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EAN : 9782330029425
220 pages
Actes Sud (26/02/2014)
4.09/5   65 notes
Résumé :
Notre démocratie représentative est aujourd’hui clans une impasse. Sa légitimité vacille : de moins en moins de gens vont voter, les électeurs font des choix capricieux, le nombre d’adhérents des partis politiques est en baisse. En outre, l’efficacité de la démocratie est violemment mise à mal : toute action énergique de l’exécutif devient problématique, les hommes politiques adaptent de plus en plus leurs stratégies en fonction des échéances électorales. Cet état d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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La "démocratie" représentative élective présente de nombreux défauts :
– La durée limitée des mandats encourage les élus à prendre des mesures à court terme qui ont l'apparence de l'efficacité plutôt des mesures à long termes à l'efficacité réelle.
– La fin du mandat d'un élu est gaspillé car il fait campagne pour sa prochaine réélection.
– L'élection était considéré par Aristote et Montesquieu non comme un processus démocratique mais oligarchique, car il ne peut conduire qu'à favoriser les classes sociales les plus élevées. Ce processus a été choisi par ceux qui ont écrit la constitution dans la plupart des pays européens, c'est à dire la bourgeoisie. Faire de la politique demande du temps, de l'argent et de l'éducation, tout ce qui est hors de portée des pauvres. Aujourd'hui on constate bien qu'être politicien n'est pas être au service du peuple, mais au service de soi-même, car il s'agit d'une carrière professionnelle comme une autre, un moyen pour l'individu d'acquérir de l'avancement après être sorti des grandes écoles, créant une caste à part qui, quelque soit leur parti, contrôle tous les pouvoirs et n'ont aucune raison de prendre des mesures qui iraient contre leurs intérêts personnels.
– de fait, les élus, souvent juristes, avocats, entrepreneurs, ou banquiers, ne sont pas représentatifs de leurs électeurs, donc peu légitimes mais aussi peu efficaces pour régler les problèmes des autres classes sociales dont ils ignorent l'existence ou se fichent complètement.
– le pouvoir réel du peuple se limitant au vote, il redevient impuissant une fois l'élection passée.
– L'élection ne permet pas de sélectionner "le meilleur" candidat ; que faire quand tous sont aussi mauvais ?
– L'élection d'un candidat, d'un parti, ne permet pas aux électeur d'exprimer leur pensée de manière nuancée ; être forcé d'accepter tout un paquet d'idées, plutôt que sélectionner précisément celles que l'on souhaite, nuit à l'efficacité du régime.
– Ce régime est facilement corruptible
Elle n'est plus adaptée à la société du 21ème siècle :
– Elle n'a jamais été conçu pour supporter des partis politiques. L'assemblée était censée être un espace de débat pour se mettre d'accord, or les partis ont pour effet de fanatiser leurs propres membres autour de quelques idées fixes, sans pouvoir en débattre avec les partis adverses, transformant l'assemblée en espace de clivages plutôt que de débats, et empêchant les partis de faire évoluer leurs propres idées.
– le battage médiatique, qui fait une montagne de quelque chose d'insignifiant et cherche plus le spectacle que l'information, mène les élus à se prêter au jeu et à se donner en spectacle en vue d'améliorer leur image pour la prochaine élection ; les politiciens se décrédibilisent chaque fois qu'ils ouvrent la bouche. Ils prennent des mesures spectacles pour nourrir le spectacle médiatique dans un but électoral, donc qu'on élise les "meilleurs" ou pas, l'inefficacité et la préférence aux intérêts personnels s'enracinent dans le paysage politique.

(Et à titre personnel je rajouterai que quand les grands médias, dont certains rachetés par des groupes financiers, diffusent le même genre de propagande libérale et influencent à la fois l'électeur et l'élu, on a un nouveau problème.)

Mon résumé est grossier et j'en ai sûrement oublié ; le procès de la procédure électorale est chargé ; sa légitimité est douteuse et son efficacité aussi, non seulement aujourd'hui, dans la pratique, mais aussi sur le papier, avant même son existence. La croyance selon laquelle démocratie=élections est devenu un dogme ; on y réfléchie plus, on nous l'enseigne depuis tout petit ; un dogme qui se montre dangereux lorsqu'on l'exporte par la force dans des pays déstabilisés où il va amplifier les conflits.
