Cette courte oeuvre est un émouvant chant livré par un grand malade, probablement proche de sa mort. On n'est donc pas dans la gaudriole. On est dans ces moments de vérité de la vie qui font que chaque mot importe.
Dès lors, persuadés de la sincérité et de la vérité des propos, les émotions ont toute leur place et rendent toute leur force. Et effectivement elles se livrent dans leur simplicité et se rencontrent tout au long du chemin allégorique parcouru par le narrateur. En effet, se mélangent le parcours qu'il se force à arpenter tous les jours comme un défi à sa maladie, comme une respiration dans celle-ci, et celui de sa vie, de ses souvenirs dont des images lui sautent à la mémoire.
Dans ses pérégrinations, il finit par buter jusqu'à l'obsession sur l'histoire de son meilleur ami, suicidé. L'événement de cette mort infuse de plus en plus au coeur de ses méditations et de sa vie parce qu'au-delà du choc de la disparition, les raisons de l'acte restent un mystère total. Et le fait que celui-ci résiste à toute explication, conduit au sentiment d'abandon puis de trahison. Ainsi, à la peine de l'absence et du manque, à la colère et à l'incompréhension, s'ajoute l'angoisse et le remord lié au fait que le quasi-frère se révèle finalement être un quasi-inconnu.
L'impact de cette histoire sur le narrateur, touché en pleine âme, est d'autant plus fort qu'il est lui-même confronté à sa fin, et qu'il la vit et la veut à l'opposé de celle de son ami disparu, en y plaçant au centre la présence et l'amour de son entourage. C'est finalement cette conviction de la justesse de son attitude qui semble l'apaiser et le conduire à moins de sévérité, à un retour de tendresse à l'égard de son grand copain suicidé.
Par leur poésie et la proposition de vérité vécue dans la simplicité de l'instant d'un grand malade, les belles méditations exprimant les détours de l'amitié font de ce livre un ouvrage éminemment touchant et charmant ; une grosse part d'essentiel y apparaît !
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Au début les propos de l'auteur sont flous, puis rapidement on se rend compte de quoi il parle, du suicide d'un proche, de la douleur, de l'incompréhension dans laquelle on se trouve quand ça nous arrive, de la culpabilité d'être encore vivant, de n'avoir pas vu les signes… oh mais les suicidaires sont bien plus malins que ça, c'est quand tout va pour le mieux après une période difficile qu'il faut s'interroger, camouflant ainsi toute possibilité de laisser entrevoir le malheur que l'on porte sur le coeur.
La première moitié est donc un peu floue mais très intéressante, on suit l'auteur dans son errance de questionnements, dans son monologue intérieur alors que dans la seconde moitié, toute aussi riche en interrogations, le sujet en devient plus touchant, c'est son intimité sans filtre qu'on découvre et il faut sacrément du courage pour se mettre à nu ainsi.
Un récit émouvant, en toute humilité sur ce qu'est la vie quand un proche choisi la mort.
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Un témoignage douloureux sur la perte d'un être cher, une façon d'essayer de faire son deuil mais y arrive t-on jamais ?
Qui de nous n'as pas connu malheureusement cette situation, la pour le coup c'est du suicide que l'on parle et moi ça m'interpelle énormément pour y avoir été confronté très violemment.
Encore aujourd'hui les mèmes questions et interrogations se posent, la colère est quelquefois présente, le manque, l'incompréhension et la culpabilité car comme ce témoignage mes pensées sont les mèmes.
Qu'est-ce que l'on a pas vu ?
Et comment vivre avec cela ?
