiques, je ne dis pas le contraire, les femmes dans le futur risquent fort de vieillir plus vite. p150 et 151
Commenter  J’apprécie          20
A l'époque féodale, les paysans étaient maintenus dans un état de subsistance minimale. C'est pareil avec la médecine d'aujourd'hui, elle empêche les vieillards de mourir sans les faire vivre pour autant. p.287
Commenter  J’apprécie          100

Videos de Sawako Ariyoshi (20) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sawako Ariyoshi
Les dames de Kimoto
autres livres classés : vieillesseVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (518) Voir plus



Quiz Voir plus

Les mangas adaptés en anime

"Attrapez-les tous", il s'agit du slogan de :

Bleach
Pokemon
One piece

10 questions
888 lecteurs ont répondu
Thèmes : manga , littérature japonaiseCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..