Plus personne ne croit que voter change quoi que ce soit, mais beaucoup le font encore. L'école nous apprend que l'on a "des droits et des devoirs" ; évidement, élire un aristocrate au service des riches fait partie des devoirs.

En solution à ces problèmes, l'auteur se penche sur la démocratie représentative par tirage au sort, qui a été utilisé avec succès à Athènes et à Florence pendant deux siècles consécutifs chacune. Quand on parle de tirage au sort, les gens ne veulent pas en entendre parler, ils croient qu'on va tirer le président au hasard ; ce n'est pas du tout ça. Il s'agit de réunir des centaines ou des milliers de citoyens pris au hasard, de manière à obtenir un échantillon représentatif de la population, en les rémunérant pour que les pauvres participent aussi, et en leur offrant un espace qui leur permet de débattre et de délibérer. Ce système offre à chacun les mêmes chances de peser sur la politique de son pays, et des mandats courts permettent de faire tourner une grande partie de la population ; les femmes participeraient autant que les hommes, et les nombreux pauvres pèseraient plus que les quelques riches. Je crois que ça pourrait même être le ciment d'une nouvelle cohésion sociale, plus efficace que le service militaire et moins malsain.
Seuls les postes nécessitant des compétences spécifiques seraient sujets à élection. La population serait plus investie dans la politique puisque elle y participerait vraiment. Ce régime serait plus légitime vis-à-vis du peuple, et moins corruptible. Quant à la compétence des sélectionnés, des expériences grandeur nature au Canada, en Islande, en Irlande, au Pays-Bas, montrent que celle-ci s'acquiert en débattant sur les sujets en question et qu'au besoin on peut former les jurés auprès de spécialistes. Lorsqu'on traite les gens en adultes capables de réflexion, au lieu d'une masse bête à laquelle il faut mentir pour son bien, ils se comportent en adultes qui réfléchissent et produisent des résultats concrets. le tirage au sort est aujourd'hui utilisé pour sélectionner les jurés d'assises sans que cela pose problème ; pourquoi ne pas faire de même pour écrire et voter les lois ? Il ne s'agirait pas de copier le régime d'Athènes au Ve siècle avant notre ère, mais de s'en inspirer pour créer quelque chose d'adapté à notre besoin actuel de participation à notre propre démocratie. Des modèles qui utilisent la tirage au sort et qui fonctionnent, on pourrait en imaginer des dizaines ; la phase délicate serait plutôt la transition d'un modèle à l'autre, mais l'élection pourrait coexister avec le tirage au sort ou la participation volontaire.

Pour citer l'auteur lorsqu'il se résume brièvement :
« – Il faut prendre conscience que les raisons invoquées aujourd'hui contre des citoyens tirés au sort sont souvent identiques à celles avancées autrefois contre le droit de vote pour les agriculteurs, les ouvriers ou les femmes. A l'époque aussi, ceux qui s'y opposaient prétendaient que c'en serait vraiment fini de la démocratie.
– Un Parlement élu dispose sans aucun doute de plus de compétences techniques que s'il était tiré au sort. En revanche, chacun est le spécialiste de sa propre vie. A quoi bon avoir un Parlement composé de juristes très qualifiés, si peu d'entre eux connaissent encore le prix du pain ? Avec le tirage au sort, on obtient un meilleur échantillon de la société au sein du corps législatif.
– Les élus ne sont pas toujours compétents non plus. Sinon, pourquoi auraient-ils des assistants, des chercheurs et des bureaux d'études à leur disposition? Comment se fait-il que les ministres puissent du jour au lendemain changer de ministère? Ne serait-ce pas uniquement parce qu'ils sont entourés d'une équipe professionnelle qui leur offre ses compétences techniques?
– Une représentation nationale tirée au sort ne serait pas laissée à elle-même : elle pourrait inviter des spécialistes, compter sur des modérateurs et se renseigner auprès des citoyens. de plus, elle se verrait accorder un certain temps pour se familiariser avec son travail et une administration pour se documenter.
