Impossible de ne pas connaître
Jean Jaurès. Que ce soit grâce aux rues qui portent son nom ou aux nombres incommensurables de fois où nos politiciens de tous bords confondus y font référence.
2ème stade, pour les plus futés d'entre nous, on peut associer son nom à celui d'
Emile Zola dans l'affaire Dreyfus, à une position anti-guerre avant 1914 (ce qui lui coûtera la vie : la preuve que la liberté d'expression en France n'a jamais été absolue que dans les esprits des plus idéalistes) et à son assassinat.
Dans ce petit recueil à destination de jeunes ados,
Didier Daeninckx imagine un dialogue, une amitié naissante entre deux soldats dans les tranchées. L'un est un simple soldat, Gaston Lallemand, et le second, son commandant n'est autre que Louis Jaurès, le fils du fameux politicien si souvent soumis à l'opprobre du peuple et de ses dirigeants.
Le texte est fait majoritairement de dialogues, ce qui rend le récit très dynamique. L'auteur n'a bien sûr pas fait l'impasse sur des citations du grand homme - et pour notre plus grand plaisir.
Cette lecture instructive permettra aux jeunes de découvrir que cet homme a été de tous les combats où l'injustice s'installait : des marins avec le Titanic, à l'affaire Dreyfus en passant par les Arméniens de l'empire ottoman. A la fin de cette lecture, difficile de ne pas sentir un peu d'amertume dans le fait que les politiciens qui se gaussent de défendre l'héritage des principes de
Jean Jaurès sachant à quel point cet homme a été traîné dans la boue par la presse et les dirigeants - dont
Charles Péguy pour ne citer que lui, dont on a souvent donné le nom à des rues malgré le fait qu'il ait clairement appelé au meurtre de Jaurès car ses positions pacifistes étaient vues comme une trahison à la patrie pour cet homme au nationalisme exacerbé.
Certes, les principes que Jaurès défendait sont universels et ne devraient pas être mis dans un camp politique ou un autre.
Et lorsqu'on voit comment lui et sa famille ont été traînés dans la boue avec un cynisme des plus honteux (longtemps même après l'Armistice) alors que la postérité a donné raison à beaucoup de ses positions, on se dit que la France n'a fait que vouloir mettre la poussière sous le tapis en transférant ses restes au Panthéon.
En fait, Jaurès est une autre facette "peu glorieuse" de l'Histoire de France, et l'ironie du sort veut qu'aujourd'hui il serve d'alibi.