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Avec la même finesse de trait, Guillaume de Fonclare déjoue le pathos et la leçon de morale. [...] C'est ce ton juste, si difficile à atteindre, qui rend ce livre fraternel. Et bouleversant.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Depuis dix ans, jour après jour, muscle après muscle, membre après membre, mon corps prends congé de moi. (… ) Je souffre jour et nuit, sans que personne ait réussi à ce jour l’exploit de savoir de pourquoi. De mon médecin traitant aux spécialistes, d’un CHU de province aux hôpitaux parisiens, j’ai divagué de consultation en consultation ; on cherche, on cherche, et on ne trouve pas. On élimine des hypothèses et on fait d’autres; on fait des examens, on refait des examens, on voit le Pr Untel qui saura dire, peut-être, et qui enverra vers un autre Pr Untel, après avoir constaté son impuissance à comprendre. Myopathies, neuropathies, maladies auto-immunes, gènes défaillants, mitochondries rétives, vacuoles absconses, on scrute, on dissèque, on compare, mais rien n’y fait. Il y a bien des signes, des défaillances aux noms barbares (...) qui sont les symptômes d’une foule de choses, sans qu’aucun soit suffisamment «franc » pour qu’il vienne formellement « caractériser » une pathologie. Mon corps est un menteur et il me fuit."
De toi , je n'ai rien appris du mystère de la vie, et celui de la mort s'est fait plus épais. Cependant, c'est le murmure de ta voix qui m'encourage à exister et à demeurer debout; malgré toutes les difficultés, et l'énigme de ta fin m'encourage à vivre pleinement; rien n'est assuré pour quiconque, joie, bonheur, tristesse ou désespérance.
Tes filles viendront me voir, et elles me demanderont des comptes. Elles viendront et elles exigeront de savoir quel sorte de salaud tu étais ; "au revoir, papa, à ce soir !" "Au revoir mes chéries" et tu vas te jeter dans le vide. Qui pourra les convaincre que tu les aimais ? Que dans ta folie tu n'as pas, tu ne pouvais penser à elles ? Que tu es mort pour des raisons dont nous ne savons rien, et dont on ne peut rien savoir ? Tu as dit "au revoir" et tu t'es jeté par la fenêtre, voilà ce qu'elles comprennent.
De toi, je n’ai rien appris du mystère de la vie, et celui de la mort s’est fait plus épais. Cependant, c’est le murmure de ta voix qui m’encourage à exister et à demeurer debout, malgré toutes les difficultés, et l’énigme de ta fin m’encourage à vivre pleinement ; rien n’est assuré pour quiconque, joie, bonheur, tristesse ou désespérance. Ma grande faiblesse n’est pas la fin, et même si mon esprit aspire à la paix, je n’en ai pas fini avec cette vie-là. Tant pis si le chemin ne m’a pas conduit là où je voulais aller ; si je n’apprends pas de mes défaites, c’en est fini de moi. J’aime et je suis aimé, c’est cela l’essentiel.
De toi, je n'ai rien appris du mystère de la vie, et celui de la mort s'est fait plus épais. Cependant, c'est le murmure de ta voix qui m'encourage à exister et à demeurer debout, malgré toutes les difficultés, et l'énigme de ta fin m'encourage à vivre pleinement ; rien n'est assuré pour quiconque, joie, bonheur, tristesse ou désespérance. Ma grande faiblesse n'est pas la fin, et même si mon esprit aspire à la paix, je n'en ai pas fini de cette vie-là. Tant pis si le chemin ne m'a pas conduit là où je voulais aller ; si je n'apprends pas de mes défaites, c'en est fini de moi. J'aime et je suis aimé, c'est cela l'essentiel.
Sur le plateau, François Busnel donne la parole au moine bouddhiste Matthieu Ricard, au philosophe Alexandre Jollien et au psychiatre Christophe André, qui publient «A nous la liberté !». Après «Trois amis en quête de sagesse», ils se retrouvent pour un nouvel opus en commun sur le thème de la liberté intérieure. Léonor de Récondo publie «Manifesto», roman autobiographique sur les derniers instants de la vie de son père. Guillaume de Fonclare évoque «Ce nom qu'à Dieu ils donnent», récit sur la retraite d'un écrivain en proie aux malaises. A ses côtés, Philippe Claudel parle de sa dernière pièce, «Compromis», jouée par Pierre Arditi et Michel Leeb. Elisabeth Quin complète la liste des invités avec «La nuit se lève». La journaliste, atteinte d'un double glaucome, y raconte son combat contre la maladie.
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