– Comme les citoyens tirés au sort n'ont pas à se préoccuper du fonctionnement d'un parti, à mener campagne et à intervenir dans les médias, ils disposent de plus de temps que leurs collègues élus dans l'autre chambre législative. Ils peuvent se consacrer pleinement à leurs travaux législatifs : acquérir une bonne connaissance des dossiers, entendre des spécialistes, délibérer entre eux. [...]
- Les jurys de citoyens tirés au sort pour se prononcer lors d'un procès montrent que, généralement, les gens prennent leur tâche très au sérieux. La crainte qu'un hémicycle se comporte de manière imprudente et irresponsable n'est pas fondée. Si nous sommes d'accord pour que douze personnes décident en leur âme et conscience de la liberté ou de l'incarcération d'un concitoyen, nous pouvons être convaincus qu'un plus grand nombre d'entre eux souhaite servir l'intérêt de la communauté de manière responsable et en soit capable.
– Toutes les expériences de forums de citoyens témoignent du dévouement et de l'approche constructive des participants tirés au sort et souvent de la finesse de leurs recommandations. Faut-il en déduire qu'elles ne présentent aucune faiblesse ? Bien sûr que non, mais un système de représentants élus a aussi ses faiblesses. Ses lois aussi ont parfois des défauts.
- Pourquoi acceptons-nous que des lobbys, des groupes de réflexion et toutes sortes de groupes d'intérêt exercent une influence sur la politique, alors que nous hésitons ne serait-ce qu'à donner voix au chapitre aux citoyens ordinaires, qui sont tout compte fait les premiers concernés ?
– En outre, une chambre composée de citoyens tirés au sort ne serait pas la seule. Durant cette phase de la démocratie, la législation serait justement le fruit d'une collaboration entre les représentants élus et ceux tirés au sort. Des pitres au pouvoir ? Si l'on veut, mais ils ne l'exerceraient pas seuls. »
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Derrière ce titre qui laisse présager une restauration monarchique ou une marche vers la dictature, van Reybrouck propose tout le contraire : (re)mettre de la démocratie dans la démocratie.
Des fois que tu craignes l'essai de philosophie politique pontifiant et ennuyeux, sois rassuré. L'ouvrage est rigoureux, documenté, annoté… et clair, agréable à lire, pas jargonnant. Très mesuré aussi. On sent à la lecture le gars passionné mais pas illuminé pour autant.
Evidemment, son propos est orienté. van Reybrouck n'a pas juste pour objectif d'exposer mais de convaincre. Il le fait avec raison et modération, pas en tapant sur la table et en criant très très fort comme si l'agitation tenait de l'argumentation en soi.

Le gars David part d'un constat : l'adhésion massive à la démocratie sur le principe s'accompagne aujourd'hui d'une méfiance tout aussi importante dans sa pratique. Défiance envers les gouvernements, parlements et partis, taux d'abstention tels que la représentativité du système en prend un coup, classe politique perçue comme une bande de corrompus slash glandeurs slash incompétents slash aristocrates modernes en cheville avec les élites et déconnectés de la masse des citoyens. Une démocratie hors sol, en roue libre, malade. van Reybrouck pose en diagnostic un “syndrome de fatigue démocratique”.
Quand tu additionnes crise de légitimité et perte d'efficacité, que tu mets par-dessus une couche d'hystérie médiatique, tu obtiens une campagne électorale permanente, où il n'est plus question de chercher la concorde mais de se balancer des antagonismes à la poire. Chaos et brouhaha. Autant de clous dans le cercueil de la démocratie.

Les deux premières parties du bouquin s'attachent à détailler ces symptômes et passer en revue quelques solutions proposées (populisme, technocratie, antiparlementarisme). Conclusion, le fond du problème se situe dans la démocratie représentative élective. “Nous avons réduit la démocratie à une démocratie représentative et la démocratie représentative à des élections.”
Van Reybrouck va jusqu'à parler de “fondamentalisme électoral” pour souligner à quel point démocratie et élections sont devenues synonymes… et problématiques, puisque toucher aux secondes reviendrait dans beaucoup d'esprits à remettre en question la première.
