Ce court roman saisit, comme par inadvertance, un bout de vie d'un couple, englué dans la pauvreté, confronté à sa survie.
Heinrich Böll laisse alternativement s'exprimer ses deux protagonistes au fil de leurs déambulations dans les rues sales de leur ville détruite par les bombardements. Sans misérabilisme. le mal à vivre sourd néanmoins de chaque ligne. Tout semble vain...for ce qui pourrait ressembler à l'amour humain à moins que ce ne soit la peur ou la lassitude d'être seul. Très humain, en tout cas.
Découvrant Böll, j'apprécie, ici, l'économie de moyens et in fine l'efficacité avec lesquelles il préempte puis rend à son lecteur son attention, libre à ce dernier d'en faire l'usage qui lui plait. Ressentir, réfléchir...
Comme souvent semble-t-il, dans cette situation la femme tente de sauver ce qui peut l'être, le sort des enfants notamment, tandis que l'homme se laisse glisser vers l'inactivité, l'alcool, le jeu...
Käte et Fred ne font pas exception au cliché.
On arguera qu'ici la guerre a brisé l'homme. On le serait à moins.
Mais ce pourrait être aussi bien le chômage, la faillite,... : on nous a invité jusqu'à présent à considérer que l'homme, compte tenu de ce qu'il pense, à tort ou à raison, que la société attend de lui, pâtit, plus que la femme, de la remise en cause de son centre de gravité social, ce qui contribuerait à la dissymétrie des comportements.
Soixante ans plus tard, ça a bougé!
Ce livre fera peut-être prochainement figure de témoignage d'un passé révolu.