Un cas intéressant d'après Dino Buzzati

Giovanni Corte semblait sain de corps et d'esprit et ne paraissait pas dédié à passer des jours et des jours à l'Hôpital.
Ce chef d'entreprise, à l'agenda bien rempli, n'imaginait pas qu'un mal surprenant allait l'emmener dans un maelström inextricable.
Certes, il entendait des voix que seul lui entendait.
Sa fille allait lui proposer de l'emmener à la clinique du Docteur Schroeder pour une visite simple. Dans ce lieu à 6 étages, on traitait les maladies légères au dernier niveau, et les cas ultimes au premier.
Notre Giovanni Corte, installé, bien entendu au 6ème, pensait n'être là que quelques heures. Eh bien non. Il voyait passer régulièrement médecins et infirmières lui indiquant qu'il ne pouvait rester à cet étage et qu'il devait descendre. Attention, il n'était, soit-disant pas plus malade qu'avant, c'était juste pour des histoires de congés ou bien de déménagement.
Toujours est-il que notre Corte se voyait descendre au fur et à mesure vers le bas. Et les véritables maux commençaient à arriver.

Voilà une fable caustique, drôle proposée par Camus bien enlevée. On ne s'ennuie pas pendant la lecture.

Un cas intéressant est l'adaptation en français par Camus d'une pièce de théâtre de Buzatti, elle-même basée sur sa nouvelle Sette piani (Sept étages).

Corte, un homme d'affaires prospère et accaparé par son travail, entend parfois des voix, mais cette manifestation est sans doute attribuable à la fatigue. Sa famille lui suggère tout de même de consulter un médecin, qui lui conseille de passer un examen de routine, lequel entraîne une hospitalisation, juste pour voir, au cas où. La clinique spécialisée qui l'accueille a la particularité de répartir les patients selon la gravité de leur mal, du plus bénin au dernier étage au plus sérieux au premier. D'abord admis au sixième étage, Corte est contraint de changer de chambre, un étage après l'autre. Est-il victime d'une maladie sournoise et foudroyante, d'une suite de malheureux malentendus, d'un complot ?

Comme le cas du titre, la pièce est intéressante, mais elle m'a un peu laissée sur ma faim. Un univers quelque part entre le Procès de Kafka et La montagne magique de Mann, à petite échelle.

Étant une inconditionnelle de Buzzati, je ne pouvais qu'apprécier ce livre. Ce qu'en a fait A. Camus est vraiment très bon. On peut comparer cette oeuvre à Kafka: le supposé malade se fait soigner et il ne sait pas pourquoi il est hospitalisé . Sa situation mentale va se dégrader continuellement jusqu'à ce qu'il accepte sa condition sans rien faire. Il est pris dans une spirale. A lire.

Formidable petit bouquin où Dino Buzzati nous fait un Docteur Knock à sa manière. Un hôpital Kafkaïen où tout se ligue, mais de manière si anodine, contre la volonté du patient. Celui-ci s'affaiblit à chaque changement d'étage, comme si c'était ici le lieu qui détermine la gravité de la maladie et non l'inverse. La fin est glaçante, où le patient n'a plus la force de suivre ses sauveurs.