On arrive ici au coeur de sa démonstration qui couvre la fin de la seconde partie et toute la troisième du bouquin. Aussi stimulante que salutaire. Les élections forment-elles vraiment l'essence de la démocratie ?
Vu le titre de l'ouvrage, t'annoncer que la réponse est non ne relève pas du spoiler. A cela plusieurs raisons. D'une, nombre de penseurs politiques estiment que les élections relèvent d'une forme d'oligarchie ou d'aristocratie. Pas des moindres, on parle de gens comme Aristote ou Montesquieu. de deux, le processus électoral dans les expériences démocratiques passées (Athènes, Venise, Florence) tenait une place mineure, preuve que la chose est possible. de trois, la mise en place du système électoral après les révolutions américaine et française procédait du barrage nécessaire au peuple.
Une démocratie ? Vous n'y pensez pas, malheureux ? Filer le pouvoir à tous ces gens, des ignorants, des pauvres, et nombreux en plus. On va plutôt leur dire que le vrai pouvoir, c'est de le refiler à d'autres. Tiens, nous, par exemple.
Chez les révolutionnaires, “les références au peuple ne manquent pas. (…) Mais en définitive, ils concevaient ce même peuple de façon plutôt élitiste.” Analyse intéressante des discours révolutionnaires, à mettre en parallèle avec la lenteur de mise en place d'un suffrage universel qui le soit vraiment.

Quelle solution apporter au mal électoral ? Retour aux sources athéniennes avec le tirage au sort. Je ne vais pas m'étaler sur les avantages et inconvénients, les difficultés pratiques, le travail à faire sur les mentalités, van Reybrouck raconte tout ça mieux que moi.
Une idée farfelue ? Elle fonctionne pour les jurys d'assise et personne n'irait remettre le procédé en question.
Le but n'est pas de passer du jour au lendemain du tout électoral au tout tirage au sort. van Reybrouck ne s'abandonne pas à un idéalisme délirant. Ça ne marcherait pas, trop brutal, trop hasardeux. En tout cas, un système bi-représentatif, avec des élus et des citoyens tirés au sort, paraît envisageable.
Il décortique quelques exemples de tentatives pour réintroduire des citoyens dans le processus décisionnel (Canada, Islande, Irlande, Pays-Bas). Pas toutes couronnées de succès – tout champ expérimental a ses ratés – mais avec dans l'ensemble un bon taux de réussite. Dès lors qu'on les implique, les citoyens lambda tirés au sort peuvent se montrer aussi capables que des politiciens de carrière.
“Si l'on traite le citoyen autonome comme du bétail électoral, il se comportera comme tel, mais si on le traite en adulte, il se comportera en adulte.” Après, bien sûr, le traiter en adulte implique de partager le pouvoir avec lui. On ne sera donc pas étonné si les deux instances à freiner des quatre fers ont pour nom partis politiques et médias, qui perdraient le contrôle de la situation au profit de ceux qu'ils manipulent…

Loin des pavés assommants, ce Contre les élections parvient en 200 pages dynamiques à poser le problème et proposer un remède. Un ouvrage très complet, sans facilités ni raccourcis, honnête aussi dans sa présentation de la démocratie participative, pas acquise, pas évidente, pas parfaite.
Pas de solution miracle, mais une somme de réflexions, constructives et sereines. Voilà qui nous change des grands monologues de sourds politico-médiatiques.
Lien : https://unkapart.fr/contre-l..
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"Contre les élections" de David VAN REYBROUCK (Ed. Babel, 2014) est un plaidoyer pour la Démocratie... mais pas celle qui est communément admise (bien plus que pensée) de nos jours par nos constitutions. Une Démocratie qui ne sert pas, en premier, les Partis politiques et leurs ténors dont les premières préoccupations sont la réussite d'un bon score aux élections, l'accès au pouvoir et l'évitement d'une sanction des urnes en cas de prises de décisions fondamentales relatives à la gouvernance du pays.

