Vous vous souvenez surement..ou pas , de Tif et Tondu pourchassant l'ignoble M. Choc .
Stephen Desberg en fut l'un des scénaristes attitrés . Série crayonnée par son compere Will avec qui il récidive , ici , en proposant
La 27e lettre . Un superbe album traitant de la montée du nazisme au travers le regard naif et touchant d'un jeune gavroche Berlinois .
Anna , la narratrice , se souvient de ce Berlin d'avant-guerre ou il faisait encore bon vivre . de son boulot de prostituée insouciante au coeur d'or qui , un jour , décida avec ses copines de recueillir Fred , un gamin des rues pickpocket au verbe haut , à la gouaille poetique contagieuse , aux reves aussi profonds que la tristesse insondable d'avoir été abandonné à la naissance . Fred va donc se construire , s'épanouir , apprendre au contact de ces meres d'adoption aussi atypiques que protectrices . L'amitié , il la découvrira aux cotés de Lizzy , cette petite gitane sauvage appellée à etre brutalement rattrapée par
L Histoire . Fred n'aura d'autres repères que cette maison close dans laquelle il évoluera comme un poisson dans l'eau . Il se construira un monde onirique idéal jusqu'à la révélation de cette terrifiante 27e lettre d'un alphabet qui longtemps s'était refusé à lui , une croix gammée . de là , toute cette réalité qui n'était que virtuelle et lointaine lui explosera au visage , le gangrénant petit à petit à l'instar du cancer Nazi infectant l'Europe .
Un récit qui jongle parfaitement entre insouciance et fléau grandissant . Ce gamin en quete de maternité et d'amour qui du jour au lendemain va se trouver confronter à la folie contagieuse d'un petit moustachu mégalomane , voyant du meme coup s'effondrer ses valeurs et disparaitre les etres tant chéris . le récit , tout en retenue , traite d'un sujet grave avec la distenciation nécéssaire à sa crédibilité . Pas de pathos . Des faits historiquement avérés relatés avec justesse et c'est cela qui touche profondément : cette chasse aux sorcieres systématique , cette adhésion à l'idée d'une race supérieure nécéssitant l'éradication de toutes les autres pour pouvoir survivre , ce monde ou lecture et savoir sont désormais voués aux flammes purificatrices , cette sauvagerie aveugle à l'égard d'une ethnie au seul motif de sa différence et sa prétendue dangerosité...
Le dessin est simple et pourtant terriblement accrocheur . Il est porté par un encrage et une mise en couleur en totale adéquation avec le theme évoqué . D'un récit aux allures naives , l'auteur parvient à insérer un propos qui , sans etre poussé historiquement parlant , amene cependant le lecteur à une certaine réflexion ( je sais , ça fait peur ; ) .
Desberg parvient , en quelques pages , à nous faire appréhender l'horreur nazie en devenir . Son ombre plane sur chaque planche jusqu'à l'épilogue final qui en sechera plus d'un !!
S'il fallait donner une note à
La 27e lettre : B+ !