Le livre de poche "Belles saisons" reprend le "Discours de
Colette à l'Académie Royale de Belgique" (paru en 1936 chez Grasset), "Mes cahiers" paru aux Armes de France en 1941, "Nudité" édité par la Mappemonde en 1943, "Belles Saisons I et Belles Saisons II" - Galerie Charpentier en 1945 et les "Derniers écrits".
Quelques extraits...
Belles saisons I "Ôtez de ma portée le visage humain et tout est changé. Il était donc le seul responsable de tant de fatigue, de tant d'intolérance? Sa bienveillance, sa courtoisie, la rapidité éblouissante de ses réflexes, et leur éloquence, -vient un moment de l'année où je n'en puis plus de les voir. Avant de le quitter, je l'ai trouvé prodigieux. "Comment peut-il me sourire si longtemps?" m'écriais-je en moi-même. Cependant je lui souriais pareillement. Nous allons jusqu'au bout de nos forces, pour la gloire machinale de mentir et de ne faire de peine à personne."
Belles saisons II "La comtesse de Noailles, chez qui j'eus accès quelquefois le matin, pendant qu'elle se reposait de ses nuits courtes et pénibles, détaillait avec malice ma tenue d'avant et d'après-midi : "Ma chère, disait sa voix incisive, vous verrai-je un jour sans votre feutre de braconnier, et votre costume de vieux chasseur, humide de brume et de pluie? -Il n'y a guère ce chances, répondais-je. Je crois que je suis habillée pour le reste de ma vie, d'une étoffe qui ne craint ni l'eau ni le soleil, et mes feutres valent tous les parapluies du monde."
Nudité "A force de jouer les statues, la femme nue, crépie de la tête aux pieds, tourne au marbre. Se reposent-elles dans leurs loges? Elles ne s'y risquent guère. Une chaise de paille ou de bois marque les fesses et raye les cuisses. Les genoux ne doivent pas perdre leur enduit de perle, et de tout contact appuyé se lève sur la peau un halo rouge. L'engagement que signe une dame nue lui interdit le port d'une gaine, mais ne mentionne rien sur l'état de ses orteils... Toujours est-il qu'aujourd'hui une dame nue est une dame sans vêtements, tandis que vers 1905 j'ai connu une "danseuse nue" qui en passant devant ma loge me montrait son fardeau de verre et de métal, de bracelets de cheville et soupirait :"Sept kilos!". C'est le poids maintenant d'une bicyclette.
Mes cahiers - "Notes de tournée" qui nous emmène de Nevers à Saint-QuentinSaint-Quentin en passant par Auxerre, Dijon, Nancy, Nîmes, Pau, Lourdes, Bayonne, Bordeaux, Lorient, Brest, Rennes, Caen, Evreux, Rouen, Amiens, Douai, Lille, BlankenbergeBlankenberge, Liège... "Pour faire une bonne tournée, une tournée vraiment agréable, il faut... Oui, je sais, il faut un nom connu, un talent consacré par la Ville)Lumière, voire une vedette un peu scandaleuse..." Qui vous parle de ça? Pour faire une bonne tournée, il faut une santé solide, une humeur à toute épreuve, des nerfs point surmenés, un estomac et un intestin bien disciplinés, et surtout cette sorte de nonchalance optimiste, ce fatalisme qui fait, d'une troupe en tournée, une caravane de pèlerins où la foi, latente, endormie, se manifeste rarement, mais suffit pourtant à les conduite, de station en station, vers le but jamais atteint, vers le repos..."
Discours de Réception à l'Académie Royale Belge - "N'allez pas me plaindre de ce que la soixantaine me trouve encore étonnée. S'étonner est un des plus sûrs moyens de ne pas vieillir trop vite." "Mon instinctif penchant qui se plaît à la courbe, à la sphère et au cercle... Tendre vers l'achevé, c'est revenir vers son point de départ...
Derniers écrits - "Tu es là, besoin décrire? Tu es bien là, nécessaire, membru, typique, tu es toujours là? Je te percute, je tâte ta présence. Quelle méfiance n'eus-je pas de toi -et de moi- durant que je souhaitais avoir fini d'écrire?