Mieux qu'un essai, le livre de VAN REYBROUCK est un coup de maître. Il est très documenté, lisible, structuré dans son approche du sujet et ses réponses aux questions soulevées. L'auteur nous retrace l'évolution du concept de Démocratie et la perte provoquée par l'abandon du 'tirage au sort' qui était pratiqué dans l'antique Athènes pour un système d'élection qui a été mis en place, au 18e siècle pour conserver le pouvoir à ceux qui le détenaient déjà.

Tout y est, L Histoire, l'évolution des modalités de gouvernance, des expériences récentes qui ont été menées pour retrouver une Démocratie participative, une gestion du devenir du Peuple pour et par le Peuple. VAN REYBROUCK ne fait pas l'impasse sur les objections, les difficultés, les réticences du monde politique. Mais il y affirme la nécessité de réagir rapidement à ce qu'il appelle le "syndrome de fatigue démocratique".

Un livre à lire, un livre à partager, un livre qui ne doit pas être tabou et dénigré d'un geste de la main par les politiques qui nous gouvernent.
La Démocratie, un sujet de discussion entre toutes personnes souhaitant une saine gestion de la 'chose publique', dès aujourd'hui et pour le long terme!
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Malgré ce que peut laisser entendre le titre, la partie de ce livre consacrée à la critique du système électorale est très succincte. Elle s'appuie notamment sur de nombreux sondages d'opinions qui traduisent une double crise auxquels les systèmes politiques occidentaux sont simultanément confrontés : une crise de l'efficacité et une crise de la légitimité, respectivement conspuées par populistes et technocrates. David van Reybrouck, lui, identifie la système de représentation par l'élection comme coupable de la fatigue démocratique.
C'est à partir de ce diagnostic que l'auteur explore des alternatives à cet ennemi désigné.
Du recours au tirage au sort à Athènes, Venise et Florence, jusqu'aux plus récentes innovations démocratiques mises en place au Canada, en Islande ou en Irlande, le caractère démocratique de la désignation de représentant·e·s par le hasard a fait ses preuves.
La naissance de la désignation des gouvernants par l'élection avec les Révolutions françaises et étasuniennes, elle, n'avaient pas vocation à être démocratique. La bourgeoisie tempérait la révolte populaire et écartait toute possibilité de mise en place du tirage au sort. La suite ? "Une nouvelle haute bourgeoisie prenait le pouvoir. Elle ne tirait plus sa légitimité de Dieu, du sol ou de la naissance, mais d'une autre autre survivance de l'aristocratie : les élections". Depuis lors, nous avons réduit la démocratie à une démocratie représentative, et la démocratie représentative à des élections.
C'est donc "contre les élections" mais surtout pour la démocratie que DVR - en s'appuyant sur les travaux du chercheur Terrill Bouricius - achève son essai en nous proposant un exemple concret de ce qui pourrait être un système délibératif réellement démocratique et efficace.
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J'ai voulu lire ce livre car van Reybrouck m'a mis deux claques littéraires (et historiques) avec Congo et le Fléau. Suivant de près ses idées via ses apparitions médiatiques et réactions sur les réseaux sociaux, je n'ai pas hésité une seule seconde à me procurer Contre les Élections. le petit ouvrage est simple à lire (en deux ou trois heures) et instructif. Les éléments historiques sur le système athénien et les républiques italiennes sont bien amenés. Les exemples plus contemporains sont un peu plus confus et bien qu'étant totalement d'accord avec la thèse de van Reybrouck, je trouve que le tout est un peu précipité (quelques exemples historiques, puis des contemporains, CQFD).....

Je m'attendais à un peu mieux. Cependant, le livre a l'énorme mérite une fois la lecture terminée de nous laisser réfléchir: dans ces temps de sur-médiatisation de la politique "politicienne" où à la fois on sent que le modèle de démocratie représentative s'essouffle; et que certaines décisions souveraines nous inquiètent (Trump, Brexit); comment réformer notre modèle politique pour que le peuple participe pleinement aux décisions sans la lame de fond populiste ......
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critiques presse (1)
NonFiction
10 juillet 2014
Un livre-manifeste puissant, de la part d'un écrivain belge iconoclaste.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
– Il faut prendre conscience que les raisons invoquées aujourd’hui contre des citoyens tirés au sort sont souvent identiques à celles avancées autrefois contre le droit de vote pour les agriculteurs, les ouvriers ou les femmes. A l’époque aussi, ceux qui s’y opposaient prétendaient que c’en serait vraiment fini de la démocratie.
– Un Parlement élu dispose sans aucun doute de plus de compétences techniques que s’il était tiré au sort. En revanche, chacun est le spécialiste de sa propre vie. A quoi bon avoir un Parlement composé de juristes très qualifiés, si peu d’entre eux connaissent encore le prix du pain ? Avec le tirage au sort, on obtient un meilleur échantillon de la société au sein du corps législatif.
– Les élus ne sont pas toujours compétents non plus. Sinon, pourquoi auraient-ils des assistants, des chercheurs et des bureaux d’études à leur disposition? Comment se fait-il que les ministres puissent du jour au lendemain changer de ministère? Ne serait-ce pas uniquement parce qu’ils sont entourés d’une équipe professionnelle qui leur offre ses compétences techniques?
– Une représentation nationale tirée au sort ne serait pas laissée à elle-même : elle pourrait inviter des spécialistes, compter sur des modérateurs et se renseigner auprès des citoyens. De plus, elle se verrait accorder un certain temps pour se familiariser avec son travail et une administration pour se documenter.
– Comme les citoyens tirés au sort n’ont pas à se préoccuper du fonctionnement d’un parti, à mener campagne et à intervenir dans les médias, ils disposent de plus de temps que leurs collègues élus dans l’autre chambre législative. Ils peuvent se consacrer pleinement à leurs travaux législatifs : acquérir une bonne connaissance des dossiers, entendre des spécialistes, délibérer entre eux.
– Chacun apporte ses talents et ses ambitions. Quiconque s’estime capable de prendre en charge de lourdes tâches administratives peut se présenter pour un tirage au sort à l’Agenda Council, aux Review Panels, au Rules Council et à l’Oversight Council. Quiconque a des idées concrètes concernant une certaine législation est le bienvenu dans un Interest Panel. Quiconque préfère sa tranquillité verra bien s’il est convoqué pour participer pendant un ou plusieurs jours à un Policy Jury. Cela revient à aller voter, même quand on ne suit pas la politique tous les jours.
– Les jurys de citoyens tirés au sort pour se prononcer lors d’un procès montrent que, généralement, les gens prennent leur tâche très au sérieux. La crainte qu’un hémicycle se comporte de manière imprudente et irresponsable n’est pas fondée. Si nous sommes d’accord pour que douze personnes décident en leur âme et conscience de la liberté ou de l’incarcération d’un concitoyen, nous pouvons être convaincus qu’un plus grand nombre d’entre eux souhaite servir l’intérêt de la communauté de manière responsable et en soit capable.
– Toutes les expériences de forums de citoyens témoignent du dévouement et de l’approche constructive des participants tirés au sort et souvent de la finesse de leurs recommandations. Faut-il en déduire qu’elles ne présentent aucune faiblesse ? Bien sûr que non, mais un système de représentants élus a aussi ses faiblesses. Ses lois aussi ont parfois des défauts.
– Pourquoi acceptons-nous que des lobbys, des groupes de réflexion et toutes sortes de groupes d’intérêt exercent une influence sur la politique, alors que nous hésitons ne serait-ce qu’à donner voix au chapitre aux citoyens ordinaires, qui sont tout compte fait les premiers concernés ?
– En outre, une chambre composée de citoyens tirés au sort ne serait pas la seule. Durant cette phase de la démocratie, la législation serait justement le fruit d’une collaboration entre les représentants élus et ceux tirés au sort. Des pitres au pouvoir ? Si l’on veut, mais ils ne l’exerceraient pas seuls .
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Ces dernières décennies, le référendum a souvent été mis en avant comme un moyen efficace de réformer la démocratie. À une époque où la société s’individualise et où la société civile pèse moins lourd qu’autrefois, il a paru utile à beaucoup d’observateurs de demander directement à la population son avis sur des dossiers controversés. Les référendums sur la Constitution européenne aux Pays-Bas, en France et en Irlande ont quelque peu refroidi le zèle en faveur de ce mode de décision. Pourtant, il bénéficie encore d’une grande popularité, comme en témoignent les référendums projetés sur l’autonomie de la Catalogne et de l’Écosse, et sur le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. Les référendums et la démocratie délibérative sont apparentés dans la mesure où, dans un cas comme dans l’autre, le citoyen ordinaire est consulté, mais les mécanismes sont pour le reste totalement opposés : lors d’un référendum, on demande à tout le monde de voter sur un sujet à propos duquel, le plus souvent, peu de gens sont informés ; lors d’un projet délibératif, on demande à un échantillon représentatif de la population de délibérer sur un sujet à propos duquel il obtient le plus d’informations possible. Lors d’un référendum, les gens réagissent encore très souvent avec leurs tripes ; lors d’une délibération, c’est une opinion publique éclairée qui s’exprime.
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La démocratie ne connaît pas seulement une crise de légitimité, son efficacité est entrée elle aussi dans une zone de turbulences. Toutes sortes de maux plus ou moins précis indiquent qu’il devient de plus en plus difficile de pratiquer une gestion active. Les Parlements mettent parfois une quinzaine d’années pour parvenir à voter une loi. Les gouvernements ont de plus en plus de mal à se former, sont souvent moins stables et, à l’issue de leur mandat, sont punis de plus en plus sévèrement par les électeurs. Les élections, auxquelles participent pourtant de moins en moins de citoyens, font de plus en plus souvent obstacle à l’efficacité. Je commente une fois encore trois symptômes.
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Les politiciens seraient des carriéristes, des parasites, des profiteurs déconnectés des réalités, ils chercheraient à s’en mettre plein les poches, n’auraient aucune notion de la vie des gens ordinaires, feraient mieux de ficher le camp : ces accusations, on commence à bien les connaître. Les populistes les utilisent chaque jour. Selon leur diagnostic, la crise de la démocratie est due avant tout à une crise du personnel politique. Les dirigeants actuels, tel est le raisonnement, forment une élite démocratique, une caste totalement coupée des besoins et des griefs de la population ordinaire. Il ne faut donc pas s’étonner que la démocratie soit entrée en zone de turbulences !
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Les technocrates font exactement le contraire des populistes. Ils essaient de remédier au syndrome de fatigue démocratique en privilégiant l’efficacité par rapport à la légitimité, dans l’espoir que les bons résultats finiront par leur valoir l’approbation des gouvernés : dans l’espoir que l’efficacité générera spontanément une légitimité. Cela peut fonctionner un moment, certes, mais la politique n’est pas qu’une question de bonne gestion. Tôt ou tard, il faut aussi effectuer des choix éthiques, ce qui nécessite de consulter la population. La question est alors la suivante : comment cette concertation doit-elle se dérouler ?
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Vidéo de David Van Reybrouck
David van Reybrouck est né à Bruges en 1971 dans une famille flamande de fleuristes, de relieurs, d'électriciens et d'artistes. Il a étudié l'archéologie et la philosophie aux universités de Louvain et de Cambridge et détient un doctorat à l'université de Leyde. Militant pour la démocratie et le climat, David van Reybrouck est essayiste, historien, romancier et auteur de théâtre. Son nouveau livre, **Nous colonisons l'avenir**, vient de paraître.
« Je passe beaucoup de mon temps dans les salles de réunion alors que je préfère être dans mon atelier littéraire. Mais franchement, en tant qu'écrivain, aujourd'hui, je trouve difficile d'écrire quand il y a un trou dans le toit. C'est difficile d'écrire quand ça goutte et donc, de temps en temps, je me mets debout pour aider et faire quelque chose contre ce problème. [...] J'essaie de trouver l'équilibre entre mes activités littéraires et démocratiques… La lutte pour trouver cet équilibre en vaut la peine, et la conséquence est nette : il y a certains livres que je ne veux pas écrire parce que je suis en train de parler à un ministre ou que je suis en train d'organiser ou de mettre sur pied quelque chose avec des citoyens. »
Pour découvrir l'oeuvre de David van Reybrouck : https://www.actes-sud.fr/contributeurs/david-van-reybrouck
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